Pko 23.04.2017

Eglise cath papeete 1

Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°24/2017

Dimanche 23 avril 2017 – 2ème Dimanche de Pâques – Dimanche de la Miséricorde Divine – Année A

Humeurs…

La chasse est ouverte !

La chasse est ouverte… les vieux démons municipaux sont de retour. Mercredi soir, 22h… deux voitures de la Police municipale se garent dans un premier temps devant le presbytère… six personnes en sorte pour réveiller deux S.D.F. qui dormaient paisiblement : « Vous devez quitter les lieux… des personnes se sont plaintes ! » Les deux voitures repartent [peut-être dérangé par la présence du vicaire de la Cathédrale à ce moment-là !] pour revenir par l’autre côté et réveiller la dizaine de personnes qui dorment derrière la Cathédrale… Aux S.D.F. qui leur demande pourquoi ? « C’est pas nous !… Nous ne faisons que notre travail… Faut nous comprendre ! »

Des personnes se sont plaintes ! Qui ? Les commerçants qui n’ont aucun scrupule à laisser à longueur de journée les poubelles sur les trottoirs ou des grenouilles de bénitier dérangées par la vision de ses frères en Jésus peu présentables autour et dans la Cathédrale ? Ou alors, plus probable et tout simplement, une réaction de « la minuscule portion de ceux qui possèdent et détiennent la plus grande partie de la richesse, prétendant déterminer le destin de l’humanité » (Pape François) ?

Il est affligeant de voir cette classe dirigeante étaler autour des fêtes de Noël, leur attention au S.D.F. en organisant des repas à la Mairie, à grand renfort de Média, et qui au milieu de la nuit, lorsqu’il n’y a personne pour s’offusquer de leur attitude s’adonnent à la chasse au S.D.F. Attitude méprisable qui nous renvoie à ces hommes courageux qui vont arrêter Jésus en cachette au milieu de la nuit !

Que devons-nous répondre aux Autorités du Territoire qui viennent de nous manifester le désir de nous accompagner lors d’une maraude du mardi soir : « Vous risquez de donner à manger à des personnes que la municipalité s’empressera de chasser juste après ! »

Qu’en est-il de l’arrêté municipal 2014-487 DGS du 28 août 2014 précise que l’interdiction de dormir à ces endroits entre 5h et 22h !

Les vieux démons de la municipalité sont toujours là ! À quand la reprise de cette vieille tradition, pratiqué dans les années 90… ou la police municipale avait pour mission de ramasser les S.D.F. de la ville pour aller les déposer à 2h du matin à Papenoo ?

Pour la ville de Papeete les S.D.F. sont plus nuisibles à son image que les poubelles, parfois débordantes, restant le long des trottoirs du centre-ville à longueur de journée…

« Aujourd’hui, lorsqu’on parle d’exclusion, viennent à l’esprit immédiatement des personnes concrètes ; pas des choses inutiles, mais des personnes précieuses. La personne humaine, placée par Dieu au sommet de la création, est souvent rejetée, car on préfère les choses qui passent. Et cela est inacceptable, parce que l’homme est le bien le plus précieux aux yeux de Dieu. Et c’est grave qu’on s’habitue à ce rejet ; il faut s’inquiéter, lorsque la conscience est anesthésiée et ne prête plus attention au frère qui souffre à côté de nous ou aux problèmes sérieux du monde, qui deviennent seulement des refrains entendus dans les revues de presse des journaux télévisés ». (Pape François – Jubilé des pauvres – 11 novembre 2016)

Chronique de la roue qui tourne

Alors vivons !

« J’étais sans vie et sans voix

Sans espérance et sans joie

Presque rendu au bout de mon temps

Mais, voici que se sont ouverts

Les grands bras de la lumière

Et voilà que je pars vers l’univers

Je pars, je pars

Je monte, je monte

Je vole

Le ciel est à moi »

Chanson du film « Le papillon bleu »,

interprétée par Marie-Hélène Thibert

La mort, cette terrible échéance qui rendait vaines toutes nos réalisations a été vaincue.

La mort, ce néant qui devait nous condamner à l’oubli éternel a été vaincu.

La mort, cette faucheuse qui devait nous arracher à jamais tous nos proches a été vaincue.

La mort, cette interminable nuit noire qui devait s’abattre sur nous a été vaincue.

La mort, ce silence assourdissant qui devait nous engloutir a été vaincu.

La mort, ce mystère qui devait nous envelopper, malgré nous, a été vaincu.

La mort, cette fin logique et immuable à toute vie qui assombrissait nos jours a été vaincue.

Alors, vivons !

Vivons car la vie n’est pas un cadeau qui nous sera repris !

Vivons car nos vies ont été rachetées au prix fort !

Vivons car notre humanité a été transfigurée pour survivre à l’éternité !

Vivons car rien n’est vain et tout est possible !

La chaise masquée

© Nathalie SH – P.K.0 – 2017

Tout ne fait que commencer

En marge de l’actualité du jeudi 20 avril 2017

La dramaturgie de la Semaine Sainte nous a fait suivre un itinéraire éprouvant, mais à l’issue extraordinaire. Aux heures si sombres et violentes du jugement et de la persécution de Jésus, au désespoir et à la tristesse inondant les cœurs tandis que le corps du Sauveur gît dans le tombeau, la lumière de la résurrection a imposé sa puissance de joie, d’espérance, d’amour.

