Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°51/2019
Dimanche 27 octobre 2019 – 30ème Dimanche du Temps ordinaire – Année C
Humeurs…
2019… au moins 9 personnes à la rue décédées
« Qu’as-tu fais ? La voix du sang de ton frère crie de la terre vers mois ! » Gn 4,10
La fin de semaine dernière ce sont deux personnes à la rue qui sont décédées, ce qui porte le nombre des décès des personnes à la rue depuis le début de cette année à 9 !
Je rêve qu’en cette fête de la Toussaint qui approche, dans chacune de nos églises, dans chacun de nos temples et maisons de prière l’on récite comme une litanie les prénoms des ces frères et sœurs de la rue… et que la voix du Père se fasse entendre à chacun de nous, comme à Caïn le jour où il tua son frère Abel : « Qu’as-tu fais ? La voix du sang de ton frère crie de la terre vers moi ! » (Gn 4,10).
Dix mois… neuf morts… durant cette même période que de promesses entendues de la part de nos élus… syndrome du ventilateur qui s'accélère en période électorale… mais concrètement : rien !
Ou plutôt… une multiplicité de tracas, de croche-pied…
Aujourd'hui, plus de 15% des personnes à la rue ne sont plus à jour au RSPF… parce qu'on ne sait pourquoi… notre personne relais harcelée et mise à mal par « son chef » a baissé les bras… On demande une référente CPS à la Direction, au Ministre de la Santé, au Pays… le Pays nous promet des millions !!! Mais toujours pas de référente !!!
La Santé public a nommé un infirmier en charge des personnes en grande précarité et à la rue… objet de harcèlement, lui aussi, il a jeté l'éponge et quitte la santé publique… sa remplaçante… rebelote… est en arrêt maladie après à peine deux mois de fonction !!!
Beaucoup de paroles… souvent contradictoire laissant clairement voir les luttes de pouvoir, les ambitions, les rancœurs des uns et des autres… Pendant ce temps-là on meurt dans nos rues…
Combien de morts faudra-t-il pour que les petits potentats qui gravite dans les sphères du pouvoir soient mis à bas, pour qu'êtres frères ne soit plus le privilège de quelques initiés ?
Pancho, Émelie, Maria, Jean, John, Théodore, Charles, Yvonne et Iona ne sont victimes que de l'arrogance des petits potentats de l'ombre et de la lâcheté de ceux qui décident ou plutôt ne décident pas !
« Le Seigneur reprit : "Qu’as-tu fait ? La voix du sang de ton frère crie de la terre vers moi !” » (Gn 4,10).
Laissez-moi vous dire…
26 octobre 2019 : Clôture du mois missionnaire
27 octobre 2019 : Clôture du synode sur l’Amazonie
Des femmes, modèles missionnaires de foi et d’action
Lors de la première congrégation générale du synode sur l’Amazonie (le 7 octobre) le cardinal Lorenzo Baldisseri, secrétaire général du Synode, a précisé que cette assemblée était l’occasion « d’écouter le cri de la terre et le cri des pauvres (…) et de répondre avec un cœur de pasteurs à leurs problématiques ».
Si l'autorité du gouvernement, dans l'Église, est masculine, l'activité pastorale est nettement féminine, a fait remarquer Mgr Zenildo Lima da Silva, recteur du séminaire São José de Manaus(*). [Vatican News : conférence de Presse du 23 octobre]
Que ce soit en Amazonie ou dans toute autre région du monde, nous ne manquons pas de modèles de foi et d’action parmi les femmes catholiques qui ont su répondre à l’appel du Christ et répandre l’amour miséricordieux du Père en se mettant au service des laissés-pour-compte. Se laissant conduire par l’Esprit Saint (Actes 5,18), elles sont devenues -par leurs actes- missionnaires témoins du Christ compatissant.
Parmi nos contemporains, de grands noms de femmes sont connus mondialement : Sainte Teresa de Calcutta (la « Mère » des mourants et des intouchables), Sœur Emmanuelle (« chiffonnière » du Caire), Geneviève De Gaulle-Anthonioz (résistante de la première heure déportée à Ravensbrück, militante active d’ATD-Quart monde), Sœur Elvira Petrozzi (fondatrice du Cenacolo, refuge des drogués), Chiara Lubich (fondatrice du mouvement des Focolari et initiatrice de l’« économie de communion »)…
Il en est d’autres, moins hardies au plan médiatique, mais tout autant généreuses et parfois héroïques, qui mériteraient d’être hissées au rang de « bienheureuses » !
Exemple, cette femme : Luisa Guidotti. Durant ses études de médecine, à l’occasion d’un congrès missionnaire, Luisa découvre l’Association Féminine Médico-Missionnaire (AFMM) fondée en 1954 par Adèle Pignatelli. Sur les conseils d’Adèle, Luisa se spécialise en radiologie avant de partir pour la Rhodésie (actuel Zimbabwe) où elle prodiguera des soins dans le dispensaire de Chinrudu. Très incommodée par la chaleur et les moustiques, Luisa fait face à un labeur harassant : aux soixante-dix patients hébergés, enfants ou adultes, s’ajoutent le dispensaire externe, ainsi que trois autres dispensaires de l’autre côté du fleuve Zambèze, qu’il faut traverser en pirogue, avec tout le matériel médical nécessaire. Jusqu’à cent patients peuvent s’y présenter dans une seule journée. En 1965 la Rhodésie est en état de guerre ; Luisa rentre quelques temps en Italie et repart en 1969. Envoyée à Blantyre (150 km au nord de Salisbury) elle est chargée d’un dispensaire et d’un hôpital de campagne rudimentaire. « L’hôpital se compose de bâtiments comportant murs et toits mais pas grand-chose d’autre…-écrit-elle-. Tout manque ici… Lorsqu’il faut faire des transfusions, nous demandons du sang aux parents du patient. Mais quand ce n’est pas suffisant, les sœurs, les prêtres, les infirmières, nous devenons tous donneurs… » Responsable d’un dispensaire-hôpital et d’une léproserie du secteur de Nyamaropa à l’ouest de la Rhodésie, elle témoigne : « En mission, la vie est simple et joyeuse, même s’il y a trop de travail à faire. Je suis heureuse comme je ne l’ai jamais été. Le Seigneur a été bon avec moi. » Cependant la rébellion communiste s’étend dans le pays. Le 6 juillet 1979, alors qu’elle emmène en ambulance un malade vers un hôpital, Luisa est mortellement atteinte par une rafale de mitrailleuse.
[Source :https://www.clairval.com/lettres/fr/2018/07/03/6040718.htm]
Autre exemple : Sœur Emmanuelle-Marie de la Congrégation des Sœurs dominicaines de Béthanie (fondée par le Bienheureux Père Lataste) est visiteuse de prisons en Italie. Elle vit dans le concret la devise du Père Lataste : « Espérer contre toute espérance », car la réalité quotidienne la plus répandue en milieu carcéral est celle du désespoir. Elle témoigne : « les toxicomanes sont les plus désespérées… Si une personne n’a rien à faire de la journée, aucun travail, aucun intérêt, quelque soit son désir d’en sortir, elle ne peut y arriver. » « Les détenues ont un besoin pressant de rencontrer des gens du dehors. Elles attendent avec anxiété lettres et cartes postales … Avoir la visite d’une bénévole, d’une personne qui leur témoigne amitié et fraternité peut signifier le salut … Il suffit souvent d’un regard… S’il y avait davantage de visiteuses dans les prisons !… » [Source : M. Bonanate, Femmes de Dieu, Au-delà des grilles dans les monastères de l’an 2 000, Ed. de Fallois, Paris]
Elles sont des milliers ces femmes portées par l’Esprit Saint à vivre un idéal de charité, répondant à un appel, à une situation liée à l’injustice et à l’indifférence d’un monde égoïste et individualiste. Souvent elles agissent dans l’anonymat et l’humilité.
