Pko 08.10.2017

Eglise cath papeete 1Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°54/2017

Dimanche 8 octobre 2017 – 27ème Dimanche du Temps ordinaire – Année A

La lutte contre les drogues… Alerte rouge !

La lutte contre les drogues n’est plus prioritaire mais fondamentale pour la Polynésie d’aujourd’hui et de demain…

On ne peut plus simplement se désoler devant les ravages qu’elles causent ! Ce n’est pas seulement l’affaire des autorités policières ou judiciaires… C’est l’affaire de tous !

« La drogue est une blessure dans notre société qui piège de nombreuses personnes dans ses filets. Ce sont des victimes qui ont perdu leur liberté pour tomber dans cet esclavage… Il ne fait pas de doute qu’il s’agit d’une “nouvelle forme d’esclavage”, comme de nombreuses autres qui frappent l’homme d’aujourd’hui et la société en général.

Il est évident qu’il n’existe pas qu’une cause unique qui conduit à la dépendance de la drogue, mais les facteurs qui interviennent sont nombreux, parmi lesquels le manque de famille, la pression sociale, la propagande des trafiquants, le désir de vivre de nouvelles expériences.

Il n’est pas surprenant qu’il y ait tant de personnes qui tombent dans la dépendance de la drogue, parce que la mondanité nous offre un ample éventail de possibilités pour atteindre un bonheur éphémère qui, à la fin, devient un venin qui ronge, corrompt et tue. Petit à petit, la personne se détruit et, avec elle, détruit tous ceux qui l’entourent. Le désir initial de fuite, à la recherche d’un bonheur momentané, se transforme dans la destruction de la personne dans son intégrité, avec des répercussions sur toutes les couches sociales.

Dans ce sens, il est important de connaître la portée du problème de la drogue – qui est destructeur, il est essentiellement destructeur – et surtout l’ampleur de ses centres de production et de son système de distribution. Les réseaux, qui rendent possible la mort d’une personne…

Bien que la prévention soit le chemin prioritaire, il est aussi fondamental d’œuvrer en vue de la réinsertion complète et sûre des victimes de la drogue dans la société, pour leur redonner la joie et pour qu’elles retrouvent la dignité qu’elles ont perdue un jour. Tant que cela ne sera pas garanti, notamment de la part de l’État et de sa législation, la réinsertion sera difficile et les victimes pourront redevenir des victimes.

Le plus nécessiteux de nos frères qui, en apparence, n’a rien à donner, conserve un trésor pour nous, le visage de Dieu qui nous parle et nous interpelle. Je vous encourage à poursuivre votre travail et à concrétiser, dans les limites de vos possibilités, les heureuses initiatives que vous avez lancées au service de ceux qui souffrent le plus sur ce champ de bataille ». (Pape François – 24 novembre 2016)

Laissez-moi vous dire…

Octobre : mois du rosaire  Cette prière qui change la vie

Chaque jour du mois d'octobre nous sommes des centaines à réciter le chapelet.

Des foyers sont visités par les membres du Rosaire Vivant.

Un jeune étudiant revenant de France pour les vacances me disait : « À quoi bon réciter des ''je vous salue Marie'' à longueur de journée ? On a l'impression que ces gens qui prient sont comme les moulins à prière dans certains temples bouddhistes. Il suffirait que j'écrive le ''je vous salue Marie'' sur un drapeau et que je laisse claquer au vent comme ces drapeaux de prière qu'on voit au Népal ! »

Voici ce que je lui ai répondu : « Tu n'as pas tout à fait tort, mais tu te trompes. Tu n'as pas tort si tu récites le chapelet comme un automate sans penser à ce que tu dis, ou si tu ne te tournes pas vers le ciel, si ce n'est pas une rencontre avec le Seigneur par la Vierge Marie, notre Mère. Cependant, même une prière machinale, mécanique ne reste pas sans effet !

Mais tu te trompes car, pour la majorité des priants, le Rosaire est comme une multitude de sources qui abreuvent notre monde désertique, notre société qui met souvent Dieu en exil. Le fait de méditer les vingt mystères du Rosaire en égrenant les

"je vous salue marie" - si j'osais la comparaison- c'est comme un ascenseur spirituel. Marie que nous saluons entraîne notre regard vers Dieu, nous sommes dans la première béatitude : "Bienheureuse es-tu !". Puis nous redescendons vers le monde des humains, les "pauvres pécheurs". Nous offrons toute l'humanité à Dieu par les mains de Marie. Au gré de ces allers et retours entre ciel et terre, nous arrosons le monde, par Marie, de grâces et de bénédictions.

Le chapelet c'est la prière du pauvre, la première que l'on apprend aux petits enfants : ''Notre Père", "Je vous salue Marie". C'est sans doute la dernière prière que nous réciterons

au moment de notre mort.

Un petit conseil : à Paris, quand tu es dans le métro ou dans un bus bondé, récite un ou deux "je vous salue Marie". Dans cette foule anonyme, stressée, sur le qui vive... ta prière descend comme un filet d'eau vive ; un espace de lumière, de paix s'ouvre ... tu te mets à respirer Dieu ! »

D.S.