Devant l’impressionnante et définitive victoire de la Vie sur la mort, d’aucuns penseraient que tout fut accompli, qu’il n’y aurait plus à attendre très longtemps pour que le Règne de Dieu s’établisse définitivement. Les premiers chrétiens, les apôtres eux-mêmes, vivaient effectivement avec cet espoir d’un retour tout imminent du Christ.

À un peu plus de 2000 ans de distance, nous connaissons l’étendue d’une attente qui semble maintenant interminable. En fait, la résurrection a été autant un point culminant qu’un point de départ : l’apogée de la révélation de l’amour du Père et du Fils pour l’humanité, mais aussi le début du déploiement progressif de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ dans le monde.

L’Église, comme légataire d’une mission confiée par le Christ d’aller dans le monde entier pour proclamer cette Bonne Nouvelle, ne peut faire autrement que comme le Christ a fait : proposer et non imposer, attirer et non tirer de force, accueillir et non tourner le dos, aimer et non ôter la liberté.

Il faut du temps pour mener à bien cette grande œuvre. Le cœur des hommes est un mystère, il ne change pas du jour au lendemain. En saint Jean, lorsque le Christ ressuscité apparaît à ses apôtres, à plusieurs reprises Il leur dit cette parole : « La paix soit avec vous ! », signe que l’extraordinaire espérance portée par l’événement de la résurrection a besoin d’être accueillie progressivement par les apôtres.

Malgré la distance qui nous sépare de cet événement, nous en sommes toujours les contemporains : le Christ ressuscité, transcendant les obstacles du temps et de l’espace, peut rejoindre toute personne « ici et maintenant ». C’est pourquoi la résurrection conserve un dynamisme intact à travers les siècles, à condition toutefois que l’espérance qu’elle représente soit accueillie par les générations.

Voilà donc le défi qui nous attend comme chrétiens : témoigner de l’actualité de la résurrection du Christ et, ce faisant, participer au progrès de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ dans le monde et dans le cœur des hommes. En cette grande œuvre, que la paix de notre Seigneur soit avec nous tous !

+ Mgr Jean Pierre COTTANCEAU

© Archidiocèse de Papeete - 2017

La Parole aux sans paroles – Hors-série

Petit bilan des Petits-déjeuners de l’Accueil Te Vai-ete

Il y a un mois, nous vous proposions un premier bilan des « Maraudes » du mardi soir avec le Truck de la Miséricorde. Aujourd’hui c’est une « photographie » de l’Accueil Te Vai-ete sur une période d’un mois et demi… À l’heure ou la Pape François déploie une énergie nouvelle pour secourir les S.D.F. de la place Saint Pierre… et ou la Municipalité de Papeete cède à ses vieux démons de la « chasse au S.D.F. » une lecture qui nous sera profitable…

Depuis l’inauguration de l’« Accueil Te Vai-ete », le 23 décembre 1994, nous avons entrepris, pour la première fois,  une étude systématique de la présence des accueillis, et de leur situation sanitaire. Ainsi, depuis le mois de mars 2017, nous relevons chaque jour le nom des personnes qui y prennent un repas.

L’Accueil est ouvert tous les jours du lundi au samedi de 6h30 à 8h30 environ, à l’exception du 1er janvier et du 25 décembre.

L’objectif de l’Accueil est d’offrir aux personnes à la rue l’occasion d’un repas à table, de se laver et de laver leur linge… éléments fondamentaux de la dignité humaine.

Le repas confectionné à l’Accueil Te Vai-ete dès 6h30, par les bénévoles et les accueillis eux-mêmes, y est servi entre 7h15 et 7h30 ; l’Accueil ferme vers 8h30. Au mois de mars-avril 2017 ce sont 130 personnes différentes qui l’ont fréquenté à raison de 40 personnes en moyenne chaque jour.

Outre les repas qui y sont distribués, il est proposé aux personnes accueillies un accompagnement pour la constitution ou le renouvellement de leur dossier R.S.P.F. ainsi que pour leurs Cartes nationale d’identité (C.N.I.). Cet accompagnement nous permet de donner aujourd’hui une photographie assez précise de la situation générale des personnes accueillies.

Durant de cette période d’un mois et demi au cours de laquelle 1562 repas ont été servis, nous avons pu constater la fréquence à laquelle les 130 personnes les ont pris.

19 personnes ont pris de 30 à 38 repas, 17 de 20 à 29 repas, 21 de 10 à 19 repas, 15 de 5 à 9 repas, 20 de 2 à 4 repas et une personne y a pris 38 repas.

Quelques constats :

  • Nous constatons, en recoupant la liste des personnes rencontrées lors des maraudes du mardi soir qui sont au nombre de 169 à ce jour et la liste des personnes reçues à l’Accueil… une concordance de 20 noms. La règle se voulant être que les personnes qui ont pris un repas le matin à l’Accueil ne soient pas servies le soir. Ainsi, nous pouvons établir que 279 personnes différentes sont atteintes lors de nos actions.
  • Sur les 130 personnes reçues à « Te-Vaiete » 39 sont des femmes et 91 des hommes… soit 30% de femmes ; occasionnellement nous recevons des enfants avec leurs parents… essentiellement durant les vacances scolaires.
  • Moyennes d’âge : 2 personnes ont entre 60 et 70 ans, 9 entre 50 et 60 ans, 35 entre 40 et 50, 39 entre 30 et 40, 29 entre 20 et 30, 3 entre 18 et 20, 8 entre 16 et 18 ans, si ajoutent 4 mineurs et une personne dont l’âge nous est inconnu.
  • Couverture médicale : 2 salariés (dont 1 mineur couvert par les parents) ; 2 RNS (dont 1 mineur couvert par les parents) ; 2 retraités ; 9 adultes handicapés (CPS) ; 3 dont la situation n’a pu être identifiée ; les autres relèvent du régime RSPF (dont 3 par le conjoint).

