Pko 29.01.2017
Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°05/2017
Dimanche 29 janvier 2017 – 4ème Dimanche du Temps ordinaire – Année A
Humeurs…
Pour une vraie solidarité…
Les élans de solidarité se multiplient. Croix-Rouge et Secours Catholique reçoivent en abondance dons alimentaires, vestimentaires… Cette sensibilité immédiate à la détresse de l’autre se vérifie une fois de plus …
Mais allons-nous savoir un jour aller au-delà de cette immédiateté et prendre conscience que la solidarité à l’égard de l’autre doit se vivre bien en amont des catastrophes.
Au-delà du déchaînement de la nature, nous avons encore pu constater que les dégâts ont été largement aggravés par notre incivisme… Nos rivières et cours d’eau nous servent bien souvent de poubelles… on y retrouve de tout, des simples déchets déjà quotidiens aux réfrigérateurs et machines à laver hors d’usage… On n’hésite pas à y jeter nos « déchets verts ». Or tout cela a fortement contribué à l’aggravation des débordements…
Saurons-nous tirer les véritables leçons de ce qui nous arrive… saurons-nous retrouver le sens du bien commun si cher à l’Évangile et à l’Église et si malmené par notre société sécularisée et égoïste.
À l’heure, ou tout le monde à le mot culture à la bouche… retour aux sources, retour à la tradition des anciens… Ne serait-il pas nécessaire et impératif de se poser la question : Comment nos anciens agissaient-ils à l’égard de la nature qui les environnait ? Comment concevaient-ils le « vivre ensemble » ?
La vraie solidarité commence en amont des catastrophes ! Elle se conjugue au quotidien…
« Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende ! »
Chronique de la roue qui tourne
Chaque moment
« Le bonheur du moment, c’est ne pas vouloir être quelqu’un d’autre, ailleurs, à un autre moment. » Isabelle Chenebault.
Chaque moment est unique et donc doit se vivre intensément. Il y a celui qu’on appelle « routine », presque péjorativement. Lassés par tant de choses, on peste contre ce moment qui ne cesse de se répéter. Pourtant, la routine se fait de notre manque d’originalité. Un moment est qu’une page blanche qui attend notre savoir-faire. Si nous ne proposons rien, pourquoi espérer que la routine change ? Nous attendons l’extraordinaire alors que les vrais changements sont le fruit de petits efforts. Nous oublions également qu’avec la course folle du temps, ce moment et toutes les personnes qui le composent ne sont pas éternels. Un jour, cette routine parfois si agaçante nous sera enlevée.
Et puis, lorsqu’enfin un moment particulier arrive, il est triste de nous voir devenir fous pour mettre la main sur notre portable. Nous sommes là à nous tâter toutes nos poches et malheur si nous avons oublié notre appareil. En clair, nous sommes plus préoccupés par réussir notre rafale de selfies que de profiter de l’instant présent. Nous avons rendu la nouvelle technologie indispensable à nos grands moments. Une photo de temps en temps, il n’y a rien de mal mais avouez que ça frise souvent une addiction. Aujourd’hui, tout ce que nous vivons doit impérativement finir en photo ou en vidéo. Nous sourions, tous ensemble, le temps d’un « cheese », après quoi chacun plongera son nez dans son portable, plus intéressé par les « j’aime » et les partages que par les personnes autour de lui.
Pourtant c’est ce que nous y mettons et ce que nous en ferons qui rendent certains moments si particuliers. Et, loin de nos artifices, c’est notre cœur qui immortalise le mieux un moment ! Instinctivement, il se nourrit de chaque bonheur pour battre plus fort dans la tristesse. Comme s’il prenait le temps de compléter son album photo « bonheur » qu’il saura ressortir pour nous permettre d’avancer encore à chaque fois que nécessaire ! Et puis, entre nous, les moments de bonheur se conservent mieux au chaud dans un cœur que dans une carte mémoire de téléphone portable.
