Pko 23.08.2020

Eglise cath papeete 1

Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°39/2020

Dimanche 23 août 2020 – 21ème Dimanche du Temps ordinaire – Année A

Humeurs

Rentrée de la Catéchèse pour les enfants à la Cathédrale

La rentrée scolaire, bien que mouvementée, a repris… C’est, désormais, l’heure de reprendre la route de la catéchèse !

Ce dimanche 23 août, auront lieu les inscriptions au 1er étage du presbytère…

La catéchèse commencera le dimanche 30 août après la messe…

Un petit rappel des règles générales édictées par notre archevêque :

  1. Port du masque obligatoire lors des réunions dans nos salles paroissiales sauf pour les enfants de moins de 11 ans ;
  2. Veiller à la distanciation physique en utilisant le maximum d'espace. ;
  3. Être vigilants et fermes pour éviter tout contact physique : embrassades, poignées de main, accolades... ;
  4. Les participants sont invités à se laver les mains avant leur entrée dans l’église.

Les mesures propres à la paroisse, compte tenu de nos locaux seront exposés aux parents lors de l’inscription.

Laissez-moi vous dire…

Lundi 24 août 2020 : Fête de Saint Barthélémy
Une guérison qui change tout

Demain lundi 24 août nous fêtons Saint Barthélémy que la tradition identifie à Nathanaël. Sur cette simple parole de Jésus : « Voici un véritable fils d’Israël, un homme qui ne sait pas mentir », Nathanaël est ébloui, spontanément il déclare : « Rabbi, c’est toi le Fils de Dieu ! ». En effet, Nathanaël venait de dire à Philippe, au sujet de Jésus : « De Nazareth peut-il sortir quelque chose de bon ? » (cf. Jean 1,45-51)

La foi en Dieu, l’adhésion au Christ viennent toujours d’une rencontre personnelle avec le Seigneur. Dans la nuit de nos doutes, nous recherchons le merveilleux, le miracle qui nous ferait croire en Dieu. Or, le Seigneur, comme pour le prophète Elie, se manifeste le plus souvent comme « une brise légère ». Une parole, une visite, un événement … peuvent bouleverser nos vies et nous transformer en hommes et femmes de passion et de foi. Chacun(e) vit à sa manière son « chemin de Damas », c’est le fruit d’une disponibilité à la grâce divine.

Récemment, mardi 26 mai, le Pape François a autorisé la publication d’un décret reconnaissant un miracle attribué à la Vénérable Pauline-Marie Jaricot, déjà nommée patronne des missions par le Pape François en octobre 2019. Il s’agit de la guérison inexpliquée scientifiquement de la petite Mayline Tran alors âgée de trois ans et demi. Voici les circonstances de cette guérison miraculeuse relatée par le papa de Mayline.

« Nous sommes le 29 mai 2012 au soir (…) quelques amis sont venus pour fêter notre futur départ pour Nice, prévu quelques semaines plus tard. Au cours de la soirée, Mayline, qui n’a que 3 ans et demi, s’étouffe en avalant une petite saucisse ronde. Elle se précipite vers moi, puis tombe inanimée dans mes bras. J’essaye de faire sortir l’aliment coincé, je pratique un massage cardiaque, en vain. Je sors avec elle dans la rue pour faciliter l’accès des pompiers. A leur arrivée, ils ont énormément de mal à récupérer Mayline qui a fait plusieurs arrêts cardiaques. Transférée à l’hôpital Femme-Mère-Enfant de Bron, son état est critique. Durant la nuit, elle fait encore plusieurs arrêts cardiaques. Le lendemain matin, les médecins nous informent que Mayline est branchée à plusieurs machines pour maintenir son cœur et aider ses poumons à respirer. Pour nous, c’est le pire des scénarios ! On ne comprend pas ce qui se passe. Une semaine après l’accident, les médecins nous disent que, compte-tenu des différents examens cérébraux et des potentiels de récupération, il n’y a aucune chance pour que Mayline revienne à elle. (…)

Au regard de l’évolution de son état de santé, une semaine après l’accident, les médecins de Lyon nous informent qu’ils arrêtent les soins thérapeutiques et nous proposent d’interrompre l’alimentation. Ils n’effectueront aucune autre réanimation ou soin thérapeutique. Nous refusons. C’était beaucoup trop tôt pour nous, et il était hors de question de débrancher son alimentation. Nous sommes alors fin juin. Nous décidons de déménager comme prévu dans les Alpes-Maritimes et de transférer Mayline début juillet vers l’hôpital pédiatrique Nice-Lenval. »

Touchée par le drame que vit la famille de Mayline, un parent d’élève de son école propose de lancer une neuvaine à Pauline Jaricot. Le diocèse de Lyon fête le jubilé de la mort de cette fondatrice du Rosaire Vivant et de la Propagation de la Foi, une des œuvres Pontificales Missionnaires. Avec l’accord de l’archevêque les membres du Rosaire Vivant acceptent de réciter cette neuvaine qui commence le 15 juin, deux semaines après l’accident. Les parents de Mayline s’associent à cette prière.

Le papa continue le récit : « Lorsque Mayline sort de l’ambulance, qui vient de la conduire de Lyon à Nice, elle n’était plus du tout la même (…) Arrivée à l’hôpital  de Nice-Lenval, ses yeux et son regard étaient totalement différents. (…) nous sommes passés d’une enfant qui avait un regard perdu, dans le vide, sans couleur, presque dénué d’âme, à une enfant à l’œil réactif à la lumière, au regard vivant.(…) Le neurologue ne comprend pas ce qui se passe. L’état de la fillette ne correspond pas à ce que son confrère de Lyon lui avait décrit. Il affirme sans hésitation : “Votre fille ne mourra pas dans mon service”(…)

Très rapidement, au mois de juillet Mayline fait des progrès fulgurants. (…) Les médecins ne peuvent qu’observer sa récupération sans pouvoir donner d’explication. En l’espace de trois mois Mayline recouvre pratiquement toutes ces facultés. »

Le diocèse de Lyon demande un dossier médical qui permettrait de conclure à un « miracle ». En 2018 les parents et Mayline sont convoqués à l’évêché de Nice avec deux neurologues, un médecin généraliste, un greffier et un procureur. Même procédure en juin 2019 à Rome. Le 27 mai 2020 ce sont les Œuvres Pontificales Missionnaires qui apprennent à la famille de Mayline que le Pape a reconnu le miracle de cette guérison.