Actuellement pour 105 d’entre eux la couverture santé est à jour ; 13 sont en attente d’admission au SAS ; pour 10 personnes, les dossiers sont en cours de constitution… 3 sont encore non identifiés. La constitution des dossiers peut prendre un peu de temps : après avoir pris note de leur nom, prénoms et date de naissance, il faut vérifier auprès des services de la CPS leur situation, puis préparer les dossiers, réunir les pièces nécessaire

  • Par ailleurs, nous notons que 9 adultes handicapés sont reconnus par le service COTOREP-CPS… cependant 4 autres nécessiteraient la mise en place d’un dossier Adulte handicapé…, ainsi nous recensons au minimum 13 personnes handicapées … dont 2 schizophrènes avérés. Toutes ces personnes souffrent de handicaps psychologiques… Ils représentent 10% des personnes rencontrées !

Quelques remarques à partir de ces constats

1°-  La majeure partie des personnes rencontrées se situe dans la tranche d’âge entre 20 et 50 ans soit 81% de l’ensemble… en décalage avec les personnes rencontrées lors de nos maraudes du mardi soir… entre 30 et 60 ans. Si l’accent donné par la politique du Pays est essentiellement, pour ne pas dire exclusivement, la formation des jeunes… il ne faudrait pas oublier la tranche d’âge des hommes et des femmes qui sont les forces vives d’une société !

2°-  Le nombre important de personnes handicapées se retrouvant en situation de grande précarité se confirme. Elles sont laissées pour une grande part à elles-mêmes, sans réel suivi même pour celles qui ont un tuteur désigné.

Projet

Nous sommes à la recherche d’un nouveau local mieux adapté pour le fonctionnement de l’Accueil. L’ancien « Cercle des marins » à Vaininiore serait idéal. Il appartient au Port autonome… Notre politique étant ne pas avoir recours à l’aide publique… l’idéal serait la mise à disposition de ce terrain et de ce qui reste de la bâtisse à titre gracieux pour une période idéale de 20 ans… sous condition que son utilisation reste exclusivement l’accueil et l’accompagnement des personnes en grande précarité à la rue. Vos prières sont les bienvenues !

Conclusion

Cette photographie très succincte de la situation des S.D.F de la zone urbaine de Tahiti, des personnes qui fréquentent l’Accueil Te Vai-ete les matins du lundi au samedi (nombre, régularité, situation administrative et médicale…) est à mettre en lien avec la précédente au sujet des maraudes du mardi soir.

Nous souhaitons que cette petite étude sans prétention puisse d’une part vous « éclairer » un peu plus sur ce sujet délicat, en plus de vouloir être utile pour mieux cerner la question des S.D.F. de Tahiti afin que des mesures pérennes soient mise en place au plus vite…et ce, pour permettre que la dignité de l’homme soit davantage respectée dans notre société polynésienne.

© Accueil Te Vai-ete - 2017

Audience générale du mercredi 19 avril 2017

Le Christianisme n’est pas une idéologie

Le christianisme « n’est pas une idéologie, ce n’est pas un système philosophique, mais c’est un chemin de foi qui part d’un événement dont ont été les témoins les premiers disciples de Jésus ». Quelques jours après Pâques, le Pape François a voulu parler du « Christ ressuscité, notre espérance tel que nous le présente saint Paul dans la première Lettre aux Corinthiens ».

Chers frères et sœurs, bonjour !

Nous nous rencontrons en ce jour, dans la lumière de Pâques, que nous avons célébré et que nous continuons de célébrer dans la liturgie. C’est pourquoi, dans notre parcours de catéchèses sur l’espérance chrétienne, je désire aujourd’hui vous parler du Christ ressuscité, notre espérance, comme le présente saint Paul dans la première Lettre aux Corinthiens (cf. chap.15)

L’apôtre veut résoudre une problématique qui était certainement au centre des discussions dans la communauté de Corinthe. La résurrection est le dernier sujet abordé dans la Lettre, mais, en ordre d’importance, c’est probablement le premier : en effet, tout repose sur ce présupposé.

En parlant à ses chrétiens, Paul part d’un donné irréfutable qui n’est pas l’aboutissement de la réflexion de quelque sage, mais un fait, un simple fait qui est intervenu dans la vie de plusieurs personnes. Le christianisme naît d’ici. Ce n’est pas une idéologie, ce n’est pas un système philosophique, mais c’est un chemin de foi qui part d’un événement, dont les premiers disciples de Jésus ont témoigné. Paul le résume ainsi : Jésus est mort pour nos péchés, il a été enseveli et le troisième jour il est ressuscité et il est apparu à Pierre et aux Douze (cf. 1 Cor 15, 3-5). Voilà le fait : il est mort, il est enseveli, il est ressuscité et il est apparu. C’est-à-dire Dieu est vivant ! C’est le cœur du message chrétien.