La chaise masquée
© Nathalie SH – P.K.0 – 2017
L’Homme et la pluie
En marge de l’actualité du mercredi 25 janvier 2017
À l’heure où notre pays vient d’être frappé par de violents épisodes météorologiques jetant un certain nombre de familles hors de leurs maisons, détruisant habitations, ponts et routes, la question revient de savoir comment éviter que pareil désastre se reproduise. Comme si l’Homme pouvait interdire à la pluie de tomber ! Écoutons ce passage de l’Ancien Testament où Dieu invitant Job à l’humilité s’adresse à lui en ces termes : « 25 Qui perce un canal pour l'averse, fraie la route aux roulements du tonnerre, 26 pour faire pleuvoir sur une terre sans hommes, sur un désert que nul n'habite… 28 La pluie a-t-elle un père, ou qui engendre les gouttes de rosée ? 29 De quel ventre sort la glace, et le givre des cieux, qui l'enfante, 30 quand les eaux se durcissent comme pierre et que devient compacte la surface de l'abîme?... 33 Connais-tu les lois des Cieux, appliques-tu leur charte sur terre ? 34 Ta voix s'élève-t-elle jusqu'aux nuées et la masse des eaux t'obéit-elle ? 35 Sur ton ordre, les éclairs partent-ils, en te disant : "Nous voici ?"… 37 Qui dénombre les nuages avec compétence et incline les outres des cieux, 38 tandis que la poussière s'agglomère et que collent ensemble les mottes de terre ? » (Job 38)
Rendons à Dieu et aux lois de la nature ce qui leur revient. Mais rendons également à l’Homme ce qui lui revient. Le texte de la Genèse évoquant la création du monde nous révèle que Dieu confia aux Humains le soin de dominer la terre et de la soumettre, le soin de poursuivre son œuvre créatrice. Dans le livre du Siracide, nous trouvons ces paroles : « Les Humains ont reçu du Seigneur l’usage des cinq sens ; il leur a donné en partage un sixième sens, l’intelligence… Aux Humains il a donné du jugement, une langue, des yeux, des oreilles et un cœur pour réfléchir. Il les a remplis de savoir et d’intelligence… » (Si 17, 5-7) Si l’Homme ne peut empêcher la pluie de tomber, il peut en limiter les désastreuses conséquences, d’abord par son savoir et son intelligence à percer les secrets de la nature pour en limiter les aspects destructeurs. Autre moyen que nous avons vu à l’œuvre ces derniers jours : les nombreux actes de solidarité, de dévouement, de don de soi, la mobilisation des services de secours, des responsables du pays, depuis les maires jusqu’aux plus hautes autorités, des confessions religieuses et autres organisations d’entraide. De cet épisode, dramatique pour beaucoup, ont surgi la solidarité et l’entraide… Ainsi, de tout mal peut en sortir un bien.
Puissent les événements de ce dernier week-end nous rappeler à l’humilité face à la nature, pour la respecter et la sauvegarder. Comme le dit un proverbe : « Dieu pardonne toujours, les Hommes parfois, la nature jamais ! ». Puissent ces événements nous ouvrir davantage à la souffrance et au désarroi de ceux qui ont tout perdu, non pour les plaindre mais pour nous faire proches d’eux et les secourir en actes. Puissent enfin ces événements nous aider à comprendre que, habitant tous la même terre, nous sommes solidaires dans une même responsabilité, poursuivre l’achèvement de cette création que Dieu a commencée dans la lumière au matin du monde !
+ Mgr Jean Pierre COTTANCEAU
© Archidiocèse de Papeete - 2017
La parole aux sans paroles – 68
Portrait d’une sœur de la nuit - Mélanie
« Je savais que ce n’était pas facile pour ma famille d’avoir quelqu’un comme moi ». Cette phrase si dure de Mélanie contraste beaucoup avec sa gaieté naturelle. Oui, d’ordinaire, Mélanie est l’enthousiasme personnifié. Toujours de bonne humeur, toujours joyeuse, toujours prête à rire, on ne se doute pas du parcours difficile de Mélanie.
Dis-moi, pourquoi le prénom Mélanie ?
« Quand j’étais jeune, j’avais une copine qui me ressemblait. C’était mon sosie en quelque sorte. Et on a choisi de se faire appeler une Leilanie et une Mélanie. Et j’ai gardé ce prénom jusqu’à aujourd’hui. »
D’où viens-tu ? Où as-tu grandi ?
« Je suis de la presqu’île, je suis de Faaone. Je suis née et j’ai grandi là-bas. Et je suis ici aujourd’hui parce que je ne voulais plus compter sur maman, je voulais me débrouiller. »
Vers quel âge tu t’es sentie femme ?
« Depuis toute petite. Vers 10, 11 ans, j’ai vraiment commencé à être efféminée. Et en grandissant, je suis devenue comme ça. »
À quel âge as-tu vraiment décidé de t’habiller en fille ?
« À l’âge de 13 ans. »
Et comment l’as-tu annoncé à tes parents ?
« Ça n’a pas été facile pour moi au début. J’étais obligée de me cacher. Quand j’allais à l’école, je sortais de la maison avec mon linge garçon mais arrivée dehors je raccourcissais mon short comme des shorts de filles. Je savais que ce n’était pas facile pour ma famille d’avoir quelqu’un comme moi. »
Pourquoi dis-tu cela ?
« J’ai toujours été un petit efféminé, on ne pouvait rien faire. Je n’arrivais pas à redevenir garçon. »
As-tu des frères et sœurs ?
« Oui, j’ai des frères et sœurs. J’ai encore maman mais j’ai perdu mon père très jeune, à 13 ans. Ben j’ai grandi sans père mais avec une maman. »
Comment ça s’est passé avec tes frères alors ?
« Tout au début, ce n’était pas facile. Les grands étaient toujours en train de s’énerver après moi, pourquoi je suis comme ça. Mais je n’ai pas lâché, je n’y peux rien, c’est la vie. Je suis comme ça, on ne peut rien y faire. »
Et aujourd’hui, ils t’ont acceptée ?
« Oui, ça y est ! C’est comme si, pour eux, ils ont une fille devant eux. Aujourd’hui, au niveau de ma famille, ce n’est plus un problème. Je peux m’habiller en femme. »
Comment es-tu arrivée dans le milieu de la prostitution ?
« Par des copines, des anciennes copines qui connaissaient le milieu bien avant moi ! Elles m’ont conseillée : "Écoute, pour vite réussir dans la vie, c’est le seul métier. Si tu veux de l’argent ‘facile’, tu fais ça.” Pour avoir des sous et tout ce que j’ai besoin. »
À quel âge as-tu commencé ?