Emmanuel Tran, père de Mayline, qui n’était pas baptisé, a été littéralement retourné (converti) par la guérison de sa fille. « J’ai vu et j’ai cru », résume-t-il. Il a été baptisé et confirmé le jour de Pâques 2016.

Quant à la petite Mayline, qui a maintenant 11 ans, elle ne cesse de répéter ce qu’elle disait déjà quand elle était en maternelle en Moyenne Section : « Jésus, je Le connais, c’est Lui qui m’a sauvée. »

[Sources : vaticannews.va / 27 mai 2020 ; Famille chrétienne, n°2217, du 11 au 1è juillet 2020]

Dominique SOUPÉ

Pauline Jaricot en quelques dates :  elle naît à Lyon le 22 juillet 1799 ; lors de la messe des Rameaux 1816, connaît une conversion fulgurante ; belle, riche et coquette, elle se dédie alors aux plus pauvres, aux marginalisés et aux malades, fait vœu de chasteté et s’engage à annoncer l’Évangile.

 En mai 1822, elle fonde l’Œuvre pour la Propagation de la foi pour soutenir les missionnaires français, qui partent en Asie ou aux Amériques.

En 1826, confrontée à l’anticléricalisme français, elle y répond par une vie de prière intense et fonde l’Œuvre du Rosaire Vivant.

Pauline-Marie Jaricot passe les dernières années de sa vie dans la pauvreté la plus absolue. Elle décède à Lyon le 9 janvier 1862.

Déclarée Vénérable par saint Jean XXIII le 25 février 1963.

© Cathédrale de Papeete – 2020

Regard sur l’actualité…

École et parents

À l’heure où vient de sonner la « rentrée des classes » pour les petits et les grands, mesurons d’abord la chance que nous avons de pouvoir envoyer nos enfants à l’école. Certes, tout n’est pas parfait, mais confrontés à ces imperfections, pensons d’abord à ces pays où beaucoup d’enfants n’ont pas la chance d’être scolarisés pour raison de guerre, de pauvreté, d’immigration, à ces pays où les enfants doivent faire parfois le ventre vide plusieurs kilomètres à pied pour rejoindre une école où le matériel pédagogique, les tables et les bancs font cruellement défaut…

L’école est d’une importance capitale pour l’éducation des enfants. Elle permet le développement ordonné des facultés intellectuelles, elle introduit à l’histoire et au patrimoine culturel hérité des générations précédentes, elle ouvre les enfants au sens des valeurs indispensables à la vie en société, elle prépare à la vie professionnelle. Lieu de rencontre entre élèves d’origine sociale et de caractère différents, elle est le lieu où peut naître un esprit de camaraderie qui forme à la compréhension mutuelle et à l’acceptation de la différence. Selon les mots du Concile Vatican II en sa déclaration sur l’Éducation Chrétienne (n°5), l’école « constitue comme un centre où se rencontrent pour partager les responsabilités de son fonctionnement et de son progrès, familles, maîtres, groupements de tous genres créés pour le développement de la vie culturelle, civique et religieuse, la société civile et enfin toute la communauté humaine. »

Cependant, n’oublions pas que les parents sont les premiers responsables de l’éducation de leurs enfants. Ils ont à promouvoir leur éducation totale, personnelle et sociale. C’est ce que rappelle le Concile Vatican II en sa déclaration sur l’éducation chrétienne au §3 : « Les parents, parce qu’ils ont donné la vie à leurs enfants, ont la très grave obligation de les élever et, à ce titre, doivent être reconnus comme leurs premiers et principaux éducateurs ». Aux côtés des parents, l’école se présente donc comme une institution sociale qui répond aux besoins de formation et d’éducation de la personne. L’Eglise entend ainsi aider les parents à assumer leur droit naturel d’éduquer leurs enfants. Et c’est au titre de cette responsabilité éducative que les parents participent à la mission de l’école catholique et s’inscrivent dans son projet éducatif. Ils sont invités à entretenir des relations cordiales et constructives avec les enseignants et les responsables des écoles. Ils sont appelés à s’engager dans la vie de l’établissement, et pour cela, doivent être tenus informés de l’évolution du système éducatif et de tout ce qui s’y rapporte. De leur côté, les établissements catholiques doivent avoir pour objectif de faciliter la rencontre et le dialogue avec les parents et les familles grâce entre autres à la promotion des associations de parents d’élèves pour établir cette personnalisation qui rend efficace l’ensemble du projet éducatif. Par leurs initiatives, ces associations de parents concourent à la vitalité et à l’animation des communautés éducatives, à la représentation des familles dans leur diversité, à la solidarité entre parents et entre écoles catholiques dans un esprit de fraternité, à la réflexion sur les enjeux éducatifs et scolaires, à la reconnaissance par la société et les pouvoirs publics du droit naturel des parents d’éduquer leurs enfants, et donc de les inscrire dans les écoles de leur choix.

Par leur engagement aux côtés de tous les bénévoles œuvrant dans l’enseignement catholique, ils éduquent leurs enfants au sens du don de soi et du service des autres qui sont des caractéristiques essentielles du message de l’évangile. Par cette participation dans les domaines de la gestion, de l’animation pastorale, des animations sportives et culturelles, parents et collaborateurs de tous ordres apportent un concours précieux, déterminant et indispensable à la mission de l’école catholique. Ils participent de l’ouverture de l’école catholique à la société de notre temps.

En ces jours de rentrée, une rentrée quelque peu « mouvementée » en raison de la Covid 19, souhaitons donc à tous ceux qui animent nos établissements scolaires d’en faire des lieux de vie et d’épanouissement pour nos enfants et nos jeunes !

+ Mgr Jean-Pierre COTTANCEAU

© Archidiocèse de Papeete – 2020

Audience générale

Pour un égal accès aux soins anti-Covid

Ce mercredi, le Pape a poursuivi son cycle de catéchèses sur la manière dont les chrétiens sont appelés à réagir à la pandémie. « Qu’il serait triste si, avec le vaccin pour le Covid-19, on donnait la priorité aux plus riches ! » Alors qu’une course au vaccin est en cours, François appelle à trouver un traitement à la Covid-19 mais également au « grand virus, celui de l’injustice sociale » pour construire une économie où les personnes, et surtout les pauvres, sont au centre.

Chers frères et sœurs, bonjour !

