Pko 22.04.2018
Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°23/2018
Dimanche 22 avril 2018 – 4ème Dimanche de Pâques – Année B
Humeurs…
Pour quel idéal ?
Depuis 55 ans, le quatrième dimanche de Pâques est consacré à la prière pour les vocations. En Polynésie, cette prière ne se limite pas qu’à ce dimanche car dans certaines communautés paroissiales, chaque jour la « prière pour les vocations » est récitée…
Mais quel idéal proposons-nous à la nouvelle génération ? Car il s’agit bien de proposer un idéal pour que naisse une vocation ou du moins qu’elle soit entendue !
Pouvons-nous éveiller des vocations si nous vivons comme des fonctionnaires de Dieu, si nous concevons notre mission comme un métier parmi d’autres de notre société moderne ? Nous sommes tous appelé à une conversion de notre regard sur la mission du prêtre…
Quel idéal, lorsque l’on parle d’un droit de vacances un mois par an ? Quel idéal lorsque l’on parle d’un jour sans célébrer la messe au nom du droit au repos ? Quel idéal lorsque l’Église se gère comme une quelconque entreprise … couvrant parfois des attitudes et des comportements injustes et frauduleux ?
Comment pouvons-nous espérer voir des personnes, des jeunes en particulier, se mettre à la suite du Christ… si nous ne vivons pas notre engagement comme un idéal… un don de soi… si avec le Christ, nous ne nous laissons pas manger… mais si nous sommes des fonctionnaires de Dieu !
Laissez-moi vous dire…
22 avril 2018 : Journée mondiale de prière pour les vocations
Jeunes « Geeks », Jeunes « Neet » et autres… appelés par Dieu ?!
Un dimanche après-midi ma petite-fille me demande : « Papy, tu peux me prêter ton portable ? ». « Pas de problème, mais ne me mange pas tout mon forfait ». Deux minutes après : « Ouah Papy, quelle horreur ! T’as même pas accès à Internet, même pas un écran tactile … tu devrais quand même être un peu plus “geek” ! ».
Je croyais qu’un téléphone était fait pour téléphoner…
Pour moi un « geek » était une espèce d’hurluberlu, un gars un peu déjanté comme les « gilles » du carnaval de Dunkerque. Pour ne pas paraître ringard, je suis allé consulter mes dictionnaires… Dans le dictionnaire de Cambridge « geek » se prononce [gi :k] (c-à-d : guique en allongeant un peu le « i »). Le Larousse indique : « geek » = mot anglo-américain signifiant « fou de ». Fan d’informatique, de science-fiction, de jeux vidéo… toujours à l’affût de nouveautés et des améliorations à apporter aux technologies numériques… Ma petite fille avait raison… je ne suis peut-être pas assez « geek » !
Une autre petite-fille - un peu plus âgée - me demande : « Tu peux m’aider à préparer un exposé sur la jeunesse “NEET” ? » … « Euh, laisse-moi un peu de temps pour rassembler quelques documents… »
En fait je ne savais rien des « NEET » (c-à-d. : Neither Employment, Education or Training/ en français : Ni en Emploi, ni Étudiant, ni en Formation). Cette dénomination a été adoptée comme indicateur en 2010 par l’Union Européenne et l’OCDE pour désigner les jeunes de 15 à 29 ans qui sont sans emploi, sans diplôme et qui ne bénéficient d’aucune formation. En France ils sont 1,8 millions, soit 16,6% de cette tranche d’âge. [Source : OCDE, regards sur l’éducation - 2016]. En Polynésie française le taux serait de 29% [estimation non confirmée par l’ISTAT].
En octobre prochain, le Pape François a convoqué l’Assemblée Générale du synode des évêques qui sera consacrée aux jeunes : « Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel ». Dans cette perspective, il nous invite à prier, spécialement en ce 22 avril, non seulement pour les jeunes mais aussi pour nous-mêmes car : « Le Seigneur continue aujourd’hui à appeler à Le suivre. Nous ne devons pas attendre d’être parfaits pour répondre notre généreux “me voici”, ni nous effrayer de nos limites et de nos péchés, mais accueillir avec un cœur ouvert la voix du Seigneur. L’écouter, discerner notre mission personnelle dans l’Église et dans le monde, et enfin la vivre dans l’aujourd’hui que Dieu nous donne. » [Message du Pape François pour la 55ème journée mondiale de prière pour les vocations]
Finalement, en lisant le message du Pape, je prends conscience que le Seigneur peut appeler quiconque pourvu qu’on écoute, discerne et vive la Parole de Dieu qui nous appelle. Jésus a bien appelé des artisans-pêcheurs, un collecteur d’impôts, des sans-emploi… pourquoi n’appellerait-il pas des « geek », des « NEET » et autres jeunes et … moins jeunes à Le servir comme prêtres, religieux, religieuses…
Mais il faut également que nous retroussions nos manches et soyons les relais de cet appel divin !
