TEMPS DE CAREME

Mgr Cottanceau            Ce Mercredi a débuté le temps du Carême avec la célébration des cendres. Il faut bien avouer que souvent, ce temps de Carême est associé à la notion de sacrifice, de privations : « il faut jeûner, il faut faire l’aumône, il faut prier … ». Oui, ce temps de Carême vient bousculer nos habitudes, nos tranquillités, notre routine quotidienne, notre confort spirituel. N’en soyons pas étonnés, la nature humaine est ainsi faite… Il serait cependant dommage de vivre comme une épreuve incontournable ce temps qui nous conduit à la joie de Pâques. Saurons-nous nous réjouir de ce temps de Carême qui nous invite à la conversion, afin de laisser le Seigneur faire irruption de façon nouvelle dans nos vies, dans nos cœurs ? Il nous est donné pendant ces 40 jours de faire le point sur la qualité de nos relations avec Dieu (la prière), avec nos frères (l’aumône) et avec nous-mêmes (le jeûne).

            Notre relation à Dieu est-elle une relation d’intérêt ou de confiance et d’abandon ? L’expérience des Hébreux au désert avec Moïse vient illustrer cette question : « Dieu nous a t’il conduit au désert pour nous faire mourir de faim ? » … Inquiétude légitime qui parfois nous assaille. Nous nous inquiétons de tout : la situation du monde, les conflits sociaux, la famille, les enfants à élever, la santé, l’avenir des siens… Peut-être devrions-nous donner plus de place à la confiance en Dieu et à la prière, non pas que cela va régler nos problèmes comme par magie, mais le Seigneur peut si nous lui demandons, nous donner courage, force et confiance pour les résoudre. D’où l’importance de se donner ces temps d’intimité avec lui pour accueillir son aide, son Esprit, sa confiance. Prière aussi pour accueillir sa miséricorde lorsque nous faisons l’expérience de notre faiblesse, de nos échecs, de nos infidélités. N’oublions pas que la victoire du Satan, c’est de nous faire douter de la miséricorde de Dieu ! Prière enfin pour nos frères et sœurs en souffrance, prière qui nous rapproche d’eux et fait grandir entre nous cette fraternité que Jésus nous demande.

            Notre relation aux autres, est-elle une fois encore une relation d’intérêt ou une relation de don et de partage ? Aimer l’autre pour lui-même… Le mot « aumône » désigne dans l’Ancien Testament la miséricorde de Dieu pour l’Homme ou bien encore la miséricorde de l’Homme pour son semblable. Cette miséricorde n’est authentique que si elle se traduit en actes parmi lesquels figure en bonne place le soutien matériel à ceux qui sont dans le besoin. Pratiquer l’aumône, c’est imiter le geste de Dieu qui, le premier, a fait preuve de bonté envers l’homme. A travers le frère malheureux, c’est Jésus lui-même que nous atteignons : « Ce que vous avez fait à l’un de ces plus petits, c’est à moi que vous l’avez fait ! » (Mt 25, 31 – 46)

            Notre relation à nous-mêmes : par la pratique du jeûne, l’homme associe le corps à la démarche spirituelle. Le jeûne accompagné de la prière, sert à traduire l’humilité devant Dieu. Quand, dans l’Ancien Testament, un homme s’abstient de manger, alors qu’il tient la nourriture pour un don de Dieu, cette privation est un geste religieux : se tourner vers le Seigneur dans une attitude de dépendance et d’abandon. Ainsi devient-il possible d’accueillir l’action de Dieu et se mettre en sa présence. Finalement, c’est pour l’amour de Dieu que nous sommes appelés à pratiquer un jeûne qui soit expression de notre espérance en lui, un jeûne qui ouvre le cœur à l’action de Dieu qui voit et agit dans le secret !

+ Mgr Jean Pierre COTTANCEAU