MANCHESTER

Mgr CottanceauAlors que nous nous apprêtons à célébrer ce Dimanche la journée pour la vie, voici que la violence et la mort s’invitent une fois de plus dans l’actualité de notre monde. A Manchester, 22 jeunes, adultes et enfants, venus entre amis, pour chanter, se réjouir ont eu en quelques instants leur vie arrachée, supprimée. D’autres familles sont plongées dans l’inquiétude et l’angoisse, ayant à déplorer un ou plusieurs blessés. Derrière toutes ces personnes, c’est la communauté humaine qui est blessée, menacée, chaque fois que la vie de l’un de ses membres est retranchée. Notre humanité, malgré ses avancées et ses progrès se voit ainsi toujours confrontée à la violence et à son cortège de souffrance et de mort. Face à cette situation, le reflexe est de trouver les responsables, de chercher l’ennemi. La justice doit en effet avoir le dernier mot. Mais il faut être fort pour parler de justice, et faire taire d’abord l’idée de vengeance. Car au départ, ce qui vient tout naturellement quand quelqu’un nous a blessés, c’est le désir de vengeance. Le penchant naturel, c’est de rendre le mal pour le mal. La Bible nous dit qu’au commencement, ce désir de vengeance est illimité : « J’ai tué un homme pour une blessure, un enfant pour une meurtrissure. C’est que Caïn est vengé 7 fois, mais Lamek 77 fois » (Gn 4, 23-24). Entrer dans cette dynamique consistant à combattre la violence par la violence, c’est se préparer à creuser de nouvelles tombes… Faudrait-il donc accepter que triomphe la haine, fille de la vengeance, et que la vie soit ainsi réduite à néant ?

            Le Christ nous invite à une autre dynamique, celle de l’amour et du pardon… aussi dur que ce choix puisse paraitre. Car accepter d’entrer dans cette dynamique de l’amour est encore un combat, une lutte qui commence en chacun de nous. C’est en effet en chacun de nous, dans notre cœur que prend naissance cette violence, toujours prête à se manifester pour nous défendre ou défendre nos intérêts et nos points de vue. Cette lutte peut également nous conduire à nous tourner vers Dieu pour lui dire notre révolte, notre souffrance, lorsque nous devenons victimes de la violence et que cette souffrance est trop lourde à porter. Qu’il nous suffise de rappeler les mots que Jésus adresse à son Père alors que, victime lui-même de la violence des hommes, il meurt sur la croix : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ». Pourtant, Jésus n’invite pas à la résignation, il invite au combat : il exige le pardon 70 fois 7 fois, il invite à aimer son ennemi et à prier pour ceux qui persécutent… Il résiste à la tentation de la violence. Il va jusqu’à demander à son Père le pardon pour ses bourreaux. Il invite à résister à la violence par l’Esprit d’amour, seul capable d’obtenir la conversion du violent et la réconciliation entre lui et sa victime. Jésus ne se contente pas, face à la violence, d’un abandon passif entre les mains de Dieu, il fait violence au violent en lui pardonnant et en l’appelant à la conversion et à la réconciliation. Il nous rappelle enfin que c’est l’amour qui aura le dernier mot. Jésus est sorti vainqueur du tombeau, la vie a triomphé de la mort.

Ce qui s’est passé à Manchester nous touche et nous interpelle tant il est vrai que ce combat contre la violence et pour le respect de la vie se joue déjà en nous et à nos portes ! Quel sera notre choix ?

+ Mgr Jean-Pierre COTTANCEAU