Pko 23.07.2017
Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°39/2017
Dimanche 23 juillet 2017 – 16ème Dimanche du Temps ordinaire – Année A
Humeurs…
« Il faut se faire pardonner par les pauvres le bien qu’on leur fait ! »
« Il faut se faire pardonner par les pauvres le bien qu’on leur fait ». Cette parole attribuée à Saint Vincent de Paul doit nous aider à réfléchir au regard que nous portons sur les pauvres et la question de la pauvreté en Polynésie.
En effet, cette phrase admirable nous rappelle comment nous devons nous situer à l’égard des pauvres. Non pas un regard de domination ou même un désir de « faire du bien » mais dans une démarche d’humilité qui reconnaisse la pleine dignité de la personne.
Le Père Jean-Christophe Chauvin, religieux de Saint Vincent de Paul commente ce propos ainsi : « Dans cet esprit-là, quand on est en contact avec un pauvre, bien sûr nous, on lui apporte une aide qui est une aide matérielle, et le cas échéant, une aide spirituelle en prenant du temps pour l’écouter, etc… Mais ce qu’il nous faut bien réaliser, c’est que le pauvre aussi nous fait un cadeau. Le pauvre nous fait le cadeau de pouvoir être bon. Et quand on regarde bien, c’est le plus grand cadeau ! À partir du moment où le contact avec le pauvre se passe dans cet esprit-là, on est sur un plan d’égalité. Il n’y a plus de charité condescendante, et cela change tout... »
Régulièrement la presse se fait l’écho de la problématique de la pauvreté dans notre Fenua, et particulièrement des personnes errant dans nos rues. Associations et Gouvernement font des tables rondes, des réunions pour évaluer le « problème ». On expose des chiffres… on se tiraille un peu pour savoir qui est SDF… qui ne l’est pas… On se « concerte pour une meilleure prise en charge des personnes… » Ainsi, cette semaine, on a pu lire : « On a identifié les problématiques, avec chacune des composantes de la population des SDF : les mineurs, jeunes adultes, personnes âgées, atteintes de troubles mentaux, etc. On ne peut pas les gérer dans leur globalité. Il faut s’attaquer à chaque profil. »
Mais il ne faut pas oublier l’essentiel : les pauvres ne sont pas un problème de société… ce sont des personnes. Tant que nous ne les regarderons pas comme telles… on n’avancera pas… Et c’est là que l’Évangile et les chrétiens doivent apporter leur pierre à l’édifice…
Changeons le regard de nos responsables… apprenons leur à regarder tout humain, comme une personne !
Humanisons notre regard ! Humanisons notre société !
Dieu s’est fait Homme !
L’homme veut se faire Dieu au mépris de ses frères !
Entretien de S. Vincent de Paul avec les Filles de la Charité
Nous ne devons pas considérer un pauvre paysan ou une pauvre femme selon leur extérieur, ni selon ce qui paraît de la portée de leur esprit ; d’autant que bien souvent ils n’ont presque pas la figure ni l’esprit de personnes raisonnables. ~ Mais tournez la médaille, et vous verrez par les lumières de la foi que le Fils de Dieu, qui a voulu être pauvre, nous est représenté par ces pauvres ; qu’il n’avait presque pas la figure d’un homme en sa Passion, et qu’il passait pour fou dans l’esprit des Gentils, et pour pierre de scandale dans celui des Juifs ; et avec tout cela, il se qualifie l’évangéliste des pauvres : Il m’a envoyé porté la Bonne Nouvelle aux pauvres.
Ô Dieu ! qu’il fait beau voir les pauvres, si nous les considérons en Dieu et dans l’estime que Jésus Christ en a faite ! Mais, si nous les regardons selon les sentiments de la chair et de l’esprit mondain, ils paraîtront méprisables. ~
Dieu aime les pauvres, et par conséquent il aime ceux qui aiment les pauvres ; car, lorsqu’on aime bien quelqu’un, on a de l’affection pour ses amis et pour ses serviteurs. [Tâchons] de s’appliquer avec affection à servir les pauvres, qui sont les bien-aimés de Dieu ; et aussi nous avons sujet d’espérer que, pour l’amour d’eux, Dieu nous aimera. ~
Il ne faut pas de retardement en ce qui est du service des pauvres. Si, à l’heure de votre oraison, le matin, vous devez allé porter une médecine, oh ! allez-y en repos ; offrez à Dieu votre action, unissez votre intention à l’oraison qui se fait à la maison, ou ailleurs, et allez-vous-en sans inquiétude.
Si, quand vous serez de retour, votre commodité vous permet de faire quelque peu d’oraison ou de lecture spirituelle, à la bonne heure ! Mais il ne vous faut point inquiéter, ni croire avoir manqué, quand vous la perdrez ; car on ne la perd pas quand on la quitte pour un sujet légitime. Et s’il y a sujet légitime, mes chères filles, c’est le service du prochain.