Dominique Soupé
Note : À l’occasion de cette journée de prière, interrogeons-nous : combien de jeunes nous ont parlé de vocation sacerdotale ou religieuse ? combien avons-nous encouragé et soutenu de jeunes en recherche vocationnelle ? À quel(s) jeune(s) avons-nous parlé de la vocation religieuse ou sacerdotale ?
© Cathédrale de Papeete - 2018
En marge de l’actualité…
Pour une sainteté reçue de l’Esprit
Le temps pascal suit son cours. Les textes de la messe accompagnent notre marche jusqu’au point culminant de la réception de l’Esprit par les apôtres le jour de la Pentecôte. Les passages d’évangiles, tirés de saint Jean, mettent en relief la continuité de la présence du Christ tandis qu’approche son départ définitif célébré à l’Ascension.
En parallèle, les premières lectures sont extraites du livre des Actes des Apôtres. Elles déploient sous nos yeux déjà l’action de l’Esprit dans les toutes premières communautés chrétiennes, signe que la promesse du don de l’Esprit par le Christ se réalise effectivement. Des évangiles aux premières lectures, il y a dès lors une continuité qui se prolonge jusqu’à aujourd’hui dans nos communautés et dans le cœur des croyants.
Nous attirons l’attention sur les discours que Pierre adresse au peuple Juif dans les Actes des Apôtres. Pierre est virulent à l’encontre de ses compatriotes, criant haut et fort leur responsabilité dans la mort du Christ. Ces passages risquent de nous faire tomber dans le piège de l’antijudaïsme. L’expression de « peuple déicide » a malheureusement été employé au cours de l’histoire pour justifier une relation haineuse. Qu’il soit bien clair pour tous que ce temps est révolu.
L’Évangile du Christ apaise les cœurs et provoque irrémédiablement le rejet de la violence et de la haine. Un détail crucial est mentionné par les évangiles qui relatent les moments où le Christ ressuscité se rend présent au milieu des apôtres. Pour se faire reconnaître, il montre explicitement ses blessures, manière de nous montrer que celles-ci ne sont pas pour lui sources de rancœur et de désir de vengeance (à la différence très souvent de nous), mais au contraire sources de vie.
Dans son exhortation apostolique sur la sainteté, le pape François affirme que la sainteté, « c’est vivre les mystères de sa vie en union avec lui », s’associer à sa mort et à sa résurrection de façon « à mourir et à ressusciter constamment avec lui ». Que chacun reçoive l’Esprit du Christ pour une vie chrétienne sans colère et pleine de Vie.
Père Vetea BESSERT
© Archidiocèse de Papeete - 2018
Audience générale…
Lors du baptême, le Seigneur nous appelle personnellement
Lors de l’audience générale, le Pape François a poursuivi son enseignement sur le baptême, en rappelant que ce rite fait sortir le chrétien de l’anonymat. Que l’on soit baptisé dans sa petite enfance ou dans sa maturité, par choix personnel, il s’agit toujours d’un rite qui ouvre à une expérience personnelle de la relation avec Dieu.
Chers frères et sœurs, bonjour !
Nous continuons, en ce temps de Pâques, les catéchèses sur le baptême. La signification du baptême ressort clairement de sa célébration, c’est pourquoi nous lui portons notre attention. En considérant les gestes et les paroles de la liturgie, nous pouvons saisir la grâce et l’engagement de ce sacrement, qui est toujours à redécouvrir. Nous en faisons mémoire dans l’aspersion avec l’eau bénite qui peut se faire le dimanche au début de la messe, ainsi que lors du renouvellement des promesses du baptême pendant la Vigile pascale. En effet, ce qui se produit lors de la célébration du baptême suscite une dynamique spirituelle qui traverse toute la vie des baptisés ; c’est le commencement d’un processus qui permet de vivre unis au Christ dans l’Église. C’est pourquoi, retourner à la source de la vie chrétienne nous fait mieux comprendre le don reçu le jour de notre baptême et renouveler notre engagement à y correspondre dans la condition où, aujourd’hui, nous nous trouvons. Renouveler notre engagement, mieux comprendre ce don qu’est le baptême et nous souvenir du jour de notre baptême. Mercredi dernier, j’ai demandé de faire un devoir à la maison et à chacun de nous, de se souvenir du jour de son baptême, quel jour j’ai été baptisé. Je sais que certains d’entre vous le savent, d’autres non ; ceux qui ne le savent pas, qu’ils le demandent à leurs parents, à ces personnes, aux parrains, aux marraines… qu’ils le demandent : « Quelle est la date de mon baptême ? » Parce que le baptême, c’est une renaissance et c’est comme si c’était le second anniversaire. Compris ? Faire ce devoir à la maison, demander : « Quelle est la date de mon baptême ? »
Avant tout, dans le rite d’accueil, on demande le nom du candidat, parce que le nom indique l’identité d’une personne. Quand nous nous présentons, nous disons tout de suite notre nom : « Je m’appelle ainsi », pour sortir de l’anonymat, l’anonyme est celui qui n’a pas de nom. Pour sortir de l’anonymat, tout de suite nous disons notre nom. Sans nom, on reste des inconnus, sans droits ni devoirs. Dieu appelle chacun par son nom, en nous aimant personnellement, dans le concret de notre histoire. Le baptême constitue la vocation personnelle à vivre en chrétiens, qui se développera pendant toute la vie. Et il implique une réponse personnelle et non empruntée, avec un « copier-coller ». La vie chrétienne, en effet, est tissée d’une série d’appels et de réponses : Dieu continue de prononcer notre nom au cours des années, en faisant résonner de mille manières son appel à devenir conformes à son Fils Jésus. Le nom est donc important ! C’est très important ! Les parents pensent au nom à donner à leur enfant dès avant sa naissance : cela fait aussi partie de l’attente de l’enfant qui, en son nom propre, aura son identité originale, y compris pour la vie chrétienne liée à Dieu.
