Pko 25.12.2018

Eglise cath papeete 1Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°66/2018

Mardi 25 décembre 2018 – Solennité de la Nativité du Seigneur – Année C

Humeurs…

2018… Un Noël de mendiant !

Noël… Dieu fait homme… Dieu qui en Jésus « ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes » (Ph 2,6).

Contemplons, en cette nuit de la Nativité, celui qui humilié par les hommes, s’abaisse pour nous élever ! Car « devant la mangeoire, nous comprenons que ce ne sont pas les biens qui entretiennent la vie, mais l’amour ; non pas la voracité, mais la charité ; non pas l’abondance à exhiber, mais la simplicité à préserver »

Noël n’a de sens que s’il se vit dans la simplicité, dans la pauvreté ! Trop longtemps, nous nous sommes laissés spoliés la fête de Noël par les marchands du Temple… au point parfois de culpabiliser lorsque nous nous refusions de céder au repas gargantuesque et aux avalanches de cadeaux en tous genres !

Noël ne peut être qu’un Noël de pauvres… de mendiants… loin des repas et des cadeaux…

En ce Noël 2018, nous voyons affluer les dons « pour les pauvres »… nous ne pouvons que nous en réjouir… mais cela ne suffit pas !

Dieu n’a pas partagé son bien avec les pauvres… Dieu a partagé leur pauvreté en s’y incarnant.

Je vous souhaite… je nous souhaite un Noël de mendiants !

Joyeux Noël à tous !

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Crèche réaliser par la communauté de Rapa-iti lors de l’exposition à l’Assemblé de Polynésie en novembre 2018 et qui reçut le premier prix !

Laissez-moi vous dire…

24 décembre : Nuit de Noël

Minuit, chrétiens ! C’est l’heure solennelle…

Chaque seconde, en France, il se vend en moyenne 7 à 8 jouets, soit plus de 243 millions de jouets par an pour 3,4 milliards d'euros dont un tiers (1/3) à Noel. [Source : planetoscope.com]

Parmi les jouets les plus vendus, on trouve les jeux à l'effigie de super-héros - sans publicité - on peut citer : Avengers, Spiderman, Batman, Wonder Woman, Hulk, Yokai Watch ou encore Thunderbirds. Les enfants de famille aisée se ruent sur le casque de réalité augmentée Iron Man qui leur permet de se mettre dans la peau de leur super-héros préféré ! Parmi les autres tendances phares de l'année 2018-2019, on note de plus en plus de jouets connectés, et ceci dès le plus jeune âge ! [Source : journaldesfemmes.fr/]

Au fenua les Pokémon reviennent en force avec des incroyables coffrets de cartes indémodables. Et pour les grands adolescents – et les adultes ! – les drones sont bien placés dans les ventes pour Noël.

Ceci m’amène à repenser aux Noëls de mon enfance. Mon père – qui n’était pas un pilier d’église – aimait assister à la messe de minuit, pour deux raisons : d’abord pour remercier la religieuse, Sœur Marie-Philomène de l’Enfant-Jésus, qui a soutenu mes parents lors du décès de mes deux petits frères (12 mois et 9 mois !) ; ensuite pour entendre le célèbre cantique : « Minuit, Chrétiens ! »1. Au retour on avait la joie de découvrir les cadeaux du « Père Noël », immanquablement : deux oranges et un petit paquet de bonbons… C’était la richesse du « Père Noël » de tous les pauvres de notre quartier. Pour les jouets : on se contentait des petites buchettes de bois blanc pour allumer le feu [ancêtres des « KAPLA » ?!], elles nous permettaient de réaliser toutes sortes de constructions. Pour les vrais jouets : avec les copains on rêvait devant les vitrines animées des grands magasins, et cela suffisait à enchanter nos nuits.

À l’image de la Sainte Famille, l’important n’est-il pas d’avoir un père et une mère aimant pareillement chacun(e) de leurs enfants ? Difficile à faire comprendre à nos jeunes d’aujourd’hui…

Heureuse et Sainte nuit de Noël… avec ou sans cadeau(x).

Dominique Soupé

1   Suggestion : il est intéressant de relire ce « vieux » cantique du XIXème écrit par un provençal originaire de Roquemaure (Gard) :

Minuit, chrétiens ! c’est l’heure solennelle,

Où l’homme Dieu descendit jusqu’à nous

Pour effacer la tache originelle,

Et de son Père arrêter le courroux.

Le monde entier tressaille d’espérance,

À cette nuit qui lui donne un Sauveur.

Peuple à genoux, attends ta délivrance,

Noël, Noël, voici le Rédempteur,

Noël, Noël, voici le Rédempteur.