Note : S'il vous arrive de vous énerver dans un embouteillage ou à un feu qui n'en finit pas de verdir... en ce mois d'octobre, priez un « je vous salue Marie » pour ceux qui vous entourent... ça changera votre vie !

© Cathédrale de Papeete - 2017

En marge de l’actualité…

« En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes… »

Deux jeunes femmes assassinées à Marseille, plus de 55 morts lors d’une fusillade à Las Vegas… La liste des atteintes à la vie, sous quelque forme que ce soit n’en finit pas de s’allonger semaine après semaine… Serait-il possible que nous, les Humains, ayons oublié à ce point le respect dû à la vie, la nôtre et celle des autres ? Son prix serait-il donc tellement dévalué qu’elle ne vaut même plus les 30 pièces d’argent versées à Judas pour prix de sa trahison ? (Mt 26, 15)

Le problème n’est pas nouveau ! Souvenons-nous que dès les premiers chapitres du livre de la Genèse (Gn 4), la première chose que fait l’Homme lorsqu’il commence son aventure après avoir été écarté du jardin d’Eden, c’est un meurtre. Caïn tue son frère Abel, dont le nom signifie « buée, fumée » chose de si peu d’importance qu’un souffle suffit à la faire disparaître ! Mais en tuant son frère, en utilisant la violence, Caïn devient incapable de produire la vie. Marqué par la mort, il porte la mort en lui, il produit la mort, au point qu’il a peur d’être tué à son tour et doit s’enfuir.

Les conflits sont inévitables, ils sont caractéristiques de toute existence, ils font partie de la vie. Ce qui compte, c’est la façon de les aborder, de les résoudre. Est-ce que je vais résoudre le problème en supprimant celui avec qui je suis en conflit, comme Caïn avait supprimé son frère Abel, ou comme les scribes voulaient éliminer Jésus ? Si je fais disparaître l’autre différent en face de moi, comment saurai-je qui je suis ? Et qui me dira qui je suis ? Ma vocation d’homme ou de femme créé à l’image et à la ressemblance de Dieu n’est pas de tuer l’autre mais de le rencontrer ; sa différence est pour moi non une menace mais une richesse. Et si moi, j’ai été capable de tuer l’autre, qui me dit que l’autre ne sera pas capable de me tuer à son tour ? Même si nous ne manions ni le couteau, ni la mitraillette ni l’explosif, l’histoire de Caïn, c’est un peu la nôtre tant il est vrai que nous avons tous nos « Abel », ceux dont nous envions la situation, les dons, les privilèges, les talents, la beauté, la richesse, ceux dont nous sommes envieux, ceux que nous considérons comme une menace insupportable ou comme des concurrents plus favorisés que nous … ceux que, en pensée, nous aimerions voir disparaître. Le commandement de Dieu est clair : « Tu ne tueras pas ! ». Le Christ Jésus va encore plus loin : « Vous avez appris qu’il a été dit aux anciens : tu ne commettras pas de meurtre…Moi, je vous dis : tout homme qui se met en colère contre son frère devra passer en jugement. Si quelqu’un insulte son frère, il devra passer devant le tribunal. Si quelqu’un le traite de fou, il sera passible de la géhenne de feu » (Mt 5, 21-22). Le respect de la vie dont Dieu est la source s’enracine dans l’amour que Dieu nous a manifesté en Jésus Christ. Ainsi, il ne nous reste, pour échapper au pouvoir de la mort et pour ouvrir un chemin d’avenir et de vie que le commandement de l’amour qui passe avant tout. Si cette perspective nous semble utopique ou irréalisable, n’hésitons pas à nous tourner vers le Dieu de Jésus Christ, le Dieu de l’espérance. Il provoque en nous la capacité de croire et d’espérer. Tournons-nous vers le Christ : « En lui était la vie, et la vie était la lumière des Hommes… » (Jn 1, 4)

+ Mgr Jean Pierre COTTANCEAU

© Archidiocèse de Papeete - 2017

Audience générale du Pape Francois …

Les chrétiens doivent être des missionnaires de l’espérance

Le Pape François a poursuivi ce mercredi 4 octobre 2017, dans le cadre de l’audience générale, sa série de catéchèses sur l’espérance. Pour la 35e étape de ce parcours, en ce jour de la Fête de saint François d’Assise et au début du mois de la mission, le Pape s’est penché sur « les missionnaires de l’espérance ».

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans cette catéchèse, je veux parler sur le thème : « Missionnaires d’espérance aujourd’hui ». Je suis content de le faire au début du mois d’octobre qui est, dans l’Église, consacré de manière particulière à la mission, et aussi en ce jour de la fête de saint François d’Assise, qui a été un grand missionnaire d’espérance.

En effet, le chrétien n’est pas un prophète de malheur. Nous ne sommes pas des prophètes de malheur. L’essence de son annonce est l’opposé, l’opposé du malheur : c’est Jésus, mort par amour et que Dieu a ressuscité au matin de Pâques. Et ceci est le noyau de la foi chrétienne. Si les Évangiles s’arrêtaient à la sépulture de Jésus, l’histoire de ce prophète irait s’ajouter aux nombreuses biographies de personnages héroïques qui ont donné leur vie pour un idéal. L’Évangile serait alors un livre édifiant, et même consolateur, mais ce ne serait pas une annonce d’espérance.