La pandémie a dévoilé la situation difficile des pauvres et la grande inégalité qui règne dans le monde. Et si le virus ne fait pas d’exception entre les personnes, il a trouvé, sur son chemin dévastateur, de grandes inégalités et discriminations. Et il les a accrues !

La réponse à la pandémie est donc double. D’un côté, il est indispensable de trouver un traitement à un virus petit mais terrible, qui met à genoux le monde entier. De l’autre, nous devons soigner un grand virus, celui de l’injustice sociale, de l’inégalité d’opportunités, de la marginalisation et du manque de protection des plus faibles. Dans cette double réponse de guérison, il existe un choix qui, selon l’Évangile, ne peut manquer : c’est l’option préférentielle pour les pauvres (cf. Exhort. ap. Evangelii gaudium [EG], n.195). Et cela n’est pas une option politique ; ni même une option idéologique, une option de parti. L’option préférentielle pour les pauvres est au centre de l’Évangile. Et le premier à l’avoir réalisée a été Jésus ; nous l’avons entendu dans le passage de la Lettre aux Corinthiens qui a été lue au début. De riche, il s’est fait pauvre pour nous enrichir. Il est devenu l’un de nous et pour cela, au centre de l’Évangile, au centre de l’annonce de Jésus, il y a cette option.

Le Christ lui-même, qui est Dieu, s’est dépouillé, se rendant semblable aux hommes ; et il n’a pas choisi une vie de privilège, mais il a choisi la condition de serviteur (cf. Ph 2,6-7). Il s’anéantit en devenant serviteur. Il est né dans une famille humble et a travaillé comme artisan. Au début de sa prédication, il a annoncé que dans le Royaume de Dieu, les pauvres sont bienheureux (cf. Mt 5,3 ; Lc 6,20 ; EG, n.197). Il était parmi les malades, les pauvres et les exclus, en leur manifestant l’amour miséricordieux de Dieu (cf. Catéchisme de l’Église catholique, n.2444). Et très souvent, il a été jugé comme un homme impur parce qu’il allait rendre visite aux malades, aux lépreux, qui, selon la loi de l’époque, étaient impurs. Et il a pris des risques pour être proche des pauvres.

C’est pourquoi les fidèles de Jésus se reconnaissent par leur proximité aux pauvres, aux petits, aux malades et aux prisonniers, aux exclus et aux oubliés, à ceux qui sont privés de nourriture et de vêtements (cf. Mt 25,31-36 ; CEC, n.2443). Nous pouvons lire ce célèbre paramètre sur lequel nous serons tous jugés, nous serons tous jugés. Il est dans Matthieu, chapitre 25. Cela est un critère-clé d’authenticité chrétienne (cf. Ga 2, 10 ; EG, n. 195). Certains pensent, à tort, que cet amour préférentiel pour les pauvres est un devoir pour une poignée de personnes, mais en réalité c’est la mission de toute l’Église, disait Jean-Paul II (cf. S. Jean-Paul II, Enc. Sollicitudo rei socialis, n.42). « Chaque chrétien et chaque communauté sont appelés à être instruments de Dieu pour la libération et la promotion des pauvres » (EG, n.187).

La foi, l’espérance et l’amour nous poussent nécessairement vers cette préférence pour les plus nécessiteux (cf. Congrégation pour la doctrine de la foi, Instruction sur certaines aspects de la « Théologie de la libération », [1984], n.5), qui va au-delà de l’assistance, bien que nécessaire (cf. EG, n.198). Elle implique en effet de marcher ensemble, de se laisser évangéliser par eux, qui connaissent bien le Christ souffrant, de se laisser « contaminer » par leur expérience de salut, par leur sagesse et par leur créativité (cf. ibid.). Partager avec les pauvres signifie s’enrichir réciproquement. Et, s’il existe des structures sociales malades qui les empêchent de rêver à l’avenir, nous devons œuvrer ensemble pour les guérir, pour les changer (cf. ibid., n.195). Et c’est à cela que conduit l’amour du Christ, qui nous a aimés jusqu’au bout (cf. Jn 13,1) et qui arrive jusqu’aux extrémités, aux limites, aux frontières existentielles. Apporter les périphéries au centre signifie centrer notre vie dans le Christ, qui « s’est fait pauvre » pour nous, pour nous enrichir « par sa pauvreté » (2Co 8, 9) (Benoît XVI, Discours d’inauguration de la Vème Conférence générale de l’épiscopat latino-américain et des Caraïbes [13 mai 2007], p.3).

Nous sommes tous préoccupés par les conséquences sociales de la pandémie. Tous. De nombreuses personnes veulent revenir à la normalité et reprendre leurs activités économiques. Certes, mais cette « normalité » ne devrait pas inclure les injustices sociales et la dégradation de l’environnement. La pandémie est une crise et on ne sort pas pareils d’une crise : nous sortons meilleurs ou nous sortons pires. Nous devrions sortir meilleurs pour améliorer les injustices sociales et la dégradation de l’environnement. Aujourd’hui, nous avons une occasion de construire quelque chose de différent. Par exemple, nous pouvons développer une économie de développement intégral des pauvres, et non d’assistanat. En disant cela, je ne veux pas condamner l’assistance, les œuvres d’assistance sont importantes. Pensons au bénévolat, qui est l’une des plus belles structures de l’Église italienne. Mais nous devons aller au-delà et résoudre les problèmes qui nous poussent à apporter une assistance. Une économie qui n’ait pas recours à des remèdes qui en réalité empoisonnent la société, comme les rendements dissociés de la création de postes de travail dignes (cf. EG, n.204). Ce type de profit est dissocié de l’économie réelle, celle qui devrait apporter un bénéfice aux personnes communes (cf. Enc. Laudato si’ [LS], n.109), et semble parfois indifférent aux dommages infligés à la maison commune. L’option préférentielle pour les pauvres, cette exigence éthique et sociale qui provient de l’amour de Dieu (cf. LS, n.158), nous donne l’élan de penser et de concevoir une économie où les personnes, et surtout les pauvres, sont au centre. Et elle nous encourage également à projeter le traitement du virus en privilégiant ceux qui en ont le plus besoin. Ce serait triste si, avec le vaccin pour le Covid-19, on donnait la priorité aux plus riches ! Ce serait triste si ce vaccin devenait la propriété de tel ou tel pays et s’il n’était pas universel et pour tous. Et quel scandale cela serait si toute l’assistance économique que nous observons – dont la majorité est issue de l’argent public – était concentrée à sauver les industries qui ne contribuent pas à l’inclusion des exclus, à la promotion des derniers, au bien commun ou à la sauvegarde de la création (ibid.). Ce sont des critères pour choisir quelles seront les industries à aider : celles qui contribuent à l’inclusion des exclus, à la promotion des derniers, au bien commun et à la sauvegarde de la création. Quatre critères.