Certes, devenir chrétien est un don qui vient d’en-haut (cf. Jn 3,2-8). La foi ne peut pas s’acheter, mais demander, oui, et recevoir en don, oui. « Seigneur, offre-moi le don de la foi » est une belle prière ! « Que j’aie la foi » est une belle prière. La demander comme un don, mais on ne peut pas l’acheter, elle se demande. En effet, « le baptême est le sacrement de cette foi avec laquelle les hommes, éclairés par la grâce de l’Esprit-Saint, répondent à l’Évangile du Christ » (Rite du baptême des enfants, Introduction générale, n.3). La formation des catéchumènes et la préparation des parents visent à susciter et à réveiller une foi sincère en réponse à l’Évangile, comme l’écoute de la Parole de Dieu au cours de la célébration du baptême.
Si les catéchumènes adultes manifestent en personnes ce qu’ils désirent recevoir en don de la part de l’Église, les enfants sont présentés par leurs parents, avec les parrains et marraines. Le dialogue avec eux leur permet d’exprimer leur volonté que les petits reçoivent le baptême et de dire à l’Église leur intention de le célébrer. « Le signe de croix, que le célébrant et les parents tracent sur le front de leurs enfants, en est l’expression » (Rite du baptême des enfants, Introd. n.16). « Le signe de croix exprime le sceau du Christ sur celui qui va lui appartenir et signifie la grâce de la rédemption que le Christ nous a acquise par le moyen de sa croix » (Catéchisme de l’Église catholique, 1235).
Au cours de la cérémonie, nous faisons sur les enfants le signe de croix. Mais je voudrais revenir sur une question dont je vous ai parlé. Nos enfants savent-ils bien faire le signe de croix ? Bien souvent, j’ai vu des enfants qui ne savent pas faire le signe de croix. Et vous, papas, mamans, grands-parents, parrains et marraines, vous devez enseigner à bien faire le signe de croix parce que c’est refaire ce qui a été fait au baptême. Avez-vous bien compris ? Enseigner aux enfants à bien faire le signe de croix. S’ils l’apprennent enfants, ils le feront bien ensuite, quand ils seront grands.
La croix est le signe distinctif qui manifeste qui nous sommes : ce que nous disons, ce que nous pensons, regardons, faisons, est sous le signe de la croix, à savoir sous le signe de l’amour de Jésus jusqu’au bout. Les enfants sont marqués sur le front. Les catéchumènes adultes sont marqués aussi sur les sens, par ces paroles : « Recevez le signe de croix sur les oreilles pour écouter la voix du Seigneur », « sur les yeux pour voir la splendeur du visage de Dieu », « sur la bouche pour répondre à la parole de Dieu », « sur la poitrine pour que le Christ habite par le moyen de la foi dans vos cœurs », « sur les épaules pour porter le joug aisé du Christ » (Rite de l’initiation chrétienne des adultes, n.85). On devient chrétien dans la mesure où la croix s’imprime en nous comme une marque « pascale » (cf. Ap 14,1 ; 22,4), en rendant visible, même extérieurement, la manière chrétienne d’aborder la vie. Faire le signe de croix quand nous nous réveillons, avant les repas, devant un danger, pour se défendre contre le mal, le soir avant de dormir, signifie se dire à soi-même et dire aux autres à qui nous appartenons, qui nous voulons être. C’est pourquoi il est si important d’enseigner aux enfants à bien faire le signe de la croix. Et, de même que nous le faisons en entrant dans une Église, nous pouvons le faire aussi à la maison, en conservant dans un petit récipient adapté un peu d’eau bénite – certaines familles le font : ainsi, chaque fois que nous entrons ou sortons, en faisant le signe de croix avec cette eau, nous nous rappelons que nous sommes baptisés. N’oubliez pas, je le redis : enseigner aux enfants à faire le signe de croix.