Et puis il y a celles que certains considèrent comme « folles, excentriques ou encore déjantées »… les religieuses cloîtrées… Et pourtant depuis le début du second millénaire leur nombre augmente. Les portes des couvents s’ouvrent et de très nombreuses femmes de tous âges s’y présentent (idem chez les hommes) … Exemple les Chartreuses … un des ordres religieux les plus « rugueux » ! Paul VI écrivait à la supérieure d’une maison de Chartreuses : « Bienheureuses êtes-vous, chartreuses, qui pouvez faire dans le monde ce que les bienheureux font au Paradis : louer Dieu. » Effectivement les Chartreuses vivent dans une solitude érémitique, dans des cellules séparées et indépendantes, chacune avec un jardinet où elle cultive des légumes et se recrée ; chacune prend ses repas seule. Uniquement le dimanche elles partagent en commun un repas et un temps de récréation. « Notre application principale et notre vocation sont de trouver Dieu dans le silence et la solitude. Là, Dieu et son serviteur entretiennent de fréquents colloques, comme il se fait entre amis. »
Nous qui vivons dans le monde, confronté(e)s aux soucis quotidiens des un(e)s et des autres, sommes-nous sensibles aux appels de l’Esprit Saint qui veut que nous soyons missionnaires ?
Dominique Soupé
(*) Manaus est la capitale de l’Etat de l’Amazonas (au nord-ouest du Brésil], située sur les rives du Rio Negro ; elle est une porte d’accès à la forêt amazonienne. Elle compte plus de deux millions d’habitants.
© Cathédrale de Papeete – 2019
En marge de l’actualité…
Visite « ad-limina »
Du 26 Septembre au 2 Octobre passé, les évêques de la Conférence du Pacifique étaient à Rome pour la visite « ad limina » auprès du Saint Père. Ce mot issu de l’expression « ad limina apostolorum » que l’on pourrait traduire « au seuil (des basiliques) des apôtres », désigne la visite que chaque évêque fait périodiquement au Saint-Siège. Cette visite est d’abord un pèlerinage sur les tombeaux des apôtres saint Pierre et saint Paul. C’est ainsi que tous les évêques de la CEPAC avons eu la joie de célébrer la messe près du tombeau de l’apôtre Pierre, dans la crypte de la basilique St Pierre de Rome, puis de l’apôtre Paul près de son tombeau en la basilique « Saint Paul hors les murs ». La visite « ad limina » permet également de renforcer les liens avec le Saint-Siège, ainsi qu’entre diocèses voisins et entre provinces proches. Au cours de la visite ad limina, les évêques rencontrent le Pape et les responsables des dicastères et congrégations, comparables aux « ministères » d’un gouvernement, mais responsables devant le Pape : ils concernent le culte divin, le clergé, l’éducation catholique, la vie consacrée, les Laïcs et la famille, la culture, la nouvelle évangélisation, la doctrine de la foi, le développement humain intégral, l’unité des Chrétiens…
Ce temps fort a permis à tous les évêques de la Conférence des évêques du Pacifique (CEPAC) de vivre une expérience d’Église tout à fait unique. La rencontre avec le Pape François en fut certainement le sommet. Pendant près de deux heures, nous avons pu échanger avec le Saint Père sur diverses questions qui se posent dans tel ou tel diocèse. Mais avant cela, le président de la CEPAC, Mgr Paul DONOGHUE, évêque de Rarotonga prononça un discours à l’adresse du Saint Père, et dont voici un extrait :
« Si nous devions signaler un problème majeur qui touche notre conférence, je parlerais du réchauffement climatique et de l’élévation du niveau de la mer qui en est la conséquence… Les ouragans qui font partie des réalités climatiques de nos îles deviennent plus puissants qu’autrefois… Votre document “Laudato si” évoquant notre “maison commune” a joué un rôle important pour signifier la position de l’Église sur cette question… Vous avez accueilli nos leaders du Pacifique au Vatican en Novembre 2017. Vous avez partagé les défis des îles, des communautés établies sur les côtes et vivant de la pêche, vous avez appelé à une coopération globale, à la solidarité et aux stratégies permettant de trouver des solutions aux problèmes tels que la détérioration de l’environnement et la “bonne santé” des océans…
Nous vous remercions pour le synode sur la jeunesse et pour les journées mondiales de la jeunesse. Notre isolement ne nous protège pas des défis auxquels les jeunes doivent faire face. Avec Internet et la télévision, notre jeunesse, même dans les îles les plus isolées reflète la culture moderne de la jeunesse avec ses forces et ses faiblesses… »
Au nom de l’archevêché de Papeete j’ai abordé devant le Saint Père la question de la place des Katekita dans les communautés sans prêtre à demeure. Sa réponse fut d’insister sur la place des laïcs qui sont, selon les mots du Pape, « les piliers, les colonnes de la communauté chrétienne ». Il insista sur l’importance de les soutenir, de les encourager et de les former.
Lors de l’entretien avec le dicastère du développement humain intégral, j’ai abordé la question de la gestion du fait nucléaire en Polynésie. Dans sa réponse, le préfet de ce dicastère insista sur l’importance du devoir de mémoire de l’Église vis-à-vis des victimes.
Bien d’autres questions furent abordées pendant ces rencontres : formation des prêtres, qualité de nos liturgies, développement humain intégral pour tous, en collaboration avec les institutions civiles etc… Nous avons encore « du pain sur la planche » ! Que ce mois missionnaire extraordinaire nous aide à rejoindre nos frères et sœurs dans ces combats pour la vie humaine et spirituelle, le respect et la dignité de chacun, combat qui, n’oublions pas, fut et demeure aujourd’hui encore celui de Jésus Christ !
Mgr Jean-Pierre COTTANCEAU
© Archidiocèse de Papeete - 2019
Audience générale
Les débuts de l’évangélisation
Lors de l’audience générale de ce mercredi matin tenue sur la Place Saint-Pierre, le Pape François a expliqué comment l’Église s’est progressivement constituée, notamment à partir de l’arrivée de saint Paul à Jérusalem, qui, malgré son échec apparent, marque la 1ère étape du voyage de l’Évangile autour du monde méditerranéen.
Chers frères et sœurs, bonjour !
Le livre des Actes des apôtres raconte qu’après cette rencontre transformante avec Jésus, saint Paul est accueilli par l’Église de Jérusalem grâce à la médiation de Barnabé et commence à annoncer le Christ. Mais à cause de l’hostilité de quelques-uns, il se voit contraint de se rendre à Tarse, sa ville natale, où Barnabé le rejoint pour l’impliquer dans le long voyage de la Parole de Dieu. On peut dire que le livre des Actes des apôtres, que nous commentons dans ces catéchèses, est le livre du long voyage de la Parole de Dieu : la Parole de Dieu doit être annoncée, et annoncée partout. Ce voyage commence à la suite d’une forte persécution (cf. Ac 11,19) ; mais celle-ci, au lieu de provoquer un coup d’arrêt pour l’évangélisation, devient une opportunité pour élargir le champ où répandre la bonne graine de la Parole. Les chrétiens ne se laissent pas effrayer. Ils doivent fuir, mais ils fuient avec la Parole, et répandent la Parole un peu partout.