Si le virus devait s’intensifier à nouveau dans un monde injuste pour les pauvres et les plus vulnérables, nous devons changer ce monde. Avec l’exemple de Jésus, le médecin de l’amour divin intégral, c’est-à-dire de la guérison physique, sociale et spirituelle (cf. Jn 5,6-9) – comme l’était la guérison qu’accomplissait Jésus – nous devons agir à présent, pour guérir les épidémies provoquées par de petits virus invisibles et pour guérir celles provoquées par les grandes et invisibles injustices sociales. Je propose que cela soit fait à partir de l’amour de Dieu, en plaçant les périphéries au centre et les derniers à la première place. Il ne faut pas oublier ce paramètre sur lequel nous serons jugés, Matthieu, chapitre 25. Mettons-le en pratique en cette reprise de l’épidémie. Et à partir de cet amour concret, ancré à l’espérance et fondé dans la foi, un monde plus sain sera possible. Dans le cas contraire, nous sortirons pires de la crise. Que le Seigneur nous aide, qu’il nous donne la force de sortir meilleurs, en répondant aux nécessités du monde d’aujourd’hui.

© Libreria Editrice Vaticana – 2020

Congrégation pour le clergé

La conversion pastorale de la communauté paroissiale au service de la mission évangélisatrice de l’Église (4)

Dans l'Église, il y a de la place pour tous et chacun peut trouver sa place, en respectant la vocation de chacun : c'est là le sens de l'Instruction « La conversion pastorale de la communauté paroissiale au service de la mission évangélisatrice de l’Église », rédigée par la congrégation pour le Clergé. Le document ne contient aucune nouvelle législation, mais propose des moyens de mieux appliquer la législation actuelle, de manière à favoriser la coresponsabilité des baptisés et à promouvoir une pastorale de proximité et de coopération entre les paroisses.

XI. Les offrandes à l’occasion de la célébration des sacrements

118. Il existe un thème connexe à la vie des paroisses et à leur mission évangélisatrice : l’offrande destinée au prêtre qui célèbre la messe et celles qui sont faites à l’occasion des autres sacrements et qui reviennent à la paroisse. Il s’agit d’une offrande qui, par sa nature, doit être de la part du donateur un acte libre, laissé à sa conscience, à son sens de la responsabilité ecclésiale, et non un “prix à payer” ou une “taxe à exiger”, comme s’il s’agissait d’un “impôt sur les sacrements”. De fait, avec leur offrande pour la messe, « les fidèles […] contribuent au bien de l'Église et participent par cette offrande à son souci pour le soutien de ses ministres et de ses œuvres ».

119. En ce sens il est important de sensibiliser les fidèles pour qu’ils contribuent volontiers aux nécessités de la paroisse, qui sont “leurs affaires”. Il est bon qu’ils apprennent à en prendre soin spontanément, spécialement dans les pays où l’offrande faite à l’occasion de la célébration de la messe est encore l’unique source de subsistance pour les prêtres et de ressource pour l’évangélisation.

120. Une telle sensibilisation sera d’autant plus efficace que, de leur côté, les prêtres offriront des exemples “vertueux” dans l’usage de l’argent, à la fois par un style de vie sobre et sans excès sur le plan personnel, et par une gestion transparente et avisée des biens paroissiaux, pensés en fonction des besoins réels des fidèles, surtout des plus pauvres et des indigents, plutôt que d’être des “projets” du curé ou d’un groupe restreint de personnes, qui peuvent être bons en soi, mais abstraits.

121. Dans tous les cas, « en matière d'offrande de Messes, on écartera absolument jusqu'à l'apparence de commerce ou de trafic », en tenant compte qu’il « est vivement recommandé aux prêtres, même s'ils n'ont pas reçu d'offrande, de célébrer la Messe aux intentions des fidèles, surtout de ceux qui sont dans le besoin ».

Parmi les moyens qui peuvent permettre d’atteindre un tel objectif, on peut penser à une collecte anonyme des offrandes, de façon à ce que chacun se sente libre de donner ce qu’il peut ou estime juste, sans se sentir obligé de correspondre à une attente ou à un prix.

Conclusion

122. La présente Instruction entend développer le thème du renouveau de la paroisse dans un sens missionnaire, en se fondant sur l’ecclésiologie du Concile Vatican II, éclairé par le Magistère récent, et en considérant les contextes sociaux et culturels qui ont connu de profondes mutations.

La paroisse reste une institution incontournable pour la rencontre et la relation vivante avec le Christ et les frères dans la foi. Mais il est tout aussi vrai qu’elle doit être constamment confrontée aux changements qui s’opèrent dans la culture actuelle et dans la vie des personnes. Cela permet d’explorer avec créativité les voies et les moyens nouveaux qui lui permettent d’être à la hauteur de sa tâche première, celle d’être le centre moteur de l’évangélisation.

123. Par conséquent, l’action pastorale a besoin de dépasser les limites territoriales de la paroisse, de manifester plus clairement la communion ecclésiale grâce à une synergie des ministères et des charismes, tout en se structurant comme “pastorale d’ensemble” au service du diocèse et de sa mission.

Il s’agit d’une action pastorale qui, grâce à une collaboration effective et vitale entre prêtres, diacres, consacrés et laïcs, ainsi qu’entre diverses communautés paroissiales d’un même territoire ou d’une région, ait le souci de trouver ensemble les demandes, les difficultés et les défis de l’évangélisation et qui cherche à intégrer des voies, des instruments, des propositions et des moyens capables de les affronter. Un tel projet missionnaire commun pourrait être élaboré et réalisé dans des contextes territoriaux et sociaux voisins, c’est-à-dire dans des communautés limitrophes ou réunies par les mêmes conditions socio-culturelles, ou encore en référence à des milieux pastoraux homogènes, par exemple dans le cadre d’une nécessaire coordination entre pastorale de la jeunesse, des étudiants et des vocations, comme cela existe déjà dans plusieurs diocèses.

