EST-CE UN PÉCHÉ ?

Mgr CottanceauSuite à la situation sanitaire qui prévaut depuis trop longtemps, certains fidèles ne pouvant assister à la messe dominicale pour raison de santé doivent rester à la maison, et manquent ainsi ce rendez-vous dominical si important. (Le cas peut également se produire pour d’autres raisons : voyage, obligations professionnelles etc…) A l’inquiétude qui déjà pèse sur eux suite à leur état de santé fragile, s’ajoute parfois une autre inquiétude, celle de se trouver « en état de péché » pour avoir manqué la messe. Cette situation nous offre une bonne occasion de clarifier les choses en précisant bien en quoi consiste le péché et ce que signifie « être en état de péché ».

Rappelons d’abord qu’au temps de Jésus, les juifs « pieux » rejetaient comme pécheurs ceux qui n’observaient pas la loi de Moïse (qui comprenait 613 commandements). Était condamné par exemple le fait de prendre le repas sans s’être purifié, de ne pas respecter le sabbat, de blasphémer, de commettre l’adultère, de partager un repas ou être en contact direct avec des païens ou des gens impurs. Ils rejetaient également ceux qu’ils considéraient comme impurs à cause de leur condition sociale, leur handicap ou leur maladie ou encore leur profession : les publicains collecteurs d’impôts (comme Matthieu, Zachée) à la solde des Romains, les lépreux, les aveugles, les bergers, les prostituées etc

Pour Jésus, ce qui compte n’est pas l’application de la loi de Moïse mais la disposition du cœur. Pour lui, le grand commandement est d’aimer Dieu et son prochain comme soi-même. Le grand péché n’est pas le non-respect de la loi mais le manque d’amour ! Le péché nait d’abord dans notre cœur, quand nous voulons volontairement tourner le dos à Dieu et à son amour par nos pensées, nos paroles, nos actions et nos omissions. Commettre un péché suppose donc un acte conscient et volontaire de notre part qui nous détourne de l’amour de Dieu et de notre prochain. Ainsi, plus nous aurons le désir d’aimer Dieu de tout notre cœur, plus nous serons attentifs à ce que notre comportement, nos paroles, nos choix soient en accord avec cet amour de Dieu que nous voulons vivre honnêtement et sincèrement. Les époux ne se réfèrent pas au code civil pour savoir ce qu’ils ont le droit de faire ou encore comment ils doivent s’aimer. Ils cherchent simplement à être fidèles à cet amour qui vient de leur cœur et qui les a unis !

Reste alors la question de savoir que devient la loi dans ce contexte. Rappelons que dans l’histoire de l’exode, face à la détresse d’Israël, Dieu ne commence pas par donner la loi. Il ne dit pas à Moïse : « si tu fais ci, si tu fais ça, je te sauverai ». Il sauve son peuple sans condition, son salut n’est pas une récompense parce qu’Israël aurait été sage et obéissant à la loi.  Ce n’est que plus tard, à la montagne du Sinaï qu’il va donner à son peuple le moyen de montrer son amour et sa reconnaissance à celui qui l’a sauvé. Dieu va donner les 10 commandements. Ainsi, en observant ces commandements, Israël pourra montrer à Dieu combien il l’aime et combien il veut se rapprocher de lui. Suivre la loi doit répondre à un désir d’aimer, et non d’être en règle de façon scrupuleuse ! C’est parce que Dieu m’a aimé et sauvé que je veux aussi l’aimer en mettant en pratique le commandement de l’amour… principe que les pharisiens avaient inversé : si j’observe la loi, alors Dieu me sauvera !

Ainsi, devant l’impossibilité d’assister à l’office dominical, sans tricher avec ma conscience, et pour motif impérieux (je suis en voyage, ou je suis fragile et vulnérable à la Covid, ou je suis malade, ou je travaille sur un bateau et je suis en mer etc…), la question que je dois me  poser est de savoir comment,  en fonction des circonstances bien entendu, trouver un moment de prière pour penser à Dieu, à ceux que j’aime, un moment de recueillement, pour lire l’évangile du dimanche par exemple, ou pour réciter mon chapelet, ou suivre la messe à la TV ou sur d’autres réseaux sociaux etc…

Et pour apaiser nos craintes et éclairer notre foi, rappelons cette promesse faite par Dieu à son peuple par la bouche du prophète Jérémie : « Voici l’alliance que je conclurai avec la maison d’Israël… Je mettrai ma Loi au fond de leur être et je l’écrirai sur leur cœur. Alors je serai leur Dieu et eux seront mon peuple ! » (Jer 31, 33) 

Mgr Jean-Pierre COTTANCEAU