Pko 21.07.2019
Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°36/2019
Dimanche 21 juillet 2019 – 15ème Dimanche du Temps ordinaire – Année C
Humeurs…
Le syndrome du ventilateur !
La particularité du ventilateur est qu’il brasse de l’air chaud en donnant une sensation de fraîcheur alors qu’il contribue à l’augmentation de la chaleur produite par son moteur !
Cette semaine le Gouvernement a planché sur la pauvreté : « L’objectif du séminaire est donc, d’une part de vérifier la pertinence de toutes les aides dispensées, mais aussi de présenter le travail de chacun des ministères dans la lutte contre les précarités et de faire de nouvelles propositions. » (Radio 1).
Dans le P.K.0 n°9 du 24 février de cette année, nous vous relations le parcours du combattant de cette jeune femme, mère de deux enfants, originaire d’une île des Tuamotu, en situation de grande précarité et à la rue désirant retourner dans, son île avec ses deux enfants : 2016 : dossier OPH… mai 2017 : avis favorable de la commission OPH… mai 2018 : attribution du Fare OPH… suivi de la saga au sujet de la quote-part à verser par la dite jeune femme (277 196 xfp) versée finalement par l’Accueil Te Vai-ete le 28 mai…
Le 4 juin nous recevons ce courriel : « L'autorisation de travaux immobiliers (PC) n°19-546-3 vient d'être accordée à Madame XXX xxx le 03 juin 2019 pour les travaux de construction d'une maison d'habitation (OPH) sur la parcelle … L'OPH dès à présent lance la programmation du chantier (colisage du kit fare, acheminement port, embarquement, livraison sur site, etc.) Je leur laisse le soin d'informer l'attributaire de l’avancement de cette étape ».
On demande à notre jeune femme, désormais enceinte, de s’activer pour un départ dans son île le 15 juillet… Elle court dans les différents services, remplit les documents et autres… nous y voilà enfin !!!
Eh bien non ! La semaine dernière s’enquérant de la situation, on lui apprend tout bonnement que le départ est reporté de deux mois !!!
Des discours dithyrambiques à l’Assemblée de Polynésie au concret… un abîme nous sépare !
Notre jeune maman dormira encore au moins pour deux mois sur ses cartons… pendant que l’on planche sur « la pauvreté en Polynésie et la pertinence des aides dispensées » !!!
« Vous le savez, notre programme a axé sa première préoccupation sur le volet social, et notamment sur l’aide aux plus démunis. » (Discours du 6 décembre 2018 à l’Assemblée de Polynésie)
Qu’importe l’axe d’un ventilateur… il continuera toujours a brasser de l’air chaud, nous donnant l’illusion de la fraicheur… tout en continuant à générer de la chaleur… ici il génère de l’injustice !!!
Laissez-moi vous dire…
Dimanche 21 juillet : Clôture des JDJ de Tahiti
« Christus vivit ! » « Christ est vivant ! »
Tout ce qu’il touche devient jeune… se remplit de vie
Les Journées Diocésaines de la Jeunesse s’achèvent au Centre Tibériade à Miti Rapa. Près de 2 000 jeunes venus des îles ont célébré Jésus Eucharistie autour de notre archevêque et approfondi le thème de ces journées :
« Je suis la servante du Seigneur, que tout m’advienne selon ta parole. » (Luc 1,38)
Il semble intéressant de reprendre certains passages de l’Exhortation Apostolique du Pape François « CHRISTUS VIVIT ! » publiée le 25 mars dernier et plus spécialement destinée aux jeunes. Cette Lettre est longue (9 chapitres, 299 paragraphes), sans doute beaucoup de jeunes ne l’ont pas lue, mais le Pape François l’a écrite avec son cœur, y mettant tout son amour pour les jeunes et toute sa confiance en eux.
D’emblée François donne le ton et s’adresse à chaque jeune comme un père peut s’adresser à son enfant : « Le Christ vit et il te veut vivant ! Il est en toi, il est avec toi et jamais ne t’abandonne. Tu as beau t’éloigner, le Ressuscité est là, t’appelant et t’attendant pour recommencer. Quand tu te sens vieilli par la tristesse, les rancœurs, les peurs, les doutes ou les échecs, il sera toujours là pour te redonner force et espérance. » [Exhortation apostolique Christus Vivit (CV) nn.1-2] Ce document rempli d’espérance et d’enseignement fait suite au Synode des Jeunes d’octobre 2018. La parole du Pape est « chargée de mille voix » de jeunes croyants et non croyants du monde entier qui ont contribué au questionnement du Saint Père.