« J’ai commencé à 16 ans. J’ai appris sur le tas en allant avec mes copines. »
Ta « première fois », tu t’en rappelles ?
« Oui, c’était un français, d’ailleurs la majorité de mes clients sont plutôt français. »
Tes clients sont plutôt des occasionnels ou des réguliers ?
« Beaucoup d’occasionnels. Après, je regarde beaucoup les clients avant de monter dans leur voiture. Je vois si je me sens en sécurité et tout. Je vois s’il me fera des problèmes. Si jamais, j’ai un peu peur, on ne va pas loin. Et s’ils ne veulent pas des capotes, je refuse. Mais la majorité accepte bien ça. »
Tu n’as jamais eu de problèmes ?
« Si, à mes 18 ans, je me suis faite larguée dans une vallée. Mais se faire taper, se faire rosser, non. »
Comment as-tu fait dans la vallée ?
« Je me suis débrouillée pour revenir sur Papeete. »
Comment « apprend-on » le métier ?
« En écoutant les copines, les conseils des copines. »
Et, entre nous, si un client arrive et il est moche, pas du tout attirant, ni charmant, rien. Que fais-tu ?
« Pour nous, ce n’est pas l’apparence qui compte ! Ce n’est pas la beauté qui compte ! C’est être payé pour le service. Moi, pour l’argent, j’y vais quand même mais ce sera sans plaisir ! »
Peut-on garder un bon souvenir de certains clients ?
« Oui, il y en a des bons, bons de chez bon, carrément généreux ! Il y en a ! Et ces clients-là, on ne les oublie pas ! »
Aujourd’hui, dis-moi, quel âge as-tu ?
« J’ai 36 ans. »
Donc ça fait 20 ans !
« Oui, ça fait 20 ans que je pratique ce métier. »
As-tu déjà essayé d’avoir un autre métier ?
« Tu sais, quand tu es jeune, tu ne penses pas à la prostitution. Moi, je voulais juste profiter de la vie. Après, je me suis rendue compte qu’il faut travailler dans la vie. »
Et, si demain tu trouves un CDI bien payé, vas-tu arrêter la prostitution ?
« S’il faut choisir, je choisirais le travail bien payé sans arrêter la prostitution. Je ne vais pas sacrifier un travail mais je ne pourrais pas arrêter. Je ferais le week-end… pour arrondir les fins de mois. (Rires) »
Pourquoi ?
« Comme on dit, c’est une maladie. (Rires) »
Comment tu vois ta vie dans 20 ans ?
« Pour le moment, je ne peux pas te répondre. C’est vrai qu’il est bon de réfléchir pour sa vie plus tard. Mais, personnellement, j’ai autre chose en tête. Moi, je vis au jour le jour. »
As-tu quelqu’un dans ta vie ?
« Pas vraiment ! Pas de mari, plus un ami avec qui je vis pour le moment ! Et il sait ce que je fais le soir et ça ne le dérange pas. »
Un dernier message ?
« J’aimerais dire aux gens qu’on n’est pas des animaux, on est des êtres humains. Il y a des moments où leurs regards font mal. »
© Nathalie SH - Accueil Te Vai-ete - 2017
Les femmes sont plus courageuses que les hommes
Audience générale du mercredi 25 janvier 2017
Le Pape François a poursuivi ce mercredi 25 janvier sa catéchèse sur l’espérance. Lors de l’audience générale tenue dans la salle Paul VI, le Souverain Pontife est revenu sur l’une des femmes emblématiques de l’Ancien testament : Judith, qui a su ramener la confiance de son peuple en Dieu, un exemple de courage et d’espérance a expliqué François.
Chers frères et sœurs, bonjour !
Parmi les figures de femmes que l’Ancien Testament nous présente, celle d’une grande héroïne du peuple ressort : Judith. Le livre biblique qui porte son nom raconte l’imposante campagne militaire du roi Nabucodonosor qui, régnant à Ninive, élargit les frontières de l’empire en battant et asservissant tous les peuples alentour. Le lecteur comprend qu’il se trouve devant un grand ennemi, invincible, qui sème la mort et la destruction et qui arrive enfin en Terre Promise, mettant en danger la vie des fils d’Israël.
L’armée de Nabucodonosor, en effet, sous la conduite du général Holopherne, assiège une ville de Judée, Béthulie, coupant le ravitaillement en eau et affaiblissant ainsi la résistance de la population.
La situation devient dramatique, au point que les habitants de la ville s’adressent aux anciens leur demandant de se rendre à l’ennemi. Leurs paroles sont désespérées : « Maintenant, il n’y a personne pour nous porter secours. Au contraire, Dieu nous a vendus pour que nous tombions entre leurs mains, que nous soyons terrassés par la soif devant eux et que nous subissions de lourdes pertes. Faites-les donc venir maintenant et livrez la ville entière au pillage de la troupe d’Holopherne et de toute son armée ! » (Jdt 7,25-26). La fin semble désormais inéluctable, la capacité à mettre sa confiance en Dieu s’est épuisée. La capacité à mettre sa confiance en Dieu s’est épuisée. Et combien de fois arrivons-nous à des situations de limite où nous ne sentons même pas la capacité à avoir confiance dans le Seigneur. C’est une tentation terrible ! Et, paradoxalement, il semble que, pour fuir la mort, il ne reste qu’à s’en remettre entre les mains de ceux qui tuent. Ils savent que ces soldats vont entrer pour saccager la ville, prendre les femmes comme esclaves et puis tuer tous les autres. C’est vraiment « la limite ».
