Lumen gentium

Relisons Lumen Gentium

Vatican II (1/12)

 

Lumen Gentium

 

En cette année de la Foi prenons le temps de relire quelques grands textes du concile Vatican II. L'idéal est de lire le texte intégral que l'on peut se procurer en librairie ou en allant sur Internet. Pour les personnes ne disposant que de peu de temps nous soulignons quelques passages de ces textes.

 

Avant de commencer, il faut toujours avoir en tête que « l'esprit du concile Vatican II » voulu par le pape Jean XXIII, n'est ni une rupture avec la Tradition de l'Eglise, ni une révolution, ni une condamnation du monde. C'est avant tout « une mise à jour » (aggiornamento), une adaptation au monde moderne et une invitation à rechercher l'unité. L'ensemble des seize documents conciliaires constituent un seul corpus qui apporte un message non seulement à l'Eglise mais aussi au monde. Voilà ce qui distingue ce concile des vingt conciles qui l'ont précédé.

 

Attardons-nous sur la Constitution dogmatique « Lumen Gentium » [LG] (Lumière des peuples).

Il s'agit du « pilier » de Vatican II, la colonne vertébrale du Concile qui définit l'Eglise dans « sa nature et sa mission universelle »(LG 1). La discussion entre les pères conciliaires fut longue, parfois laborieuse, mais finalement très fructueuse puisqu'elle a permis, grâce à l'apport de nombreux théologiens (Bouyer, Congar, Daniélou, De Lubac, Rahner, Ratzinger, Schillebeecks, Von Balthasar, …) d'aboutir à un texte qui renouvelle le regard porté sur l'Eglise. Celle-ci n'est plus présentée comme une institution basée sur une hiérarchie à laquelle il suffit d'obéir, mais elle est « dans le Christ, comme un sacrement,..., un signe et un moyen d'opérer l'union intime avec Dieu et l'unité de tout le genre humain »(LG1).

Chapitre I : Le Mystère de l'Eglise

La tonalité missionnaire est donnée par la première phrase : « Le Christ est la lumière des peuples ». L'Eglise est située dans sa relation avec la Trinité et avec le projet divin de salut universel dans une perspective d'économie du salut (LG 2).

Par le sacrifice du Christ qui accomplit la volonté du Père : « l'Eglise est le royaume du Christ déjà présent sous une forme mystérieuse ». Et « le sacrement du pain eucharistique représente et produit l'unité des fidèles, qui constituent un seul corps dans le Christ ». (LG3)

L'Esprit-Saint continue l'oeuvre accomplie par le Christ : « Il l'amène à la vérité tout entière... il l'édifie encore et la dirige par des dons variés » (LG4).

Au n°5, le rôle missionnaire de l'Eglise est rappelé : « l'Eglise pourvue des dons de son Fondateur … reçoit la mission d'annoncer et d'instaurer en toutes les nations le Royaume du Christ et de Dieu, dont sur terre, elle constitue le germe et le commencement. » (LG5)

De nombreuses et belles images bibliques de l'Eglise et de ses membres sont données au n°6 : « le bercail », le « troupeau dont Dieu est le pasteur », « la terre que Dieu cultive », « la vigne choisie », « temple sacré », « Cité sainte », « Jérusalem d'en haut », « l'Epouse du Christ »...

L'image de l'Eglise: « Corps mystique du Christ » est largement développée au n°7.

C'est ce lien avec le Christ qui confère à l'Eglise une double nature « visible et spirituelle » (LG8). Mais les pères conciliaires soulignent que «la société constituée d'organes hiérarchiques et le Corps mystique du Christ, le groupement visible et la communauté spirituelle,  l'Eglise terrestre et l'Eglise déjà pourvue des biens célestes ne doivent pas être considérés comme deux entités; ils constituent bien plutôt une seule réalité complexe formée d'un élément humain et d'un élément divin. »

Chapitre II : Le Peuple de Dieu

Le concile Vatican II parle d'une manière nouvelle, il est à la fois pastoral et enseignant (on peut dire pédagogique). C'est pourquoi avant de décrire l'Eglise dans la diversité de ses membres, les pères conciliaires ont consacré le second chapitre à ce qui unit les membres en un seul peuple : leur baptême commun.