Il commence par rappeler des passages de l’ancien Testament où Dieu s’adresse à des jeunes : Joseph, Gédéon, Samuel, le jeune David choisi comme roi, Salomon tout étonné d’être appelé qui demande la sagesse, la jeune Ruth… Puis, bien sûr, il cite de nombreux passages où Jésus rencontre ou parle des jeunes. [CV, nn.5-21]
François fait remarquer que le Christ est toujours jeune : « Il est très important de contempler le Jésus jeune que nous montrent les Évangiles, car Il a été vraiment l’un de vous, et en Lui on peut reconnaître beaucoup de caractéristiques des cœurs jeunes. (…) le Christ lui-même est pour nous la grande lumière d’espérance et la boussole dans notre nuit, car il est “l'étoile radieuse du matin” (Ap 22,16). » [CV, nn.31.33.] Il invite aussi les jeunes à prier pour que l’Église reste jeune également : « Demandons au Seigneur de délivrer l’Église des personnes qui veulent la faire vieillir, la scléroser dans le passé, la figer, l’immobiliser. » [CV, n.35] C’est aussi pour le Pape une occasion d’inviter les responsables de l’Église à être plus humbles, davantage à l’écoute : « Une Église sur la défensive, qui n’a plus l’humilité, qui cesse d’écouter, qui ne permet pas qu’on l’interpelle, perd la jeunesse et devient un musée. Comment pourra-t-elle accueillir de cette manière les rêves de ces jeunes ? » [CV, n.41]
Les JDJ de Tahiti invitent les jeunes à calquer leur vie et leurs choix sur ceux de la Vierge Marie. De même le Saint Père rappelle que « la force du “oui” de Marie » au plan de Dieu fait d’elle « le grand modèle pour une Église jeune ». [CV, nn.43.44] « Les jeunes saints qui ont offert leur vie pour le Christ » « montrent de quoi sont capables les jeunes quand ils s’ouvrent à la rencontre avec le Christ ». [CV, n.49]
François consacre tout un chapitre pour répondre à cette question : « Comment sont les jeunes aujourd’hui, qu’est-ce qui leur arrive à présent ? » Il distingue ce qui est positif chez les jeunes, tenant compte de leurs origines diverses, des difficultés, des souffrances qu’ils rencontrent dans un monde en crise [trois grands thèmes sont abordés : le numérique, les migrants, les abus]. Il n’occulte pas les manquements de l’Église à leur égard, ni les faiblesses et les tentations auxquelles cèdent les jeunes. François pointe une difficulté majeure pour la jeunesse confrontée au monde numérique : « La vie nouvelle et débordante des jeunes, qui les pousse à chercher et à affirmer leur personnalité, est confrontée aujourd’hui à un nouveau défi : interagir avec un monde réel et virtuel dans lequel ils pénètrent seuls comme dans un continent global inconnu. (…) C’est pourquoi il faut qu’ils parviennent à passer du contact virtuel à une bonne et saine communication. » S’adressant à chaque jeune, le Pape rappelle : « … tu as besoin de savoir une chose fondamentale : la jeunesse, ce n’est pas seulement la recherche de plaisirs passagers et de succès superficiels. Pour que la jeunesse atteigne sa finalité dans le parcours de ta vie, elle doit être un temps de don généreux, d’offrande sincère, de sacrifice qui coûtent mais qui nous rendent féconds... Jeunes (!), unis, vous avez une force admirable. Quand vous vous enthousiasmez pour une vie communautaire, vous êtes capables de grands sacrifices pour autrui et pour la communauté. Par contre, l’isolement vous affaiblit et vous expose aux pires maux de notre temps. » [CV ch.3, nn. 64-110]
Dans le chapitre suivant [CV ch.4] François veut rappeler aux jeunes trois grandes vérités : la première, « Dieu t’aime. N’en doute jamais, quoiqu’il arrive dans ta vie » ; la deuxième, « le Christ, par amour, s’est livré jusqu’au bout pour te sauver » ; la troisième, « le Christ vit ! … ton Sauveur vit !... ne l’oublie pas. » Puis il invite le jeune à se laisser guider par l’Esprit Saint, et alors « tombe amoureux … de Dieu ! ».
Dans le chapitre 5 le Saint Père s’adresse librement à chaque jeune en réfléchissant avec lui sur « les différents chemins de jeunesse » possibles, le temps de la jeunesse étant celui « des rêves et des choix ». Si les jeunes pouvaient lire ce chapitre en petites équipes, ils seraient étonnés de la qualité du dialogue proposé par notre Pape.