Paul et Barnabé arrivent d’abord à Antioche de Syrie, où ils s’arrêtent une année entière pour enseigner et aider la communauté à mettre des racines (cf. Ac 11,26). Ils annonçaient à la communauté juive, aux juifs. Antioche devient ainsi le centre de propulsion missionnaire, grâce à la prédication par laquelle les deux évangélisateurs – Paul et Barnabé – touchent le cœur des croyants qui, ici à Antioche, sont appelés pour la première fois « chrétiens » (cf. Ac 11,26).
Du livre des Actes émerge la nature de l’Église qui n’est pas une forteresse mais une tente capable d’étendre son espace (cf. Is 54,2) et de permettre à tous d’y accéder. L’Église est « en sortie » ou ce n’est pas l’Église ; soit elle est en chemin en élargissant toujours son espace afin que tous puissent y entrer, soit ce n’est pas l’Église. « Une Église aux portes ouvertes » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, 46), toujours les portes ouvertes. Quand je vois une petite église, ici dans cette ville, ou quand j’en voyais dans l’autre diocèse d’où je viens, les portes fermées, c’est mauvais signe. Les églises doivent toujours avoir leurs portes ouvertes parce que c’est le symbole de ce qu’est une église : toujours ouverte. L’Église est « appelée à être toujours la maison ouverte du Père. […] De sorte que, si quelqu’un veut suivre une motion de l’Esprit et s’approche en cherchant Dieu, il ne se heurte pas à la froideur d’une porte fermée » (ibid., 47).
Mais cette nouveauté des portes ouvertes à qui ? Aux païens, parce que les apôtres prêchaient aux juifs, mais les païens aussi sont venus frapper à la porte de l’Église ; et cette nouveauté des portes ouvertes aux païens déchaîne une controverse très animée. Certains juifs affirment la nécessité de se faire juif à travers la circoncision pour être sauvé, et recevoir ensuite le baptême. Ils disent : « Si vous n’acceptez pas la circoncision selon la coutume qui vient de Moïse, vous ne pouvez pas être sauvés », c’est-à-dire vous ne pouvez pas recevoir ensuite le baptême. D’abord le rite juif et ensuite le baptême : c’était leur position. Et pour trancher la question, Paul et Barnabé consultent le conseil des apôtres et des anciens à Jérusalem et se tient alors ce qui est considéré comme le premier concile de l’histoire de l’Église, le concile – ou assemblée – de Jérusalem, auquel se réfère Paul dans sa Lettre aux Galates (2,1-10).
C’est une question théologique, spirituelle et disciplinaire très délicate qui est abordée ici : c’est le rapport entre la foi dans le Christ et l’observance de la Loi de Moïse. Les discours de Pierre et Jacques, « colonnes » de l’Église-mère, au cours de cette assemblée, sont déterminants (cf. Ac 15,7-21 ; Gal 2,9). Ils invitent à ne pas imposer la circoncision aux païens, mais à leur demander seulement de rejeter l’idolâtrie et toutes ses expressions. C’est à partir de la discussion que se dessine la route commune, et cette décision, ratifiée par la fameuse lettre apostolique envoyée à Antioche.
L’assemblée de Jérusalem nous donne une lumière importante sur les modalités avec lesquelles aborder les divergences et rechercher la « vérité dans la charité » (Ep 4,15). Elle nous rappelle que la méthode ecclésiale pour la résolution des conflits se fonde sur le dialogue fait d’écoute attentive et patiente et sur le discernement réalisé à la lumière de l’Esprit. C’est l’Esprit, en effet, qui aide à surmonter les fermetures et les tensions et qui travaille dans les cœurs pour qu’ils parviennent, dans la vérité et le bien, à l’unité. Ce texte nous aide à comprendre la synodalité. Il est intéressant de voir comment la lettre est écrite : les apôtres commencent en disant : « L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé que… ». C’est le propre de la synodalité, la présence de l’Esprit Saint, sinon ce n’est pas la synodalité, c’est un parloir, un parlement, autre chose…
Demandons au Seigneur de renforcer chez tous les chrétiens, en particulier chez les évêques et les prêtres, le désir et la responsabilité de la communion. Qu’il nous aide à vivre le dialogue, l’écoute et la rencontre avec nos frères dans la foi et avec ceux qui sont loin, pour goûter et manifester la fécondité de l’Église.
© Libreria Editrice Vaticana - 2019
Mois extraordinaire des Missions
Une Église missionnaire
Nous clôturons ce dimanche le « Mois missionnaire extraordinaire » demandé par le Pape François. Nous avons l’habitude de penser la « mission » à travers les religieuses, religieux et prêtres qui sont venus apporter l’Évangile en Polynésie… Mais saviez-vous que notre Église est aussi missionnaire… et ce depuis les origines jusqu’à nos jours ?
Des polynésiens et polynésiennes missionnaires aujourd’hui
En 2019, les diocèses de Polynésie française comptent au moins 19 personnes nées en Polynésie et missionnaires à travers le monde :
Religieuses : 11
- 1 Filles de la Charité du Sacré-Cœur :
Sœur HUVEKE Marie-Andrée, supérieure générale de la congrégation ;
- 1 Sœur apostoliques de Marie Immaculée :
Sœur GIAU Catherine ;
- 1 Sœur Clarisse :
Sœur HATITIO Martine, mère abbesse ;
- 1 Sœur Missionnaire de la Société de Marie :
Sœur ÉTILAGÉ Jeanne ;
- 4 Sœurs de Notre dame des Anges :
Sœur CHUNGUE Marie-Christine
Sœur KAIHA Estelle
Sœur ROBSON Thérèse
Sœur TEPEHU Louise
- 3 Sœurs de Saint Joseph de Cluny :
Sœur AH-SAM Joséphine Tiaheitapu
Sœur SPITZ Élisabeth
Sœur TERIIEROITERAI Josiane
Religieux : 2
- 1 Frère de l’ordre de saint Benoît :
Frère Joseph LII
- 1 Frère des Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie :
Frère BRUNEAU Chadwick
Diacre permanent : 1
- 1 Diacre permanent en Nouvelle Calédonie :
Diacre MAMATUI Henri
Prêtres : 4
- 2 Père des Sacrés Cœurs :
Père LEOUTHAM David
Père TEPA William
- 1 Prêtre diocésain :
Père BESSERT Vetea
- 1 Prêtre d’une Communauté nouvelle :
Père TEUA Alphonse
Évêque : 1
- 1 Évêque en France :
Des polynésiens et polynésiennes missionnaires hier
Durant les 185 ans qui se sont écoulés depuis l’arrivée des premiers missionnaires aux Gambiers, quelque uns sont morts en terre de mission :
Religieuses : 3
- 2 Sœurs de Saint Joseph de Cluny :
Sœur BODIN Marie-Hélène de la Croix ;
Sœur FIU Gabrielle ;
Sœur RICHEMOND Marie de la Purification
- 1 Sœurs des Sacrés Cœurs :
Sœur FROGIER Emma ;
Diacre : 1
- 1 Diacre permanent en Nouvelle Calédonie :
LABBEYI François ;
Prêtre : 1
- 1 Prêtre diocésain :
Père MAMA TAIRA PUTAIRI
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Quelques témoignages de nos missionnaires d’aujourd’hui…
Sœur Marie Andrée HUVEKE, f.c.s.j.c.