En annonçant cet événement, qui est le noyau central de la foi, Paul insiste surtout sur le dernier élément du mystère pascal, à savoir le fait que Jésus soit ressuscité. En effet, si tout avait fini avec la mort, nous aurions en lui un exemple de dévouement suprême, mais cela ne pourrait pas engendrer notre foi. Il a été un héros. Non ! Il est mort, mais il est ressuscité. Parce que la foi naît de la résurrection. Accepter que le Christ soit mort, et qu’il soit mort crucifié n’est pas un acte de foi, c’est un fait historique. En revanche, croire qu’il est ressuscité, oui. Notre foi naît le matin de Pâques. Paul fait une liste des personnes auxquelles Jésus ressuscité est apparu (cf. vv.5-7). Nous avons ici une petite synthèse de tous les récits de Pâques et de toutes les personnes qui sont entrées en contact avec le Ressuscité. Au sommet de la liste, il y a Céphas, c’est-à-dire Pierre, et le groupe des Douze, ensuite « cinq cents frères », dont un grand nombre pouvaient encore rendre témoignage, puis Jacques est cité. Le dernier de la liste – comme le moins digne de tous – c’est lui-même. Paul dit de lui-même « l’avorton que je suis » (cf. v.8).

Paul emploie cette expression parce que son histoire personnelle est dramatique : ce n’était pas un enfant de chœur, mais c’était un persécuteur de l’Église, fier de ses convictions ; il se sentait arrivé, avec une idée très limpide de ce qu’était la vie avec ses devoirs. Mais, dans ce cadre parfait – tout était parfait chez Paul, il savait tout – dans ce cadre de vie parfait, un jour se produit ce qui était absolument imprévisible : la rencontre avec Jésus ressuscité, sur la route de Damas. Là, il n’y a pas seulement eu un homme qui est tombé par terre ; il y a eu une personne saisie par un événement qui allait bouleverser le sens de sa vie. Et le persécuteur est devenu apôtre, pourquoi ? Parce que j’ai vu Jésus vivant ! J’ai vu Jésus-Christ ressuscité ! C’est le fondement de la foi de Paul, comme de la foi des autres apôtres, comme de la foi de l’Église, comme de notre foi.

Qu’il est beau de penser que le christianisme est essentiellement cela ! Ce n’est pas tant notre recherche de Dieu – une recherche, en vérité, si hésitante – mais plutôt la recherche de Dieu à notre égard. Jésus nous a pris, nous a saisis, nous a conquis pour ne plus nous lâcher. Le christianisme est une grâce, c’est une surprise et cela suppose donc un cœur capable de s’étonner. Un cœur fermé, un cœur rationaliste est incapable d’étonnement et ne peut comprendre ce qu’est le christianisme. Parce que le christianisme est une grâce et la grâce ne peut que se percevoir et en plus, elle se manifeste dans l’étonnement de la rencontre.

Et alors, même si nous sommes pécheurs – nous le sommes tous – si nos bonnes résolutions sont restées sur le papier ou si, en regardant notre vie, nous nous apercevons que nous avons accumulé les échecs… Au matin de Pâques, nous pouvons faire comme ces personnes dont nous parle l’Évangile : aller au sépulcre du Christ, voir la grande pierre roulée et penser que Dieu est en train de réaliser pour moi, pour nous tous, un avenir inattendu. Aller à notre sépulcre : nous en avons tous un petit à l’intérieur. Y aller, et voir comment Dieu est capable de ressusciter de là. Là, il y a le bonheur, là il y a la joie, la vie, là où tous pensaient qu’il n’y avait que tristesse, échec et ténèbres. Dieu fait croître ses plus belles fleurs au milieu des pierres les plus arides.

Être chrétien signifie ne pas partir de la mort, mais de l’amour de Dieu pour nous, qui a vaincu notre ennemie la plus implacable. Dieu est plus grand que le néant et il suffit d’une bougie allumée pour vaincre la plus obscure des nuits. Paul crie, se faisant l’écho des prophètes : « Ô Mort, où est ta victoire ? Ô Mort, où est-il, ton aiguillon ? » (v.55). En ces jours de Pâques, portons ce cri dans notre cœur. Et si l’on nous demande le pourquoi de notre sourire donné et de notre partage patient, nous pourrons alors répondre que Jésus est encore ici, qu’il continue d’être vivant parmi nous, que Jésus est ici, sur la place, avec nous : vivant et ressuscité.

© Libreria Editrice Vaticana - 2017

Lettre du Pape François pour l’inauguration du sanctuaire du Dépouillement à Assise

Une économie qui tue !

« Tu as ajouté une perle au panorama religieux de la “Cité séraphique”, offrant à la communauté chrétienne et aux pèlerins une autre grande opportunité dont on peut justement espérer recueillir des fruits spirituels et pastoraux. » C’est avec ces mots que le Pape François remercie, dans une lettre rendue publique ce dimanche 16 avril 2017, l’évêque d’Assise-Nocera Umbra-Gualdo Tadino, Mgr Domenico Sorrentino, pour la création du sanctuaire du Dépouillement. Ce nouveau lieu de prière sera officiellement inauguré le 20 mai prochain. Il se trouve dans l’église de Sainte-Marie-Majeure, ancienne cathédrale d’Assise. C’est dans ces lieux que « saint François se dépouilla, jusqu’à la nudité, de tous ses biens terrestres pour se donner entièrement à Dieu ».