Les quatre derniers chapitres constituent une bonne base de réflexion pour tous les responsables en pastorale : « les racines » [CV ch.6] ; « la pastorale des jeunes » [CV ch.8] ; « la vocation » [CV ch.8] ; « le discernement » [CV ch.9]
En guise de conclusion le Saint Père reprend un souhait déjà formulé en rencontrant les jeunes italiens au Circo Massimo de Rome, le 11 août 2018 : « Chers jeunes, je serai heureux en vous voyant courir plus vite qu’en vous voyant lents et peureux. Courez, “attirés par ce Visage tant aimé, que nous adorons dans la sainte Eucharistie et que nous reconnaissons dans la chair de notre frère qui souffre. Que l’Esprit Saint vous pousse dans cette course en avant. L’Église a besoin de votre élan, de vos intuitions, de votre foi. Nous en avons besoin ! Et quand vous arriverez là où nous ne sommes pas encore arrivés, ayez la patience de nous attendre” ». [CV, n.299]
Dominique Soupé
© Cathédrale de Papeete – 2019
En marge de l’actualité…
Heiva
Depuis plusieurs jours, si peu que l’on se promène à Papeete du côté du front de mer en soirée, résonnent à nos oreilles les chants et les danses du Heiva. Pour ceux et celles qui ne disposent pas de places, les chaines de TV permettent de communier à l’évènement que constitue chaque prestation. Mais quel que soit l’endroit d’où nous pouvons suivre le Heiva, que ce temps fort de la culture Maohi soit pour nous l’occasion de remercier Dieu pour tant de beauté et de grâce qui se déploient sous nos yeux. Me vient à l’esprit cette phrase du livre de la Genèse : « Et Dieu vit que cela était bon ». Remercier Dieu pour ce corps capable de danser, de rythmer avec grâce les battements du cœur au son du to’ere et à l’unisson des autres danseurs, remercier aussi pour cette harmonie entre nature et culture qui permet aux chanteurs et danseurs de tirer pour leurs costumes le meilleur parti des trésors que réserve la nature. Le Heiva est également l’occasion de réveiller et de garder vivante par la richesse de la chorégraphie, par les chants, la richesse d’une tradition culturelle unique. Quand ce patrimoine rassemble les personnes – tahitiens et visiteurs venant de tous horizons - et les attire vers ce qu’il y a de plus beau et de meilleur, il contribue à faire grandir l’humanité. Croyons que l’Esprit Saint, à l’œuvre au cœur de toute personne comme le rappelle le Concile Vatican II, n’est pas étranger à cette croissance et qu’il nous précède en nous invitant à donner le meilleur, le plus beau de ce dont nous sommes capables et ainsi de rendre grâce au Créateur. Voilà qui pourra nous aider à nous réjouir de ce Heiva, tant il est vrai que le beau est un excellent chemin pour nous attirer vers Dieu et pour faire naitre notre louange !
« Louez Dieu par l’éclat du cor,
Louez-le par la harpe et la cithare,
Louez-le par la danse et le tambour,
Louez-le par les cordes et les flutes…
Que tout ce qui respire loue le Seigneur ! »
(Ps 150)
+ Mgr Jean Pierre COTTANCEAU
© Archidiocèse de Papeete - 2019
Éthique médicale
L’Apair Apurad
Une association au service des patients polynésiens, un conseil d’administration de personnalités bénévoles, un personnel remarquable aux allures de dévouement quotidien.
Après 20 années de collaboration extrêmement proche, l’APAIR (au service du soin à domicile et surtout des insuffisants respiratoires) et l’APURAD (spécialisée dans le traitement des maladies des reins) ont décidé de fusionner pour devenir l’APAIR APURAD le 1er juillet 2019. Cette fusion est l’occasion de mettre à l’honneur près de 150 salariés qui œuvrent depuis plus de 20 ans dans une profession qui est plus qu’un travail : une véritable vocation où le don de soi est une réalité de chaque jour.
Cette fusion associative permet non seulement la mise en commun d’un savoir-faire acquis depuis plus de 20 ans mais aussi le rapprochement d’équipes dévouées travaillant en parfaite collaboration depuis toutes ces années au service des patients atteints de maladies respiratoires et rénales.
Historique de l’APURAD
Fondée en septembre 1997 par Dr Alain FOURNIER, visionnaire au service de la santé en Polynésie depuis 30 ans, l'APURAD était une association à but non lucratif régie par la loi du 1er juillet 1901. Alain FOURNIER sera fait chevalier de l’Ordre national du mérite en 2007 pour toutes ses actions au service des malades des reins en Polynésie.
Grâce à la mise en place de la Protection Sociale Généralisée (PSG) en 1995, elle peut s’adresser à tous les régimes et débute son activité en janvier 1998.