© Libreria Editrice Vaticana – 2018
55ème Journèé mondiale des vocation…
Écouter, discerner, vivre l’appel du Seigneur
Ce message qui a pour thème « écouter, discerner, vivre l’appel du Seigneur », s’intègre dans la préparation du Synode prévu en octobre 2018 sur le thème « Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel ». « Nous ne sommes pas plongés dans le hasard, ni entraînés par une série d’évènements désordonnés, mais, au contraire, notre vie et notre présence dans le monde sont fruits d’une vocation divine ! ». Le Pape le rappelle dans ce message plein d’espérance. « Même dans nos temps inquiets, le Mystère de l’Incarnation nous rappelle que Dieu vient toujours à notre rencontre. »
Chers frères et sœurs,
En octobre prochain, se déroulera la XVème Assemblée Générale ordinaire du Synode des Évêques, qui sera consacrée aux jeunes, en particulier au rapport entre jeunes, foi et vocation. A cette occasion, nous aurons la possibilité d’approfondir comment, au centre de notre vie, il y a l’appel à la joie que Dieu nous adresse et comment cela est « le projet de Dieu pour les hommes et les femmes de tout temps » (Synode des Évêques, XVème Assemblée Générale Ordinaire, Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel, Introduction).
Il s’agit d’une bonne nouvelle qui nous est annoncée avec force par la 55ème Journée mondiale de Prière pour les Vocations : nous ne sommes pas plongés dans le hasard, ni entraînés par une série d’évènements désordonnés, mais, au contraire, notre vie et notre présence dans le monde sont fruits d’une vocation divine !
Même dans nos temps inquiets, le Mystère de l’Incarnation nous rappelle que Dieu vient toujours à notre rencontre et il est Dieu-avec-nous, qui passe le long des routes parfois poussiéreuses de notre vie et, accueillant notre poignante nostalgie d’amour et de bonheur, nous appelle à la joie. Dans la diversité et dans la spécificité de chaque vocation, personnelle et ecclésiale, il s’agit d’écouter, de discerner et de vivre cette Parole qui nous appelle d’en-haut et qui, tandis qu’elle nous permet de faire fructifier nos talents, nous rend aussi instruments de salut dans le monde et nous oriente vers la plénitude du bonheur.
Ces trois aspects – écoute, discernement et vie – servent aussi de cadre au début de la mission de Jésus, qui, après les jours de prière et de lutte dans le désert, visite sa synagogue de Nazareth, et là, se met à l’écoute de la Parole, discerne le contenu de la mission que le Père lui a confiée et annonce qu’il est venu pour la réaliser « aujourd’hui » (cf. Lc 4, 16-21).
Écouter
L’appel du Seigneur – il faut le dire tout de suite – n’a pas l’évidence de l’une des nombreuses choses que nous pouvons sentir, voir ou toucher dans notre expérience quotidienne. Dieu vient de manière silencieuse et discrète, sans s’imposer à notre liberté. Aussi, on peut comprendre que sa voix reste étouffée par les nombreuses préoccupations et sollicitations qui occupent notre esprit et notre cœur.
Il convient alors de se préparer à une écoute profonde de sa Parole et de la vie, à prêter aussi attention aux détails de notre quotidien, à apprendre à lire les évènements avec les yeux de la foi, et à se maintenir ouverts aux surprises de l’Esprit.
Nous ne pourrons pas découvrir l’appel spécial et personnel que Dieu a pensé pour nous, si nous restons fermés sur nous-mêmes, dans nos habitudes et dans l’apathie de celui qui passe sa propre vie dans le cercle restreint de son moi, perdant l’opportunité de rêver en grand et de devenir protagoniste de cette histoire unique et originale que Dieu veut écrire avec nous.
Jésus aussi a été appelé et envoyé ; pour cela, il a eu besoin de se recueillir dans le silence, il a écouté et lu la Parole dans la Synagogue et, avec la lumière et la force de l’Esprit Saint, il en a dévoilé la pleine signification, référée à sa personne-même et à l’histoire du peuple d’Israël.
Cette attitude devient aujourd’hui toujours plus difficile, plongés comme nous le sommes dans une société bruyante, dans la frénésie de l’abondance de stimulations et d’informations qui remplissent nos journées. Au vacarme extérieur, qui parfois domine nos villes et nos quartiers, correspond souvent une dispersion et une confusion intérieure, qui ne nous permettent pas de nous arrêter, de savourer le goût de la contemplation, de réfléchir avec sérénité sur les évènements de notre vie et d’opérer, confiants dans le dessein bienveillant de Dieu pour nous, un discernement fécond.
Mais, comme nous le savons, le Royaume de Dieu vient sans faire de bruit et sans attirer l’attention (cf. Lc 17, 21), et il est possible d’en accueillir les germes seulement lorsque, comme le prophète Elie, nous savons entrer dans les profondeurs de notre esprit, le laissant s’ouvrir à l’imperceptible souffle de la brise divine (cf. 1 R 19, 11-13).
Discerner
En lisant, dans la synagogue de Nazareth, le passage du prophète Isaïe, Jésus discerne le contenu de la mission pour laquelle il a été envoyé et il le présente à ceux qui attendaient le Messie : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur » (Lc 4, 18-19).