Et devant un tel désespoir, le chef du peuple tente de proposer un motif d’espérance : résister encore cinq jours en attendant l’intervention salvifique de Dieu. Mais c’est une espérance faible qui lui fait conclure : « Mais si ces jours s’écoulent sans qu’il nous vienne du secours, alors j’agirai selon vos paroles. » (7,31). Pauvre homme : il était sans issue. Cinq jours sont concédés à Dieu – et c’est là qu’est le péché – cinq jours sont concédés à Dieu pour intervenir ; cinq jours d’attente, mais déjà avec la perspective de la fin. Ils concèdent cinq jours à Dieu pour qu’il les sauve mais ils savent qu’ils n’ont pas confiance, ils s’attendent au pire. En réalité, plus personne, dans le peuple, n’est encore capable d’espérer. Ils étaient désespérés.
C’est dans cette situation que Judith entre en scène. Veuve, femme d’une grande beauté et sagesse, elle parle au peuple avec le langage de la foi. Courageuse, elle reprend le peuple face à face (en disant) : « En réalité, vous qui scrutez les intentions du Seigneur souverain de l’univers […]. Non, frères, n’irritez pas le Seigneur notre Dieu ! Car même s’il n’a pas l’intention de nous porter secours dans les cinq jours, il a le pouvoir, lui, de nous protéger aux jours qu’il voudra, comme de nous exterminer devant nos ennemis […] C’est pourquoi, en attendant avec patience le salut qui vient de lui, invoquons-le à notre secours. Il écoutera notre voix, si cela lui plaît. » (8,13.14-15.17). C’est le langage de l’espérance. Frappons aux portes du cœur de Dieu, il est Père, il peut nous sauver. Cette femme, veuve, risque de faire mauvaise impression devant les autres ! Mais elle est courageuse ! Elle va de l’avant ! C’est mon opinion : les femmes sont plus courageuses que les hommes (Applaudissement dans la salle).
Et avec la force d’un prophète, Judith rappelle les hommes de son peuple pour les ramener à la confiance en Dieu ; avec le regard d’un prophète, elle voit au-delà de l’horizon étroit proposé par les chefs et que la peur rend encore plus limité. Dieu agira certainement, affirme-t-elle, tandis que la proposition des cinq jours d’attente est une façon de le tenter et de se soustraire à sa volonté. Le Seigneur est le Dieu du salut – et elle y croit – quelle que soit la forme que cela prendra. C’est le salut de libérer des ennemis et de faire vivre, mais, dans ses plans impénétrables, cela peut aussi être le salut de livrer à la mort. Femme de foi, elle le sait. Et puis nous connaissons la fin, comment se termine l’histoire : Dieu sauve.
Chers frères et sœurs, ne mettons jamais de conditions à Dieu et laissons au contraire l’espérance vaincre nos craintes. Faire confiance à Dieu veut dire entrer dans ses desseins sans prétendre à rien, en acceptant même que son salut et son aide nous rejoignent de manière différente de nos attentes. Nous demandons au Seigneur vie, santé, affection, bonheur ; et c’est juste de le faire, mais en étant conscients que Dieu sait tirer la vie même de la mort, que l’on peut expérimenter la paix même dans la maladie et qu’il peut y avoir la sérénité même dans la solitude et la béatitude même dans les larmes. Ce n’est pas nous qui pouvons enseigner à Dieu ce qu’il doit faire, ce dont nous avons besoin. Il le sait mieux que nous et nous devons avoir confiance, parce que ses voies et ses pensées sont différentes des nôtres.
Le chemin que Judith nous indique est celui de la confiance, de l’attente dans la paix, de la prière et de l’obéissance. C’est le chemin de l’espérance. Sans résignation facile, en faisant tout ce qui est en notre pouvoir, mais en restant toujours dans le sillage de la volonté du Seigneur parce que, nous le savons, elle a tellement prié, elle a tellement parlé au peuple et ensuite, courageuse, elle est partie, elle a cherché le moyen de s’approcher du chef de l’armée et elle a réussi à lui couper la tête, à l’égorger. Elle est courageuse dans sa foi et dans ses œuvres. Et elle cherche toujours le Seigneur ! Judith, en effet, a son plan, elle le réalise avec succès et conduit le peuple à la victoire, mais toujours dans l’attitude de foi de qui accepte tout de la main de Dieu, sûr de sa bonté.
Ainsi, une femme pleine de foi et de courage redonne force à son peuple en danger de mort et le conduit sur les voies de l’espérance, nous les indiquant aussi à nous. Et nous, si nous faisons un peu mémoire, combien de fois avons-nous entendu des paroles sages, courageuses, de personnes humbles, de femmes humbles dont on pense – sans les mépriser – qu’elles sont ignorantes… Mais ce sont les paroles de la sagesse de Dieu ! Les paroles des grands-mères… Combien de fois les grands-mères savent-elles dire le mot juste, la parole d’espérance parce qu’elles ont l’expérience de la vie, elles ont beaucoup souffert, elles ont fait confiance à Dieu et le Seigneur fait ce cadeau de nous donner un conseil d’espérance. Et, si nous empruntons ces voies, il y aura de la joie et la lumière pascale à se confier au Seigneur avec les paroles de Jésus : « Père, si tu le veux, éloigne de moi cette coupe ; cependant, que soit faite non pas ma volonté, mais la tienne. » (Lc 22,42). Et cette prière est celle de la sagesse, de la confiance et de l’espérance.