Historique de l’APAIR
Crée en 1997, par le Dr René CHANSIN, l’APAIR est régie par la loi du 1er juillet 1901, à but non lucratif. Cette association contribue à la prise en charge du traitement à domicile de l'insuffisance respiratoire sous toutes ses formes conjointement avec l'ensemble du secteur de soin et surtout de participer à la prévention des maladies respiratoires. Elle contribue, dans la mesure de ses possibilités, à la recherche et à la promotion de toute méthode susceptible d'entraîner une amélioration de l'état de santé et de la situation matérielle et morale des malades atteints de handicap respiratoire. L’APAIR organise aussi l'assistance médico-technique à domicile au profit des patients atteints de toutes autres pathologies nécessitant un appareillage ou des dispositifs médicaux d'aide à la vie.
L’APAIR APURAD compte aujourd’hui 6 centres d’hémodialyse répartis sur Tahiti, Moorea et Raiatea. Des centres de consultations et d’entrainement aux techniques de dialyse en partenariat avec le CHPf.
Nous proposons l’hémodialyse, la dialyse péritonéale et l’hémodialyse à domicile ; tout en favorisant la transplantation rénale lorsque les dons d’organes le permettent.
Près de 300 patients insuffisants rénaux sont actuellement pris en charge par nos soins et plus de 1 200 patients sont appareillées ou en suivis pour leurs maladies respiratoires.
Donc merci pour cette occasion qui nous est donnée aujourd’hui de mettre à l’honneur l’ensemble de notre personnel d’exception sans qui rien, de toute cette aventure, ne serait possible
Docteur Grégory DETRUN
Président de l’APAIR APURAD
© Apair-Apurad - 2019
Éthique sociale
Alcooliques Anonymes
« J’avais honte, mais un jour j’ai osé y aller… »
Chaque mercredi soir, l'association des Alcooliques Anonymes accueille discrètement dans une petite salle du Presbytère de Papeete les personnes souffrant d'addiction à l'alcool. Pendant une heure, ces personnes, toutes très différentes les unes des autres, vont se parler, s'écouter et se serrer les coudes dans leur combat contre l'alcoolisme.
« Bonjour, je m'appelle Hanavei* et je suis alcoolique. Cela fait un mois que je n'ai pas bu », annonce d'une voix timide la jeune femme en se présentant. Hanavei fait partie des personnes qui assistaient mercredi soir à la réunion hebdomadaire de l'association des Alcooliques Anonymes.
Ils sont une petite dizaine ce mercredi assis les uns à côté des autres dans cette salle prêtée par le Père Christophe. De prime abord, rien ne prédestine ces hommes et ces femmes à être attablés ensemble. Ils n'ont rien en commun. Il y a des personnes de tout âge, des hommes, des femmes, des Polynésiens d'origine, des Popa'a. Ils semblent tous provenir de milieux sociaux bien différents. Rien si ce n'est leur combat commun contre l'alcool. Certains n'ont pas bu une goutte d'alcool depuis plus de 30 ans, d'autres depuis quelques semaines, mais tous ont comme meilleur "ennemi" l'alcool.
« L'alcool allait m'envoyer dans la tombe »
Chacun pendant une heure va témoigner de sa souffrance vécue à cause de l'alcool, échangeant ses expériences. Les abstinents depuis plusieurs années vont souvent être plus prolixes. « Au départ, c'est festif, on boit avec les amis. Mais l'alcool est sournois, facétieux, on tombe rapidement dans son piège. Un verre en amène un autre et puis on cherche l'ivresse », explique Maia avec lucidité.
Et cette recherche de l'ivresse à tout prix va les emmener vers les affres de l'enfer. « Je n'étais plus moi-même, je devenais méchante avec mon mari et même avec mes enfants », avoue Maia. « L'alcool me bousillait à petit feu. Même complètement bourré, je me levais pour acheter mes bouteilles avant que le Chinois du coin ne ferme. L'alcool était devenu une prison sans barreaux, dans laquelle je m'enfermais. Il allait m'envoyer dans la tombe. Quand j'ai arrêté, c'était comme une libération », insiste Nicolas, un homme d'une cinquantaine d'années.
« Mon petit garçon a failli se noyer pendant que je buvais »
Au fil des témoignages et des échanges, les nouveaux venus comprennent qu'ils ne sont pas les seuls à souffrir de ce fléau. Oscillant entre la honte et le besoin d'être là, ils vont oser se livrer davantage. « Au départ, j'étais dans le déni de la maladie, je n'admettais pas que j'étais alcoolique. Un jour alors que j'étais en train de boire à la plage, mon petit garçon a failli se noyer. Le papa a voulu prendre mon fils. Je ne savais plus quoi faire, j'étais vraiment désespérée. Je n'avais pas les moyens d'aller voir un psychologue, mais il fallait que je trouve quelque chose pour m'en sortir. J'avais honte, mais j'ai téléphoné aux Alcooliques Anonymes et j'ai osé y aller », admet la jeune Hanavei, qui vient depuis un mois chaque mercredi aux Alcooliques Anonymes.