Ce n’est point quitter Dieu que quitter Dieu pour Dieu, c’est-à-dire une œuvre de Dieu pour en faire une autre, ou de plus grande obligation, ou de plus grand mérite. Vous quittez l’oraison ou la lecture, où vous perdez le silence pour assister un pauvre, oh ! sachez, mes filles, que faire tout cela, c’est le servir. ~
Car, voyez-vous, la charité est par-dessus toutes les règles, et il faut que toutes se rapportent à celle-là. C’est une grande dame. Il faut faire ce qu’elle commande. ~
Allons donc, et nous employons avec un nouvel amour à servir les pauvres, et même cherchons les plus pauvres et les plus abandonnés ; reconnaissons devant Dieu que ce sont nos seigneurs et nos maîtres, et que nous sommes indignes de leur rendre nos petits services.
© Textes liturgiques © AELF, Paris
La Parole aux sans paroles 84
Portrait d’une sœur de la rue - Moehau
Jamais on ne saura vraiment ce qui c’est passé entre Moehau et son beau-père. Mais, la mère, elle, a préféré croire son nouveau conjoint et chasser sa fille de 16 ans. 11 ans après et d’autres galères, Moehau est encore dans la rue.
D’où viens-tu ?
« Je viens de Faaa, j’ai grandi là-bas avec mes parents. Mais, à mes 16 ans, ma maman m’a foutue dehors parce qu’elle croit que je veux de mon beau-père. Un jour, je lui ai dit : "Maman, ton mari est venu me voir dans ma chambre" et elle m’a mise dehors. Elle ne s’est pas faite chiée. C’est lui qui était venu mais elle ne voulait rien savoir. Aujourd’hui, j’ai 27 ans. Ça fait 11 ans que je suis dans la rue ! Et, elle, elle dit à tout le monde que je suis morte. »
Et ton papa ?
« Il vit à Moorea avec ma belle-mère. Ça va avec lui, il fait attention à moi. De temps en temps, je descends à Moorea. »
Il ne pourrait pas t’héberger ?
« Si, il pourrait mais il a 8 enfants avec ma belle-mère. C’est difficile, tu vois. Je n’ai pas envie de déranger. »
Comment survit-on dans la rue à 16 ans ?
« Ben, j’allais me vendre, pour avoir des sous, pour manger. Certains clients m’aidaient un peu plus que les autres. Des gens, croisés dans la rue, me donnaient à manger et des sous. C’est comme ça que je m’en sortais. Mais, tu sais, j’aime bien, je préfère cette vie-là. Chez moi, j’avais le droit de ne rien faire. Si je sortais, on me tapait avec la ceinture. »
Et à l’école ?
« J’ai été à l’école des Sœurs aux Marquises. C’est mon tonton qui a choisi de me mettre là-bas. Et, j’étais suivie aussi par les Affaires Sociales. Ça allait mieux après. J’ai été aussi en famille d’accueil. J’ai vécu une vie pas très stable ! On nous maltraitait, moi et mon petit frère à chaque fois. Puis, on changeait de famille et c’était la même chose ! Je suis rentrée des Marquises à 18 ans, j’ai eu un bébé et, là, je suis revenue dans la rue. Ma fille, elle a 9 ans aujourd’hui. »
Où est ta fille aujourd’hui ?
« Elle est chez ma maman, à Faaa. Ça, c’est l’aînée. Ma cadette, elle, a 6 ans et vit chez son papa à Arue. »
Le plus dur dans la rue ?
« De dormir sans avoir peur ! Avec tous les agresseurs, tous les voleurs, ça craint ! »
Tu as déjà eu des problèmes ?
« Non, pas encore mais je me méfie quand même. »
Où dors-tu ?
« À la Cathédrale, dans l’église, c’est mieux. Mais, même avec les caméras dans l’église, il y a encore des voleurs ! »
Ton meilleur souvenir de la rue ?
« C’est ici, à Te Vaiete, avec Père et les amis. Quand je suis arrivée dans la rue, quelqu’un m’a dit que Père Christophe aidait les S.D.F. et qu’il servait tous les jours le café ici. C’est comme que je l’ai connu, j’étais jeune ! »
Qu’est-ce qu’il faudrait pour t’aider à sortir de la rue ?
« Un travail. Là, je suis en train de chercher partout ! J’attends une formation, là début juillet, pour avoir un CAP de cuisine. Avec ce CAP, je pourrais trouver un travail ! »
Comment vois-tu ta vie dans 20 ans ?
« Alors là, je ne sais pas ! Je ne peux pas voir aussi loin mais je sais que j’aurai un travail pour pouvoir récupérer mes enfants ! »
© Accueil Te Vai-ete - 2017
Un pain et un vin authentique pour la célébration de la messe
Lettre circulaire aux évêques sur le pain et le vin pour l’Eucharistie – 15 juin 2017
La Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des sacrements, dont le préfet est le cardinal Robert Sarah, a rendu public un décret sur le pain et le vin pour l'eucharistie.