« … ceux qui croient au Christ, engendrés à nouveau d'un germe non point corruptible, mais incorruptible par la parole du Dieu vivant, non pas de la chair mais de l'eau et de l'Esprit-Saint constituent ''une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis … eux, qui jadis n'étaient pas un peuple, et maintenant sont le peuple de Dieu''' ».(LG9)

Suit une belle explication sur « le sacerdoce commun » (LG10) qui découle du baptême. «  ...par la régénération et l'onction de l'Esprit-Saint, les baptisés sont consacrés pour être une maison spirituelle et un sacerdoce saint, en vue d'offrir des sacrifices...». Mais il ne faut pas confondre « sacerdoce commun des fidèles » et « sacerdoce ministériel ou hiérarchique », ils diffèrent mais sont cependant « ordonnés l'un à l'autre ». « Le prêtre, ministre du Christ instruit et gouverne le peuple sacerdotal, accomplit en qualité de représentant du Christ, le sacrifice eucharistique et l'offre à Dieu au nom de tout le peuple; les fidèles, en vertu de leur sacerdoce royal, ont part à l'offrande eucharistique et exercent leur sacerdoce par la réception des sacrements, la prière et l'action de grâces, par le témoignage d'une vie sainte, par l'abnégation et la charité active. » (LG10)

Le n°11 décrit comment s'exerce le sacerdoce commun des fidèles dans les sacrements. C'est ici qu'on trouve l'expression « Eglise domestique » à propos des parents qui « doivent par la parole et par l'exemple être les premiers à faire connaître la foi à leurs enfants et cultiver la vocation de chacun... ».

Aux n°s 12 et 13 il est demandé au Peuple de Dieu de témoigner une vie de foi et de charité en se laissant guider par l'Esprit-Saint, tout en cherchant à rassembler toute l'humanité en un unique Peuple « appelé au salut par la grâce de Dieu ».

Ensuite, sont décrits les différents degrés de relation à l'Eglise et le rôle missionnaire que doit jouer l'Eglise : « A chacun des disciples du Christ incombe, pour sa part, la charge de jeter la semence de la foi ». (LG17)

Chapitre III : La constitution hiérarchique de l'Eglise, en particulier l'épiscopat

Le concile Vatican I (1869-1870) avait défini le primat du Souverain Pontife. Vatican II ne réduit pas l'autorité du Pape (cf. LG 18) mais rappelle, au chapitre III, que les évêques sont « successeurs des Apôtres » (LG 19, 20) et apporte une nouvelle dimension : la « consécration épiscopale confère la plénitude du sacrement de l'Ordre... le sacerdoce suprême.  » (LG 21).

L'épiscopat est présenté comme pivot des autres exercices, avant tout dans son exercice collégial et non individuel. « L'Ordre des évêques qui succède au collège apostolique dans le magistère et le gouvernement pastoral, en qui même se perpétue le corps apostolique, uni à son Chef le Pontife romain, et jamais sans ce Chef, est également sujet du pouvoir suprême et plénier sur toute l'Eglise... » (LG 22)

« L'unité collégiale apparaît aussi dans les relations réciproques de chaque évêque avec les Eglises particulières et avec l'Eglise universelle... Tous les évêques doivent promouvoir et défendre l'unité de la foi et la discipline commune à toute l'Eglise... » (LG 23) Cette notion de collégialité a donné lieu à de longues discussions netres les pères conciliaires.

Le ministère épiscopal est décrit dans son exercice à partir des tria munera (trois fonctions) : la fonction d'enseignement (LG 25), la fonction de sanctification (LG 26), la fonction de gouvernement (LG 27).

Le ministère presbytéral est décrit par analogie avec le ministère épiscopal (LG 28) : «Les prêtres, collaborateurs vigilants de l'épiscopat, établis pour l'aider et lui servir d'organe,appelés à servir le Peuple de Dieu, forment avec leur évêque un unique corps sacerdotal (le presbytérium). » (LG 28)

Le Concile Vatican II rétablit le diaconat permanent. « … ce diaconat pourra être conféré à de hommes d'âge mûr, même s'ils vivent dans le mariage, et aussi à des jeunes hommes jugés aptes à cette fonction, la loi du célibat demeurant pour eux en vigueur. » « Voués aux oeuvres de charité et d'assistance, les diacres se rappelleront l'avertissement de sint Polycarpe : '' Miséricordieux, empressés, marchant dans la vérité du Seigneur, qui s'est fait le serviteur de tous.''» (LG 29)