© Libreria Editrice Vaticana - 2017
Luther ne voulait pas diviser l’Église, mais la renouveler
Recevant en audience une délégation œcuménique de l’Église luthérienne de Finlande, jeudi 19 janvier, le pape François a affirmé que l’action de Luther, il y a 500 ans, avait eu pour but de « renouveler l’Église et non de la diviser ».
Chers frères et sœurs,
Je vous salue tous avec joie, vous qui, dans cette délégation œcuménique, êtes venus en pèlerins de la Finlande à Rome à l’occasion de la fête de saint Henri. Je remercie l’évêque luthérien de Turku pour ses aimables paroles… en espagnol ! Depuis plus de trente ans, c’est une belle habitude que votre pèlerinage coïncide avec la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, qui nous appelle au rapprochement à partir de la conversion. Le véritable œcuménisme, en effet, se base sur la conversion commune à Jésus-Christ, notre Seigneur et Rédempteur. Si nous nous rapprochons ensemble de lui, nous nous approchons aussi les uns des autres. En ces jours, invoquons plus intensément l’Esprit Saint pour qu’il suscite en nous cette conversion qui rend possible la réconciliation.
Sur ce chemin, catholiques et luthériens de différents pays, avec diverses communautés qui partagent ce chemin œcuménique, nous avons parcouru une étape significative lorsque, le 31 octobre dernier, nous nous sommes réunis à Lund, en Suède, pour commémorer le début de la Réforme par une prière commune. Cette commémoration conjointe de la Réforme a eu une signification importante sur le plan humain et théologico-spirituel. Après cinquante ans de dialogue œcuménique officiel entre catholiques et luthériens, nous avons réussi à exposer clairement les perspectives sur lesquelles nous pouvons aujourd’hui nous dire d’accord. Nous sommes reconnaissants de cela. En même temps, nous gardons dans notre cœur un repentir vif et sincère pour nos fautes. Dans cet esprit, à Lund, il a été rappelé que l’intention de Martin Luther, il y a cinq-cents ans, était de renouveler l’Église, et non de la diviser. Cette rencontre nous a donné le courage et la force de regarder devant nous, en notre Seigneur Jésus-Christ, le chemin œcuménique que nous sommes appelés à parcourir ensemble.
En préparant la commémoration commune de la Réforme, catholiques et luthériens ont pris davantage conscience aussi du fait que le dialogue théologique demeure essentiel pour la réconciliation et qu’il doive être mené avec un engagement constant. Ainsi, dans cette communion, qui permet au Saint-Esprit d’agir, nous pourrons parvenir à des convergences ultérieures sur les contenus de la doctrine et de l’enseignement moral de l’Église et nous pourrons nous approcher toujours plus de la pleine et visible unité. Je prie le Seigneur d’accompagner de sa bénédiction la Commission de dialogue catholique-luthérienne de la Finlande qui travaille avec dévouement à une interprétation sacramentelle commune de l’Église, de l’Eucharistie et du ministère ecclésial.
2017, année commémorative de la Réforme, représente donc pour les catholiques et les luthériens une occasion privilégiée de vivre la foi de manière plus authentique pour redécouvrir ensemble l’Évangile et pour chercher le Christ et témoigner de lui avec un nouvel élan. En conclusion de la journée commémorative de Lund, regardant vers l’avenir, nous avons puisé le courage dans notre témoignage commun de foi devant le monde, quand nous nous sommes engagés à soutenir ensemble ceux qui souffrent, ceux qui sont dans le besoin et ceux qui sont exposés aux persécutions et aux violences. Ce faisant, en tant que chrétiens nous ne sommes plus divisés, mais nous sommes unis dans le chemin vers la pleine communion.
Il me plaît de rappeler que les chrétiens finlandais fêtent cette année le centenaire du Conseil œcuménique finlandais qui est un instrument important pour promouvoir la communion de foi et de vie entre vous.
En 2017, enfin, votre patrie, la Finlande, fêtera cent ans comme État indépendant. Puisse cet anniversaire encourager tous les chrétiens de votre pays à professer leur foi dans le Seigneur Jésus-Christ – comme l’a fait saint Henri avec un grand zèle – témoignant de celle-ci aujourd’hui devant le monde et la traduisant aussi en gestes concrets de service, de fraternité et de partage.
Souhaitant que votre pèlerinage contribue à renforcer encore la bonne collaboration entre orthodoxes, luthériens et catholiques en Finlande et dans le monde et que le témoignage commun de foi, d’espérance et de charité, par l’intercession de saint Henri, porte des fruits abondants, j’invoque de tout cœur la grâce et la bénédiction de Dieu pour vous tous.
Cher frère évêque, je tiens à vous remercier pour votre bonne idée d’amener vos petits-enfants : nous avons besoin de la simplicité des enfants, ils nous enseigneront le chemin vers Jésus-Christ. Merci, merci beaucoup.