Pour cela, la pastorale d’ensemble, en plus d’une coordination responsable des activités et des structures pastorales capables de se rencontrer et de collaborer ensemble, requiert la contribution de tous les baptisés. Comme le dit le Pape François, « quand nous parlons de “peuple”, il ne faut pas comprendre les structures de la société ou de l’Église, mais l’ensemble des personnes qui ne marchent pas comme des individus mais comme le tissu d’une communauté de tous et pour tous ».

Cela exige que l’institution paroissiale historique ne soit pas emprisonnée dans l’immobilisme ou une répétition pastorale préoccupante, mais qu’elle mette bien au contraire en acte ce “dynamisme en sortie” qui, dans la collaboration entre les diverses communautés paroissiales et une communion renforcée entre clercs et laïcs, l’oriente effectivement vers la mission évangélisatrice, tâche de tout le Peuple de Dieu, qui marche dans l’histoire comme “famille de Dieu” et qui, dans la synergie de ses membres divers, œuvre à la croissance du corps ecclésial tout entier.

Ainsi, le présent Document, en plus de souligner l’urgence d’un semblable renouveau, présente un ensemble de normes canoniques qui précise la possibilité, les limites, les droits et devoirs des pasteurs et des laïcs, afin que la paroisse se redécouvre un lieu fondamental de l’annonce évangélique, de la célébration de l’Eucharistie, espace de fraternité et de charité, d’où rayonne le témoignage chrétien pour le monde. Autrement dit, la paroisse « doit rester, en tant qu’un lieu de créativité, de référence, de maternité. Et là, mettre en œuvre cette capacité inventive ; et quand une paroisse va ainsi de l’avant, elle devient ce que j’appelle une “paroisse en sortie” ».

124. Le Pape François invite à invoquer « Marie, Mère de l’Évangélisation » afin qu’elle « nous aide, la Vierge, à dire notre “oui” dans l’urgence de faire résonner la Bonne Nouvelle de Jésus à notre époque ; qu’elle nous obtienne une nouvelle ardeur de ressuscités pour porter à tous l’Évangile de la vie qui remporte la victoire sur la mort ; qu’elle intercède pour nous afin que nous puissions acquérir la sainte audace de rechercher de nouvelles routes pour que parvienne à tous le don du salut ».

Le Saint-Père a approuvé le présent Document de la Congrégation pour le Clergé le 27 juin 2020.

Rome, 29 juin 2020,

en la Solennité des Saints Apôtres Pierre et Paul.

© Libreria Editrice Vaticana – 2020

Bioéthique

Le progrès n’a plus de limite

Récemment adoptée par une Assemblée nationale vide, la révision de la loi bioéthique poursuit l'élargissement des transgressions en tous genres.

Les “progressistes” peuvent dire ce qu'ils veulent : tout était prévisible - d'ailleurs, ce fut prédit. Quand aux premières heures du 1er août, en pleine trêve estivale, l'Assemblée nationale adopte en deuxième lecture le projet de loi bioéthique, à main levée et devant un député sur cinq, on assiste au dénouement d'un processus sans suspense qui prend sa source bien avant les prétendus engagements de campagne et promesses de “débat apaisé” d'Emmanuel Macron. Le père du premier bébé-éprouvette, Jacques Testart, ne cesse de mettre la France en garde : « Jusqu'à la construction du monde hypertechnologisé que nous connaissons, le progrès consistait dans l'amélioration des conditions de vie vers l'épanouissement des personnes… Aujourd'hui, la fétichisation des productions technoscientifiques sert l'économie libérale en aliénant les personnes. C'est d'autant plus grave qu'il n'existe que des “avancées” en bioéthique, pas de retours possibles, si bien que les résistants à ces “progrès” sont vite qualifiés de conservateurs… »

Le processus est toujours le même. Prenez l'avortement : depuis sa dépénalisation il y a quarante-cinq ans, l'accès à l'IVG - pourtant considérée comme un “drame” - n'a cessé d'étendre ses frontières. Remboursement intégral voté en 2013, suppression de la condition de détresse et reconnaissance d'un “droit fondamental” en 2014, retrait du délai de réflexion en 2015… tandis que la pression est toujours plus forte pour l'allongement du délai légal pendant lequel l'avortement est autorisé et la suppression de la clause de conscience spécifique des médecins. Pourquoi s'attarder sur ce sujet ? Parce qu'il n'est jamais débattu et directement lié à la question de l'extension des recherches sur l'embryon, dont personne ne parle jamais. « L'arbre de la “PMA pour toutes” a caché la forêt des abandons éthiques », regrette encore Jacques Testart.

Pas de projet, pas d'enfant

Si l'avenir n'est jamais certain, les causes ont des conséquences. La logique actuelle est simple : l'enfant n'est pas un don mais un projet parental. Si ce projet n'existe pas, l'enfant non plus. Sinon, qui pourrait expliquer la différence de valeur entre un fœtus de 12 semaines que l'on peut avorter et celui de 13 pour lequel c'est interdit ? Qui pourrait assumer de dire qu'un embryon handicapé de 17 semaines mérite une protection moins grande que celui qui est sain, précisément parce qu'il est handicapé ? Comment assumer que certains embryons soient donnés à la recherche ? Plus personne ne se pose la question de ce qu'est l'embryon, de ses éventuels droits, de sa nature, de la valeur de la vie qui l'anime… Il n'est question que du “droit” de la femme à disposer de “son” corps. Toute limite devient une potentielle entrave aux libertés individuelles.