Je suis née le 3 février 1963 à Taiohae aux Iles Marquises.
J’ai prononcé mes premiers vœux dans la Congrégation des Filles de la Charité du Sacré Cœur de Jésus le 16 septembre 1988 et fait mon engagement définitif le 15 août 1998. Cette année cela fait 31 ans que je suis engagée dans la vie consacrée et que je fais partie de cette grande famille religieuse. J’ai quitté la Polynésie française en août 2011 pour rejoindre les sœurs de la province du Canada à laquelle j’appartiens.
J’ai été dans le Conseil Général de la Congrégation en France d’octobre 2013 à juillet 2019. Cet été, nous avons eu notre Chapitre Général et j’ai accepté dans la foi et par attachement au Christ et mon amour pour la Congrégation la responsabilité de Supérieure Générale pour un mandat de 6 ans.
J’essaierai donc dans la simplicité et avec la grâce de l’Esprit de partager mon expérience comme missionnaire et en lien avec le thème retenu en ce mois missionnaire extraordinaire « Baptisés et envoyés ». Je ne peux parler de l’expérience missionnaire sans faire allusion à l’histoire de ma vocation religieuse.
Histoire de ma vocation
Je me limiterai à ce qui me semble essentiel.
Je dirai que je n’ai jamais douté de l’appel à la vie religieuse que le Seigneur m’a adressé bien que j’ai traversé des épreuves durant mon parcours personnel. Il m’a fait la grâce dès mon jeune âge à être attentive à ce qui se passe en moi, autour de moi : les paroles des personnes, les évènements et surtout à travers la méditation de sa Parole. Je peux ainsi dire que le Seigneur a mis sur ma route des personnes comme ses intermédiaires pour m’aider à le reconnaître présent et cheminant avec moi. Il y a aussi ces paroles qui ont résonné en moi, qui sont devenues les fondements de ma vocation, qui m’ont enracinée dans ma vie de foi.
Dans mon discernement pour le choix d’entrer dans la Congrégation des FCSCJ « Et voici qu’une voix venant des cieux disait : “Celui-ci est mon Fils bien-aimé, celui qu’Il m’a plu de choisir.” » (Mt 3,17)
Dans mon année de préparation aux vœux perpétuels, St Paul aux Romains 1,26-31 : « Et Dieu qui scrute les cœurs, connaît les intentions de l’Esprit puisque c’est selon Dieu que l’Esprit intercède pour les fidèles. Nous le savons, quand les hommes aiment Dieu, lui-même fait tout contribuer à leur bien puisqu’ils ont appelés selon le dessein de son amour… »
À la demande de prendre la direction de l’école Sainte Anne aux Marquises en août 2008, c’est à travers l’expérience d’Abraham que le Seigneur me parle. « Quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père, et va vers le pays que je te montrerai. Je ferai de toi une grande nation, je te bénirai, je rendrai grand ton nom, et tu deviendras une bénédiction… » Convaincue par ces paroles, j’ai accepté de sortir de mes zones de confort, de quitter mes nombreuses relations, de me désencombrer pour une nouvelle aventure.
Ces 3 années aux Marquises ont été des plus belles expériences à plusieurs niveaux : apostolique, spirituel, professionnel. J’ai pu apporter grâce aux formations reçues, à mes expériences professionnelles dans l’enseignement, la pastorale à Tahiti, j’ai pu donner le meilleur de moi-même pour le bien des élèves, des parents, du personnel éducatif, mais j’y ai aussi reçu beaucoup également. Ma joie est de reconnaître comment à ma manière, je suis restée fidèle à notre mission exprimée dans notre projet commun d’évangélisation :
Par notre adhésion totale à Jésus Christ
Révéler qu’Il est vivant
Par la cordialité et la simplicité
De notre accueil
Témoigner qu’il est proche
Par notre disponibilité envers tous
Annoncer que son amour est universel.
Avec un regard de foi, je réalise que le Seigneur n’a cessé de me guider et de m’accorder toujours cette grâce d’avoir un cœur ouvert pour discerner et accueillir ce qu’Il veut me dire, ce qu’Il attend de moi.
De 2013 à aujourd’hui…
Au cours du chapitre de 2013, j’ai été élue comme Conseillère Générale. 1P 4, 7… « Ce que chacun de vous a reçu comme don de la grâce, mettez-le au service des autres, comme de bons gérants de la grâce de Dieu sous toutes ses formes : si quelqu’un a le don de parler, qu’il dise la parole de Dieu ; s’il a le don du service, qu’il s’en acquitte avec la force que Dieu communique. Ainsi, en toute chose, Dieu recevra sa gloire par Jésus Christ, car c’est à lui qu’appartiennent la gloire et la puissance pour les siècles des siècles. Amen. » Ces paroles m’invitaient à reconnaître les talents que le Seigneur m’a accordés et à me rendre disponible pour le service de la Congrégation. C’est une manière de vivre en vérité avec le Seigneur et moi-même dans la mesure où j’admettais les capacités pour assumer ce service.
Au cours de ces 6 années au Conseil Général, j’avais souci d’apporter le meilleur de moi-même dans nos réunions, dans notre vie communautaire ou encore dans les visites dans les différentes provinces. C’est dans un esprit de collaboration, de complémentarité que j’ai mis à profit les savoir-faire acquis grâce aux différentes formations reçues, des expériences professionnelles qui m’ont permis de développer des talents… C’est par mon attachement au Christ, ma joie de vivre, ma disponibilité à rendre service aux unes et aux autres que j’ai contribué à la vie fraternelle en communauté et à en rendre témoignage « À ceci, tous vous reconnaîtront pour mes disciples, à cet amour que vous aurez les uns pour les autres ».
Comme je mentionnais plus haut, je suis depuis juillet dernier la Supérieure Générale de la Congrégation des Filles de la Charité du Sacré Cœur de Jésus. Comme le précise notre Règle de Vie, mon rôle ou pour parler en termes de mission est l’animation spirituelle, apostolique et communautaire de l’Institut. J’assure la fonction d’animatrice d’abord auprès des conseillères qui ont été élues, et appelées à collaborer avec moi dans ce service de la Congrégation. Ensemble, nous essayons « d’infuser à toute la Congrégation l’esprit de l’Évangile, de l’Église, des fondateurs, de la Règle de vie pour stimuler les échanges et favoriser l’unité dans la charité. » R.V 1.166
J’assure également ma fonction d’animatrice dans mes contacts avec les Provinces que je visite. Je reste disponible et attentive aux sœurs quels que soient leurs origines, leurs besoins, leurs cultures…
Je reconnais les exigences de la responsabilité qui m’est confiée depuis plus de 3 mois et je fais miennes ces paroles « À qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup ; à qui l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage. » Luc 12, 39 et je sais que le Seigneur continuera de pourvoir de ses grâces.
C’est avec ce message du pape François en ce mois missionnaire extraordinaire « toute baptisée est une mission. Celui qui aime se met en mouvement, il est poussé en dehors de lui-même, il est attiré et il attire, il se donne à l’autre et tisse des relations qui engendrent la vie… » et celui de Mathias « l’occasion pour chaque baptisé de redécouvrir la saveur de la vie missionnaire dans son quotidien et de tisser des liens de la foi avec d’autres chrétiens à travers le monde. » que je voudrais conclure.