Mais les Évangiles ne se ferment pas sur le vendredi saint, ils vont au-delà ; et c’est justement ce fragment ultérieur qui transforme nos vies. Les disciples de Jésus étaient abattus ce samedi après sa crucifixion ; cette pierre roulée sur la porte du tombeau avait même fermé les trois années enthousiasmantes qu’ils avaient vécues avec le Maître de Nazareth. Il semblait que tout était fini et certains, déçus et craintifs, quittaient déjà Jérusalem.

Mais Jésus ressuscite ! Ce fait inattendu retourne et  renverse l’esprit et le cœur des disciples. Parce que Jésus ne ressuscite pas seulement pour lui-même, comme si sa renaissance était une prérogative de laquelle être jaloux : s’il monte vers le Père, c’est parce qu’il veut que tous les êtres humains participent à sa résurrection et que celle-ci entraîne vers le haut toutes les créatures. Et le jour de la Pentecôte, les disciples sont transformés par le souffle de l’Esprit Saint. Ils n’auront pas seulement une belle nouvelle à apporter à tous, mais ils seront eux-mêmes différents d’avant, comme nés à une vie nouvelle. La résurrection de Jésus nous transforme par la force de l’Esprit Saint. Jésus est vivant, il est vivant parmi nous, il est vivant et a cette force de transformer.

Comme il est beau de penser que l’on est annonciateur de la résurrection de Jésus non seulement par les paroles, mais par les faits et avec le témoignage de sa vie ! Jésus ne veut pas de disciples uniquement capables de répéter des formules apprises par cœur. Il veut des témoins : des personnes qui propagent l’espérance par leur manière d’accueillir, de sourire et d’aimer. Surtout d’aimer : parce que la force de la résurrection rend les chrétiens capables d’aimer même quand l’amour semble avoir perdu ses raisons d’être. Il y a un « plus » qui habite l’existence chrétienne et qui ne s’explique pas simplement par la force d’âme ou par un plus grand optimisme. La foi, notre espérance n’est pas seulement un optimisme ; c’est autre chose, c’est plus ! C’est comme si les croyants étaient des personnes avec un « morceau de ciel » en plus au-dessus de la tête. C’est beau, cela : nous sommes des personnes avec un morceau de ciel en plus au-dessus de la tête, accompagnés par une présence que personne ne parvient à deviner.

Ainsi, la tâche des chrétiens en ce monde est d’ouvrir des espaces de salut, comme des cellules de régénération capables de restituer de la sève à ce qui semblait perdu à jamais. Quand le ciel est tout nuageux, celui qui sait parler du soleil est une bénédiction. Voilà, le vrai chrétien est comme cela : ni pleurnichard ni en colère mais convaincu, par la force de la résurrection, qu’aucun mal n’est infini, qu’aucune nuit n’est sans fin, qu’aucun homme n’est définitivement dans l’erreur, qu’aucune haine n’est invincible devant l’amour.

Certes, quelquefois les disciples paieront un prix élevé cette espérance qui leur est donnée par Jésus. Pensons à tous ces chrétiens qui n’ont pas abandonné leur peuple quand est venu le temps de la persécution. Ils sont restés là, où l’on était incertain même du lendemain, où l’on ne pouvait faire des projets d’aucune sorte, ils sont restés en espérant en Dieu. Et pensons à nos frères, à nos sœurs du Moyen-Orient qui donnent un témoignage d’espérance et qui offrent même leur vie pour ce témoignage. Ce sont de vrais chrétiens ! Ils portent le ciel dans leur cœur, ils regardent au-delà, toujours au-delà. Celui qui a eu la grâce d’embrasser la résurrection de Jésus peut encore espérer dans l’inespéré. Les martyrs de tous les temps, par leur fidélité au Christ, racontent que l’injustice n’est pas la dernière parole dans la vie. Dans le Christ ressuscité, nous pouvons continuer d’espérer. Les hommes et les femmes qui ont un « pourquoi » vivre résistent plus que les autres en temps de malheur. Mais celui qui a le Christ à ses côtés ne craint vraiment plus rien. Et c’est pourquoi les chrétiens, les vrais chrétiens, ne sont jamais des hommes faciles et accommodants. Leur douceur ne doit pas être confondue avec un sentiment d’insécurité et de soumission. Saint Paul pousse Timothée à souffrir pour l’Évangile et dit ceci : « Car ce n’est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d’amour et de pondération » (2 Tm 1,7). Tombés, ils se relèvent toujours.

Voilà, chers frères et sœurs, pourquoi le chrétien est un missionnaire d’espérance. Non par son propre mérite mais grâce à Dieu, le grain de blé qui, tombé en terre, et mort et a porté beaucoup de fruit (cf. Jn 12,24).

© Libreria Editrice Vatican - 2017

Déjeuner de solidarité avec les pauvres, les réfugiés, les prisonniers…

L’étrange mathématique de Dieu

« Que la mathématique de Dieu est étrange : elle se multiplie seulement si elle se divise ! », a souligné le pape François au cours de sa visite pastorale dans les diocèses de Cesena et de Bologne (Emilie-Romagne, nord de l’Italie), le 1er octobre 2017.