De la même manière, chacun de nous peut découvrir sa propre vocation seulement à travers le discernement spirituel, un « processus grâce auquel la personne arrive à effectuer, en dialoguant avec le Seigneur et en écoutant la voix de l’Esprit, les choix fondamentaux, à partir du choix de son état de vie » (Synode des Évêques, XVème Assemblée Générale Ordinaire, Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel II, 2).
Nous découvrons en particulier, que la vocation chrétienne a toujours une dimension prophétique. Comme nous témoigne l’Écriture, les prophètes sont envoyés au peuple dans des situations de grande précarité matérielle et de crise spirituelle et morale, pour adresser au nom de Dieu des paroles de conversion, d’espérance et de consolation. Comme un vent qui soulève la poussière, le prophète dérange la fausse tranquillité de la conscience qui a oublié la Parole du Seigneur, discerne les évènements à la lumière de la promesse de Dieu et aide le peuple à apercevoir des signes d’aurore dans les ténèbres de l’histoire.
Aujourd’hui aussi, nous avons grand besoin du discernement et de la prophétie ; de dépasser les tentations de l’idéologie et du fatalisme et de découvrir, dans la relation avec le Seigneur, les lieux, les instruments et les situations à travers lesquels il nous appelle. Chaque chrétien devrait pouvoir développer la capacité à « lire à l’intérieur » de sa vie et à saisir où et à quoi le Seigneur l’appelle pour continuer sa mission.
Vivre
Enfin, Jésus annonce la nouveauté de l’heure présente, qui enthousiasmera beaucoup et durcira d’autres : les temps sont accomplis et c’est Lui le Messie annoncé par Isaïe, oint pour libérer les prisonniers, rendre la vue aux aveugles et proclamer l’amour miséricordieux de Dieu à toute créature. Vraiment « aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre » (Lc 4, 20), affirme Jésus.
La joie de l’Évangile, qui nous ouvre à la rencontre avec Dieu et avec les frères, ne peut attendre nos lenteurs et nos paresses ; elle ne nous touche pas si nous restons accoudés à la fenêtre, avec l’excuse de toujours attendre un temps propice ; elle ne s’accomplit pas non plus pour nous si nous n’assumons pas aujourd’hui même le risque d’un choix. La vocation est aujourd’hui ! La mission chrétienne est pour le présent ! Et chacun de nous est appelé – à la vie laïque dans le mariage, à la vie sacerdotale dans le ministère ordonné, ou à la vie de consécration spéciale – pour devenir témoin du Seigneur, ici et maintenant.
Cet « aujourd’hui » proclamé par Jésus, en effet, nous assure que Dieu continue à « descendre » pour sauver notre humanité et nous rendre participants de sa mission. Le Seigneur appelle encore à vivre avec lui et à marcher derrière lui dans une relation de proximité particulière, à son service direct. Et s’il nous fait comprendre qu’il nous appelle à nous consacrer totalement à son Royaume, nous ne devons pas avoir peur ! C’est beau – et c’est une grande grâce – d’être entièrement et pour toujours consacrés à Dieu et au service des frères.
Le Seigneur continue aujourd’hui à appeler à le suivre. Nous ne devons pas attendre d’être parfaits pour répondre notre généreux “me voici”, ni nous effrayer de nos limites et de nos péchés, mais accueillir avec un cœur ouvert la voix du Seigneur. L’écouter, discerner notre mission personnelle dans l’Église et dans le monde, et enfin la vivre dans l’aujourd’hui que Dieu nous donne.
Que Marie la très Sainte, la jeune fille de périphérie, qui a écouté, accueilli et vécu la Parole de Dieu faite chair, nous garde et nous accompagne toujours sur notre chemin.
Du Vatican, 3 décembre 2017
Premier Dimanche de l’Avent
François
© Libreria Editrice Vaticana – 2017
Pouvoir et argent. La justice sociale selon Bergoglio…
Le chemin de la vérité est praticable, même en économie et finance
Il signe la préface du livre « Pouvoir et argent. La justice sociale selon Bergoglio ». « Le chemin de la vérité, de la charité et de la beauté est ardu, mais praticable et nécessaire, même en économie et finance », affirme le pape François. « Tant de travailleurs, d’entrepreneurs et d’administrateurs » qui « sont déjà au service de la justice, de la solidarité et de la paix » le « confirment », souligne-t-il.
L’économie est une composante essentielle pour toute société. Elle détermine en grande partie la qualité de la vie, mais aussi celle de la mort, contribue à rendre digne ou indigne l’existence humaine. C’est pourquoi elle tient une place importante dans la réflexion de l’Église qui voit l’homme et la femme comme des personnes appelées à collaborer au plan de Dieu à travers le travail, mais aussi la production, la distribution et la consommation des biens et des services. Dès les premières semaines du pontificat, j’ai pu traiter des questions relatives à la pauvreté et la richesse, la justice et l’injustice, la finance, saine et perverse.