© Libreria Editrice Vaticana - 2017
Comment Dieu traite les pauvres dans la Bible (1)
Pour le pape François « Vivre la charité, c’est porter les fardeaux des plus faibles et des plus pauvres. » Son insistance à évoquer ce thème nous invite nous-mêmes à renouveler notre regard sur les pauvres. Il faudra à l’Académie faire l’effort de ne pas s’enfermer dans un discours théorique sur la pauvreté, mais bien envisager de regarder les pauvres, de les écouter, de les comprendre, de les aider ou de les secourir. Voici la Conférence de Mgr Emmanuel Laffont, évêque de Cayenne à l’Académie d’Éducation et d’Études Sociales.
Je ne commence pratiquement jamais une intervention sans ouvrir la Parole de Dieu. Je me propose de le faire avec vous. Je prends dans le Livre du Deutéronome au chapitre 24, les versets 17 et suivants.
« Moïse dit : vous respecterez les droits d’un étranger installé chez vous ou ceux d’un orphelin. Vous ne prendrez pas le vêtement d’une veuve pour prouver sa dette. Souvenez-vous : vous avez été esclaves en Égypte et le Seigneur Notre Dieu vous a libérés. C’est pourquoi je vous ordonne d’obéir à Ses commandements. Quand vous ferez la récolte, si vous oubliez un tas d’épis dans votre champ, ne retournez pas le chercher. Laissez-le pour les étrangers installés chez vous, les orphelins et les veuves. Alors le Seigneur Votre Dieu vous bénira dans tout ce que vous entreprendrez. De même quand vous secouerez vos oliviers, ne retournez pas chercher les olives oubliées. Laissez-les pour les étrangers installés chez vous, les orphelins et les veuves. Si vous récoltez votre raisin, ne retournez pas chercher les grappes oubliées. Laissez-les pour les étrangers installés chez vous, les orphelins et les veuves. Souvenez-vous, vous avez été esclaves en Égypte c’est pourquoi je vous ordonne d’obéir à ces commandements. Parole du Seigneur ».
Ce texte est pour moi emblématique en ce qu’il présente d’abord le commandement essentiel du Seigneur qui est celui du partage « de telle sorte que, si possible, il n’y ait pas de pauvre chez vous ».
Selon la Bible, les biens que nous avons ne sont pas seulement pour nous, ils sont pour tous et personne n’a le droit de s’accaparer ce qui manquerait à son prochain. Et son prochain, c’est celui qui est installé chez lui.
Le Deutéronome présence une trilogie de prochains. Ce sont qui ne peuvent pas vivre parce qu’ils sont seuls en raison de leur situation : les étrangers, les orphelins et les veuves.
Le texte donne ensuite la raison théologique qui fonde ce devoir de charité et de partage, c’est l’expérience vécue par ce peuple d’avoir été lui-même esclave et d’avoir été libéré par le Seigneur : « Souvenez-vous, vous avez été esclaves en Égypte c’est pourquoi je vous ordonne d’obéir à ces commandements. Parole du Seigneur. »
Alors je vais parcourir un peu avec vous cette Écriture Sainte.
Je suis bien conscient qu’il est difficile aujourd’hui d’écrire vraiment ce qui s’est passé dans les Temps Anciens autour de Moïse et de la sortie d’Égypte, de la traversée du désert, de l’entrée en Canaan, de l’établissement de la monarchie.
C’est seulement à partir de l’an 1 000 que l’on commence à avoir, et encore, une idée plus précise des détails historiques de l’histoire du Peuple de Dieu. Mais nous en savons suffisamment pour pouvoir pointer quelques remarques importantes.
La première c’est que le Dieu qui traverse l’Écriture et dont le nom ne se prononce pas, est un Dieu qui s’est révélé autour d’un événement fondateur dans la vie du peuple juif, c’est la libération de la maison de l’esclavage et la sortie d’Égypte.
De telle sorte que Dieu se présente dans la Bible comme un Dieu qui libère, Dieu de libération.
Et l’histoire de l’Écriture Sainte, l’histoire de la Bible est une histoire de libération. Si j’ose dire, la théologie de la Bible est une théologie de la libération.
Libération de l’esclavage, libération du péché et libération de la mort, aucune des trois n’étant inutile.
C’est au cœur de cette expérience fondamentale de libération que Dieu a révélé son nom propre à Moïse. « Je suis celui qui suis » « J’ai entendu les cris de mon peuple sous les coups de ses gardes et je suis descendu pour le libérer »
C’est dire que d’emblée nous avons un Dieu (tel que le présente la Bible) qui est un Dieu qui regarde ceux qui sont en bas du panier. Un Dieu qui ne peut pas accepter que l’un quelconque de ses enfants créés à son Image et à sa Ressemblance ne puisse vivre dans la liberté et la dignité qui lui conviennent. Notre Dieu est un Dieu de liberté.
Le cardinal Joseph Ratzinger, alors Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, avait eu à analyser « la théologie de la libération » telle qu’elle se développait dans les années 1970 et 1980. Il rédigea deux documents successifs, approuvés par le Pape, qui furent publiés en 1984 et en 1986.
Le premier mettait l’accent sur les dangers et les dérives possibles d’une théologie qui était marquée, à l’époque par l’affrontement des deux blocs idéologiques et qui ne manquait pas d’avoir été teintée par l’une des deux idéologies qui se disputaient le monde, l’analyse marxiste.