Chers frères et sœurs,

Quelle joie de vous voir si nombreux en cette maison ! C’est véritablement comme la maison de notre Mère, la maison de la miséricorde, l’Eglise qui accueille tout le monde, en particulier ceux qui ont besoin d’une place. 

Vous êtes au centre de cette maison. L’Eglise veut que vous soyez au centre. Elle ne prépare pas n’importe qu’elle place ou une place différente : au centre et ensemble. L’Eglise est de tous, particulièrement des pauvres. Nous sommes tous des invités, uniquement par la grâce. C’est un mystère d’amour gratuit de Dieu qui nous veut ici, non par mérite, mais par son amour.

Dans cette maison, on célèbre normalement le mystère de l’Eucharistie, la table sur laquelle sont déposés le pain et le vin qui deviennent le Corps et le Sang de Jésus, rompu et versé pour la multitude des hommes qu’Il aime. Que la mathématique de Dieu est étrange : elle ne se multiplie que si elle se divise ! Dressons toujours une table d’amour pour ceux qui en ont besoin.

La charité n’est jamais à sens unique, elle est toujours circulaire et tous donnent et reçoivent quelque chose. Nous recevons tous et nous savons et pouvons tous donner beaucoup. Jésus n’écarte personne, il ne méprise pas. Il a soif et il nous demande de lui donner à boire car il marche avec nous et souffre avec nous. Et précisément nous avons cette cruche, peut-être un peu usée, qui peut lui donner de l’eau, qui est notre cœur ! Notre vie est toujours précieuse et nous avons tous quelque chose à donner aux autres.

A la fin, vous sera remise la nourriture la plus précieuse, l’Evangile, la Parole de ce Dieu que nous portons tous dans notre cœur, qui pour nous chrétiens a le bon visage de Jésus. Il est pour vous ! Il est tourné précisément vers ceux qui en ont besoin ! Prenez-le tous et portez-le comme signe, sceau personnel d’amitié avec Dieu qui se fait pèlerin, sans avoir de place, pour la préparer à tous.

Nous sommes tous des pèlerins, des mendiants d’amour et d’espérance, et nous avons besoin de ce Dieu qui se fait proche et se révèle dans la fraction du pain.

Ce pain d’amour que nous partageons aujourd’hui, apportez-le vous aussi aux autres. Offrez à tous sympathie et amitié. C’est l’engagement que nous pouvons tous avoir. Il y en a grand besoin. Vous avez une sensibilité particulière à saisir la dimension humaine, parce que vous savez ce qu’est la fragilité, le besoin de tendre les mains, de se faire aider en mettant de côté l’orgueil.

Le « Notre Père » que nous réciterons à la fin est vraiment la prière des pauvres. La demande de pain, en effet, exprime la confiance en Dieu pour les besoins fondamentaux de notre vie. Ce que Jésus nous a enseigné par cette prière exprime et recueille la voix de ceux qui souffrent en raison de la précarité de l’existence et du manque du nécessaire. Aux disciples qui demandaient à Jésus de leur enseigner à prier, Il a répondu avec les paroles des pauvres qui s’adressent à l’unique Père dans lequel tous se reconnaissent comme frères. Le « Notre Père » est une prière qui s’exprime au pluriel: le pain qui se demande est «notre», et cela implique partage, participation et responsabilité commune. Dans cette prière, nous reconnaissons tous l’exigence de surmonter toute forme d’égoïsme pour accéder à la joie de l’accueil réciproque.

Aujourd’hui nous pouvons partager notre pain quotidien. Et nous voulons tous en rendre grâce à Dieu.

© Libreria Editrice Vatican - 2017

Comme St Vincent de Paul, investir dans la créativité de l’Amour

À l’occasion de la mémoire liturgique de saint Vincent de Paul, le 27 septembre, et dans le contexte du 400e anniversaire de la famille spirituelle « vincentienne », le Pape François a adressé une lettre à l’intention des personnes qui, dans différents mouvements spirituels et caritatifs, suivent son exemple.

Chers frères et sœurs,

En la fête du quatrième centenaire du charisme qui a donné vie à votre Famille, je voudrais vous rejoindre par quelques mots de gratitude et d’encouragement et souligner la valeur et l’actualité de saint Vincent de Paul.

Il a toujours vécu en chemin, ouvert à la recherche de Dieu et de soi. Dans cette recherche constante, s’est insérée l’action de la grâce : en tant que pasteur, il fit une rencontre avec Jésus Bon Pasteur dans la personne des pauvres. Cela s’est produit, de manière particulière, quand il s’est laissé toucher par le regard d’un homme assoiffé de miséricorde et par les visages d’une famille qui manquait de tout. Il a perçu là le regard de Jésus qui le secouait, l’invitant à ne plus vivre pour lui-même mais à le servir sans réserves dans les pauvres, que saint Vincent appellera ensuite « seigneurs et maîtres »  (Correspondance, entretiens, documents, XI, 393). Sa vie s’est ainsi transformée en un temps de service jusqu’à son dernier souffle. Une parole de l’Écriture lui avait donné le sens de sa mission : « Le Seigneur m’a envoyé annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres » (cf. Lc 4,18).

