ACCUEILLIR LES PREMICES D’UN NOUVEL AGE

Cottanceau jean pierre 2015   Cinquante jours après Pâques, la Pentecôte signe l'accomplissement de la promesse faite par Jésus à ses apôtres : « l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit » (Jn 14,26).

   Pour raconter la Pentecôte dans les Actes des Apôtres (2,1-11), saint Luc s'inspire de deux événements et d'une promesse. Le premier événement est le don de la Loi au Sinaï. Dans la tradition juive, la fête de la Pentecôte célèbre précisément ce souvenir fondateur du Peuple élu. Des milliers de pèlerins affluaient vers Jérusalem pour participer à la fête.

   Avec le don de l'Esprit, un nouveau Sinaï se produit. L'Esprit apporte aux hommes une Loi nouvelle avec la promesse qu'elle pourra s'inscrire dans leur cœur et non plus sur des tables de pierre. Cette espérance s'était déjà déclarée par la bouche du prophète Joël plusieurs siècles auparavant : « Je répandrai mon esprit sur tout être de chair » (3,1).

   Enfin, saint Luc s'inspire aussi de l'épisode bien connu de la tour de Babel (Gn 11). Babel symbolise le rêve d'une humanité fière de sa puissance, cherchant à se faire un nom et à gagner le ciel par ses propres forces. La tour immense qu'elle se construit est un défi à la transcendance divine.

   Abusée par l'illusion d'une entente fondée sur l'usage d'une langue unique et des mêmes mots,  l'humanité se donne belles institutions politiques entourées de solides murailles. Elles lui donnent l'assurance d'une protection contre un extérieur menaçant, les effets du temps et même la mort.

   Pentecôte, c'est tout l'inverse de Babel ! Le rêve aurait tourné au cauchemar si Dieu n'était pas intervenu pour mettre fin à une quête sans fin de puissance et de gloire. À la Pentecôte, l'Esprit ouvre une voie nouvelle pour l'homme en réorientant son désir vers la fin des temps.

   Au rêve de la langue unique qui conduit à la confusion succède la surabondance liée à la diversité des langues. Mystérieusement, la parole vivante des apôtres, dynamisée par l'Esprit, est comprise par tous. Elle transforme le monde comme un feu.

   À Babel, la fragilité de la construction censée fonder l'unité d'une nation et prémunir contre le temps et la mort était flagrante. À Jérusalem, le don que Jésus fait de sa vie fonde l'unité de tous les peuples. Et c'est son nom qui  va désigner pour toujours le peuple de la Nouvelle Alliance.

   Ceux qui entendent Pierre lui demandent : que faire ? Pierre appelle alors à un retournement : accepter de faire mourir en soi ses germes mortifères de renommée, de puissance et de gloire par ses propres forces et accueillir l'Esprit qui vient du Père, qui est donné aux hommes par le nom de Jésus.

 

+ Père Jean-Pierre COTTANCEAU