1. La Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements, à la demande du Saint Père François, s’adresse aux Évêques diocésains (et à ceux qui leur sont équiparés en droit) pour leur rappeler qu’il leur appartient, en premier lieu, de pourvoir dignement à ce qui est nécessaire pour la célébration de la Cène du Seigneur (cf. Lc 22,8.13). C’est à l’Évêque, premier dispensateur des mystères de Dieu, modérateur, promoteur et gardien de la vie liturgique dans l’Église qui lui est confiée (cf. CIC can. 835 §1), que revient de veiller sur la qualité du pain et du vin destinés à l’Eucharistie et, donc, sur ceux qui les préparent. On rappelle ici, dans le but d’être utile, les dispositions en vigueur, et on suggère quelques indications pratiques.
2. Alors que jusqu’à maintenant, d’une manière générale, quelques communautés religieuses ont pris soin de confectionner le pain et le vin pour la célébration de l’Eucharistie, aujourd’hui on les trouve en vente aussi dans les supermarchés, dans d’autres magasins et sur le réseau Internet. Afin d’éviter tout doute sur la validité de la matière eucharistique, ce Dicastère suggère aux Ordinaires de donner des indications à ce propos, par exemple en garantissant la matière eucharistique par des certificats appropriés.
L’Ordinaire est tenu à rappeler aux prêtres, en particulier aux curés et aux recteurs d’églises, leur responsabilité de vérifier qui sont les personnes qui procurent le pain et le vin pour la célébration, ainsi que l’idonéité de la matière.
Il appartient en outre à l’Ordinaire d’informer et de rappeler la nécessité du respect absolu des normes de la part des producteurs de vin et de pain pour l’Eucharistie.
3. Les normes à propos de la matière eucharistique, indiquées dans le canon 924 du CIC et aux numéros 319-323 de la Présentation générale du Missel romain, ont déjà été expliquées dans l’Instruction Redemptionis Sacramentum de cette Congrégation (25 mars 2004) :
4. « Le saint Sacrifice eucharistique doit être célébré avec du pain azyme, de pur froment et confectionné récemment en sorte qu’il n’y ait aucun risque de corruption. Par conséquent, le pain fabriqué avec une autre matière, même s’il s’agit d’une céréale, ou le pain, auquel on a ajouté une autre matière que le froment, dans une quantité tellement importante que, selon l’opinion commune, on ne peut pas le considérer comme du pain de froment, ne constitue pas la matière valide de la célébration du Sacrifice et du Sacrement de l’Eucharistie. Le fait d’introduire d’autres substances dans la fabrication du pain destiné à l’Eucharistie, telles que des fruits, du sucre ou du miel, constitue un grave abus. Il est évident que les hosties doivent être fabriquées par des personnes qui, non seulement se distinguent par leur intégrité, mais encore sont compétentes dans ce domaine, et emploient les instruments appropriés » (n°48).
5. « Le saint Sacrifice eucharistique doit être célébré avec du vin naturel de raisins, pur et non corrompu, sans mélange de substances étrangères. […] Il faut prendre soin de conserver en parfait état le vin destiné à l’Eucharistie, et de veiller à ce qu’il ne s’aigrisse pas. Il est absolument interdit utiliser du vin dont l’authenticité et la provenance seraient douteuses : en effet, l’Église exige la certitude au sujet des conditions nécessaires pour la validité des sacrements. Aucun prétexte ne peut justifier le recours à d’autres boissons, quelles qu’elles soient, qui ne constituent pas une matière valide » (n°50).
6. La Congrégation pour la Doctrine de la Foi, dans sa Lettre circulaire aux Présidents des Conférences Épiscopales sur l’usage du pain pauvre en gluten et du moût comme matière eucharistique (24 juillet 2003, Prot. N. 89/78 – 17498), a rendu publiques les normes qui regardent les personne qui, pour des motifs graves et divers, ne peuvent absorber du pain normalement confectionné ou du vin normalement fermenté.
a- « Les hosties totalement privées de gluten sont une matière invalide pour la célébration de l’Eucharistie. Sont, par contre, matière valide, les hosties partiellement privées de gluten et celles qui contiennent la quantité de gluten suffisante pour obtenir la panification, sans que l’on y ajoute des matières étrangères et qui n’ont pas été confectionnées selon des procédés susceptibles de dénaturer la substance du pain » (A. 1-2).
b- « Le moût c’est-à-dire le jus de raisin, frais ou conservé, dont on suspend la fermentation grâce à des procédés qui n’en altèrent pas la nature (par exemple dans le cas de la congélation), est une matière valide pour l’Eucharistie » (A. 3).
c- « Les Ordinaires sont compétents pour concéder, aux prêtres ou aux fidèles, la licence d’utiliser comme matière eucharistique du pain comportant une faible teneur de gluten ou du moût. Cette licence peut être concédée, de manière habituelle, tant que dure la situation qui l’a motivée » (C.1).