Enflammé du désir de faire connaître Jésus aux pauvres, il se consacra intensément à l’annonce, spécialement à travers les missions populaires et en soignant de manière particulière la formation des prêtres. Il appliquait avec naturel une « petite méthode » : parler avant tout par la vie et puis avec grande simplicité, de manière familière et directe. L’Esprit fit de lui un instrument qui suscita un élan de générosité dans l’Église. Inspiré par les chrétiens des origines, qui avaient « un seul cœur et une seule âme » (Ac 4,32), saint Vincent fonda les « charités » pour que l’on prenne soin des plus nécessiteux en vivant la communion et en mettant joyeusement ses propres biens à disposition, dans la certitude que Jésus et les pauvres sont le trésor précieux et que, comme il aimait le répéter, « quand tu vas voir les pauvres, tu rencontres Jésus ».

Cette « graine de moutarde », semée en 1617, a fait germer les Congrégations de la Mission et la Compagnie des Filles de la Charité, a créé des ramifications dans des instituts et associations et elle est devenue un grand arbre (cf. Mc 4,31-32) : votre Famille. Mais tout a commencé par cette graine de moutarde : saint Vincent n’a jamais voulu être un protagoniste ou un pionnier, mais une « petite graine ». Il était convaincu que l’humilité, la douceur et la simplicité sont des conditions essentielles pour incarner la loi de la graine qui donne la vie en mourant (cf. Jn 12,20-26), cette loi qui, seule, rend la vie chrétienne féconde, cette loi par laquelle on reçoit en donnant, on se trouve en se perdant et on resplendit quand on n’apparaît pas. Et il était aussi convaincu que tout cela ne peut se faire seul mais ensemble, dans l’Église, dans le peuple de Dieu. J’aime à cet égard rappeler son intuition prophétique qui consistait à valoriser les extraordinaires capacités féminines qui affleuraient dans la finesse spirituelle et dans la sensibilité humaine de sainte Louise de Marillac.

« Tout ce que vous avez fait à un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25,40), dit le Seigneur. Au cœur de la Famille vincentienne, il y a la recherche des « plus misérables et abandonnés », dans la conscience radicale que l’on n’est pas « digne de leur prêter nos humbles services » (Correspondance, entretiens, documents, XI, 392). Je souhaite que cette année de remerciement à l’intention du Seigneur et d’approfondissement du charisme soit pour vous l’occasion de vous désaltérer à la source pour vous rafraîchir aux sources de l’esprit d’origine. N’oubliez pas que les sources de grâces auxquelles vous vous abreuvez ont jailli de cœurs fermes comme des rocs dans l’amour, de « modèles insignes de charité »  (Benoît XVI, Lett. enc. Deus caritas est, 40).

Vous n’apporterez cette même fraîcheur de la source qu’en tournant votre regard vers le roc d’où tout a jailli. Ce roc est Jésus pauvre, qui demande d’être reconnu dans celui qui est pauvre et sans voix. Parce qu’il est là. Et vous, tout en rencontrant des existences fragiles, abîmées par des passés difficiles, vous êtes à votre tour appelés à être des rocs : non pour sembler durs et invulnérables, encore moins pour vous montrer imperméables aux souffrances, mais pour devenir des points d’appui surs, fermes face aux intempéries, résistants devant l’adversité, parce que « regardez le rocher dans lequel vous avez été taillés, la carrière d’où vous avez été tirés » (Is 51,1). Ainsi, vous êtes appelés à rejoindre les périphéries de la condition humaine, pour apporter non pas vos capacités mais l’Esprit du Seigneur, « Père des pauvres ». Il vous disperse dans le monde comme des semences qui germent dans la terre aride, comme un baume de consolation pour celui qui est blessé, comme un feu de charité pour réchauffer tant de cœurs gelés par l’abandon et endurcis parce qu’ils ont été rejetés.

En vérité, nous sommes tous appelés à nous abreuver au roc qu’est le Seigneur et à désaltérer notre monde avec la charité qui jaillit de lui. La charité est au cœur de l’Église, elle est le motif de son agir, l’âme de sa mission. « La charité est la voie maîtresse de la doctrine sociale de l’Église. Toute responsabilité et tout engagement définis par cette doctrine sont imprégnés de l’amour qui, selon l’enseignement du Christ, est la synthèse de toute la Loi » (Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate, 2). C’est là la voie à suivre, pour que l’Église soit toujours plus mère et maîtresse de charité, grandissant et surabondant dans l’amour mutuel et envers tous (cf. 1 Ts 3,12) : unanime dans la communion à l’intérieur, ouverte et accueillante à l’extérieur, avec le courage de renoncer à ce qui peut lui être utile pourvu qu’elle imite en tout son Seigneur et se retrouve ainsi pleinement elle-même, faisant de l’apparente faiblesse de la charité le seul motif de son orgueil (cf. 2 Cor 12,9).

À ce sujet, nous entendons résonner, très actuelles, les paroles du Concile : « Le Christ Jésus […] pour nous « s’est fait pauvre, de riche qu’il était » (2 Co 8, 9). Ainsi l’Église, qui a cependant besoin pour remplir sa mission de ressources humaines, n’est pas faite pour chercher une gloire terrestre mais pour répandre, par son exemple aussi, l’humilité et l’abnégation. Le Christ a été envoyé par le Père “pour porter la bonne nouvelle aux pauvres” […] de même l’Église enveloppe de son amour ceux que l’infirmité humaine afflige, bien plus, dans les pauvres et les souffrants, elle reconnaît l’image de son fondateur pauvre et souffrant, elle s’efforce de soulager leur misère et en eux c’est le Christ qu’elle veut servir. » (Conc. oecum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, 8).