Puisse l’Esprit du Christ faire de nous de vrais missionnaires de la Parole et de la Charité.
Sr Maria Andrée
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Frère Chadwick-Joseph BRUNEAU, s.s.c.c;
BRUNEAU Chadwick Joseph (Kehueinui comme prénom marquisien). Mais je me suis vite habitué avec le diminutif de mon prénom « Chad », voilà comment on m’appelle en général.
Né à Taiohae, Nuku-Hiva, le 31 Juillet 1993 (en la fête de Saint Ignace de Loyola).
Un parcours classique
- Maternelle : à St Joseph de Taiohae
- Primaire : École primaire public
- Secondaire : Collège à Taiohae jusqu’à la 2nd Générale
- Lycée : Lycée Agricole d’Opunohu, Moorea.
J’ai quitté les îles Marquises à 17 ans, pour le lycée agricole d’Opunohu de Moorea, où entre temps j’ai logé à la communauté des frères des Sacrés Cœurs de Moorea (avant appelé la Communauté du Noviciat).
Le Lycée à Opunohu : J’ai pris une filière pas très connue dans le milieu de l’éducation, j’ai fais une 1ère et une Terminale STAV (Sciences et Technologies de l’Agronomie et du Vivant)… Une filière intéressante pour un milieu social et culturel comme le nôtre, où le secteur primaire tient une place importante dans notre petit et beau pays qu’est la Polynésie-Française.
Tout simplement, cette filière propose d’étudier et de chercher toutes composantes qui constituent un circuit afin d’améliorer le secteur primaire, autrement dit, étudier et faire des recherches pour améliorer tous les flux entrants et sortants dans une production agricole. Connaître tout ce qui se passe « de la fourche à la fourchette ».
Je pense justement que ce que j’ai pu étudier en STAV, me permet de comprendre tout l’enjeu de l’encyclique du pape François, Laudato Si, qui parle implicitement de l’impact que pourrait avoir notre société de consommation, avec une petite touche d’égoïsme. Bref.
Mon parcours religieux
- Baptisé le 6 février 1994, à Hiva-oa, (Nahoe) par le P.Bernard Sins (frère sscc) ;
- Première communion : 14 avril 2002 à Taiohae ;
- Enfant de cœur : le 21 avril 2002 ;
- Confirmation : le 26 octobre 2008 à Taiohae ;
- Aide-Catéchiste : 29 octobre 2008 ;
- MEJ (animateur) : année 2009.
Premier pas sur la vocation.
Mon enfance : Christ, catéchèse, confirmation.
L’appel du Seigneur, je l’ai ressenti dès mon enfance, il n’y a pas très longtemps d’ailleurs, j’ai pris conscience que j’ai été capable de situer le début de cet appel.
Je me souviens être entré avec un cousin qui voulait prier dans la cathédrale de Taiohae aux Marquises, je le voyais tout en pleur. J’étais assis à côté de lui, et en balayant du regard toutes les statues qu’il y avait sur les murs, mes yeux sont restés figé sur le grand Christ en croix qui surplombe tout l’avant-chœur de la cathédrale. Je pense que c’est à ce moment-là que tout a commencé. Je devais avoir entre 5 ou 6 ans. Et c’est à ce moment-là que mon désir de devenir prêtre à commencer à germer.
D’autres raisons m’animaient aussi, comme l’habit du prêtre, et comme beaucoup d’enfants de chœurs de l’époque, on appréciait voir le prêtre porter la chasuble. Je me suis dit, juste après la première communion, il fallait que je devienne enfant de cœur, pour être proche du prêtre. Alors le dimanche juste après ma première communion je me suis mis à servir.
Je suis resté fidèle à la messe, tous les dimanches, on se disputait même pour pouvoir servir la messe, on faisait même des bêtises de servants d’autel. Une fois je me suis fait tirer les oreilles par Mgr Hervé Le Cléach’, on avait ris.
Il y avait aussi l’un des rares événements du diocèse qui m’avait particulièrement touché, c’était l’ordination du Père Émile Buchin, je l’ai vu sourire devant, j’étais servant d’autel ce jour-là, je me souviens comme si c’était hier, et j’ai même une photo de son ordination dans mon ordinateur. Oui son sourire, sa joie, ses émotions, je pense qu’il nous a tous partagé cette joie, c’était un des moments qui affirmait un désir en moi, qui me semblait impossible à réaliser. Ce même jour, il y avait un autre prêtre qui avait retenu mon attention, c’était l’unique prêtre qui avait une capuche à son aube, on devine tout de suite qui c’est, lorsqu’on regarde les concélébrants de ce jour-là.
Autrement, je n’ai pas été sage quand j’étais petit, j’étais même un moteur à problème. J’étais terrible au caté. Mais ça ne m’a pas empêché de venir au caté tous les mercredis, ou de servir la messe. J’ai rencontré des catéchistes formidables dans ma vie, qui ne sont pas allés très loin dans leurs études, mais leur dévouement à donner la catéchèse aux enfants, par leur tendresse et leur patience, majoritairement des femmes, j’ai été touché par leur témoignage de simplicité et d’amour. (J’ai encore leur nom dans ma tête : Mme Juliette, Mme Marie-Salomé, Mme Noéline, et bien d’autres encore). De saintes femmes.
Mes débuts dans le MEJ, un début à la vie communautaire et religieux
Après la confirmation, je me souviens du frère Omer Chouan, qui venait à la maison pour récupérer la fiche d’inscription de mon petit frère pour un camps Bivouac à Anaho – lieu où se trouve le centre de camps de vacance du MEJ – avant de partir, il avait dit à ma mère « lui aussi je pourrai l’embarquer avec moi », et moi, qui répond sans réfléchir « jamais je ne mettrai mes pieds dans le MEJ, jamais ». Je n’ai pas attendu un an, j’y suis entré, et j’y suis resté longtemps, d’ailleurs j’ai encore le MEJ dans mon cœur.
Quand j’étais animateur de camps de vacances, voir l’avenir de ces enfants, 14-15 ans, beaucoup avait déjà goûter au paka, certains étaient déjà des fêtards, j’étais touché par un jeune, qui ne voyait pas ses parents comme des exemples de vie, de sa vie. Je connais très bien la réputation d’une des vallées des îles Marquises, et c’est un peu similaire dans d’autres vallées de ces mêmes îles, des parents économisent pour faire la fête, où alcool et paka étaient plus importants, pour entrer dans une posture d’hors contrôle, ou de sensation forte, ou de trans… on faisait des économies pour ne plus être soi-même. Cette réalité me rend triste.
Je pense d’ailleurs que s’il y a un taux d’alcoolémie très importante en Polynésie c’est en général dû à un taux de précarité importante chez beaucoup de famille. Ça me rend triste tout ça.
C’est en voyant le Fr Omer se plier en quatre pour ces enfants, que j’ai compris que le chemin que je veux prendre sera un chemin difficile.
Je me suis alors posé la question du « pourquoi pas devenir frère-religieux, comme le frère Omer ? ». Mais il ne peut pas être prêtre, alors non, je vais envisager cette possibilité plus tard.
Mgr Pascal, un prêtre-religieux ou un frère-prêtre.