De notre foi que la lumière ardente

Nous guide tous au berceau de l’enfant,

Comme autrefois une étoile brillante

Y conduisit les chefs de l’Orient.

Le Roi des rois naît dans une humble crèche ;

Puissants du jour, fiers de votre grandeur,

À votre orgueil c’est de là qu’un Dieu prêche :

Courbez, courbez vos fronts devant le Rédempteur,

Courbez vos fronts devant le Rédempteur.

Le Rédempteur a brisé toute entrave

La terre est libre et le ciel est ouvert.

Il voit un frère où n’était qu’un esclave :

L’amour unit ceux qu’enchaînait le fer !

Qui lui dira notre reconnaissance ?

C’est pour nous tous qu’il naît, qu’il souffre et meurt :

Peuple, debout ! Chante ta délivrance,

Noël, Noël, chantons le Rédempteur,

Noël, Noël, chantons le Rédempteur.

Écrit aux alentours de 1843 par Placide Cappeaumis en musique par Adolphe Adam en 1847.

[À noter que certains prêtres étaient “chagrinés” par l’expression : « …et de son Père arrêter le courroux », ce passage pouvait offenser le Seigneur du fait que Dieu n'a pas de courroux !

© Cathédrale – 2018

Vœux de Mgr Jean-Pierre COTTANCEAU…

Vœux de Noël et de Sainte Année

Grandir en humanité

Frères et sœurs, c’est avec plaisir que je m’adresse à vous pour vous souhaiter un Joyeux noël et vous présenter mes meilleurs vœux de bonne et heureuse année 2019.

Mais que peuvent signifier ces vœux de Noël pour tous ceux et celles confrontés à la maladie, à la précarité, à la solitude, à la peur du lendemain et au rejet ? Quelle pourrait être cette bonne nouvelle qui engendre les lumières, guirlandes et ce parfum de fête qui flotte dans nos rues et jusque dans les yeux des enfants ? Ce n’est rien d’autre que la naissance d’un enfant dans une étable, né dans une famille humble et modeste … Accueillir cet enfant avec Marie et Joseph, c’est accueillir la vie dans sa forme la plus simple et la plus belle, cette vie qui fait irruption sans aucune considération de richesse, de classe sociale, de race ou de niveau intellectuel … La naissance d’un enfant est en effet un moment privilégié dans une famille, car elle ouvre un avenir, elle est une victoire de la vie, elle est (ou elle devrait être) un fruit de l’amour.

La naissance du Christ Jésus dans la crèche de Bethleem est tout cela … mais elle est plus encore : elle donne à chacun et chacune d’entre nous une dignité incomparable puisque Dieu se fait homme. Désormais, même le plus petit, le plus pauvre, le dernier se voit revêtu de cette dignité qui trouve son origine dans l’amour que Dieu porte à notre humanité. Désormais, tout ce qui touche et concerne l’humain touche et concerne Dieu ! Et blesser l’Homme, c’est blesser Dieu !

Cette naissance nous dit enfin où chercher Dieu : ni dans de riches palais, de luxueuses maisons, ni en des lieux inaccessibles aux pauvres et aux humbles, mais dans une crèche où Dieu se fait petit, faible, fragile comme l’est un nouveau-né … un lieu où les bergers peuvent le trouver simplement car il est venu habiter chez eux …

C’est donc avec cette conviction de foi que je vous présente mes souhaits de joyeux noël et de bonne et heureuse année 2019. Ma pensée va vers vos familles, mais également vers ceux qui sont malades, vers ceux qui sont seuls, vers ceux qui sont loin de leur foyer en ce temps de fête familiale, vers ceux qui souffrent de la misère économique et humaine, qui vivent des situations de division dans leur foyer … vers ceux et celles qui sont en prison.

À tous, je souhaite de grandir en humanité, je souhaite beaucoup d’amour à donner, à recevoir et à partager. Je demande au Seigneur d’écarter de nos cœurs tout ce qui avilit et détruit et de faire grandir ce qu’il y a de beau en chacun. Je lui demande aussi pour vous la santé du corps, de l’esprit. Je lui demande enfin de faire germer en chacun les semences de paix, de réconciliation et de solidarité qui nous permettront de bâtir ensemble cette année 2019 encore plus belle et plus fraternelle.

Que la naissance du Christ Jésus redonne à chacun espérance, et réveille en nous le désir et la force pour servir et aimer, afin que Noël ne soit pas seulement un jour dans l’année, mais chaque fois que nous ouvrons nos mains et nos cœurs pour partager cette joie que le Seigneur fait briller en nous.