Saint Vincent a traduit tout ceci par sa vie et c’est pourquoi il parle encore aujourd’hui à chacun de nous et à nous en tant qu’Église. Son témoignage nous invite à être toujours en chemin, prêts à nous laisser surprendre par le regard du Seigneur par sa Parole. Il nous demande petitesse de cœur, pleine disponibilité et docile humilité. Il nous pousse à la communion fraternelle entre nous et à la mission courageuse dans le monde. Il nous demande de nous libérer des langages complexes, des rhétoriques autoréférentielles et des attachements aux sécurités matérielles qui peuvent tranquilliser dans l’immédiat mais qui ne donnent pas la paix de Dieu et qui, souvent, font obstacle à la mission. Il nous exhorte à investir dans la créativité de l’amour, avec l’authenticité d’un « cœur qui voit » (cf. Benoît XVI, Lett. enc. Deus Caritas est, 31).

En effet, la charité ne se contente pas des bonnes habitudes du passé mais sait transformer le présent. Ceci est d’autant plus nécessaire aujourd’hui, dans la complexité changeante de la société mondialisée, où certaines formes d’aumône et d’aide, bien que motivées par de généreuses intentions, risquent d’alimenter des formes d’exploitation et d’illégalité et de ne pas apporter de bénéfices réels et durables. C’est pourquoi penser la charité, organiser la proximité et investir sur la formation sont des enseignements actuels qui nous viennent de saint Vincent. Mais son exemple nous stimule, en même temps, à donner de la place et du temps aux pauvres, aux nouveaux pauvres d’aujourd’hui, aux trop nombreux pauvres d’aujourd’hui, à faire nôtres leurs pensées et leur gêne, parce qu’un christianisme sans contact avec ceux qui souffrent devient un christianisme désincarné, incapable de toucher la chair du Christ. Rencontrer les pauvres, préférer les pauvres, donner la parole aux pauvres pour que leur présence ne soit pas réduite au silence par la culture de l’éphémère. J’espère vivement que la célébration de la Journée mondiale des pauvres du 19 novembre prochain nous aidera dans notre « vocation à suivre Jésus pauvre », devenant « toujours plus et mieux un signe concret de la charité du Christ pour les derniers et les plus démunis » et réagissant « à la culture du déchet et du gaspillage » (Message pour la Journée mondiale des pauvres, « N’aimons pas en paroles mais par les faits », 13 juin 2017).

Je demande pour l’Église et pour vous la grâce de trouver dans le frère affamé, assoiffé, étranger, dépouillé de ses vêtements et de sa dignité, malade et en prison, mais aussi celui qui doute, est ignorant, obstiné dans son péché, affligé, agressif, grincheux et agaçant, le Seigneur Jésus. Et de trouver dans les plaies glorieuses de Jésus la vigueur de la charité, la béatitude de la graine qui, en mourant, donne la vie, la fécondité de la roche blessée d’où jaillit l’eau, la joie de sortir de soi et d’aller dans le monde, sans nostalgie du passé, mais avec une confiance bien établie en Dieu, créatifs face aux défis d’aujourd’hui et de demain parce que, comme le disait saint Vincent, « l’amour est créatif à l’infini ».

© Libreria Editice Vaticana – 2017

Un bon politicien finit toujours par être martyr au service du bien commun !

Pour la vie de la communauté, a expliqué le Saint Père, une « bonne politique » est nécessaire, qui ne soit « ni esclave, ni maître », qui ne se laisse pas absorber par des ambitions individuelles, par la pression des factions et des centres d’intérêt ; qui sache tourner le dos à la corruption, véritable « tare » de la vocation politique.

Chers frères et sœurs, bonjour !

Je suis heureux de commencer ma visite à Cesena en rencontrant les citoyens, en ce lieu si significatif pour la vie civile et sociale de votre ville. Une ville riche de civilisation et chargée d’histoire qui, parmi ses fils illustres a vu naître deux papes : Pie VI dont c’est le IIIe centenaire de la naissance, et Pie VII.

Depuis des siècles, cette place constitue le point de rencontre des citoyens et le cadre où se déroule le marché. Elle mérite donc son nom : Place du Peuple, ou simplement « la Place », parce qu’elle est du peuple, un espace public où l’on prend des décisions importantes pour la ville, au palais communal, et où l’on lance des initiatives économiques et sociales.

La place est un lieu emblématique où les aspirations des personnes se confrontent aux exigences, aux attentes et aux songes de toute la communauté citoyenne ; où les groupes particuliers prennent conscience que leurs désirs doivent s’harmoniser avec ceux de la collectivité.

Je dirais – permettez-moi l’image – que sur cette place on « travaille la pâte » du bien commun de tous, ici, on travaille au bien commun de tous. Cette harmonisation des désirs de chacun avec ceux de la communauté fait le bien commun. Sur cette place, on apprend que si l’on ne poursuit pas le bien commun avec constance, engagement et intelligence, les personnes non plus ne peuvent pas jouir de leurs droits ni réaliser leurs plus nobles aspirations, parce que l’espace ordonné et civique où vivre et agir disparaîtrait.