Le vote du 1er août incarne ce paradigme progressiste. Peut-on, par exemple, tuer un enfant dans le sein de sa mère la veille de la naissance ? La France répond déjà oui à cette question, dans certains cas : si l'enfant porte une maladie incurable, ou si le fait de mener la grossesse à terme fait courir un risque à la mère. Sans prévenir, les députés socialistes ont ajouté un amendement visant à élargir l'accès à ces interruptions médicales de grossesse (IMG). Une mère pourrait désormais y recourir - jusqu'au terme de la grossesse - si elle se trouve en « détresse psychosociale », situation par nature difficile à définir. Il y a quelques années, la condition de “détresse” était supprimée des critères de recours à l'IVG, au motif qu'elle était devenue “obsolète”… Tugdual Derville, délégué général d'Alliance Vita, a médiatisé l'amendement discret, et s'en insurge : « Présenté comme un progrès, ce type d'IMG se révèle être une violence faite aux femmes, une régression de leur droit d'être accompagnées et protégées quand elles sont fragilisées par une grossesse. Pour en avoir conscience, il faut avoir entendu la peine immense de celles qui se culpabilisent, a posteriori, d'avoir cédé aux pressions en consentant à se faire avorter de leur enfant en bonne santé. »

Création de chimères homme-animal

Mais puisque l'embryon ne vaut rien hors de la volonté des adultes, le reste coule de source. Cette loi autorise aussi, par exemple, la création de chimères homme-animal, tout en détaillant certains garde-fous. « Des précautions hypocrites et risibles », selon Jacques Testart : « C'est l'embryon animal qui sera enrichi en cellules humaines et pas l'inverse, et la proportion d'humain dans la chimère ne devra pas dépasser 50% (comme dans le centaure ou la sirène). De plus c'est une femelle animale qui portera la chimère (quelle femme aurait pu accepter ce rôle ?) et la gestation sera interrompue avant la naissance… pour cette fois. »

Les défenseurs du texte réfutent toute imprudence. La Ropa, par exemple, reste interdite. Petit point de vocabulaire sur cette « réception des ovocytes de la partenaire » : une femme lesbienne donne ses ovocytes pour une fécondation in vitro, et l'embryon est implanté chez sa conjointe. L'une conçoit l'enfant, l'autre le porte. Mais si toutes deux veulent être mères, comment comprendre la motivation de ce refus ? L'interrogation est la même pour la PMA post mortem (une fécondation pratiquée avec le sperme d'un homme mort consentant), ou pour l'accès des transsexuels à la PMA : pourquoi refuser à certains ce qui a été accordé à d'autres par souci “d'égalité” ? Interrogation également quant au refus de l'extension de l'accès au DPI-A. Ce diagnostic pratiqué in vitro est autorisé dans une famille où une maladie génétique grave est identifiée, mais interdit dans une famille où ce n'est pas le cas. Le rapporteur du texte, Jean-Louis Touraine, trouve cela - légitimement – absurde : « Le refus du DPI-A a été prononcé dans la crainte que cela ne limite le nombre de naissances d'enfants avec trisomie 21 ; en vérité ce nombre resterait identique car, pour les femmes qui le désirent, le diagnostic de trisomie est effectué en début de grossesse avec la possibilité d'interrompre celle-ci. » Pourquoi refuser le DPI-A lorsqu'on autorise l'avortement et qu'il est pratiqué dans 97% des cas de trisomie ? Jacques Testart s'en étonne aussi : « Le rejet du DPI-A m'a surpris tant cette extension de la technique du tri embryonnaire va dans le sens général de la loi, vers l'eugénisme consenti et l'acclimatation au transhumanisme. »

L'avortement post-natal déjà réclamé

Certaines dispositions sont acceptées, d'autres refusées. Comment comprendre la logique ? Le progressisme ne semble avoir qu'une doctrine : attendre que la société, travaillée par des revendications individuelles, soit “prête” à accepter les progrès techniques grandissants. Édifiante à cet égard, la façon dont Jean-Louis Touraine commente le rejet de certaines propositions : « Elles aussi sont en adéquation avec les valeurs de notre société, mais il a été jugé raisonnable de rester dans une certaine circonspection afin de ne pas heurter ceux qui sont préoccupés par les évolutions et qui tardent parfois à s'adapter, par exemple aux diverses modalités actuelles permettant de “faire famille”. » Tout n'est qu'une question de temps. La présidente de La Manif pour tous, Ludovine de La Rochère, n'est pas dupe : « C'est uniquement tactique : le président souhaite faire croire que ce projet de loi est “équilibré” et que nos alertes seraient excessives. »

Car si tout cela était prévisible, la suite l'est autant. Et elle fait froid dans le dos : des chercheurs réclament déjà l'avortement “postnatal”, c'est-à-dire l'infanticide, dans les cas où l'avortement tardif est autorisé. L'argumentaire est imparable : il n'y a aucun changement de nature avant et après la naissance. L'enfant est toujours dépendant, incapable de décider lui-même de son sort. Dans les services de néonatalogie, certains enfants sont aujourd'hui avortés à l'âge auquel d'autres sont sauvés. Quelle différence entre eux ? La volonté et le “projet” des parents. Pourquoi s'arrêter à la naissance ?

« C'est une réforme de société et on peut même dire une réforme de civilisation. »

Sans limite de principe, tout est possible. C'est vrai sur le terrain eugénique, mais également sur les conséquences du “mariage pour tous”, nettement plus médiatisé. Christiane Taubira le savait bien, qui déclarait en 2013 : « C'est une réforme de société et on peut même dire une réforme de civilisation. » Le débat ne fut jamais à la hauteur : il porta sur “l'amour” et “l'égalité”, quand ce qui était réellement en jeu était la définition même de la nature de l'homme et de la femme. Pour Touraine, l'enjeu n'est plus un bien commun mais une addition de visions individuelles : « Conservateurs et progressistes ont heureusement le même “droit de cité”. Les uns et les autres sont utiles, et chacun se retient d'imposer à tous son point de vue personnel. » Contrairement à lui, Christiane Taubira assumait le contraire : une réforme de civilisation concerne la société tout entière. Prenons des exemples volontairement éloignés pour comprendre : pourquoi interdire le crime d'honneur ? L'excision ? L'amour entre un homme mûr et une toute jeune fille ? Parce qu'il existe une morale civilisationnelle qui s'impose devant les revendications particulières. Quand tout est relatif, il n'y a plus de raison d'interdire quoique ce soit. Ou alors de façon arbitraire, et donc potentiellement temporaire.

Si la PMA, puis l'extension de la PMA, et demain la GPA finissent inévitablement par arriver, c'est parce que rien ne s'y oppose plus. Il en va de même avec les recherches sur l'embryon. « Plus important que le résultat législatif immédiat : les rapports préparatoires à la révision issus des grandes institutions, explique Testart. Leur convergence pour en finir avec “l'éthique à la française” est frappante et augure de l'évolution scientiste, eugéniste et mercantile de la bioéthique. » Il faut se rendre à l'évidence progressiste : les blocages d'aujourd'hui seront les “avancées” de demain.