5. De plus, la même Congrégation a décidé que la matière eucharistique préparée avec des organismes génétiquement modifiés peut être considérée une matière valide (cf. Lettre au Préfet de la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements, 9 décembre 2013, Prot. N. 89/78 – 44897).
6. Ceux qui confectionnent le pain et produisent le vin pour la célébration doivent être vivement conscients que leur œuvre est orientée au Sacrifice Eucharistique, et ceci demande, de leur part, honnêteté, responsabilité et compétence.
7. En vue de l’observance de ces normes générales, les Ordinaires peuvent, s’ils le jugent opportun, se mettre d’accord au sein des Conférences Épiscopales, en donnant des indications concrètes. En tenant compte de la complexité des situations et des circonstances, de même que de la disparition du respect pour les choses sacrées, on sent qu’il est devenu nécessaire, du point de vue pratique, qu’il y ait quelqu’un qui puisse garantir effectivement, à la demande de l’Autorité compétente, l’authenticité de la matière eucharistique de la part des producteurs, ainsi qu’une distribution et vente qui soient convenables.
On suggère, par exemple, qu’une Conférence Épiscopale puisse demander à une ou plusieurs Congrégations religieuses, ou encore à un autre Organisme idoine, de vérifier la production, la conservation et la vente du pain et du vin pour l’Eucharistie dans un pays donné ainsi que dans les autres pays où ces produits seraient exportés. On recommande en outre que, dans les lieux de vente, le pain et le vin destinés à l’Eucharistie soient traités de la manière qui convient à leur usage.
Du siège de la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrement, le 15 juin 2017,
en la solennité du Saint-Sacrement du Corps et du Sang du Christ.
Robert Card. Sarah - Préfet
+ Arthur Roche - Archevêque Secrétaire
© Libreria Editrice Vaticana - 2017
G20 – Attention aux alliances dangereuses
Lettre du Pape François à l’occasion du G20 à Mme Angela Merkel
Le Pape François a adressé une lettre à la chancelière allemande Angela Merkel, à l’occasion du sommet du G20 qui s’ouvre aujourd’hui à Hambourg. Suivant la tradition instauré par Benoît XVI en 2009 lors du sommet du G20 de Londres, le Pape précise dans ce courrier les positions du Saint-Siège sur les grands dossiers de l’actualité internationale.
À Son Excellence
Madame Angela Merkel
Chancelière de la République fédérale d’Allemagne
Suite à notre récente rencontre au Vatican et répondant à votre demande opportune, je désire vous soumettre certaines considérations qui me tiennent à cœur, ainsi qu’à tous les pasteurs de l’Église catholique, en vue de la prochaine rencontre du G20, au cours de laquelle sont présents les chefs d’Etat et de gouvernement des plus grandes économies mondiales et les plus hautes autorités de l’Union européenne. Je suis ainsi une tradition commencée par le Pape Benoît XVI, en avril 2009, à l’occasion du G20 de Londres. Mon prédécesseur écrivit à Votre Excellence également en 2006, à l’occasion de la présidence allemande de l’Union européenne et du G8.
Je voudrais avant tout vous manifester, ainsi qu’aux responsables qui se rencontreront à Hambourg, ma reconnaissance pour les efforts accomplis en vue d’assurer la gouvernabilité et la stabilité de l’économie mondiale, avec une attention particulière pour les marchés financiers, le commerce, les questions fiscales et, plus généralement, une croissance économique mondiale qui soit inclusive et durable (cf. Communiqué du G20 de Hangzhou, 5 septembre 2016). Ces efforts, comme le prévoit le programme de travail du sommet, sont inséparables de l’attention portée aux conflits en cours et au problème mondial des migrations.
Dans le document programmatique de mon pontificat adressé aux fidèles catholiques, l’exhortation apostolique Evangelii gaudium, j’ai proposé quatre principes d’action pour l’édification de sociétés fraternelles, justes et pacifiques: le temps est supérieur à l’espace; l’unité prévaut sur le conflit; la réalité est plus importante que l’idée ; et le tout est supérieur aux parties. Il est évident que ces lignes d’action appartiennent à la sagesse multiséculaire de toute l’humanité et je considère donc qu’elles peuvent également servir de contribution à la réflexion pour la rencontre de Hambourg et également pour l’évaluation de ses résultats.
Le temps est supérieur à l’espace. La gravité, la complexité et l’interconnection des problématiques mondiales sont telles qu’il n’existe pas de solutions immédiates et entièrement satisfaisantes. Malheureusement, le drame des migrations, inséparable de celui de la pauvreté et exacerbé par les guerres, en est une preuve. Il est possible, en revanche, de mettre en œuvre des processus qui soient capables d’offrir des solutions progressives et non traumatisantes et de conduire, dans des délais relativement brefs, à une libre circulation et à une stabilité des personnes qui soient au bénéfice de tous. Toutefois, cette tension entre espace et temps, entre limite et plénitude, exige un mouvement exactement contraire dans la conscience des gouvernants et des puissants. Une solution efficace étendue nécessairement dans le temps ne sera possible que si l’objectif final du processus est clairement présent dans son projet. Dans les cœurs et dans les esprits des gouvernants, et à chacune des phases d’application des mesures politiques, il faut donner une priorité absolue aux pauvres, aux réfugiés, aux personnes qui souffrent, aux déplacés et aussi aux exclus, sans distinction de nation, de race, de religion ou de culture, et il faut rejeter les conflits armés.