Le caractère central de la place envoie par conséquent le message qui est essentiel de travailler tous ensemble pour le bien commun. Voilà la base du bon gouvernement de la ville, qui la rend belle, saine, et accueillante, carrefour d’initiatives et moteur d’un développement durable et intégral.

Cette place, comme toutes les autres places d’Italie, rappelle la nécessité de la bonne politique pour la vie de la communauté ; non pas de la politique asservie aux ambitions individuelles ou à la domination de factions ou de centres d’intérêts. Une politique qui ne soit ni esclave ni patronne, mais amie et collaboratrice ; non pas peureuse ni téméraire, mais responsable et donc en même temps courageuse et prudente; qui fasse grandir l’implication des personnes, leur inclusion et leur participation progressives ; qui ne laisse aucune catégorie aux marges, qui ne saccage ni ne pollue les ressources naturelles : en effet, elles ne sont pas un puits sans fond mais un trésor que nous a été donné par Dieu pour que nous en usions avec respect et intelligence. Une politique qui sache harmoniser les aspirations légitimes des personnes et des groupes en tenant bien fermement la barre en direction des intérêts de l’ensemble des citoyens.

Voilà la visage authentique de la politique et sa raison d’être : un service inestimable pour le bien de toute la collectivité. Voilà pourquoi la doctrine sociale de l’Église la considère comme une forme noble de la charité.

Par conséquent j’invite les jeunes à se préparer adéquatement et à s’engager personnellement dans ce domaine, en assumant dès le début la perspective du bien commun et en repoussant toute forme – même minime – de corruption. La corruption est le ver de la vocation politique. La corruption ne laisse pas la civilité grandir. Et le bon politicien a aussi sa croix quand il veut être bon parce que si souvent il doit abandonner ses idées personnelles pour prendre les initiatives des autres et les harmoniser, les joindre, afin justement de faire progresser le bien commun. Dans ce sens, le bon politicien finit toujours par être un « martyre » du service, parce qu’il laisse ses idées propres, mais il ne les abandonne pas, il en discute avec tous pour avancer vers le bien commun et c’est très beau cela.

Depuis cette place, je vous invite à considérer la noblesse de l’action politique au nom et en faveur du peuple : on la reconnaît dans une histoire et dans des valeurs partagées et elle requiert tranquillité de vie et développement ordonné. Je vous invite à exiger des protagonistes de la vie publique la cohérence de l’engagement, la préparation, la rectitude morale, la capacité d’initiative, la longanimité, la patience et la force d’âme pour affronter les défis d’aujourd’hui, sans cependant prétendre une impossible perfection.

Et quand le politicien se trompe, qu’il ait la grandeur d’âme de dire : « Je me suis trompé, excusez-moi, avançons ». C’est noble cela ! Les vicissitudes humaines et historiques et la complexité des problèmes ne permettent pas de tout résoudre tout de suite. La baguette magique ne fonctionne pas en politique. Un sain réalisme sait que même la meilleure classe dirigeante ne peut pas résoudre toutes les questions en un éclair. Il suffit, pour s’en rendre compte, d’essayer d’agir en personne au lieu de se limiter à observer et à critiquer depuis le balcon ce que font les autres. C’est un défaut quand les critiques ne sont pas constructives. Si le politicien se trompe, va le lui dire, il y a tant de façons de le dire : « Mais, je crois que cela serait mieux comme ci, comme cela… » Par la presse, la radio… mais le dire de façon constructive. Et ne pas regarder du balcon, no l’observer depuis le balcon en attendant qu’il échoue.

Non, cela ne construit pas la citoyenneté. De cette façon, on trouvera la force d’assumer les responsabilités de chacun, en comprenant en même temps que, même avec l’aide de Dieu et la collaboration des hommes, il arrivera qu’on commette de toute façon des erreurs. Nous commettons tous des erreurs. « Excusez-moi, je me suis trompé. Je reprends le juste chemin et j’avance. »

Chers frères et sœurs, cette ville, comme toute la Romagne, a été, traditionnellement, une terre de vives passions politiques. Je voudrais dire, à vous et à tous : redécouvrez aussi pour aujourd’hui la valeur de cette dimension essentielle du vivre ensemble en citoyens, apportez votre contribution, prêts à faire prévaloir le bien du tout sur celui d’une partie ; prêts à reconnaître que toute idée doit être vérifiée et remodelée en la confrontant à la réalité ; prêts à reconnaître qu’il est fondamental de lancer des initiatives en suscitant de d larges collaborations plus qu’en misant sur l’occupation de postes. Soyez exigeants avec vous-mêmes et avec les autres, en sachant que l’engagement consciencieux précédé d’une préparation adéquate portera son fruit et fera grandir le bien et même le bonheur des personnes.