Si aujourd’hui nous regardons l’économie et les marchés dans le monde, il ressort un élément, c’est leur ambivalence. D’une part, jamais comme durant ces années, l’économie a permis à des milliards de personnes de goûter au bien-être, aux droits, à une meilleure santé et à tant d’autres choses. Mais en même temps l’économie et les marchés ont joué un rôle dans l’exploitation excessive des biens communs, dans l’augmentation des inégalités et dans la détérioration de la planète. Une évaluation éthique et spirituelle doit donc savoir se mouvoir dans cette ambivalence qui émerge dans des contextes de plus en plus complexes.
Notre monde est capable du mieux et du pire. Il l’a toujours été, mais aujourd’hui les moyens techniques et financiers ont amplifié les forces du bien et du mal. Alors que dans certaines parties de la planète on se noie dans l’opulence, dans d’autres on est sans le minimum pour survivre. Au cours de mes voyages, j’ai pu voir ces contrastes beaucoup plus que je n’ai pu le voir en Argentine. J’ai vu le paradoxe d’une économie mondialisée qui pourrait donner à manger, soigner et loger tous les habitants qui peuplent notre maison commune, mais qui — comme l’indiquent certaines statistiques préoccupantes — concentre dans les mains de quelques-uns la même richesse qui est l’apanage de la moitié pratiquement de la population mondiale. J’ai constaté que le capitalisme effréné des dernières décennies a encore élargi le fossé qui sépare les plus riches des plus pauvres, générant de nouvelles précarités et de nouveaux esclavages.
L’actuelle concentration des richesses est fruit, en bonne partie, des mécanismes du système financier. En regardant la finance, nous voyons par ailleurs qu’un système économique basé uniquement sur la proximité, à l’époque de la mondialisation, rencontre pas mal de difficultés : les institutions financières et les entreprises multinationales atteignent de telles dimensions qu’elles conditionnent les économies locales, mettant les États de plus en plus en situation de difficulté pour gérer le développement des populations. Par ailleurs, le manque de réglementation et de contrôles adéquats favorise la croissance du capital cumulatif qui ne s’intéresse pas aux investissements productifs à long terme, mais cherche le profit immédiat.
D’abord comme simple chrétien, puis comme religieux et prêtre, puis comme pape, j’estime que les questions sociales et économiques ne peuvent être écartées du message de l’évangile. C’est pourquoi, dans le sillage de mes prédécesseurs, j’essaie de me mettre à l’écoute des acteurs présents sur la scène mondiale, des travailleurs aux entrepreneurs, aux politiques, en donnant la voix en particulier aux pauvres, aux rejetés, à ceux qui souffrent. L’Eglise en diffusant le message de charité et de justice de l’Évangile, ne peut se taire devant l’injustice et la souffrance. Celle-ci peut et veut s’unir aux millions d’hommes et de femmes qui disent non à l’injustice de manière pacifique, en agissant pour une meilleure équité. Partout, il y a des gens qui disent oui à la vie, à la justice, à la légalité, à la solidarité. Tant de rencontres me confirment que l’évangile n’est pas une utopie, mais une espérance réelle, pour l’économie aussi : Dieu n’abandonne pas ses créatures à la merci du mal. Au contraire, Il les invite à ne pas se lasser de collaborer avec tout pour le bien commun.
Tout ce que je dis et j’écris sur le pouvoir de l’économie et de la finance veut être un appel afin que les pauvres soient mieux traités et que les injustices diminuent. En particulier, je demande constamment que l’on arrête de faire du profit sur les armes avec le risque de déclencher des guerres qui, en plus des morts et des pauvres, n’augmentent que les fonds de quelques-uns, des fonds souvent impersonnels et plus importants que les budgets des États qui les accueillent, des fonds qui prospèrent dans le sang innocent. Dans mes messages en matière économique et sociale, je souhaite solliciter les consciences, surtout de ceux qui spéculent et exploitent le prochain, pour que l’on retrouve le sens de l’humanité et de la justice. Et c’est pourquoi je ne peux pas ne pas dénoncer avec l’évangile en main les péchés personnels et sociaux commis contre Dieu et contre le prochain au nom du dieu argent et du pouvoir comme fin en soi. Je m’exprime aussi avec sollicitude parce que je suis conscient que d’autres crises économiques mondiales ne sont pas impossibles. Quand se vérifie l’écroulement d’une finance détachée de l’économie réelle, beaucoup en paient les conséquences et parmi ces nombreuses personnes surtout les pauvres, et que de gens deviennent pauvres, alors que les riches, eux, d’une façon ou d’une autre, s’en tirent souvent.