À mon vénéré frère Mgr Domenico Sorrentino,

évêque d’Assise-Nocera Umbra-Gualdo Tadino

Tu m’as informé, cher frère, de ton initiative liée de manière particulière à la visite que tu as faite à Assise le 4 octobre 2013 quand, dans l’évêché, tu t’es arrêté dans la Salle du Dépouillement. Là, on se remémore le geste du jeune François qui se dépouilla, jusqu’à la nudité, de tous ses biens terrestres pour se donner entièrement à Dieu et à ses frères. Pour mettre en lumière cet épisode singulier, tu as voulu ériger, dans l’église Sainte Marie Majeure, antique cathédrale d’Assise, et dans les lieux de l’évêché qui furent témoins de l’événement, le Sanctuaire du Dépouillement. Ainsi, tu as ajouté une perle au panorama religieux de la « Ville séraphique », offrant à la communauté chrétienne et aux pèlerins une autre grande opportunité de laquelle ils peuvent à juste titre espérer des fruits spirituels et pastoraux. Je suis donc heureux d’accompagner par une réflexion et une bénédiction l’inauguration officielle que tu en feras le 20 mai prochain.

Je me souviens bien de l’émotion de ma première visite à Assise. Ayant choisi pour inspiration de mon pontificat le nom de François, la Salle du Dépouillement me faisait revivre avec une intensité particulière ce moment de la vie du saint. Renonçant à tous les biens terrestres, il se déliait du charme du dieu-argent qui avait séduit sa famille, en particulier son père, Pietro di Bernardone. Le jeune converti n’entendait certainement pas manquer du respect dû à son père, mais il se rappelait qu’un baptisé doit mettre l’amour du Christ au-dessus de ses liens affectifs les plus chers. Sur une peinture qui décore la Salle du Dépouillement, le regard contrarié de son père est bien visible, lorsqu’il s’éloigne avec l’argent et les vêtements de son fils tandis que celui-ci, nu mais désormais libre, se jette dans les bras de l’évêque Guido. Dans la Basilique supérieure de Saint François, le même épisode est évoqué par une fresque de Giotto qui souligne l’élan mystique du jeune désormais projeté vers son Père céleste, tandis que l’évêque le couvre de son manteau, pour exprimer l’étreinte maternelle de l’Église.

En venant visiter la Salle du Dépouillement, je t’ai demandé de me faire surtout rencontrer une représentation de pauvres. Dans cette salle si éloquente, ils étaient le témoignage de la scandaleuse réalité d’un monde encore tellement marqué par le fossé entre le nombre sans fin des indigents, souvent privés du strict nécessaire, et la minuscule portion de ceux qui possèdent et détiennent la plus grande partie de la richesse, prétendant déterminer le destin de l’humanité. Malheureusement, deux mille ans après l’annonce de l’Évangile et après huit siècles du témoignage de François, nous sommes devant un phénomène d’ « inégalité mondiale » et d’« économie qui tue » (cf. E.A. Evangelii gaudium, 52-60). La veille exactement de mon arrivée à Assise, dans les eaux de Lampedusa, une grande hécatombe de migrants avait eu lieu. En parlant, dans le lieu du « dépouillement », avec une émotion causée par cet événement qui nous endeuillait, je sentais toute la vérité de ce dont avait témoigné le jeune François : c’est seulement lorsqu’il s’approchait des plus pauvres, à l’époque représentés surtout par les malades de la lèpre, en exerçant envers eux la miséricorde, qu’il expérimentait la « douceur de l’âme et du corps » (Testament, FF 110).

Le nouveau sanctuaire d’Assise naît comme la prophétie d’une société plus juste et solidaire, tout en rappelant à l’Église son devoir de vivre sur les traces de François, en se dépouillant de la mondanité et en se revêtant des valeurs de l’Évangile. Je répète ce que j’ai dit dans la Salle du Dépouillement : « Nous sommes tous appelés à être pauvres, à nous dépouiller de nous-mêmes : et pour cela, nous devons apprendre à rester avec les pauvres, à partager avec celui qui est privé du nécessaire, à toucher la chair du Christ ! Le chrétien n’est pas quelqu’un qui remplit la bouche des pauvres, non ! C’est quelqu’un qui les rencontre, qui les regarde dans les yeux et qui les touche ». Aujourd’hui, il est plus que jamais nécessaire que les paroles du Christ caractérisent le chemin et le style de l’Église. Si, dans tant de régions du monde traditionnellement chrétiennes, on observe un éloignement de la foi, nous sommes donc appelés à une nouvelle évangélisation, le secret de notre prédication ne réside pas tant dans la force de nos paroles mais dans la fascination exercée par le témoignage, soutenu par la grâce. Et la condition est que nous n’oubliions pas les indications que le Maître a données à ses apôtres dans le discours sur la mission, faisant à la fois appel à la générosité des évangélisateurs et à l’attention fraternelle à leur égard : « Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement. Ne vous procurez ni or ni argent, ni monnaie de cuivre à mettre dans vos ceintures, ni sac pour la route, ni tunique de rechange, ni sandales, ni bâton. L’ouvrier, en effet, mérite sa nourriture. » (Mt 10,8-10)