Ecoutez tout le monde, tous ont le droit de faire entendre leur voix, mais écoutez spécialement les jeunes et les personnes âgées. Les jeunes parce qu’ils ont la force de réaliser les choses et les personnes âgées parce qu’elles ont la sagesse de la vie et qu’elles ont l’autorité de dire aux jeunes – même aux jeunes politiciens – : « Écoute, jeune homme, jeune fille, sur ce point tu te trompes, prends un autre chemin, réfléchis. » Ce rapport entre les personnes âgées et les jeunes est un trésor que nous devons retrouver. C’est aujourd’hui l’heure des jeunes ? Oui, pour moitié. C’est aussi l’heure des personnes âgées, pour moitié. S’il vous plaît, prenez ce chemin ! La politique a parfois semblé ces dernières années reculer face à l’agressivité et la prégnance d’autres formes de pouvoir, comme le pouvoir financier ou médiatique. Il faut relancer les droits de la bonne politique, son indépendance, son caractère spécifique qui est de servir le bien public, d’agir de façon à faire diminuer les inégalités, à promouvoir le bien des familles par des mesures concrètes, à fournir un cadre solide de droits-devoirs – équilibrer les deux – et à les rendre effectifs pour tous.

Le peuple qui se reconnaît dans un ethos et une culture propres, attend de la bonne politique la défense et le développement harmonieux de ce patrimoine et de ses meilleurs potentiels. Prions le Seigneur pour qu’il suscite de bons politiciens qui aient vraiment à cœur la société, le peuple et le bien des pauvres. A Lui, le Dieu de la justice et de la paix, je confie la vie sociale et civique de votre ville. Merci.

© Libreria Editice Vaticana – 2017

Commentaire des lectures du dimanche

Aujourd’hui, le prophète Isaïe et l’Évangile utilisent l’image de la vigne du Seigneur. La vigne du Seigneur est son « rêve », le projet qu’il cultive avec tout son amour, comme un paysan prend soin de son vignoble. La vigne est une plante qui demande beaucoup de soin !

Le « rêve » de Dieu c’est son peuple : il l’a planté et le cultive avec un amour patient et fidèle, pour qu’il devienne un peuple saint, un peuple qui porte beaucoup de fruits de justice.

Mais, aussi bien dans la prophétie ancienne que dans la parabole de Jésus, le rêve de Dieu est déçu. Isaïe dit que la vigne, si aimée et soignée, « a produit de mauvais raisins » (5, 2.4), alors que Dieu « attendait le droit, et voici le crime ; il attendait la justice, et voici les cris » (v.7). Dans l’Évangile, au contraire, ce sont les paysans qui ruinent le projet du Seigneur : ils ne font pas leur travail, mais ils pensent à leurs intérêts.

Jésus, dans sa parabole, s’adresse aux chefs des prêtres et aux anciens du peuple, c’est-à-dire aux « sages », à la classe dirigeante. Dieu leur a confié de façon particulière son « rêve », c’est-à-dire son peuple, pour qu’ils le cultivent, en prennent soin, le protègent des animaux sauvages. Voilà la tâche des chefs du peuple : cultiver la vigne avec liberté, créativité et ardeur.

Jésus dit que pourtant ces paysans se sont emparés de la vigne ; par leur cupidité et leur orgueil, ils veulent faire d’elle ce qu’ils veulent, et ainsi ils ôtent à Dieu la possibilité de réaliser son rêve sur le peuple qu’il s’est choisi.

La tentation de la cupidité est toujours présente. Nous la trouvons aussi dans la grande prophétie d’Ézéchiel sur les pasteurs (cf. ch. 34), commentée par saint Augustin dans son célèbre discours que nous venons de relire dans la Liturgie des Heures. Cupidité d’argent et de pouvoir. Et pour assouvir cette cupidité, les mauvais pasteurs chargent sur les épaules des gens des fardeaux insupportables qu’eux-mêmes ne déplacent pas même avec un doigt (cf. Mt 23, 4).

Nous aussi, au Synode des Évêques, nous sommes appelés à travailler pour la vigne du Seigneur. Les Assemblées synodales ne servent pas à discuter d’idées belles et originales, ou à voir qui est le plus intelligent… Elles servent à cultiver et à mieux garder la vigne du Seigneur, pour coopérer à son « rêve », à son projet d’amour sur son peuple. Dans ce cas, le Seigneur nous demande de prendre soin de la famille, qui depuis les origines est partie intégrante de son dessein d’amour pour l’humanité. 

Nous sommes tous pécheurs et à nous aussi, peut arriver la tentation de « nous emparer » de la vigne, à cause de la cupidité qui ne nous manque jamais à nous, êtres humains. Le rêve de Dieu se heurte toujours à l’hypocrisie de quelques-uns de ses serviteurs. Nous pouvons « décevoir » le rêve de Dieu si nous ne nous laissons pas guider par l’Esprit Saint. Que l’Esprit nous donne la sagesse qui va au-delà de la science, pour travailler généreusement avec vraie liberté et humble créativité.

Frères Synodaux, pour cultiver et bien garder la vigne, il faut que nos cœurs et nos esprits soient gardés en Jésus Christ dans la « paix qui surpasse tout ce qu’on peut concevoir », (Ph 4,7). Ainsi nos pensées et nos projets seront conformes au rêve de Dieu : se former un peuple saint qui lui appartienne et qui produise des fruits du Royaume de Dieu (cf. Mt 21, 43).

© Libreria Editrice Vaticana - 2014