Que faire ? Une chose qui me semble importante est de conscientiser sur la gravité des problèmes. C’est ce que fait Michele Zanzucchi en recueillant, mettant en bon ordre et rendant accessibles aux lecteurs des synthèses de ce que je pense du pouvoir de l’économie et de la finance. J’espère que cela permettra à conscientiser et responsabiliser, favorisera des processus de justice et d’équité. Il ne suffit pas de passer un peu de pommade sur les blessures d’une société qui traite souvent tous et tout comme des marchandises, des marchandises qui, quand elles deviennent inutiles, sont jetées, selon cette culture du rebut dont j’ai parlé tant de fois. Seule une culture qui valorise toutes les ressources à disposition de la société, mais en premier lieu les ressources humaines, peut guérir les maladies profondes. Les chrétiens et les hommes de bonne volonté sont appelés à se sentir acteurs de cette culture de la valorisation. Conscientiser et valoriser donc, mais aussi renier. Il y a des non à dire à la mentalité du rebut : il faut éviter de s’uniformiser à la pensée unique, en faisant courageusement de bons choix et des choix à contre-courant. Tout le monde, comme enseignent les Écritures, peut revenir sur ses actes, se convertir, devenir témoins et prophètes d’un monde plus juste et solidaire.
Beaucoup, vraiment beaucoup, d’hommes et de femme de tout âge et latitude sont déjà enrôlés dans une impuissante « armée du bien », qui n’a d’autres armes que sa passion pour la justice, le respect de la légalité et l’intelligence de la communion. Est-ce trop demander de penser introduire dans le langage de l’économie et de la finance, de la coopération internationale et du travail ce mot, communion, en le déclinant comme soin des autres et de la maison commune, solidarité effective, collaboration réelle et culture du don ? Le bien n’est pas tranquillité et ne porte pas à être dociles. L’art d’aimer unique mode d’emploi de l’armée du bien, demande au contraire d’être actifs, demande la capacité à être les premiers à s’impliquer, à ne pas se lasser de chercher la rencontre, à accepter quelque sacrifice pour soi et à avoir tant de patience avec tous pour établir une meilleure réciprocité. Les trois attributs qui, traditionnellement, reviennent à plus haut niveau à Dieu sont le vrai, le bien et le beau. Ce n’est pas par hasard si l’Église parle de trois vertus théologales : la foi, la charité et l’espérance. Plus les êtres humains entrent dans le cercle vertueux de Dieu, qui est communion et amour, plus ils peuvent se redécouvrir vrais, bons et beaux. C’est possible : le fait que tant de travailleurs, d’entrepreneurs et administrateurs sont déjà au service de la justice, de la solidarité et de la paix nous confirme que le chemin de la vérité, de la charité et de la beauté, est ardu, mais praticable et nécessaire, même en économie et finance.
Comme en témoigne ce livre, ma pensée se situe sur la voie tracée par le très riche patrimoine de la doctrine sociale de l’Église. Quiconque peut la faire sienne, ne serait-ce qu’en lisant l’Abrégé de la doctrine sociale de l’Église que j’ai tant de fois cité, car, en quelques mots, celui-ci offre un panorama général de ce qu’est la pensée de l’Église en matière sociale. Parmi les textes que j’ai rédigés, l’auteur à juste titre a privilégié l’exhortation apostolique Evangelii gaudium et l’encyclique Laudato si’. En même temps il n’a pas été possible de couper les racines communautaires de ma pensée qui plongent en particulier dans l’Église latine. Je suis par exemple débiteur de la grande assemblée d’Aparecida, dans laquelle est reproposé un modèle aux chrétiens pour la vie sociale : voir, juger, et agir. C’est-à-dire que nous pouvons voir la réalité qui nous entoure à la lumière de la providence de Dieu ; la juger selon Jésus Christ, chemin, vérité et vie ; agir en conséquence dans l’Église et avec tous les hommes de bonne volonté.
Le monde créé aux yeux de Dieu est une bonne chose, l’être humain est une bonne chose (cf. Genèse 1, 4-31). Le péché a taché et continue de tacher la bonté originelle, mais il ne peut effacer l’empreinte de l’image de Dieu présent en tout homme. C’est pourquoi nous ne devons pas perdre espoir : nous vivons une époque difficile, mais pleine d’opportunités nouvelles et inédites. Nous ne pouvons cesser de croire qu’avec l’aide de Dieu et ensemble — je le répète ensemble — on peut améliorer notre monde et ranimer l’espérance, la vertu peut-être la plus précieuse aujourd’hui. Si nous sommes ensemble, unis en son nom, le Seigneur est au milieu de nous selon sa promesse (cf. Mathieu 18, 20) ; Il est donc avec nous au milieu du monde, dans les usines, dans les entreprises, dans les banques et dans les maisons, dans les bidonvilles et dans les camps de réfugiés : Nous pouvons, nous devons espérer.
© Zenit.org – 2018
Commentaire des lectures du dimanche
Pourquoi célébrer en ce quatrième dimanche de Pâques la journée mondiale de prière pour les vocations, pour les vocations spécifiques à la vie consacrée, que ce soit dans la vie religieuse masculine ou féminine ou bien dans la vie sacerdotale ? L’image du Bon Pasteur, que Jésus emploie pour parler de lui-même, pour parler de sa propre vocation, de son mystère personnel, peut nous éclairer à ce propos. Non pas que toutes les vocations consisteraient en une participation à la charge pastorale du Christ – cela, c’est le propre de la vocation des évêques, et des prêtres avec eux. Mais deux caractéristiques de la façon d’être et de faire du Bon Pasteur qu’est le Christ lui-même doivent concerner aussi toute personne qui s’engage et avance sur un chemin de consécration au Seigneur.