En décembre 2010, l’ordination de Mgr Pascal. J’allais souvent le voir chez lui, j’étais en Second Général du Collège de Taiohae. Il arrivait, il apporté quelque nouveauté à la paroisse, dont l’adoration par les jeunes le vendredi soir à la cathédrale – ces moments là, étaient des moments de profondeurs, c’est la première fois que je priai en silence, j’étais habitué à prier automatiquement, Acte de Contrition, Notre Père, 10 Ave Marie, 1 Gloria, etc… Mais l’adoration eucharistique, avec Mgr Pascal qui est un homme de prière, on était vite emporté dans la prière, et j’ai encore gardé ce silence et cette profondeur de vie de prière, c’est un cadeau que le Seigneur m’a donné à travers Mgr Pascal.
En fait, Mgr Pascal venait de la communauté de Moorea, et pour moi, ça tombait bien, il fallait que je poursuive mes études du lycée à Moorea. Je me suis approché auprès de Mgr Pascal pour lui demander s’il connaissait quelqu’un qui pourrait me loger à Moorea, il m’a réglé rapidement l’affaire, il m’avait proposé d’aller à la communauté du Noviciat pour y loger le week-end et les vacances, et c’était le Vice-Provincial de l’époque le P. William TEPA qui m’avait accepté (internat du lycée agricole fermée le week-end). Deux ans à Moorea, je fais connaissance des frères François, Ferdinand, Merehau, William Tepa, et bien d’autres encore.
À Moorea, à la communauté du Noviciat de Paopao, je découvre l’existence de vie communautaire où les frères peuvent être prêtre, je me suis dit que c’était là ma place.
J’avais même perdu de vue mes études.
Le Choix de cette orientation au lycée agricole, est dû au fait que je souhaitais devenir agriculteur-maraîcher. Je remarquais que tout ce que je semais pousser facilement, et j’étais toujours émerveillé par la nature. Quand je passais mes vacances à Terre Déserte, chez mon oncle, il m’arrivait, après le boulot, de m’évader en montagne pour m’asseoir et contempler l’horizon. Comment ne pas reconnaître là, la main de Dieu qui dit qui Il est pour nous ses enfants ?
Au Séminaire de Tahiti à Orléans.
Après l’obtention du BACCALAUREAT, Mgr Pascal m’avait proposé d’entrer au Séminaire. Pour moi, c’était l’occasion tant rêvée, « c’est à porter de main », je fonce !
J’étais jeune et encore immature intellectuellement. Tout de suite après le lycée, j’ai demandé à entrer au Séminaire de Tahiti.
J’ai fais deux ans, une propédeutique, et une année de philosophie. Puis Mgr Guy m’a demandé d’aller à Orléans pour une meilleur formation pastorale et intellectuelle (Séminaire où sont actuellement nos frères séminaristes de Tahiti, Ravaki, Timi, Marcel, Tareva et Martin).
Je pense que Mgr Guy avait pris cette décision pour m’aider à discerner en toute liberté, j’étais pris par la famille et des amis - ou connaissances - qui me flattaient que c’était le meilleur chemin, que j’ai fini par perdre le vrai but du discernement. Un chemin avec Christ est un chemin de liberté.
D’ailleurs au Séminaire d’Orléans, je commençais à comprendre tout l’importance du détachement, de soi, de sa famille, de ses habitudes, de son petit confort. Aux Marquises on ne trouve pas de miséreux, ou de SDF, ou de prostitués etc… non, il n’y a pas tout ça aux Marquises, ou peut-être pas encore. J’ai compris ce que c’était la miséricorde, d’ailleurs le thème de ma première année à Orléans c’était l’année de la Miséricorde. L’évêque d’Orléans nous avait donné une belle définition de la miséricorde, où l’on peut entendre deux mots, Misère et cordiae, c’est à dire, le Cœur, et il nous disait que celui qui vivait l’expérience de la miséricorde c’était celui qui était touché au plus profond de son Cœur par la misère de son frère ou de sa sœur. Le café pour les gens qui dorment dans les rues, pour quelques prostitués etc… les familles qui rendent visitent à leur père ou mère et époux ou épouse en détention, fatigué par le voyage… les gens en fin de vie à l’hôpital… etc… voilà des expériences de miséricorde que j’ai pu vivre à Orléans.
Avec la communauté de Picpus.
Durant mes deux ans au Séminaire d’Orléans, Mgr Guy Chevalier m’avait demandé de passer les week-ends libres et les vacances à la Communauté de Picpus, où j’ai fait connaissance de frères des Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie, dit de Picpus, ainsi j’ai pu continuer à fréquenter les frères de la Congrégation, on les appelles ou les SSCC, ou les Picpuciens (c’est plus commun), et parmi ces frères, j’en ai rencontré un, qui a été attentif à ce que je disais et après m’avoir patiemment écouté il m’avait dit ceci : « Mon petit loulou, en fait, pour qui tu t’engages, pour le diocèse des Marquises ? Si c’est ça, tu n’iras pas loin… Tu es sûr que tu t’es posé la bonne question ? Pour qui veux-tu remettre ta vie ? Pour Qui ? ».
Depuis cette question, beaucoup d’événements se sont précipités dans ma vie. J’ai eu l’occasion de rencontrer des frères missionnaires. J’ai eu la chance de partager avec un frère qui a été longtemps à Quito, il voulait aller au Pérou, mais son supérieur lui a demandé d’aller en Équateur. Il est parti, et il ne voulait plus revenir, en lui, une phrase a donc surgi : « Dieu, il ne m’a pas donné tout ce que je lui ai demandé, par contre, il m’a fait aimer tout ce que j’avais ».
J’ai demandé à quitter le Séminaire d’Orléans, pour entrer au Postulat (une année où on commence à prendre nos repères dans cette grande famille), puis l’année du noviciat, l’année canonique, que demande Rome avant de pouvoir faire la profession des Vœux de Pauvreté, Chasteté et d’obéissance. J’ai demandé à entrer dans la Province de France-Polynésie, et j’ai fait l’année de Noviciat en Espagne. Une expérience vraiment bien, où on apprend à nous découvrir sous tous les angles. Il y avait des choses de moi-même que je ne connaissais même pas. L’année de noviciat, est une année unique, et importante, d’ailleurs c’est l’expérience d’un moment en un lieu où l’on discerne pour répondre à l’appel de Dieu. Pour nous aider le maître des novices nous donnait matière à discerner :
Apostolat :
- Bénévole à la maison d’accueil pour les personnes SDF ou sortant de Prison « Padre Damian ».
- Classe de Français pour quelques élèves qui avaient demandé comme option L. Français, mais avaient des difficultés avec cette langue.
- Jeux de société ou autres avec les jeunes de la rue, dans les locaux de la paroisse durant l’hiver.
- Visite des personnes qui vivaient seules. (initiative personnelle).
Intellectuelle :
- Lectures de livres concernant la congrégation.
- Participation à un Cours en Bible à la Faculté Pontifical de Salamanca. Un moyen de se familiariser encore plus avec les Saintes Ecritures, et à travers elles, Jésus.
- Des Sessions inter-Noviciat, et autres sessions.
- Réunions de formation propre aux novices.
Humaine :
- Assiduité et participation aux heures communautaire, repas, détentes, prières, réunions, excursions, et autres…
Spirituelle :
- Adoration, prières, oraisons personnelles, eucharistie, retraites spirituelles…
Cette année de noviciat, a été pour moi l’occasion de faire du ménage dans ma vie affective et spirituelle. Et de pouvoir mettre la première pierre de fondation sur laquelle je voudrais fonder ma vie.