Et si pour Hanavei la bataille contre l'alcool est encore toute récente, elle espère tenir bon et ne pas rechuter. « Samedi, je me suis lancé un challenge, je suis allée à une bringue. J'ai réussi à ne pas boire, je regardais les autres s'enivrer, cela me faisait bizarre, c'était un peu comme un film. J'ai résisté en pensant aux phrases que j'avais entendues ici. “Le premier verre en entraîne un autre”, “chaque heure sans alcool, c'est déjà cela de gagné” (…). Ma mère est venue sentir mon verre, il y avait du jus, elle m'a dit qu'elle était contente pour moi », confie une once de fierté dans la voix Hanavei, consciente que le combat sera long.
Éric
« On gagne notre sobriété en la transmettant »
« Cela fait plus de 30 ans que j'ai arrêté de boire et pourtant je continue d'assister aux réunions des AA toutes les semaines. Si on ne m'avait pas aidé lorsque j'en avais besoin, je ne serais plus là. Maintenant à moi d'aider les autres. A chaque témoignage, c'est comme une piqûre de rappel de la souffrance que peut provoquer l'alcool. On gagne notre sobriété en la transmettant. »
Infos pratiques
Téléphone : 40 43 21 63 ;
Courriel : Alcooliquesanonymes@gmail.com ;
Site local : www.alcooliques-anonymes.fr;
Site international : www.aa.org ;
Facebook : Alcooliques Anonymes Tahiti
Réunion : L'association des Alcooliques Anonymes propose une réunion hebdomadaire tous les mercredis de 18h30 à 19h30 au 1er étage du presbytère de la cathédrale à Papeete.
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*Par respect de l'anonymat, tous les prénoms ont été changés.
© Tahiti-infos - 2019
Littérature
Georges ORWELL
Le 8 juin 1949, George Orwell publiait son roman « 1984 ». Sa dénonciation du totalitarisme et de ses effets sur les consciences n'a pas pris une ride en soixante-dix ans.
Le Britannique George Orwell (1903- 1950), alias Éric Blair, né au Bengale, a le cœur plutôt à gauche. En 1936, il réalise un reportage sur les conditions de travail des mineurs dans le nord de l'Angleterre. Il s'émeut de la misère sociale. Dans la même année, il rejoint les milices antifranquistes en Espagne. Blessé, il rentre à Londres. Il écrit « Hommage à la Catalogne », pour dénoncer la répression du mouvement par les communistes. En 1945, il est chroniqueur politique en France et en Allemagne. Il quitte la BBC pour écrire « La Ferme des animaux », qui paraît en 1945. Une charge contre le stalinisme et les régimes totalitaires. Il rédige ensuite son œuvre majeure, « 1984 » qui paraît en 1949.
Ce chef-d'œuvre de la littérature politique connaît un succès retentissant. Il met en lumière les ressorts du totalitarisme, les ravages de Big Brother et de ses affidés, la capacité des humains à le supporter et à s'en faire les complices zélés. Le Québécois Mathieu Bock-Côté écrit, pas très optimiste : « Orwell visait l'Union soviétique. Mais la relecture de son maître ouvrage soixante-dix ans plus tard frappe : si le communisme s'est effondré, la tentation totalitaire, consubstantielle à la modernité, se recompose aujourd'hui à travers l'idéologie diversitaire et le politiquement correct, même si la démocratie libérale parvient encore à la contenir et à conserver les libertés publiques ».
Une idéologie d'apparence molle, destinée à satisfaire les « bobos » et à « casser les codes ». Une dictature qui spécule sur l'indifférence et commence par des mots. Le « sociétal » envahit le champ politique et se substitue au politique. Il ne s'agit pas seulement de tourner le dos au « Vieux Monde », mais de continuer le chantier de la « déconstruction ». Il s'agit de tenir les promesses de l'Utopie. L'idéologie nouvelle charrie l'écologisme politique et la théorie du genre forgée aux États-Unis par Judith Butler. Sa théorie queer révolutionne le féminisme et refuse de dissocier le « genre féminin » du « genre masculin », en prétendant que la distinction entre l'homme et la femme ne relève que de constructions sociales.
Le marxisme se voulait scientifique, cette idéologie se veut pareillement scientifique. Elle proclame « l'urgence climatique », dénonce « l'oppression patriarcale » et cherche à satisfaire des groupes censés représenter le féminisme et la mouvance LGBTB. L’idéologie progressiste relativise le bien et le mal, se moque des « lois naturelles », entend surtout abolir le passé. La question du genre occupe l'esprit de nos dirigeants. Favoriser la démonstration de l'égalité des sexes. Avec un ministère dédié et une femme à la tête du ministère des Armées...