C’était bien clair pour François d’Assise. Il l’avait assimilé dans la méditation de l’Évangile, mais surtout dans la contemplation du visage du Christ dans les lépreux et sur le Crucifié de Saint Damien, de qui il avait reçu le mandat : « François, va réparer ma maison ». Oui, comme au temps de François, l’Église a toujours besoin d’être « réparée ». En effet, elle est sainte dans les dons qu’elle reçoit d’en-haut, mais elle est formée de pécheurs et, pour cette raison, elle a toujours besoin de pénitence et de renouvellement. Et comment pourrait-elle se renouveler, sinon en regardant son Seigneur « nu » ? Le Christ est le modèle originel du « dépouillement » comme tu as voulu, cher frère, le souligner en promulguant ta lettre d’institution du nouveau sanctuaire en la solennité de Noël. Dans l’enfant de Bethléem, la gloire divine s’est pour ainsi dire cachée. Elle sera encore plus voilée sur le Golgotha. « Ayez en vous les dispositions qui sont dans le Christ Jésus : Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix. » (Ph 2,5-8).

De Noël à Pâques, le chemin du Christ est tout un mystère de « dépouillement ». La toute-puissance, d’une certaine manière, s’éclipse afin que la gloire du Verbe fait chair s’exprime surtout dans l’amour et dans la miséricorde. Le dépouillement est un mystère d’amour ! Elle ne signifie pas le mépris des réalités du monde. Et comment le pourrait-elle ? Le monde vient tout entier des mains de Dieu. Dans le Cantique de Frère Soleil, François lui-même nous invite à chanter et à garder la beauté de toutes les créatures. Le dépouillement nous fait bénéficier de celles-ci d’une façon sobre et solidaire, avec une hiérarchie de valeurs qui met l’amour à la première place. En substance, il faut se dépouiller plus que des choses, de soi-même, en mettant à part l’égoïsme qui nous fait nous retrancher dans nos propres intérêts et dans nos biens, nous empêchant de découvrir la beauté de l’autre et la joie de lui ouvrir le cœur. Un chemin chrétien authentique ne mène pas à la tristesse mais à la joie. Dans un monde marqué par tant de « tristesse individualiste » (E.A. Evangelii gaudium, 2), le Sanctuaire du Dépouillement se propose d’alimenter dans l’Église et dans la société la joie évangélique, simple et solidaire.

Un bel aspect du nouveau sanctuaire est donné par le fait que, dans l’événement du dépouillement de François, émerge aussi la figure d’un pasteur, l’évêque Guido, qui l’avait probablement connu, sinon carrément accompagné dans son chemin de conversion, et qui maintenant l’accueillait dans son choix décisif. C’est une image de la maternité de l’Église qui mérite d’être redécouverte, tandis que la condition des jeunes, dans un contexte général de crise de la société, soulève des interrogations sérieuses que j’ai voulu mettre en avant en convoquant un synode qui leur soit dédié. Les jeunes ont besoin d’être accueillis, valorisés et accompagnés. Il ne faut pas craindre de leur proposer le Christ et les idéaux exigeants de l’Évangile. Mais il faut pour cela se mettre au milieu d’eux et marcher avec eux. Le nouveau sanctuaire acquiert ainsi aussi la valeur d’un lieu précieux où les jeunes peuvent être aidés dans le discernement de leur vocation. En même temps, les adultes y sont appelés à s’unir d’intentions et de sentiments pour que l’Église fasse émerger toujours plus son caractère familial, et que les nouvelles générations se sentent soutenues dans leur chemin.

Je bénis donc de tout cœur le nouveau sanctuaire, étendant ma bénédiction aux pèlerins qui le visiteront et à toute la communauté diocésaine. Que la Vierge Sainte, à laquelle le sanctuaire reste dédié, fasse sentir toute sa maternelle protection.

Le 16 avril 2017, Pâques de Résurrection.

© Libreria Editrice Vaticana - 2017

Tribune libre

Enseignement catholique – le respect du caractère propre

« La personne de chacun, dans ses besoins matériels et spirituels, est au centre de l’enseignement de Jésus : c’est pour cela que la promotion de la personne humaine est le but de l’école catholique ». Jean-Paul II,1991

Il faut se demander pourquoi nous inscrivons nos enfants en écolé privé catholique ? Pourquoi le faisons nous : parce que le niveau est meilleur que celui du public ? Parce que les horaires sont moins aléatoires ? Parce que les professeurs sont moins absents ? Parce que les élèves y sont plus calmes ? Parce… Pour toutes ces raisons à la fois très certainement…

Sans se poser la question de leur bienfondé évidemment mais pourtant il manque une seule bonne raison qui disparaît un peu plus chaque année alors que les autres bonnes raisons augmentent : parce que je veux que mon enfant suive une instruction religieuse.  Cette raison n’est jamais énoncée. Pourquoi ? Parce qu’on semble oublier un mot essentiel lorsque l’on parle de ces écoles on dit communément : « écoles privées » on oublie le reste de la phrase : « école privée catholique » … Ce qualificatif disparait de notre vocabulaire et pourtant il est certainement le plus important, le plus essentiel, il doit même être l’essence de cette motivation qui nous pousse à inscrire nos enfants dans ce type d’établissement. Combien d’entre nous choisissions ce type d’établissement pour cette raison ? il serait intéressant de faire ce sondage. Oui aujourd’hui nos enfants vont en école privée. Mais surtout en école privée catholique oui c’est bien cela mais notre bouche avale ce dernier terme il reste comme coincé au fond de notre gorge et refuse de sortir spontanément.  Et pourtant nos écoles privées catholiques ne sont pas n’importe lesquelles elles sont bien ancrées dans un enseignement catholique voulue, elles ont ce qu’on appelle un « caractère propre… » mais qu’est-ce que le caractère propre de ces écoles ? C’est cela qu’on a oublié et dont on ne parle jamais qui fonde tout le reste.