Je ne peux alors manquer d’adresser aux chefs d’État et de gouvernement du G20 ainsi qu’à toute la communauté mondiale un appel pressant pour la situation tragique au Soudan du Sud, du bassin du lac Tchad, de la Corne de l’Afrique et du Yémen, où 30 millions de personnes n’ont ni nourriture, ni eau pour survivre. L’engagement en vue de répondre avec urgence à ces situations et apporter un soutien immédiat à ces populations sera un signe du sérieux et de la sincérité de l’engagement à moyen terme pour réformer l’économie mondiale et une garantie de son développement efficace.
L’unité prévaut sur le conflit. L’histoire de l’humanité, aujourd’hui encore, nous présente un vaste horizon de conflits actuels ou potentiels. Toutefois, la guerre n’est jamais une solution. À l’approche du centenaire de la lettre de Benoît XV Aux chefs des peuples belligérants, je me sens dans l’obligation de demander au monde de mettre fin à tous ces massacres inutiles. L’objectif du G20 et d’autres rencontres annuelles semblables est de résoudre dans la paix les différences économiques et de trouver des règles financières et commerciales communes qui permettent le développement intégral de tous, en vue d’atteindre l’objectif de l’Agenda 2030 et les objectifs de développement durable (cf. Communiqué du G20 de Hangzhou). Toutefois, cela ne sera possible que si toutes les parties s’engagent à réduire de façon significative les niveaux de conflit, à arrêter l’actuelle course aux armements et à renoncer à s’impliquer de façon directe ou indirecte dans les conflits, et acceptent de discuter de façon sincère et transparente de toutes les divergences. Il y a une contradiction tragique et une incohérence dans l’apparente unité, d’une part, dans les forums internationaux sur des questions économiques ou sociales et, d’autre part, l’acceptation active ou passive de conflits armés.
La réalité est plus importante que l’idée. Les tragiques idéologies du XXe siècle ont été remplacées par les nouvelles idéologies de l’autonomie absolue des marchés et de la spéculation financière (cf. EG, n.56). Celles-ci laissent derrière elles des conséquences tragiques d’exclusion et de rejet, et également de mort. Les succès politiques et économiques qui, en revanche, n’ont pas manqué, ont toujours été marqués par un pragmatisme sain et prudent, guidé par le primat de l’être humain et par la tentative d’intégrer et de coordonner des réalités diverses et parfois opposées, à partir du respect pour chaque citoyen. Dans ce sens, je prie Dieu pour que le sommet de Hambourg soit illuminé par l’exemple de responsables européens et mondiaux qui ont toujours privilégié le dialogue et la recherche de solutions communes : Schuman, De Gasperi, Adenauer, Monnet et tant d’autres.
Le tout est supérieur aux parties. Les problèmes doivent être résolus de façon concrète et en accordant toute l’attention qui leur est due à leurs particularités, mais les solutions, pour être durables, ne peuvent manquer d’avoir une vision plus ample et doivent considérer les répercussions sur tous les pays et tous leurs citoyens, et respecter leurs vues et opinions. Je voudrais répéter l’avertissement que Benoît XVI adressait au G20 de Londres en 2009. Bien qu’il soit raisonnable que les sommets du G20 se limitent au nombre réduit de pays qui représentent 90% de la production mondiale de biens et de services, cette même situation doit encourager les participants à une profonde réflexion. Tous ceux — Etats et personnes — dont la voix a moins de force sur la scène politique mondiale sont précisément ceux qui souffrent le plus des effets pernicieux des crises économiques pour lesquelles ils n’ont que peu ou aucune responsabilité. Dans le même temps, cette grande majorité qui, en termes économiques, ne représente que 10 pour cent du total, représente la portion d’humanité qui aurait le plus grand potentiel de contribuer au progrès de tous. Il faut donc toujours faire référence aux Nations unies, aux programmes et aux agences associées, ainsi qu’aux organisations régionales, respecter et honorer les traités internationaux et continuer de promouvoir le multilatéralisme, afin que les solutions soient véritablement universelles et durables, au bénéfice de tous (cf. Benoît XVI, Lettre à Gordon Brown, 30 mars 2009).
J’ai voulu offrir ces considérations en tant que contribution aux travaux du G20, confiant dans l’esprit de solidarité responsable qui anime tous les participants. J’invoque donc la bénédiction de Dieu sur la rencontre de Hambourg et sur tous les efforts de la communauté internationale en vue de donner forme à une nouvelle ère de développement innovatrice, durable, respectueuse de l’environnement et incluant tous les peuples et toutes les personnes (cf. Communiqué du G20 de Hangzhou).