Voyez Édouard Philippe qui, dans son grand discours programme du 12 juin, fait l'impasse sur l'immigration et les questions relevant de « l'insécurité culturelle », mises en évidence notamment par le « mal-être » des « Gilets Jaunes », thème qui hérisse la Gauche. Philippe préfère invoquer « les Lumières françaises », pour s'empresser de promettre l'extension de la Procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes seules et celles vivant en couple. La disposition sera intégrée à la Loi bioéthique qui sera présentée au Parlement en juillet par Agnès Buzyn, ministre de la Santé. La GPA suivra. Calcul électoral ? Pauvre petit calcul. Les enfants sans père, le monde en sera transfiguré. Selon un récent sondage IFOP réalisé à la demande d'Alliance Vita, 1% seulement des personnes interrogées estime que c'est la mesure la plus prioritaire, tandis que 91% pensent que le père joue un rôle essentiel et 79% que les enfants qui n'ont pas de père sont défavorisés.
Le gouvernement redoute que son projet, dixit Le Monde, ne reproduise « la vaste mobilisation des opposants au mariage pour tous, qui avait eu lieu en 2012 et en 2013 ». Mobilisation qui n'avait pas empêché Christiane Taubira de faire adopter sa loi le 23 avril 2013. Philippe craint donc la riposte de ceux qui désapprouvent et les probables divisions susceptibles d'affecter les Républicains, mais également les LREM. Le projet actuel laisse dans le flou l'accès aux origines des donneurs, l'établissement de la filiation et le financement.
Ce projet témoigne du refus du réel, comme le définissait le philosophe Clément Rosset (1939-2018). Il feint d'en ignorer toutes les abominables conséquences, notamment celle d'engendrer un refus d'humanité qui affectera les « enfants sans père ». Elle montre que l'idéologie dite progressiste est hantée par le parricide. Il faut « tuer le père », comme les protagonistes du dernier roman de Dostoïevski (1821-1881), « Les Frères Karamazov » (1880). Roman qui a fasciné Sigmund Freud et Benoît XVI. Voir Thérèse Delpech et son essai L'homme sans passé.
L’idéologie du « progressisme » se targue de prôner l'émancipation. Elle accorde une grande place au « sociétal », une forme de narcissisme qui revient à précipiter « la liquéfaction du politique », comme le soutient François-Xavier Bellamy. Un mouvement tout aussi dommageable que la réduction à « l'économisme » que le monde occidental a dû supporter. Le « sociétal » englobe la question dite de « la fin de vie ». Les réactions du pouvoir sur le sort de Vincent Lambert montrent clairement un parti pris délibéré en faveur de l'euthanasie. Avec l'attitude honteuse de Jacques Toubon, prétendu « défenseur des droits » qui refuse de trancher, après la décision du Conseil d'État pour l'arrêt des soins, et la demande du Comité international de la protection des droits des personnes handicapées de l'ONU demandant à la France de suspendre toute décision. Et les déclarations parfaitement scandaleuses d'Agnès Buzyn, ministre de la Santé, assurant que la France n'avait pas à se soumettre aux avis de ce comité. La même décide de s'opposer à la décision de la Cour d'appel datée du 20 mai au sujet de la reprise des traitements de Vincent Lambert, obtenue par les parents du jeune homme. Le 31 mai, la ministre annonce le dépôt d'un pourvoi en cassation. Le CHU de Reims annonce qu'il prévoit d'en faire autant. Affligeant…
À l'évidence, les actuels dirigeants de la France macronienne cherchent à satisfaire les « dadas » et les « fixations » de ces « bobos » urbains qui constituent leurs électeurs. Ils font montre d'une naïveté prétentieuse qui frise la pédanterie.
Le sujet récurrent de la « libéralisation » du cannabis revient sur le devant de la scène. Il est même à l'ordre du jour. L’Obs vient de publier un appel de soixante-dix médecins, économistes et personnalités variées, en faveur de la « légalisation du cannabis ». Parmi les signataires : Yannik Jadot, l'idole verte, Raphaël Glucksmann et Bernard Kouchner. Ils invoquent le « pragmatisme » et mettent en avant l'exemple du Canada et les « vertus thérapeutiques », contestées par l'Académie nationale de pharmacie. Boris Vallaud, porte-parole du PS, demande un débat parlementaire sur la « légalisation ». Richard Ferrand, président de l'Assemblée nationale, n'y est pas opposé.