En fait il existe bien un statut de l’école catholique, un statut qui prévoit que ces écoles enseignent, diffusent, fassent respecter les enseignements de la bible. Ainsi en affirmant, comme elle l’a toujours fait, son droit de fonder des écoles, l’Eglise aide les parents à assumer leur droit naturel d’éduquer leurs enfants. Elle fait en sorte qu’ils puissent se sentir accueillis dans des lieux où l’Evangile est à la fois vécu et proposé. (Article 9 du statut de l’enseignement catholique 1er juin 2013)

L’Ecole catholique est attachée au respect de la personne qui n’accède vraiment et pleinement à l’humanité que par la culture. C’est pourquoi elle est un lieu de « transmission systématique et critique de la culture en vue de la formation intégrale de la personne ». (Article 36 du statut de l’enseignement catholique 01 juin 2013)

Au nom de l’Evangile, l’Ecole catholique est attachée à la liberté des consciences, à l’écoute des croyances dans leur diversité et accueillante aux différents parcours personnels. C’est pourquoi elle permet à chacun, au sein d’une communauté, de grandir en humanité, en répondant librement à sa vocation. (Article 37 du statut de l’enseignement catholique 1 juin 2013)

La mission éducative se fonde sur la pédagogie du Christ. Elle déploie solidairement une attention : « Que veux-tu que je fasse pour toi ?», un appel toujours personnel : « Viens ... », une confiance en chacun : « Va ... », une promesse d’accompagnement : « Je serai avec vous ... ». (Article 74 du statut de l’enseignement catholique 01 juin 2013)

Et oui le caractère propre c’est tout cela et bien plus encore ces textes existent réellement et pourtant on en parle jamais, on ne les diffuse pas alors même qu’ils devraient prôner dans chaque entrée de chaque établissement privé catholique pour que personne n’oublie, pour que personne ne puisse ignorer que l’école privé catholique fait tout cela et le fait dans son bon droit. 

Si l’école privé est catholique alors l’enfant y suit des préceptes catholiques, cela ne doit pas nous choquer et pourtant… que dire quand une grande école privée catholique de la place qui enseigne le catéchisme une fois par semaine aux classe de 6° refuse durant la période de carême de demander aux élèves d’une classe de faire des efforts de carême car un, et un seul des parents de cette même classe, trouve que cela fait trop… refuse que cette période si sacrée aux catholiques soit respectée… un seule parent à suffit à faire fléchir une classe de 30 élèves, un seul parent a su faire oublier le caractère propre de l’école privée catholique, un seul parent a réussi à priver une classe entière du respect des 40 jours de carême… nous avons perdu un combat cette année, et il y en aura bien d‘autre à perdre encore c’est dans l’air du temps, nous oublions l’essentiel, nous ne le prononçons plus, nous mettons un genou à terre face à un seul individu, nous avons perdu le sens de notre religion, le sens de notre engagement, le sens des mots simples, nous sommes comme le répète à foison notre cher vicaire des « chrétiens tièdes »… et nous devenons des chrétiens glacés au fur et à mesure de ces laisser faire, au nom du rien dire pour ne pas déranger, nous refusons d’admettre et de nous battre pour dire oui j’inscris mon enfant dans une école privée catholique car je souhaite qu’il aille à la messe du vendredi à l’école, car je souhaite qu’il suive le catéchisme… L’école privée catholique ne doit pas fléchir devant un sel d’entre nous, il doit respecter le caractère propre et nous, parents, nous devons insister sur ce devoir envers nos enfants de respecter l’enseignement catholique. Il existe des écoles qui dans leur règlement intérieur prévoit une disposition comme suit : 

« LE RÔLE DES PARENTS

En tant que Parents, je souscris aux propositions suivantes :

L’école étant sous tutelle de l’Enseignement Catholique, l’inscription d’un élève à l’école (…) implique de la part des parents, l’acceptation du caractère propre de l’établissement en référence aux valeurs de l’enseignement Catholique, afin de préserver un climat serein et en adéquation avec nos valeurs catholiques.

Dans ce cadre, le chef d’établissement se réserve le droit de remettre en cause la poursuite de la scolarité de l’élève au sein de l’école (..) »

Rappelons-nous de l’importance des mots, rappelons-nous de l’importance de nos croyances pour que nos enfants comprennent le sens des mots, le sens du devoir et des obligations d’un vrai chrétien.