Chapitre IV : Les laïcs

Avant Vatican II les laïcs étaient les fidèles ni clercs, ni religieux. Les pères conciliaires reprennent cette acception ''négative'' mais y ajoutent une définition positive : « De par leur vocation propre, il revient aux laïcs de chercher le royaume de Dieu en administrant les choses temporelles et en les ordonnant selon Dieu. » (LG 31)

En tant que membres du Peuple de Dieu, les laïcs ne connaissent « aucune inégalité , dans le Christ » et  « la dignité de membres est commune à tous », « tous sont appelés à la sainteté. » (LG 32)

Suivent des indications concernant la vie des laïcs dans l'Eglise : l'apostolat (LG33), la participation au sacerdoce commun et au culte (LG34), à la fonction prophétique du Christ (LG 35), leur rôle dans la société doit contribuer à étendre le règne du Christ (LG 36)

Soutenu par les pasteurs et associé à leur oeuvre (LG37),  « tout laïc doit être, à la face du monde, un témoin de la résurrection et de la vie du Seigneur Jésus »(LG 38).

Chapitre V : La vocation universelle à la sainteté dans l'Eglise

Les conciles précédents n'ont jamais mentionné explicitement cet idéal de sainteté qui est la raison d'être de l'Eglise. Le concile Vatican II insiste beaucoup sur l'appel universel à la sainteté (le thème revient souvent dans les documents conciliaires) : «... chacun des fidèles, peu importe son état ou son rang, est appelé à la plénitude de la vie chrétienne et à la perfection de la charité... par une telle sainteté il contribue à rendre plus humaine la manière de vivre dans la société terrestre elle-même. » (LG 40) Tout le chapitre V contribue à la réflexion sur cet appel à la sainteté, la voie et les moyens pour y parvenir.

Chapitre VI : Les religieux

Le chapitre VI est un appel aux religieux qui, observant les trois conseils évangéliques (chasteté consacrée à dieu, pauvreté et obéissance) ont à « persévérer et à exceller davantage dans la vocation à laquelle Dieu les a appelés ».

Chapitre VII : L'Eglise en marche : son caractère eschatologique et son union avec l'Eglise du ciel.

Au chapitre VII l'Eglise du ciel est présentée comme l'accomplissement de l'Eglise terrestre (« lorsque viendra le temps de la restauration universelle »), en celle-ci se manifeste une articulation entre un don déjà reçu et une promesse pas encore réalisée. (LG 48)

« Notre union avec l'Eglise céleste se réalise de la manière la plus éclatante -et avant tout dans la Sainte Liturgie où la vertu du saint-Esprit agit sur nous par les signes sacramentaux- … Ainsi quand nous célébrons le sacrifice eucharistique, nous nous unissons très intimement au culte de l'Eglise céleste... » (LG 50)

Chapitre VIII : La Bienheureuse Vierge Marie, Mère de Dieu dans le mystère du Christ et de l'Eglise.

Le texte du chapitre VIII décrit le rôle de la Vierge Marie dans l'histoire du salut et fait ressortir, en s'appuyant sur les textes bibliques, l'image de Marie , « servante du Seigneur » (LG 60) et « modèle de l'Eglise » (LG 63).

Les Pères conciliaires se sont interrogés sur l'éventuel rôle médiateur de Marie entre Dieu et les hommes, voici la réponse fondamentale :

« Nous n'avons qu'un Médiateur selon les paroles de l'Apôtre [cf. 1 Tim 2, 5-6]... ''il n'y a qu'un Dieu et aussi qu'un Médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ-Jésus, hommelui-même, qui s'est donné comme rançon pour tous.'' Le rôle maternel de Marie envers les hommes ne voile ou ne diminue en aucune manière cette médiation unique du Christ ... » (LG 60)

Marie est également présentée comme « signe d'espérance  et de consolation» : « Si la Mère de Jésus, déjà glorifiée au ciel en son corps et en son âme, est l'image et le commencement de ce que sera l'Eglise en sa forme achevée, au siècle à venir, eh bioen ! Sur la terre, jusqu'à l'avènement du jour du Seigneur, elle brille, devant le Peuple de Dieu en marche, comme un signe d'espérance certaine et de consolation. » (LG 68)

 

[ La traduction du texte conciliaire utilisée est celle donnée dans la Collection La pensée chrétienne, 2ème édition de FIDES, 1991, Montréal & Paris]