Le choix de mettre sur ma carte d’invitation « Le Seigneur nous a conduits comme par la main » est un choix pensé. Cette phrase, si je la développe, ça donnerait, « Le Seigneur nous a conduit comme un père tient la main de son enfant pour construire sa vie avec lui ».
Je sais qu’en choisissant le Seigneur, je me prépare à vivre et à réaliser d’une manière particulière mes aspirations profondes de maraîcher, d’éleveur et de pêcheur. Oui je suis un enfant de « fa’a’apu » j’adore la brousse, les champs, la pêche, la chasse etc… C’est une vie qui me dit beaucoup de chose. Mais le Seigneur n’éteint pas nos aspirations ou nos qualités, au contraire, il nous invite à les mettre à son service. Semeur, pour semer la Bonne Nouvelle dans le cœur des gens. Pêcheur, comme Jésus invitait Pierre à devenir pêcheur d’homme. Et éleveur, comme celui qui va à la recherche de la brebis perdue. Voilà comment aujourd’hui, j’entends répondre à l’appel d’un ami qui m’a accompagné, malgré toutes ces fois où j’ai pris de mauvaises décisions, malgré toutes ces fois où j’étais récalcitrant, malgré toutes ces fois où j’ai manqué d’amour et de charité… Il n’a pas cessé de m’aimer, et il sait qu’un jour je l’aimerai comme lui il m’aime. « Pierre m’aimes-tu, plus que ceci ?… Suis-moi ».
J’ai un parcours atypique. Je ne sais pas si mon chemin est un exemple à suivre. Par contre, en relisant mon parcours, je comprends enfin ce que signifie cette phrase entendue lors d’une retraite en Espagne « Dieu nous appelle personnellement ». L’appel du Seigneur est personnel. J’ai choisi comme phrase principale pour ma carte d’invitation, une citation de notre Fondateur, P. Marie-Joseph Coudrin, « Le Seigneur nous a conduits comme par la main ». C’est dans ce sens que je me vois cheminer avec Christ, comme un enfant tenant la main de son père. Dieu nous laisse libre dans nos décisions, et lorsqu’on agit en son nom, avec Lui, pour Lui et en Lui, non seulement il nous accompagne, mais en plus il multiplie notre action. J’ai parfois pris des décisions hâtives, sans discernement, mais le Seigneur m’accompagne en mettant des personnes sur ma route vocationnelle, des personnes qui me veulent heureux sur un chemin non confortable, sur un chemin exigeant. Je reprendrai la citation d’un père missionnaire, longtemps en Équateur « Le Seigneur ne m’a pas donné ce que je voulais, mais il m’a fait aimer ce que j’ai déjà ».
Je commence un nouveau pas dans ma vie, et un adage important que nous avons appris au noviciat, « nous ne choisissons pas nos frères, nous apprenons à vivre avec eux ». Voilà le début de notre mission, qui se manifeste ensuite dans la société au quelle nous sommes envoyés. La mission commence en communauté, la mission commence en famille.
Frère Chadwick–Joseph
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…et d’hier
Sœur RICHEMOND Marie de la Purification, s.j.c.
Et pour conclure ce petit tour des missionnaires polynésiens, voici l’histoire de la 1ère sœur polynésienne et missionnaire partie servir à Haiti…
Petite chronologie :
Jeanne Diana RICHMOND
Fille de Joseph Dana RICHMOND
Et de Toru TURA
Née à Papeete – Tahiti le 1er février 1854
Entrée en religion à Thiais le 6 novembre 1876
Pris le saint habit à Paris le 26 avril 1877
1ère émission à Paris le 19 mars 1879
Vœux perpétuels à Haïti le 8 janvier 1891
Haïti – Gonaïves : 1879 – 3ème classe primaire, ouvrage
Port-au-Prince – Séminaire 188, lingerie
Id. Maison principale, 1888 – lingerie communauté et pensionnaires
Baradères 27 mars 1889 – 3ème classe, ouvrage, lingerie
1890 – classe enfantine, infirmerie, scristie
1891 – id. ouvrage
Gonaïve, hospice décembre 1892 – infirmière, lingerie
1894 – infirmière, lingerie des pauvres et des malades
Port-au-Prince, ateliers St Joseph janvier 1898 – infirmières Pères et enfants?–
Id. orphelinat 1899 – infirmière, couture
1901 – ouvrage, gardes
1902 – Id. confection chemises d’hommes
1903 – Id. discipline
1912 – chargée de couture, racommodage vêtements hommes
Décédée Port-au-Prince (Haïti) le 27 janvier 1919.
Lettre de la Sœur Elisabeth à Madame Gaudin.
Port-au-Prince 30 Janvier 1919
Chère Madame,
Il m’est pénible d’avoir à vous annoncer une nouvelle qui, certainement vous attristera ; mais il m’est consolant d’avoir à vous parler de notre bonne sœur Marie de la Purification qui nous a quittées pour un monde meilleur, lundi, 27 janvier, à 3 heures du matin.
Depuis un mois Sœur Marie souffrait davantage de ces petits malaises qui lui étaient ordinaires ; et la fièvre intestinale étant survenue, elle nous fut enlevée, après quelques jours seulement de sérieuse maladie.
La veille de sa mort j’allai la visiter ; elle avait toute sa connaissance, et rien, sur sa physionomie ne faisait pressentir la fin ; elle me demanda si j’avais eu des nouvelles de Tahiti, ajoutant aussitôt que depuis longtemps elle n’avait rien reçu ; et ce fut tout.
Les soins les plus maternels, les plus dévoués lui furent prodigués, et rien ne fut épargné pour adoucir ses derniers moments.
Ce pays d’Haïti qu’elle habitait depuis 40années se montra reconnaissant de son dévouement, et durant le long parcours de l’orphelinat de la Madeleine à la maison principale, le lieu de son repos, les habitants de Port-au-Prince la saluèrent avec respect.
Deux Archevêques, un nombreux clergé régulier et séculier honorèrent de leur présence les obsèques de l’humble religieuse.
Les orphelines la pleurèrent comme une mère, et toutes, aimons à nous rappeler sa grande bonté.
Pour moi, je ne vois pas disparaître sans émotions, Sœur Marie, la première Tahitienne appelée et choisie par Dieu.
Je vous conseille, chère Madame, de faire offrir quelques fois le saint sacrifice de la Messe pour le repos de l’âme de celle qui fut la bénédiction et l’honneur de son pays. De là-haut, elle vous en sera reconnaissante, et s’il n’est pas dans les desseins de Dieu de se choisir une fois encore parmi les vôtres une belle âme pour la remplacer ici-bas, elle continuera mieux que jamais de prier pour sa famille à laquelle elle garda jusqu’à la fin le plus fidèle, le plus affectueux souvenir.
Notre bonne Mère Supérieure vous envoie pour elle, pour son district, ses plus religieuses condoléances et vous prie, Madame, de vouloir faire part aux membres de votre famille de la douloureuse nouvelle.
Je me rappelle à votre bon souvenir, et assure de mes prières chacune des enfants qui m’ont connu et auxquelles je me suis autrefois, si vivement intéressée.
Sr Elisabeth de St Antoine.