Joyeux Noël et Bonne, heureuse et sainte année à tous !

+ Monseigneur Jean-Pierre COTTANCEAU,

Archevêque de Papeete

© Archidiocèse de Papeete - 2018

Conte de Noël…

Les deux sapins de la Sainte Aurélie…

Le soir de Noël, un enfant pauvre allait de porte en porte, il frappait et disait : 

« Voulez-vous mes deux petits sapins ? Vous y attacherez des boules d’or et des étoiles de papier… C’est bien amusant pour les enfants… »

Mais à chaque maison, les gens lui répondaient :

« Il est trop tard, il y a longtemps que les arbres de Noël sont achetés !... Passe l’an prochain ! »

Et l’enfant se désespérait, car il n’y avait pas de pain chez lui. Son père était très vieux, sa mère malade, et les deux autres enfants au berceau. Après bien des demandes et bien des réponses indifférentes ou dures, il se trouva devant la maison d’Eidel le jardinier. A-t-on jamais eu l’idée de vendre des sapins à l’homme dont c’est le métier de les faire pousser ? Le pauvre innocent frappa et la grosse voix d’Eidel lui répondit :

« Qui frappe à pareille heure ? »

L’enfant n’osa répondre.

« Mais qui frappe chez moi quand je veux être en paix ? » reprit Eidel et ses sabots claquèrent sur le plancher. Il ouvrit sa grande porte, et l’humble quémandeur aperçut un arbre magnifique, tout rutilant, tout chargé de richesses et qui jeta sa vive lueur jusque dans la rue déserte. Et trois enfants assis près d’un bon feu regardaient au foyer la dinde de Noël qui cuisait dans son jus.

« Qu’est-ce que tu veux, petit ? demanda Eidel, tu as l’air d’un béjaune avec tes deux sapinots rabougris ! » L’enfant se tenait tout triste parce qu’il comprenait que sa dernière espérance s’était envolée.

« Le froid entre chez moi, reprit le jardinier. Parle vite ou je te ferme la porte au nez ! »

C’était un homme qui avait le ton bourru. Autant dire qu’il était bon. Il regarda le déshérité qui avait l’âge de ses enfants, et qui, pieds nus dans la neige, n’osait même pas lever les yeux. Il parla d’une voix radoucie.

« Que veux-tu ? Je te donnerai suivant mon possible… »

« Vendre mes deux sapins, pour Noël… mais le vôtre est bien plus beau ».

« N’importe ! dit Eidel. Donne-les moi ! »

Et il alla quérir une pièce d’or qu’il gardait en réserve dans un tiroir. Ce que voyant, le pauvre petit ne pouvait en croire ses yeux, et pensait que l’homme se moquait de lui.

Mais les enfants lui donnèrent chacun une cuisse de la dinde, et la mère, dans un bol, une part de bonne soupe chaude, et le chien aussi fut aimable pour lui et lécha bonnement ses mains rougies par le froid. Alors, il osa croire à sa joie, il remercia du mieux qu’il put et rentra chez lui, heureux comme une alouette au printemps.

Cependant Eidel, qui n’aimait pas les attendrissements, jeta dans un coin les deux sapins du pauvre, et se mit à table.

Le repas fut bon, la dinde bien cuite, le vin bien frais, puis chacun s’en fut se coucher.

Le lendemain matin, jour de Noël, les enfants d’Eidel se battaient dans la neige, en attendant l’heure de la messe, ils prirent les deux arbustes et par jeu, pour imiter leur père, s’en furent les planter derrière l’église.

Et les cloches sonnèrent. La foule prit place dans la nef et les bas-côtés. Les chants célébraient la gloire du Sauveur des hommes, et le jardinier se disait qu’on n’est jamais trop bon pour les enfants pauvres, puisqu’ils sont les frères véritables de celui qui est né dans une étable parce qu’on ne voulait de lui nulle part.

Mais quand la messe fut dite, quand les cierges furent éteints, l’encens dissipé, l’église déserte, la foule sur la place cria au prodige.

Deux sapins hauts comme le clocher, aux troncs tout droits comme des mâts de navire, aux branches vastes et lourdes, s’élevaient au ciel.

Et dans l’air pur de Noël, les oiseaux chantaient la gloire des charitables : de ceux qui aiment leur prochain.

Et l’on vit la colombe d’un vitrail s’animer soudain, voler au faîte de chaque sapin, battre les ailes par trois fois et revenir prendre sa place au vitrail chrétien.

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Noël des pauvres

Les bois frissonnent dans la nuit d'hiver

Les cloches sonnent par tout l'univers

Car Noël bientôt va paraître

C'est la nuit où l'Enfant-Dieu va naître

Et dans les rêves des petits enfants

Brillent sans trève de jolis présents

Mais les réveils souvent sont trompeurs

Au lieu des rires, on voit des pleurs.