© Valeurs actuelles – 2020

Bioéthique

IVG, IMG : Pourquoi le nouvel amendement sème la confusion

Adopté par l’Assemblée nationale à l’extrême fin de l’examen du projet de loi de bioéthique, un amendement ouvrant l’interruption médicale de grossesse aux cas de détresse psychosociale a déclenché une vive controverse. Il fait craindre une disparition des frontières entre IVG et IMG.

Inattendu, le sujet a subitement chassé tous les autres thèmes explosifs de la loi de bioéthique. C’est Tugdual Derville, délégué général de l’association Alliance Vita, qui fut le premier à relayer la présence de cet amendement autorisant l’interruption médicale de grossesse pour « détresse psychosociale », adopté par l’Assemblée nationale dans la nuit du 31 juillet au 1er août. « Cette revendication, émanant de la délégation au droit des femmes, a clairement été boostée par la Covid », analyse-t-il. Pendant le confinement, certains députés, médecins et associations avaient en effet réclamé l’allongement du délai de l’IVG. Le ministre de la Santé Olivier Veran aurait alors proposé l’IMG pour détresse psychosociale comme alternative, dans une lettre du 23 avril. S’engouffrant dans la brèche, la sénatrice PS Laurence Rossignol déposait le 4 mai un amendement pour faciliter cette procédure dans le cadre de la révision des lois de bioéthique. Repoussé au Sénat, il est réapparu en seconde lecture à l’Assemblée nationale.

L’interruption médicale de grossesse n’est pas un sujet nouveau, c’est son extension qui pose problème. Contrairement à l’Interruption volontaire de grossesse (IVG), possible sans justification mais jusqu’à la 12ème semaine, l’IMG, autorisée jusqu’au terme, requiert un avis médical. « Certains médecins font déjà des IMG pour détresse psychosociale, c’est autorisé par la loi de 2001 », explique à La Vie la présidente du Planning familial, Caroline Rebhi, espérant que cet amendement permettra une meilleure application de cette mesure sur tout le territoire. « La détresse actuellement prise en compte est surtout psychiatrique », précise le docteur Marc Leblanc, gynécologue obstétricien et chef de pôle Femme Mère Enfant inter-établissements à Vannes, indiquant qu’il s’agit généralement de femmes droguées, violées, ou prostituées et autres situations très critiques.

L’inquiétude d’une notion floue

« Réagir à la demande d’une IMG est toujours très difficile », confie le professeur Israël Nisand, président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) et chef du département de gynécologie obstétrique au CHU de Strasbourg. « Les causes des IMG maternelles acceptées sont toujours très lourdes, à l’instar de ce qui se passe pour les malformations fœtales. » La loi actuelle n’autorise en effet l’IMG qu’à deux conditions : soit « il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic » (cela concerne environ 7 000 des 8 000 IMG annuelles selon les chiffres de la drees), soit « la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme » (environ 300 IMG par an).

C’est à cette notion de « péril grave » que s’ajouterait le terme de « détresse psychosociale », la présentant ainsi explicitement comme l’une des menaces légitimes pour la santé de la femme. « Je pense que cet amendement a simplement un objectif de précision sémantique : la santé, telle que la définit l’OMS, a trois composantes, physique, psychique et sociale », précise à l’hebdomadaire le professeur Yves Ville, chef du service de gynécologie obstétrique à l’hôpital Necker. Il rappelle néanmoins que la décision d’une IMG doit « prendre en compte la notion de détresse, mais aussi la gravité de cette détresse ».

En réalité, comment juger de la détresse psychosociale d’une femme ? « Cette notion est complètement invérifiable, s’inquiète Tugdual Derville. Il n’est pas anodin que cette notion de détresse, invoquée comme argument pour voter et en même temps délimiter la loi Veil, soit reprise pour élargir l’IMG ». L’appréciation serait, comme aujourd’hui, entre les mains du staff de l’établissement médical et du Centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal (CPDPN) auquel il est obligatoire de recourir. L’équipe du CPDPN compte au moins deux médecins, dont un choisi par la femme enceinte, un psychiatre, psychologue ou assistant social, au moins un praticien spécialiste de l’affection dont la femme ou l’enfant est atteint. « Pour éclairer la prise de décision, nous avons essayé d’ouvrir la discussion en impliquant des profils en sciences humaines, (anthropologie, sociologie, théologie...), sans grand succès », livre Israël Nisand, pour qui les profils ne sont pas assez variés.

Première étape avant l’IVG sans délai ?

L’ambivalence de cette notion de « détresse psychosociale » fait craindre à certains, y compris parmi les médecins, un effacement de la distinction entre l’interruption volontaire de grossesse et l’IMG. « Il y aura toujours une différence entre les deux : c’est le fait que pour l’IMG, la femme enceinte soit obligée de passer par l’avis des médecins, rappelle Israël Nisand. Ils ont l’expérience de ces situations toujours très sensibles auxquelles leur métier implique de se confronter, c’est une responsabilité qui les honore ».

Pour le professeur Yves Ville, c’est « une erreur d’interpréter ce texte comme un allongement de l’IVG. Les CPDPN n’ont jamais emprunté cette voie et n’en ont aucunement l’intention ». Il appelle à distinguer la « détresse » et l’« inconfort, la volonté contrariée ». « Ce n’est pas parce qu’un couple se sépare ou que la femme ne veut plus être enceinte qu’il y a soudain détresse psychosociale : nous faisons une expertise sur la gravité des symptômes », insiste-t-il. Néanmoins, « les femmes pourront toujours aller d’un CPDPN à un autre jusqu’à ce que leur demande soit validée », reconnaît Marc Leblanc.

Certains ne voient d’ailleurs pas d’un œil très favorable cette obligation de recourir à l’avis des médecins. Pour le Planning familial, il s’agit surtout un dernier verrou à faire sauter. « C’est la femme qui doit décider jusqu’au bout ce qu’elle veut et pas l’équipe médicale, défend Caroline Rebhi. Chaque raison d’avorter est bonne. Au Planning, quand nous rencontrons une fille qui nous dit que sa grossesse est non planifiée et non souhaitée, pour n’importe quelle décision qu’elle a mûrement réfléchie seule ou en couple, c’est une détresse psychosociale ; il faut pouvoir y répondre. » Pour Caroline Rebhi, cette loi est aussi une question de santé publique : elle permettrait de mettre fin au commerce parallèle mis en place pour répondre à la demande de ces femmes, « qui se mettent parfois en danger. »

Un manque d’alternatives à l’IMG

Les opposants à l’amendement regrettent le manque d’alternatives proposées à ces femmes en détresse. « Ce n’est pas une obligation inscrite dans la loi, mais à Necker nous proposons très souvent un accouchement sous X », explique le professeur Yves Ville. « Ce n’est pas le cas partout, tempère Marc Leblanc. À Vannes, l’association La Tilma aide les femmes enceintes en détresse à vivre leur grossesse jusqu’au bout. Mais un jour, une responsable de l’association accompagne à l’hôpital une fille enceinte ayant fui Paris après avoir dénoncé son réseau de prostitution. La sage-femme met la volontaire de La Tilma à la porte, pour aussitôt exhorter la jeune femme enceinte à aller faire une IMG à l’étranger. » Des exemples similaires, ce responsable de pôle en a connu plusieurs au cours de sa carrière parisienne puis bretonne.