Je prie Votre Excellence de croire à l’expression de ma plus haute considération et estime.
Du Vatican, le 29 juin 2017
© Libreria Editrice Vaticana - 2017
« Pourquoi je prie »
Max Gallo, historien et académicien décédé le 19 juillet 2017
L'historien et académicien Max Gallo est décédé mercredi 19 juillet à 85 ans. En 2002, après la sortie d'un livre où il racontait comment il avait retrouvé la foi de sa jeunesse, il témoignait dans La Vie de son retour à la prière. Nous republions son interview en hommage.
« La France a besoin de retrouver ses racines chrétiennes ! » Qui l’affirme ? Max Gallo, ardent défenseur des valeurs républicaines et laïques, écrivain de son état. Après les biographies de Napoléon, de De Gaulle et de Victor Hugo, l’ancien porte-parole de François Mitterrand, soutien de Jean-Pierre Chevènement durant la présidentielle [de 2002], s’attaque [à l'époque], via une trilogie romanesque, à l’histoire des premiers chrétiens. L’occasion pour lui, dans un étonnant prologue dont nous publions quelques extraits, de confesser sa foi en Dieu.
La Vie : Pourrait-on qualifier de conversion l’expérience que vous décrivez dans le prologue de votre roman ?
Max Gallo : Le mot me paraît beaucoup trop fort. Je me suis toujours défini comme catholique, même si je ne suis pas pratiquant. J’ai été baptisé dans une famille qui était laïquement catholique. Cette rencontre avec un événement inattendu, à l’église Saint-Sulpice, m’a brusquement obligé à réfléchir sur la place du christianisme, dans nos sociétés occidentales. C’est ce qui m’a décidé à écrire cette nouvelle grande fresque historique autour des trois personnages qui ont marqué l’histoire de notre pays : Martin de Tours, Clovis et Bernard de Clairvaux.
La Vie : Il y a tout de même ce cri du cœur : « Je suis croyant ! » Aviez-vous déjà eu l’occasion d’exprimer cette conviction ?
Max Gallo : Il m’est arrivé de le dire, mais jamais de manière aussi précise. Peut-être parce que quelque chose s’est déclenché en moi qui m’a incité à le manifester. Peut-être aussi parce que les questions religieuses, liées aux événements du 11 septembre, et l’attitude d’une religion comme l’islam me conduisent aujourd’hui à affirmer ma propre appartenance avec plus de force. Non pas pour afficher je ne sais quelle supériorité, mais pour exprimer une identité autrement que par un creux ou par une absence.
La Vie : Mais la laïcité républicaine que vous défendez si chèrement ne peut-elle tenir lieu d’identité ?
Max Gallo : Cela n’est pas contradictoire. Laïc et républicain, je suis également catholique. Ce serait une imbécillité que de vouloir opposer ces deux appartenances. Ceux qui refusent de vibrer au souvenir de Reims et ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération ne comprendront jamais l’histoire de France. Mon travail d’écrivain, depuis quelques années, consiste précisément à essayer de donner une image la plus complète possible de la diversité de notre histoire nationale. Les Chrétiens s’inscrivent dans le droit fil d’une biographie de Napoléon, de De Gaulle ou de Victor Hugo. Tout cela tourne en fait autour d’une interrogation sur les fondations de notre collectivité nationale et de l’identité française.
La Vie : À sa manière, votre démarche ne rejoint-elle pas celle de Régis Debray, chargé par l’Éducation nationale de réfléchir au problème de la culture religieuse à l’école ?
Max Gallo : De fait, alors qu’il n’y a eu aucune concertation entre nous, je constate que nos démarches convergent. Il nous faut revisiter notre histoire. La France n’est pas née en 1789. Elle est d’abord la fille aînée de l’Église. Si on ne prend pas en compte cette dimension, on ne peut rien comprendre à notre passé. Bien qu’il soit laïc, et qu’il ait été parfois anticlérical, le modèle républicain français doit beaucoup à la tradition catholique. On ne peut absolument pas séparer ces deux réalités, même si on peut comprendre qu’il y ait pu y avoir des oppositions liées à des périodes de tension. Tel est le paradoxe de notre histoire. Un travail doit être mené au plan intellectuel pour réconcilier les Français avec leur histoire, avec toute leur histoire, et pour ne pas laisser s’interrompre le fil de la mémoire. Car l’amnésie est une tragédie pour l’individu comme pour la collectivité.
La Vie : Pourquoi avoir choisi, pour votre nouveau roman, Martin de Tours, Clovis et Bernard de Clairvaux ?