© Tribune libre - 2017

Commentaire des lectures du dimanche

« Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre » (Jn 20, 30). L’Évangile est le livre de la miséricorde de Dieu, à lire et à relire, parce que tout ce que Jésus a dit et accompli est une expression de la miséricorde du Père. Toutefois, tout n’a pas été écrit ; l’Évangile de la miséricorde demeure un livre ouvert, où continuer à écrire les signes des disciples du Christ, gestes concrets d’amour, qui sont le meilleur témoignage de la miséricorde. Nous sommes tous appelés à devenir écrivains vivants de l’Évangile, porteurs de la Bonne Nouvelle à tout homme et à toute femme d’aujourd’hui. Nous pouvons le faire en mettant en pratique les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles, qui sont le style de vie du chrétien. Par ces gestes simples et forts, parfois même invisibles, nous pouvons visiter tous ceux qui sont dans le besoin, portant la tendresse et la consolation de Dieu. On poursuit ainsi ce que Jésus a accompli le jour de Pâques, quand il a répandu dans les cœurs des disciples effrayés la miséricorde du Père, soufflant sur eux l’Esprit Saint qui pardonne les péchés et donne la joie.

Toutefois, dans le récit que nous avons écouté émerge un contraste évident : il y a la crainte des disciples, qui ferment les portes de la maison ; de l’autre, il y a la mission de la part de Jésus, qui les envoie dans le monde porter l’annonce du pardon. Il peut y avoir aussi en nous ce contraste, une lutte intérieure entre la fermeture du cœur et l’appel de l’amour à ouvrir les portes closes et à sortir de nous-mêmes. Le Christ, qui par amour est passé à travers les portes closes du péché, de la mort et des enfers, désire entrer aussi chez chacun pour ouvrir tout grand les portes closes du cœur. Lui, qui par la résurrection a vaincu la peur et la crainte qui nous emprisonnent, veut ouvrir tout grand nos portes closes et nous envoyer. La route que le Maître ressuscité nous indique est à sens unique, elle avance dans une seule direction : sortir de nous-mêmes, sortir pour témoigner de la force de guérison de l’amour qui nous a conquis. Nous voyons devant nous une humanité souvent blessée et craintive, qui porte les cicatrices de la douleur et de l’incertitude. Face à l’imploration douloureuse de miséricorde et de paix, nous entendons, aujourd’hui adressée à chacun de nous, l’invitation confiante de Jésus : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie » (v. 21).

Chaque infirmité peut trouver dans la miséricorde de Dieu un secours efficace. Sa miséricorde, en effet, ne s’arrête pas à distance : il désire venir à la rencontre de toutes les pauvretés et libérer des nombreuses formes d’esclavage qui affligent notre monde. Il veut rejoindre les blessures de chacun, pour les soigner. Être apôtres de miséricorde signifie toucher et caresser ses plaies, présentes aussi aujourd’hui dans le corps et dans l’âme de tant de ses frères et sœurs. En soignant ces plaies nous professons Jésus, nous le rendons présent et vivant ; nous permettons à d’autres, de toucher de la main sa miséricorde, de le reconnaître « Seigneur et Dieu » (cf. v. 28), comme fit l’Apôtre Thomas. C’est cela la mission qui nous a été confiée. Tant de personnes demandent d’être écoutées et comprises. L’Évangile de la miséricorde, à annoncer et à écrire dans la vie, cherche des personnes au cœur patient et ouvert, « bons samaritains » qui connaissent la compassion et le silence face au mystère du frère et de la sœur ; il demande des serviteurs généreux et joyeux, qui aiment gratuitement sans rien exiger en échange.

« La paix soit avec vous ! » (v. 21) : c’est le salut que le Christ adresse à ses disciples ; c’est la même paix qu’attendent les hommes de notre temps. Ce n’est pas une paix négociée, ce n’est pas l’arrêt de quelque chose qui ne va pas : c’est sa paix, la paix qui vient du cœur du Ressuscité, la paix qui a vaincu le péché, la mort et la peur. C’est la paix qui ne divise pas, mais unit ; c’est la paix qui ne laisse pas seuls, mais nous fait sentir accueillis et aimés ; c’est la paix qui demeure dans la douleur et fait fleurir l’espérance. Cette paix, comme le jour de Pâques, naît et renaît toujours du pardon de Dieu, qui enlève l’inquiétude du cœur. Être porteuse de sa paix : c’est la mission confiée à l’Église le jour de Pâques. Nous sommes nés dans le Christ comme instruments de réconciliation, pour porter à tous le pardon du Père, pour révéler son visage de seul amour dans les signes de la miséricorde.

Dans le Psaume responsorial il a été proclamé : « Son amour est pour toujours » (117/118, 2). C’est vrai, la miséricorde de Dieu est éternelle ; elle ne finit pas, elle ne s’épuise pas, elle ne se rend pas face aux fermetures, et elle ne se fatigue jamais. Dans ce « pour toujours » nous trouvons un soutien dans les moments d’épreuve et de faiblesse, parce que nous sommes certains que Dieu ne nous abandonne pas : il demeure avec nous pour toujours. Remercions pour son si grand amour, qu’il nous est impossible de comprendre : il si grand ! Demandons la grâce de ne jamais nous fatiguer de puiser la miséricorde du Père et de la porter dans le monde : demandons d’être nous-mêmes miséricordieux, pour répandre partout la force de l’Évangile, pour écrire ces pages de l’Évangile que l’apôtre Jean n’a pas écrites.

Homélie du 3 avril 2016

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