Dans le camp des juristes quelques voix s’élèvent aussi pour manifester leur inquiétude. Dans une tribune collective publiée le 12 août par le Figaro, 7 avocats et maîtres de conférences en droit alertent sur le statut de l’enfant à naître qui « ne bénéficierait plus d’aucune protection ». Ils craignent que le détournement de la notion de détresse psychosociale « à géométrie variable » par des associations militantes, fasse de l’avortement « la solution unique pour répondre à une situation de précarité. »

« Il y a une énorme ambivalence chez ceux qui proposent l’IMG comme solution, analyse Tugdual Derville. Sur le papier, on a l’impression que la décision d’avorter vient de la femme, mais il y a souvent bien d’autres facteurs de pression. Le compagnon, la société, parfois le corps médical. La tentation, c’est d’effacer le problème à savoir l’enfant, mais on fait subir à la femme un traumatisme sans l’aider là où elle en a réellement besoin ». Encore faut-il s’accorder sur le fait de considérer l’avortement comme « un traumatisme », la tendance allant plutôt à le présenter comme un droit inaliénable en faveur de l’émancipation des femmes. Quoi qu’il en soit, pas sûr que le climat plutôt favorable aux défenseurs de l’IVG suffise à faire sauter toutes les barrières jusqu’à l’adoption de cet amendement concernant l’IMG. S’ils l’ont déjà rejeté en première lecture, les sénateurs pourraient bien, lors du prochain examen du texte, le repousser une nouvelle fois.

© La Vie – 2020

Commentaire

 

Chers frères et sœurs, bonjour !

L’Évangile de ce dimanche (Mt 16,13-20) nous rapporte un passage clef du chemin de Jésus avec ses disciples: le moment où il veut vérifier à quel point en est leur foi en Lui. D’abord, il veut savoir ce que les gens pensent de Lui ; et les gens pensent que Jésus est un prophète, ce qui est vrai, mais ils ne saisissent pas le centre de sa personne, ils ne saisissent pas le centre de sa mission. Ensuite, il pose à ses disciples la question qui lui tient le plus à cœur, c’est-à-dire qu’il leur demande directement : « Mais pour vous, qui suis-je ? » (v.15) Et avec ce « mais », Jésus distingue nettement les apôtres de la foule, comme pour dire : mais vous, qui êtes avec moi tous les jours, et qui me connaissez de près, qu’avez-vous saisi de plus ? Le Maître attend des siens une réponse élevée et différente de celles de l’opinion publique. Et, en effet, une telle réponse jaillit précisément du cœur de Simon appelé Pierre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (v.16). Simon Pierre retrouve sur ses lèvres des paroles plus grandes que lui, des paroles qui ne viennent pas de ses capacités naturelles. Peut-être n’avait-il pas fréquenté l’école primaire et il est capable de dire ces paroles, plus fortes que lui ! Mais elles sont inspirées par le Père céleste (cf. v.17), qui révèle au premier des Douze la vraie identité de Jésus : Il est le Messie, le Fils envoyé par Dieu pour sauver l’humanité. Et de cette réponse, Jésus comprend que, grâce à la foi donnée par le Père, il y a un fondement solide sur lequel il peut construire sa communauté, son Église. C’est pourquoi il dit à Simon : « Tu es Pierre — c’est-à-dire pierre, roc — et sur cette pierre je bâtirai mon Église » (v.18).

Aujourd’hui, avec nous aussi, Jésus veut continuer à construire son Église, cette maison aux fondements solides, mais où ne manquent pas les fissures et qui a constamment besoin d’être réparée. Toujours. L’Église a toujours besoin d’être réformée, réparée. Nous ne nous considérons certainement pas comme des rocs, mais seulement comme de petites pierres. Cependant aucune petite pierre n’est inutile, au contraire, entre les mains de Jésus, la plus petite pierre devient précieuse, parce qu’Il la prend, la regarde avec une grande tendresse, la travaille avec son Esprit, et la place au bon endroit, auquel il a pensé depuis toujours, et où elle peut être utile à toute la construction. Chacun de nous est une petite pierre, mais entre les mains de Jésus, chacun participe à l’édification de l’Église. Et nous tous, bien que petits, devenons des « pierres vivantes » parce que quand Jésus prend sa pierre dans sa main, il la fait sienne, la rend vivante, pleine de vie, pleine de vie de d’Esprit Saint, pleine de vie de son amour, et ainsi, nous avons une place et une mission dans l’Église : elle est une communauté de vie, faite de tant de pierres, toutes différentes, qui forment un unique édifice, sous le signe de la fraternité et de la communion.

En outre, l’Évangile d’aujourd’hui nous rappelle que Jésus a aussi voulu pour son Église un centre visible de communion, dans Pierre — lui non plus n’est pas une grande pierre, c’est une petite pierre, mais prise par Jésus elle devient centre de communion —, dans Pierre et dans ceux qui lui allaient lui succéder dans la même responsabilité primatiale, qui, dès les origines, ont été identifiés avec les évêques de Rome, la ville où Pierre et Paul ont rendu leur témoignage par le sang.

Confions-nous à Marie, Reine des apôtres, Mère de l’Église. Elle se trouvait au Cénacle, à côté de Pierre, quand l’Esprit est descendu sur les apôtres et les a poussés à sortir, à annoncer à tous que Jésus est le Seigneur. Puisse notre Mère nous soutenir aujourd’hui et nous accompagner de son intercession, afin que nous réalisions pleinement cette unité et cette communion pour lesquelles le Christ et les apôtres ont prié et ont donné leur vie.

© Libreria Editrice Vaticana – 2017