Quand au matin de Noël ils s'éveillent

Les petits riches contemplent leurs bas

Ils y trouvent mille merveilles

Les petits pauvres n'en trouvent pas

Car leurs bas sont percés de grands trous

Par où sont passés tous leurs joujoux.

Les bois frissonnent dans la nuit d'hiver

Les cloches sonnent par tout l'univers

Car Noël bientôt va paraître

C'est la nuit où l'Enfant-Dieu va naître

Et dans les rêves des petits enfants

Brillent sans trève de jolis présents

Mais les réveils souvent sont trompeurs

Au lieu des rires, on voit des pleurs.

© Contes.biz – 2018

Commentaire des lectures du dimanche

 

Joseph, avec Marie son épouse, monta jusqu’à « la ville de David appelée Bethléem » (Lc 2,4). Cette nuit, nous aussi, nous montons jusqu’à Bethléem pour y découvrir le mystère de Noël.

1. Bethléem : le nom signifie maison du pain. Dans cette “maison”, le Seigneur donne aujourd’hui rendez-vous à l’humanité. Il sait que nous avons besoin de nourriture pour vivre. Mais il sait aussi que les aliments du monde ne rassasient pas le cœur. Dans l’Écriture, le péché originel de l’humanité est associé précisément au manger : « Elle prit de son fruit, et en mangea » dit le livre de la Genèse (3,6). Elle prit et elle mangea. L’homme est devenu avide et vorace. Avoir, amasser des choses semble pour beaucoup de personnes le sens de la vie. Une insatiable voracité traverse l’histoire humaine, jusqu’aux paradoxes d’aujourd’hui ; ainsi quelques-uns se livrent à des banquets tandis que beaucoup d’autres n’ont pas de pain pour vivre.

Bethléem, c’est le tournant pour changer le cours de l’histoire. Là, Dieu, dans la maison du pain, naît dans une mangeoire. Comme pour nous dire : me voici tout à vous, comme votre nourriture. Il ne prend pas, il offre à manger : il ne donne pas quelque chose, mais lui-même. À Bethléem, nous découvrons que Dieu n’est pas quelqu’un qui prend la vie mais celui qui donne la vie. À l’homme, habitué depuis les origines à prendre et à manger, Jésus commence à dire : « Prenez, mangez: ceci est mon corps » (Mt 26,26). Le petit corps de l’Enfant de Bethléem lance un nouveau modèle de vie : non pas dévorer ni accaparer, mais partager et donner. Dieu se fait petit pour être notre nourriture. En nous nourrissant de lui, Pain de vie, nous pouvons renaître dans l’amour et rompre la spirale de l’avidité et de la voracité. De la “maison du pain”, Jésus ramène l’homme à la maison, pour qu’il devienne un familier de son Dieu et frère de son prochain. Devant la mangeoire, nous comprenons que ce ne sont pas les biens qui entretiennent la vie, mais l’amour ; non pas la voracité, mais la charité ; non pas l’abondance à exhiber, mais la simplicité à préserver.

Le Seigneur sait que nous avons besoin chaque jour de nous nourrir. C’est pourquoi il s’est offert à nous chaque jour de sa vie, depuis la mangeoire de Bethléem jusqu’au cénacle de Jérusalem. Et aujourd’hui encore sur l’autel, il se fait Pain rompu pour nous : il frappe à notre porte pour entrer et prendre son repas avec nous (cf. Ap 3,20). À Noël, nous recevons sur terre Jésus, Pain du ciel : c’est une nourriture qui ne périme jamais, mais qui nous fait savourer déjà la vie éternelle.

À Bethléem, nous découvrons que la vie de Dieu court dans les veines de l’humanité. Si nous l’accueillons, l’histoire change à commencer par chacun d’entre nous. En effet, quand Jésus change le cœur, le centre de la vie n’est plus mon moi affamé et égoïste, mais lui qui naît et vit par amour. Appelés cette nuit à sortir de Bethléem, maison du pain, demandons-nous : quelle est la nourriture de ma vie, dont je ne peux me passer ? Est-ce le Seigneur ou quelque chose d’autre ? Puis, en entrant dans la grotte, flairant dans la tendre pauvreté de l’Enfant un nouveau parfum de vie, celle de la simplicité, demandons-nous : ai-je vraiment besoin de beaucoup de choses, de recettes compliquées pour vivre ? Est-ce j’arrive à me passer de tant de garnitures superflues, pour mener une vie plus simple ? À Bethléem, à côté de Jésus, nous voyons des gens qui ont marché, comme Marie, Joseph et les pasteurs. Jésus est le Pain de la route. Il n’aime pas des digestions paresseuses, longues et sédentaires, mais il demande qu’on se lève en hâte de table pour servir, comme des pains rompus pour les autres. Demandons-nous : à Noël, est-ce je partage mon pain avec celui qui n’en a pas ?