Max Gallo : Ces trois personnages correspondent à trois moments clés de notre histoire. Martin, le premier évangélisateur des Gaules, est celui qui, à la fin du IVe siècle, a contribué à populariser le christianisme qui, jusque-là, était plutôt le fait des élites et des fonctionnaires. Cet homme a tellement marqué notre histoire que son prénom est le plus porté en France, soit comme nom de famille, soit comme nom de commune. Clovis, lui, fut le chef de la tribu des Francs qui donnèrent leur nom à la France. Son baptême, en 499, fait entrer notre pays dans une nouvelle ère. Cinq cents ans plus tard, avec saint Bernard, nous découvrons l’avènement d’une Europe chrétienne à travers la construction de quelque deux cents abbayes en moins de 50 ans. Ces trois figures m’ont permis d’explorer les fondements de notre nation.
La Vie : Les Français ont-ils besoin de retrouver leurs racines ?
Max Gallo : La France souffre d’un très grand déficit de sens. Elle ne sait plus où elle va, ni même ce qu’elle est, peut-être parce qu’elle ne sait plus d’où elle vient. Le XXe siècle, ses guerres et ses totalitarismes, n’a épargné personne. Mais là où d’autres ont su trouver un nouvel élan, qu’il s’agisse des États-Unis, de la Chine, de l’Angleterre ou de l’Allemagne réunifiée, notre pays semble être resté en rade. De toutes les grandes nations, nous sommes la plus blessée symboliquement. Nous n’avons plus de grand dessein. Le problème de la France aujourd’hui ne se résume pas à la question des retraites ou de la sécurité, mais à celle de notre identité. À quelle communauté appartenons-nous ? Quel est notre projet collectif ? Ces questions méritent aussi une réponse spirituelle.
La Vie : Cette prise de conscience a-t-elle changé quelque chose dans votre existence ?
Max Gallo : Curieusement, j’ai redécouvert le sens de la prière, celle que je pratiquais durant mon enfance. Elle est pour moi un moment d’apaisement personnel. On a tous des tensions dans une journée, le soir, le matin et le fait de prier m’apaise. Plus profondément, face à tous les fanatismes et à toutes les tentations sectaires, il me paraît nécessaire de prendre le temps de nous arrêter pour nous poser quelques questions fondamentales, spirituelles, qui touchent au sens de la vie. À cet égard, le christianisme est une religion qui, me semble-t-il, essaie d’éviter les fermetures tout en prenant en compte la demande de spiritualité très forte de nos contemporains. Cette religion s’appuie sur une conviction très forte et très novatrice : il y a du divin et du sacré dans chaque homme. Cette conviction est aussi la mienne.
Extraits : Le jour où tout a basculé…
Dans ces passages, Max Gallo raconte un événement spirituel qui a inauguré une nouvelle étape de sa vie. Extraits du prologue des Chrétiens, volume 1, le Manteau du soldat.
« J’attendais sur les marches de l’église Saint-Sulpice, ce samedi 20 octobre 2001. Le baptême d’Antoine, le fils de Rémi et d’Angela, avait été fixé à seize heures. J’avais accompagné les parents et le nouveau-né et j’avais échangé quelques mots avec le père V., dominicain, qui s’apprêtait à officier. C’était un homme imposant, au visage énergique, au regard voilé. Il m’avait pris par le bras et m’avait entraîné dans une marche autour du baptistère octogonal.
– Je connais vos livres, m’avait-il dit. Vous êtes en chemin. Vous recherchez l’unité. Pourquoi n’entreprendriez-vous pas un grand livre sur les chrétiens ? La manière dont la Gaule a été évangélisée, est devenue la France, reste mal connue, mystérieuse, opaque même pour la plupart des Français. Qui connaît la vie de saint Martin, les circonstances du baptême de Clovis, ou l’œuvre de pierres et de mots de Bernard de Clairvaux ? Voilà les trois colonnes qui soutiennent l’édifice de la foi dans notre pays. Pensez-y !
(...) J’aime la place Saint-Sulpice, qui s’étend devant le lieu de culte comme un vaste parvis, un immense carré de lumière. (...) Une partie de ma vie (...) s’était déroulée là, dans l’un des immeubles d’angle (...). Et c’est là (...) qu’un après-midi d’une sinistre année, il y a trente ans, on vint m’annoncer le suicide de ma fille de seize ans. (...) Sans réfléchir, comme par instinct, je m’étais précipité dans l’église, m’y étais agenouillé.
J’avais récité les prières de mon enfance que j’avais cru oubliées et qui, à cet instant, me revenaient en mémoire comme les seules paroles capables non pas d’atténuer la douleur, mais de me faire accepter ce qui m’apparaissait inconcevable. J’avais eu le désir de m’allonger sur les dalles de la nef, devant l’autel, bras en croix, et de rester là, immobile. J’avais alors pensé – depuis lors, cette brûlure n’a jamais cessé d’être vive – que je n’avais pas fait baptiser ma fille, qui était née sans que sa mère ni moi souhaitions sa venue au monde. Nous avions même plusieurs fois évoqué l’idée que nous pouvions – que nous devions – interrompre cette grossesse survenue trop tôt, alors que nous n’étions encore que des étudiants tout juste sortis de l’adolescence. Mais, en ce temps-là, l’avortement était une aventure qui par ailleurs nous révulsait. Et nous avions renoncé à la courir.