Témoignage familial
Pour parfaire son instruction, Raymond qui avait suivi une série de cours à l’École des Radios du Mourillon, sur la Méditérranée, Var, France et satisfait à toutes les épreuves, fut embarqué à bord du croiseur École Jeanne d’Arc, pour une durée de deux ans, ce qui lui permit aussi de visiter des pays divers et de retrouver des fetii, des amis ou des connaissances, parfois bien loin de notre île natale.
Le 10 novembre 1934, la Jeanne d’Arc fit escale à Port-au-Prince, capitale de la République de Haïti où notre TAIANA « passa quarante années de sa vie religieuse ». Sachant qu’elle repose au cimetière des Sœurs de Saint Joseph de Cluny, Raymond ne voulait pas manquer d’aller s’incliner sur sa tombe, mais comment y accéder ? Il s’informa et chercha à entrer en relation avec une des sœurs de cette congrégation, afin d’avoir des précisions quant au chemin à suivre pour y parvenir. Il ne tarda pas trouver la maison religieuse où TAIANA œuvra avec beaucoup de dévouement « fidèle à son devoir quelque pénible qu’il fût ». Il sonne, on ouvre la porte, à sa grande surprise, Raymond reconnu Mademoiselle Madeleine BODIN, de Tahiti, en religion Sœur Hélène de la Croix. Les civilités faites, les nouvelles de Tahiti communiquées, mon frère lui dit le but de sa visite. Sœur Hélène lui offrit de le guider et ils s’acheminèrent vers la dernière demeure de notre TAIANA. En voici l’épitaphe : « SŒUR MARIE DE LA PURIFICATION RICHMOND » sans dates. Ils se recueillirent, restèrent quelques instants près de sa tombe et revinrent au Couvent. Lui ayant exprimé ses sentiments reconnaissants, Raymond prit congé de Sœur Hélène et tristement s’en retourna.
Treize ou quinze ans avant la fin du siècle dernier, des fetii revenant de France à Tahiti par les États-Unis firent un détour et entreprirent le voyage au pays de Haïti pour revoir TAIANA et lui donner des nouvelles de Tahiti. Quand TAIANA les aperçut, elle fondit en larmes, pleura longtemps et leur parut désemparée. L’un d’eux pensa que l’ambiance de Port-au-Prince, où elle se dépensait, ne lui convenait pas du tout et qu’elle ne s’adapterait jamais à la vie dans cette ville, que la nostalgie la minait et qu’il fallait la ramener à Tahiti.
- « Sans aucun doute le travail est moins ardu sous notre ciel, lui dit-il. Si tu ne pouvais t’adapter à la vie dans ce pays, si tu souhaitais servir Dieu dans notre petite île, je solliciterais de votre Supérieure un entretien, j’interviendrais en ta faveur. Si des difficultés surgissaient, je m’efforcerais de les aplanir. Je ne m’en retournerai pas avant d’avoir obtenu la permission de t’emmener ».
- « Je te remercie de ta bonté. Ne te tourmente pas, je t’en prie. Ma foi me soutient. Il est vrai que mes pensées s’envolent souvent vers notre cher pays. Je me réjouirais de retrouver ma mère et les nôtres, mais je dois servir Dieu où bon lui semble. J’ai prononcé mes vœux ».
Sa mort
L’humble Sœur missionnaire aima le pays d’Haïti, et les petites orphelines confiées à ses soins ressentirent les effets de sa constante sollicitude. Vis-à-vis de ses Supérieures, elle se montra obéissante, soumise, et ses compagnes louent sa bonté et son tact à réconforter et à consoler. Des infirmités rendirent pénibles les dernières années de sa vie ; elle vit alors son activité comprimée, mais elle garda dans son humble sphère d’action le dévouement et l’entier oubli de soi qui la caractérisaient. Ses œuvres furent modestes, mais Dieu qui lit au fond des cœurs a dû récompenser cette âme de foi qui ne travaillait que pour lui.
Sœur Marie de la Purification quitta cette terre d’exil le 27 janvier 1919.
© Cathédrale de Papeete – 2019
Commentaire des lectures du dimanche
Chers frères et sœurs, bonjour !
La seconde lecture de la liturgie du jour nous présente l’exhortation de saint Paul à Timothée, son collaborateur et fils bien-aimé, dans laquelle il repense à son existence d’apôtre entièrement consacré à la mission (cf. 2Tm 4,6-8.16-18). Voyant désormais approcher la fin de son chemin terrestre, il le décrit en référence à trois saisons : le présent, le passé, le futur.
Le présent, il l’interprète avec la métaphore du sacrifice : « Je suis déjà répandu en libation » (v.6). En ce qui concerne le passé, Paul indique sa vie passée à travers les images du « bon combat » et de la « course » d’un homme qui a été cohérent avec ses engagements et ses responsabilités (cf. v.7) ; par conséquent, pour l’avenir, il espère en la reconnaissance de la part de Dieu, qui est « le juste juge » (v.8). Mais la mission de Paul se révèle efficace, juste et fidèle uniquement grâce à la proximité et à la force du Seigneur, qui a fait de lui un annonciateur de l’Évangile à tous les peuples. Voici son expression : « Le Seigneur, lui, m’a assisté et m’a rempli de force afin que, par moi, le message fût proclamé et qu’il parvînt aux oreilles de tous les païens » (v.17).
Dans ce récit autobiographique de saint Paul se reflète l’Église, en particulier aujourd’hui, journée mondiale des missions, dont le thème est « Église missionnaire, témoin de miséricorde ». En Paul, la communauté chrétienne trouve son modèle, dans la conviction que c’est la présence du Seigneur qui rend efficace le travail apostolique et l’œuvre d’évangélisation. L’expérience de l’apôtre des nations nous rappelle que nous devons nous engager dans les activités pastorales et missionnaires, d’une part, comme si le résultat dépendait de nos efforts, avec l’esprit de sacrifice de l’athlète qui ne s’arrête pas même face aux défaites ; de l’autre, cependant, en sachant que le vrai succès de notre mission est un don de la Grâce : c’est l’Esprit Saint qui rend efficace la mission de l’Église dans le monde.
Aujourd’hui est le temps de la mission et le temps du courage ! Le courage de renforcer les pas vacillants, de reprendre le goût de se dépenser pour l’Évangile, de reprendre confiance dans la force que la mission porte en elle. C’est le temps du courage, même si avoir du courage ne signifie pas avoir la garantie du succès. Il nous est demandé du courage pour lutter, pas nécessairement pour vaincre ; pour annoncer, pas nécessairement pour convertir. Il nous est demandé du courage pour être des alternatives au monde, mais sans jamais faire de polémiques ou être agressifs. Il nous est demandé du courage pour nous ouvrir à tous, sans jamais réduire l’absolu et l’unicité du Christ, unique Sauveur de tous. Il nous est demandé du courage pour résister à l’incrédulité, sans devenir arrogants. Il nous est demandé aussi le courage du publicain de l’Évangile d’aujourd’hui, qui avec humilité n’osait pas même lever les yeux au ciel, mais se frappait la poitrine en disant : « O Dieu, aie pitié de moi pécheur » . Aujourd’hui c’est le temps du courage ! Aujourd’hui il faut du courage !
Que la Vierge Marie, modèle de l’Église « en sortie » et docile à l’Esprit Saint, nous aide à être tous, par la force de notre baptême, des disciples missionnaires pour apporter le message du salut à toute la famille humaine.
© Libreria Editrice Vaticana – 2016