2. Après Bethléem maison du pain, réfléchissons sur Bethléem maison de David. Là, David, jeune garçon, faisait le pasteur et à ce titre il a été choisi par Dieu, pour être pasteur et guide de son peuple. À Noël, dans la ville de David, pour accueillir Jésus, il y a précisément les pasteurs. Dans cette nuit « ils furent saisis d’une grande crainte, nous dit l’Évangile » (Lc 2,9), mais l’ange leur dit : « Ne craignez pas » (v.10). Dans l’Évangile revient tant de fois ce ne craignez pas : c’est comme un refrain de Dieu à la recherche de l’homme. En effet, l’homme depuis les origines, encore à cause du péché, a peur de Dieu : « j’ai eu peur […], et je me suis caché » (Gn 3,10), a dit Adam après le péché. Bethléem est le remède à la peur, parce que malgré les “non” de l’homme, là Dieu dit pour toujours “oui” : pour toujours il sera Dieu-avec-nous. Et pour que sa présence n’inspire pas la peur, il s’est fait un tendre enfant. Ne craignez pas : cela n’est pas dit à des saints, mais à des pasteurs, des gens simples qui en même temps ne se distinguent pas par la finesse ni par la dévotion. Le Fils de David naît parmi les pasteurs pour nous dire que personne n’est jamais seul ; nous avons un Pasteur qui surmonte nos peurs et nous aime tous, sans exceptions.

Les pasteurs de Bethléem nous disent aussi comment aller à la rencontre du Seigneur. Ils veillent dans la nuit : ils ne dorment pas, mais font ce que Jésus demandera à plusieurs reprises : veiller (cf. Mt 25,13 ; Mc 13,35 ; Lc 21,36). Ils restent éveillés, attendent éveillés dans l’obscurité ; et Dieu «les enveloppa de sa lumière» (Lc 2,9). Cela vaut aussi pour nous. Notre vie peut être une attente, qui également dans les nuits des problèmes s’en remet au Seigneur et le désire ; alors elle recevra sa lumière. Ou bien une prétention, où ne comptent que les forces et les moyens propres : mais dans ce cas, le cœur reste fermé à la lumière de Dieu. Le Seigneur aime être attendu et on ne peut pas l’attendre dans le divan, en dormant. En effet, les pasteurs se déplacent : « ils se hâtèrent » dit le texte (v.16). Ils ne restent pas sur place comme celui qui sent qu’il est arrivé et n’a besoin de rien, mais ils s’en vont ; laissant le troupeau sans surveillance, ils prennent des risques pour Dieu. Et après avoir vu Jésus, sans même être des experts de discours, ils vont l’annoncer, à telle enseigne que « tous ceux qui entendirent s’étonnaient de ce que leurs racontaient les bergers » (v.18).

Attendre éveillé, aller, risquer, raconter la beauté : ce sont des gestes d’amour. Le bon Pasteur, qui à Noël vient donner la vie aux brebis, à Pâques adressera à Pierre et, à travers lui à nous tous, la question finale : « M’aimes-tu » (Jn 21,15). C’est de la réponse que dépendra l’avenir du troupeau. Cette nuit, nous sommes appelés à répondre, à lui dire nous aussi : “Je t’aime”. La réponse de chacun est essentielle pour le troupeau tout entier.

« Allons jusqu’à Bethléem » (Lc 2,15) : c’est ce qu’ont dit et fait les pasteurs. Nous aussi, Seigneur, nous voulons venir à Bethléem. Aujourd’hui également la route est ascendante : on doit dépasser le sommet de l’égoïsme, il ne faut pas glisser dans les ravins de la mondanité et du consumérisme. Je veux arriver à Bethléem, Seigneur, parce que c’est là que tu m’attends. Et me rendre compte que toi, déposé dans une mangeoire, tu es le pain de ma vie. J’ai besoin du parfum tendre de ton amour pour être, à mon tour, pain rompu pour le monde. Prends-moi sur tes épaules, bon Pasteur : aimé par toi, je pourrai moi aussi aimer et prendre mes frères par la main. Alors, ce sera Noël quand je pourrai te dire : “Seigneur, tu sais tout, tu sais que je t’aime” (cf. Jn 21,17).

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