Notez que des économistes qui conseillent Matignon appellent à la « légalisation » du cannabis par le biais d'un rapport sur « l'échec » de la prohibition. Émanant du Conseil d'analyse économique (CAE) regroupant des économistes rattachés à Matignon avec pour chef de file Philippe Martin réputé proche de Macron, ce rapport souligne les « retombées économiques » de la légalisation. Un argument de poids pour ces temps où l'État semble plutôt « dépourvu », alors que la France serait championne d'Europe de la consommation du cannabis...
Dans le même temps, les vigiles de la « nouvelle pensée » assurent la promotion de leurs thématiques. Ils pratiquent « la novlangue ». Comme le dit l'un des personnages inventés par Orwell : « Le véritable but de la novlangue est de réduire les limites de la pensée ». Empêcher les conditions de la dissidence. Ce qui implique le contrôle du passé et de barrer la route à la nostalgie. Orwell constatait : « D'innombrables mots communs comme : honneur, justice, moralité, internationalisme, démocratie, science, religion, avaient simplement cessé d'exister ». Il en va de même aujourd'hui. Certains mots sont « entachés » et « bannis ».
Ce qui implique aussi de jeter la suspicion et l'opprobre sur les sujets « indisciplinés » tentés de regarder derrière eux. Voyez le sort fait aux adversaires du Mariage entre personnes du même sexe. Voyez celui réservé aux défenseurs de la famille. Voyez celui dévolu à des concepts tels que « identité » et « enracinement ». En oubliant que la philosophe Simone Weil (1909-1943) assurait que l'enracinement dans le passé a préservé l'humanité de la corrosion sociale et pourrait à nouveau la protéger dans l'avenir.
L’Irlandais Edmund Burke (1729-1797) dans ses Réflexions sur la Révolution en France (1790) a soutenu que la tradition est une forme de « savoir » et qu'il n'est pas de société politique sans appartenance à une communauté. Le Britannique Roger Scruton souligne que Burke s'attache à dire : « L’héritage que nous recevons, indivis, nous apprend à limiter nos demandes, à considérer que nous existons au sein d'une longue chaîne où nous donnons et recevons tour à tour, et à comprendre que les bonnes choses dont nous héritons ne sont pas destinées à être gâchées mais à être transmises aux générations futures ».
Le conservatisme, voilà l'ennemi. Ceux qui osent contester sont qualifiés de « ringards ». Mathieu Bock-Côté constate : « Le conservatisme est une anomalie et c'est nécessairement un dysfonctionnement psychologique ou sociologique qui mènerait les individus par millions à voter contre le sens de l'histoire. La psychologisation du conservatisme permet sa pathologisation et évite d'avoir à tenir compte des arguments et des perspectives qu'il met de l'avant dans le débat public. Nous assistons à une psychiatrisation de la dissidence en régime diversitaire, qui n'est pas sans rappeler celle qu'on pratiquait en URSS dans les années Brejnev, quand la critique de la révolution d'octobre était considérée comme· un signe flagrant de dérèglement mental ».
La « Police de la Pensée », imaginée par Orwell, existe. Ses agents surveillent leurs cibles. Le samedi 25 mai, Laurent Ruquier, médiocre petit dictateur du monde médiatique, animateur de l'émission « On est pas couché » sur France 2, consacre plusieurs longues minutes à ironiser sur le sort de Vincent Lambert. Avec une indécence sans borne, il déclare notamment : « C'est vrai que c'est un exploit quasi sportif, dix ans dans un lit sans pouvoir bouger… », sans être blâmé ou remis à sa place. Mieux, il peut donner libre cours à ses jugements dans un entretien publié par Le Journal du Dimanche.
Mathieu Bock-Côté rappelle ce moment imaginé par Orwell : « les Deux minutes de la Haine ». Une séquence essentielle. « Où tous sont conviés à exprimer leur haine de l'ennemi du moment. Tous doivent y participer vigoureusement et de manière ostentatoire ». La machinerie médiatique monte en ligne pour orchestrer la dénonciation haineuse de ceux qui bravent les « interdits » ou font preuve d'une prétendue « intolérance ». Voyez les charges répétées contre Alain Finkielkraut qui a osé montrer un enthousiasme limité pour le football féminin...
Relire George Orwell, pour comprendre le dessein de ceux qui, aujourd'hui, prétendent 'en finir avec « le Vieux Monde » et se réclament d'un « nouvel humanisme ». L’exercice permet de mesurer les énormes ravages qu'ils se préparent à perpétrer dans le monde d'aujourd'hui. L’ablation des mémoires pour une tabula rasa effroyable...
Charles Haegen
© L’Ami-hebdo - 2019
Commentaire des lectures du dimanche
Chers frères et sœurs, bonjour !