Pourtant, dans cette église Saint-Sulpice, le jour de la mort de ma fille, j’ai su – j’ai cru – que Dieu nous l’avait reprise parce que nous ne l’avions pas assez désirée pour être heureux de sa naissance, et que nous avions négligé de la faire baptiser.
Au moment où j’allais m’abattre sur les pierres de la nef, un ami qui m’avait suivi depuis le bureau m’avait entouré les épaules et soutenu, me guidant hors de l’église. J’avais été ébloui par l’insolente lumière de cette journée d’un juvénile été. Et j’étais longuement resté sur les marches, face à la place, incapable de faire un pas, de retourner dans la vie après cette mort.
© La Vie - 2017
Commentaire des lectures du dimanche
Ainsi il y a de l’ivraie dans le champ du Seigneur !
Ce n’est pas lui qui l’y a semée, car Jésus n’est venu semer que la Parole du Règne de Dieu. « C’est un ennemi qui a fait cela », explique Jésus. Mais comment a-t-il pu réussir ? - parce que « les gens dormaient ». Peut-être avaient-ils des raisons de se reposer ; mais ils auraient dû s’arranger ensemble pour qu’une surveillance, une vigilance, soit possible.
II fallait rester vigilant, car le mal est vite fait quand il s’agit de semer. Jésus le souligne également : l’ennemi a semé de l’ivraie en plein milieu du blé, et il s’en est allé, sachant bien que désormais sa mauvaise graine allait pousser sans lui, en profitant de la bonne terre, préparée pour la bonne graine.
L’inconvénient, avec la mauvaise herbe, c’est qu’au début, et longtemps, elle ressemble au bon blé. Tant que l’herbe est verte, tant que les graines ne sont pas formées, impossible de reconnaître l’ivraie avec certitude. De même dans la terre de notre cœur, lorsque nous laissons l’ennemi semer ses graines de malheur : la désunion, l’égoïsme, ou la tristesse. C’est au bout d’un certain temps que l’on constate le désastre : « mon champ est plein d’ivraie ; mon cœur de croyante est partagé, et il porte à la fois des fruits pour la vie et des germes de mort ».
Alors, quel est le remède ? Les serviteurs, dans la parabole, viennent trouver le maître du champ, avec toute leur bonne volonté, et avec beaucoup d’illusions : « Veux-tu que nous allions ramasser cette ivraie ? » L’ivraie a déjà produit ses épis, et déjà on peut la reconnaître. Mais le maître est formel : « Non ! de peur qu’en arrachant l’ivraie vous ne déraciniez le blé avec elle ».
Il est bien dommage qu’il se trouve de l’ivraie dans notre cœur, dans nos groupes chrétiens, dans nos communautés ; mais ce qu’il faut sauvegarder avant tout, c’est la moisson qui lève et qui va nourrir les hommes, c’est la croissance de l’Évangile dans notre vie, c’est l’expansion missionnaire de l’Église où tous les peuples trouveront le salut.
Si pour éliminer l’ivraie il faut arracher le bon grain, mieux vaut patienter jusqu’à la moisson ; si pour extirper le mal il faut compromettre les fruits du bien, mieux vaut laisser Dieu faire le tri à Son heure.
« Laissez l’une et l’autre croître jusqu’à la moisson », dit Jésus ; et l’on pourrait trouver sa réponse décevante, tellement le désir est puissant au fond des cœurs de vivre dans un monde pur, dans une Église unie, dans une communauté ardente et unanime. Et pourtant, c’est Jésus qui a raison.
D’abord parce que Dieu, en patientant jusqu’au jugement, patiente avec chacun de nous, sans détruire en nous les forces de vie pour arracher tout de suite le mal de notre cœur. Dieu nous donne le temps de la conversion.
Et puis Dieu se réserve le jugement, que Jésus décrit souvent dans l’Évangile comme un moment de vérité où seront révélés le fond des cœurs et le poids réel de chaque existence. Laissons à Dieu le dernier mot sur toute chose, et gardons la paix. Le mal ne gagnera pas, ni dans notre cœur ni dans le monde, si nous laissons faire la patience de Dieu : « Ayez confiance ; disait Jésus, j’ai vaincu le monde », le monde du refus.
Certes, l’ivraie pousse, grandit, et c’est souvent un scandale ; mais nous n’avons pour la combattre, en nous et autour de nous, que les seules armes de l’Évangile, les outils du grand Moissonneur. Jésus s’est livré pour nos péchés. Pour stopper la montée de l’ivraie dans le champ du monde, il a offert à Dieu sa vie donnée aux hommes et son obéissance ; il a vécu pleinement Fils et totalement frère.
Et depuis vingt siècles il moissonne, pour son grenier éternel.
Fr. Jean-Christian Lévêque, o.c.d.
© Carmel.asso- 2008