Dans le second : Liberté chrétienne et libération, on trouve celle belle expression : « Dieu veut être adoré par des gens qui sont libres. » Il n’a pas besoin d’être adoré par des esclaves.
Nous trouvons tout au long du Livre du Deutéronome le refrain : « Souviens-toi que tu as été esclave dans le pays d’Égypte. Voilà pourquoi je te donne ces commandements ». Ces commandements sont ceux du partage, de la solidarité et de la redistribution quand c’est nécessaire.
L’histoire du peuple de Dieu pendant la période qu’on appelle « la période des Juges » est une histoire assez difficile à rétablir mais qui remonte à une époque où il n’y avait pas de pouvoir central, le pouvoir était – si j’ose dire – familial, clanique et tribal, où la propriété était largement une propriété collective. Et où donc la vie de la population ressemblait à la vie du jeune Nelson Mandela au Transkaï, une vie où pas grand monde n’était riche car la richesse était partagée.
Cependant – on le voit dans les Livre des Juges, de Josué et de Samuel – les circonstances de la vie font que même si tout le monde part plus ou moins à égalité, les uns chutent tandis que les autres prospèrent. La pauvreté peut venir d’une guerre, d’une razzia, d’une tempête, de la destruction de la récolte par la grêle, d’une épidémie de peste dans le bétail, si bien que, au fil des années, cette égalité entre les personnes et les familles se distant, un fossé se creuse.
Et un fossé tel que – à l’époque il n’y avait pas de travail salarié – lorsqu’on en était réduit à vendre son travail, cela voulait dire se vendre comme esclave. Quand on ne pouvait pas survivre par ses propres moyens on était réduit à vivre comme l’esclave d’un autre.
C’est pour cela que on trouve dans l’Écriture Sainte et particulièrement dans le Livre du Deutéronome et aussi dans celui du Lévitique au chapitre 25 cette idée fondamentale du jubilé, ce temps, tous les cinquante ans, où la terre devait être rendue à ses propriétaires d’origine et les esclaves hébreux devaient retrouver leur liberté : « L’année des 50 ans sera pour vous une année sainte où vous proclamerez l’affranchissement pour tous les habitants dans le pays : ce sera pour vous le Jubilé. Chacun reprendra sa propriété, chacun retournera dans sa famille. » (Lévitique 25,10).
J’ai beaucoup aimé d’ailleurs – et je ne suis pas sûr que beaucoup de monde ait retenu ce fait – que lorsque le Pape saint Jean-Paul II a lancé le Jubilé par sa lettre de 1994 Tertium millento adviente, il disait que le jubilé était un moment où l’on restaurait la dignité de chacun, où l’on remettait les dettes, où l’on redonnait la terre à ceux qui l’avaient perdue, soit par la guerre, soit par la famine, soit pour d’autres raisons. C’était le moment où l’on rétablissait l’égalité.
Et le pape Jean-Paul II n’a pas hésité à dire que l’an 2000 était le moment où l’on devait remettre les dettes. Il parlait entre autres de la dette internationale dont il était beaucoup question à l’époque, souvenez-vous, à la fin des années 1990.
Il ne pensait d’ailleurs pas seulement à la dette internationale ou dette financière ou économique, il pensait aussi à la dette que nous devions aux générations passées pour les péchés qui s’étaient déroulés pendant le millénaire qui s’achevait.
Et c’est de là d’ailleurs que le pape Jean-Paul II a tiré sa volonté de glorifier la sainteté des mille ans qui venaient de s’achever d’une part, et de demander pardon pour les péchés de ces mêmes mille ans, d’autre part. Ainsi germa le travail de repentance qu’il enracinait dans cette expérience biblique du jubilé comme temps de remise de la dette et de redistribution de la terre.
C’est dire à quel point Dieu n’aime pas qu’il y ait des pauvres et des riches ou plutôt que les riches ne s’intéressent pas aux pauvres, qu’il n’y ait pas de temps en temps et régulièrement une redistribution.
Il a créé la terre pour tout le monde mais il en reste le maître : « La terre m’appartient. Vous n’en êtes pas les propriétaires, vous n’en êtes que les tenanciers. Je vous l’ai offerte mais c’est pour tous et pas seulement pour un petit nombre » (Lévitique 25,23).
La période des Juges s’est achevée pour des raisons simples, si j’ose dire, c’est que la complexification de la situation politique, l’arrivée en particulier de peuples venus de la mer que l’on appelait les Philistins, qui maîtrisaient le fer, ce que ne maîtrisaient pas les tribus israélites, a fait que le système de protection des Juges ne fonctionnait plus.
Si bien que les clans des Israélites ont cherché un nouveau modèle de fédération et d’unification par l’établissement d’un royaume. Un roi, cela voulait dire une armée de métier, un corps de fonctionnaires, bref, une organisation plus forte et plus centralisée que l’organisation tribale. Cela voulait dire aussi une stratification sociale qui allait de nouveau diviser la population et faire que les uns soient au service des autres.