Dans l’Évangile du jour, l’évangéliste Luc raconte que Jésus, tandis qu’il est en chemin vers Jérusalem, entre dans un village et est accueilli dans la maison de deux sœurs : Marthe et Marie (cf. Lc 10,38-42). Toutes les deux accueillent le Seigneur, mais elles le font de façon différente. Marie s’assied aux pieds de Jésus et écoute sa parole (cf. v.39), tandis que Marthe est toute prise par les choses à préparer, et à un certain moment, elle dit à Jésus : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur me laisse servir toute seule ? Dis-lui donc de m’aider » (v.40). Et Jésus lui répond : « Marthe, Marthe, tu te soucies et t’agites pour beaucoup de choses ; pourtant il en faut peu, une seule même. C’est Marie qui a choisi la meilleure part ; elle ne lui sera pas enlevée » ( vv. 41-42).
En s’affairant et en se donnant de la peine, Marthe risque d’oublier — et c’est le problème — la chose la plus importante, c’est-à-dire la présence de l’hôte, qui était Jésus dans ce cas. Elle oublie la présence de l’hôte. Et l’hôte ne doit pas simplement être servi, nourri, soigné de toutes les façons possibles. Il faut surtout qu’il soit écouté. Rappelez-vous bien de ce mot : écouter ! Car l’hôte doit être accueilli comme une personne, avec son histoire, son cœur riche de sentiments et de pensées, afin qu’il puisse se sentir vraiment en famille. Mais si tu accueilles un hôte chez toi et que tu continues à t’affairer, que tu le fais asseoir là, lui muet et toi muet, c’est comme s’il était de pierre : l’hôte de pierre. Non. L’hôte doit être écouté. Certes, la réponse que Jésus donne à Marthe — quand il dit qu’une seule chose est nécessaire — trouve sa pleine signification en référence à l’écoute de la parole de Jésus, cette parole qui illumine et soutient tout ce que nous sommes et ce que nous faisons. Si nous allons prier — par exemple — devant le Crucifix, et que nous parlons, parlons, parlons et puis nous nous en allons, nous n’écoutons pas Jésus ! Nous ne le laissons pas parler à notre cœur. Écouter : voilà le mot-clé. N’oubliez pas ! Et nous ne devons pas oublier que dans la maison de Marthe et Marie, Jésus, avant d’être Seigneur et Maître, est pèlerin et hôte. Donc, sa réponse a ce sens premier et plus immédiat : « Marthe, Marthe, pourquoi te donnes-tu tant de peine pour l’hôte jusqu’à oublier sa présence ? — L’hôte de pierre ! — Pour l’accueillir, il n’est pas nécessaire de faire beaucoup de choses ; au contraire, une seule chose est nécessaire : l’écouter — c’est le mot : l’écouter —, faire preuve à son égard d’une attitude fraternelle, de façon qu’il se sente en famille, et non dans un refuge provisoire ».
Comprise ainsi, l’hospitalité, qui est l’une des œuvres de miséricorde, apparaît véritablement comme une vertu humaine et chrétienne, une vertu qui, dans le monde d’aujourd’hui, risque d’être négligée. En effet, les maisons de repos et de retraite se multiplient, mais on ne pratique pas toujours dans ces milieux une réelle hospitalité. On crée diverses institutions qui pourvoient à de nombreuses formes de maladies, de solitude, de marginalisation, mais la probabilité diminue, pour celui qui est étranger, marginalisé, exclu, de trouver quelqu’un disposé à l’écouter : parce qu’il est étranger, réfugié, migrant, écouter cette douloureuse histoire. Même dans sa propre maison, parmi les membres de sa propre famille, il peut arriver de trouver plus facilement des services et des soins de différentes sortes qu’une écoute et un accueil. Aujourd’hui, nous sommes tellement pris, avec frénésie, par tant de problèmes — dont certains ne sont pas importants — que nous n’avons plus la capacité d’écoute. Nous sommes continuellement affairés et ainsi, nous n’avons pas le temps d’écouter. Et je voudrais vous demander, vous poser une question, à laquelle chacun répondra dans son cœur : toi, mari, as-tu du temps pour écouter ta femme ? Et toi, femme, as-tu du temps pour écouter ton mari ? Vous, parents, avez-vous du temps, du temps à « perdre », pour écouter vos enfants ? Ou vos grands-parents, les personnes âgées ? — « Mais les grands-parents disent toujours les mêmes choses, ils sont ennuyeux... » — mais ils ont besoin d’être écoutés ! Écouter. Je vous demande d’apprendre à écouter et d’y consacrer plus de temps. Dans la capacité d’écoute se trouve la racine de la paix.
Que la Vierge Marie, Mère de l’écoute et du service attentionné, nous enseigne à être accueillants et hospitaliers envers nos frères et nos sœurs.
© Libreria Editice Vaticana – 2016