La première, c’est le fait de donner et recevoir. Le verbe « donner » revient à cinq reprises dans les huit versets du chapitre dixième de saint Jean que nous venons d’entendre. Il a toujours Jésus pour sujet et « ma vie » pour complément. L’une des caractéristiques du Bon Pasteur qu’est Jésus est qu’il donne sa vie. Littéralement, il « dépose » sa vie, comme un geste libre et souverain, en un geste d’offrande. Même le déchaînement de la violence aveugle durant sa Passion ne devra pas nous faire perdre de vue cela. Jésus précise en effet : « Nul ne peut m’enlever ma vie : je la donne de moi-même ». Cette offrande est plus forte que la mort : la violence ou l’apparente absurdité de la mort ne doit pas le faire oublier. Cette offrande de la vie est aussi un geste de service, de dévouement, et ce n’est pas un hasard si nous retrouvons ce verbe « déposer » au chapitre treizième de l’Évangile selon Jean, lorsqu’il nous est dit que, lors du dernier repas qu’il prit avec ses amis, Jésus « déposa » ses vêtements pour laver les pieds de ses disciples (cf. Jn 13,4).
Cette liberté souveraine, manifestée dans l’offrande sa vie et dans le service le plus humble, trouve sa source dans la communion profonde de Jésus avec son Père. C’est pourquoi, à trois reprises dans la seconde partie de notre Évangile de ce jour, le verbe « donner, déposer » est accompagné du verbe « recevoir » : « Je donne ma vie pour la recevoir de nouveau » ; « j’ai le pouvoir de la donner, j’ai aussi le pouvoir de la recevoir de nouveau » ; « voilà le commandement que j’ai reçu de mon Père ». Dans ces trois cas, dans ces trois emplois du verbe « recevoir », Jésus est le sujet, celui qui reçoit. La troisième fois seulement, il nous est dévoilé de la part qui est-ce que Jésus reçoit, qui est l’auteur du don : il s’agit du Père. C’est du Père que Jésus reçoit à nouveau sa vie après l’avoir déposée : c’est là une annonce de la Résurrection après la Passion et la mort de la Croix.
Mais ce fait de déposer sa vie et de la recevoir à nouveau est aussi un commandement « reçu » du Père. C’est-à-dire que dans cet acte libre de Jésus se manifeste sa communion la plus intime à la volonté du Père, son obéissance au Père. Non pas que le Père manipule de l’extérieur les événements de la vie du Fils, mais bien plutôt le Fils demeure dans la communion avec la volonté du Père à travers tous les événements de sa vie. C’est la confiance absolue, la confiance filiale de Jésus qui s’exprime là. Ce n’est pas un hasard non plus si saint Jean avait employé dès le prologue de son Évangile ce verbe « recevoir ». Il l’avait employé pour désigner la foi qui nous fait devenir enfants de Dieu : « À tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu » (Jn 1, 12). Ici, recevoir, c’est croire : une attitude qui ouvre à la vie.
Plus rapidement, je voudrais souligner une seconde attitude caractéristique de la façon d’être et de faire du Bon Pasteur. Comme le verbe utilisé pour la désigner n’est employé qu’une fois, je serai forcément plus rapide ! Le mauvais pasteur, « les brebis ne comptent pas vraiment pour lui ». Donc, le Bon Pasteur se caractérise par le fait que les brebis comptent vraiment pour lui : il a souci d’elles, il en prend soin. Notre Mère sainte Thérèse (d’Avila), au cours d’une grâce mystique que l’on appelle le « mariage spirituel », reçut du Seigneur cette parole en gage d’union : « Désormais tu auras soin de mon honneur » (Relation 35), cet honneur du Christ qui est la gloire du Père et le salut du monde. Désormais, les intérêts de l’Église et du monde, leur prise en charge dans la prière, compteront vraiment pour toi, comme compte quelque chose à quoi l’on tient vraiment, qui nous concerne personnellement. Telle est la façon dont le Bon Pasteur prend soin de nous, car, pour Jésus, nous comptons vraiment, il ne fait pas semblant.
C’est à cette ressemblance avec le Christ qui dépose sa vie et la reçoit du Père, en un geste d’offrande et d’abandon confiant, le Christ qui consacre sa vie entière à prendre soin de ses brebis, que sont appelés ceux pour qui le Seigneur désire qu’ils le suivent sur le chemin d’une vocation spécifique, dans la diversité des charismes et des appels, et nous sommes tous bénéficiaires de la fécondité de leur vie. Que cette lumière de l’Évangile stimule de façon renouvelée notre prière pour les vocations à la vie consacrée et à la vie sacerdotale, et réveille notre propre désir de recevoir la vie du Christ et de prendre soin de son Église ! Amen.
Fr. Anthony-Joseph de sainte Thérèse de Jésus, ocd
© Carmel-asso. 2015