[à suivre]
© A.E.S. -2015
Commentaire des lectures du dimanche
Réjouissez-vous et soyez dans l’allégresse
Le sermon sur la montagne (Mt 5-6-7) s’ouvre avec les béatitudes. Il est intéressant de constater que ce programme de vie, proposé aux filles et aux fils du Royaume de Dieu, ne commence pas par une série d’obligations : « Vous devez faire ceci, vous devez faire cela… » mais par la répétition joyeuse du « Heureux êtes-vous ! ». Le Christ lance un vibrant appel au bonheur, un appel à la joie. La vocation des chrétiens, c’est de rechercher le bonheur.
« Heureux », revient cinquante-cinq fois dans le Nouveau Testament ? La religion de Jésus n’est pas une religion triste, tournée vers tout ce qui est négatif. Le Seigneur veut rendre les gens heureux.
Les Béatitudes ne sont pas un tranquillisant spirituel destiné à nous faire accepter les difficultés de la vie, dans l’attente d'un monde meilleur plus tard ! Elles sont un appel et une mission qui nous est confiée maintenant à nous qui avons reçu l’Évangile.
Tout de suite après les Béatitudes, Jésus explique ce que l’on doit faire chaque jour pour être heureux : « On vous a dit : Tu ne tueras point. Moi je vous dis de ne pas insulter, de ne pas même contrister vos frères et sœurs. On vous a dit : Tu ne commettras pas d’adultère. Moi je vous dis de conserver votre œil et votre cœur pur. On vous a dit : œil pour œil, dent pour dent. Moi je vous dis de ne pas vous laisser prendre dans l’engrenage et l’escalade de la violence ; soyez des artisans de paix. On vous a di : aimez votre prochain et haïssez votre ennemi. Moi je vous dis : aimez vos ennemis, faites du bien à ceux et celles qui vous haïssent. On vous a dit : les offrandes à l’autel doivent avoir la priorité. Moi je vous dit : Quand tu présentes ton offrande à l’autel, si alors tu te souviens que ton frère ou ta sœur a quelque chose contre toi, laisse là ton offrande, devant l’autel. Va d’abord te réconcilier avec ton frère ou ta sœur ; puis reviens, et alors présente ton offrande ».
Jésus parle du bonheur en termes d’amour pour les autres. C’est cela qui caractérise aussi bien les Béatitudes que le Jugement dernier (Mt 25 : J’avais faim et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif… j’étais nu… j’étais malade…).
Jésus est la clé de compréhension des béatitudes. Il est celui qui n’arrache pas le roseau écrasé, il n’éteint pas la mèche qui vacille (Mt 12, 20). Il s’offre en exemple : « Apprenez de moi qui suis doux et humble de cœur » (Mt 11, 29).
L’évangile des Béatitudes nous présente Jésus entouré d’une foule de malades, d’infirmes, de gens qui souffrent. « À la vue des foules, il fut saisi de pitié, car ces gens étaient prostrés, écrasés, comme des brebis qui n’ont pas de berger ». (Mt 9, 36) Jésus s’identifie à ceux et celles qui souffrent. Il ira jusqu’à dire : « Ce que vous avez fait à l’un de ces petits... c’est à moi que vous l’avez fait ». (Mt, 25,40)
Dans le Sermon sur la Montagne, Jésus est le nouveau Moïse venu refaire l’unité du Peuple de Dieu. Il promulgue la loi du Royaume et invite ses auditeurs à changer leur vie, à se convertir, à voir les choses d’une manière différente.
Dès maintenant il est possible d’adopter une nouvelle façon de vivre, et ceci est le fondement de la joie des Béatitudes. Il s’agit de choisir les valeurs qui peuvent nous changer et apporter un peu de chaleur humaine autour de nous. Les béatitudes veulent transformer notre cœur de pierre en cœur de chair.
Dans une société de gens violents, intolérants, revendicateurs, le Seigneur nous propose aujourd’hui un choix bien différent. Il ne s’agit pas d’être le premier, le meilleur, le plus riche, le plus fort, mais d’être des femmes et des hommes de paix, de partage et d’entraide. Il s’agit de remplacer notre mentalité égoïste (moi ! moi ! moi !) par une mentalité fraternelle.
Nous avons toujours eu de ces femmes et ces hommes de paix au milieu de nous. Il faut penser au Mahatma Gandhi, Martin Luther King, Thérèse de Calcutta, Jean Vanier, Nelson Mandela, Mgr Roméro, Desmon Tutu... Ces femmes et ces hommes sont aussi très nombreux dans nos familles et dans notre entourage. Ils nous font comprendre qu’une seule personne peut faire une différence importante dans la vie des gens.
Manuel Mejìa Vallejo, un auteur péruvien, a écrit un roman intitulé « El día señalado » : il raconte l’histoire d’un curé de campagne dans un village abandonné à la sécheresse et à la mort lente de la terre et du village. Aux paroissiens qui viennent se confesser, le jeune prêtre ne trouve rien de mieux que de leur donner, comme pénitence, la graine d’un arbre qu’ils devront planter pour être absous. Ces pauvres gens ont dû commettre un grand nombre de péchés car après une trentaine d’années la croissance de tous ces arbres a changé le climat, redonné vie à la terre et espoir aux familles. Avec clairvoyance, ce jeune prêtre a changé la vie des gens du village.
Le Christ nous invite aujourd’hui à nous convertir et à changer le monde une action à la fois : « Heureux les artisans de paix; ils seront appelés filles et fils de Dieu. »
© Cursillo - 2017