Pko 04.06.2017

Eglise cath papeete 1Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°32/2017

Dimanche 4 juin 2017 – Solennité de la Pentecôte – Année A

Humeurs…

Saint Visitation, priez pour nous !

Le saviez-vous ? Un nouveau saint est apparu dans le calendrier républicain : « St Visitation ». Dans certaines régions du monde on connaissait des enfants nommé « Fête Nat »…

« St Visitation » a été officiellement déclaré mardi soir dernier sur Polynésie 1ère… [et il ne s’agit pas seulement d’une erreur du commentateur de la Météo !]

Anecdote qui fait sourire mais qui révèle aussi une profonde inculture et légèreté de l’information !

À force de vouloir épurer, au nom de la sacro-sainte « laïcité » notre environnement de tout ce qui pourrait rappeler la religion, et plus particulièrement la religion catholique, on en arrive à des situations ubuesques.

Ainsi, au nom de la laïcité, lorsque à la fin de la Météo on présente le saint du jour… on ne dit plus « Saint » mais simplement le prénom… tout en gardant à l’écrit l’abréviation « St » À noter, aussi qu’on ne fête que les personnes portant un prénom chrétien… les Tetuanui, Tiare… à la trappe… N’y aurait-il pas là une discrimination anti-laïque ?

L’« Homme des Lumières » du 21ème siècle n’a pas une tâche facile… Voltaire, leur père, avait moins de scrupules : « Il me paraît nécessaire qu’il y ait des gueux ignorants. Ce n’est pas le manœuvre qu’il faut instruire, c’est le bon bourgeois, c’est l’habitant des villes » (Lettre à M. Damilaville, 1er avril 1766) ou encore : « Distingue toujours les honnêtes gens qui pensent, de la populace qui n’est point faite pour penser. » (Dictionnaire philosophique portatif, ou la raison par l’alphabet).

Aujourd’hui, on est plus policé! On « écervele » les personnes en douceur… au nom d’une pseudo-liberté, on instille dans leur esprit que tel ou tel élément nuit à la liberté et au vivre ensemble… sans pour autant oser aller jusqu’au bout de la logique, ou plutôt de l’idéologie prônée : retirer les signes religieux ostentatoires… sans pour autant oser supprimer l’ensemble des fêtes religieuses et le dimanche du calendrier républicain… sans pour autant oser supprimer les clochers de nos environnements…

Notre monde est en mutation… un nouveau monde est en train de naître… sera-t-il le monde de tout le monde… ou seulement le monde de quelques idéologues manipulateurs ? Réinvestissons le monde de la pensée, de la réflexion… de la philosophie… ne le laissons pas à quelques manipulateurs assoiffés de pouvoir, d’argent, sans scrupules quand il s’agit de la « populace » et des « gueux ignorants ».

« L'Europe et le monde attendent que nous défendions partout l'esprit des Lumières menacé dans tant d'endroits » (Macron).

Jubilé du renouveau dans l’Esprit

Prière pour demander les grâces de l’Esprit saint

Esprit Saint, divin Paraclet, Père des pauvres, Consolateur des affligés, Sanctificateur des âmes, me voici prosterné en Votre présence, je Vous adore avec la plus profonde soumission, et je répète mille fois avec les Séraphins qui se tiennent devant Votre trône : Saint ! Saint ! Saint !

Vous Qui avez rempli d'immenses grâces l'âme de Marie et enflammé d'un saint zèle les cœurs des Apôtres, daignez aussi embraser mon cœur de Votre amour.

Vous êtes un Esprit divin, fortifiez-moi contre les mauvais esprits ; Vous êtes un Feu, allumez en moi le feu de Votre amour ; Vous êtes une Lumière, éclairez-moi en me faisant connaître les choses éternelles ; Vous êtes une Colombe, donnez-moi des mœurs pures ;

Vous êtes un Souffle plein de douceur, dissipez les orages que soulèvent en moi les passions ; Vous êtes une Langue, enseignez-moi la manière de Vous louer sans cesse ; Vous êtes une nuée, couvrez-moi de l'ombre de Votre protection.

Enfin, Vous êtes l'auteur de tous les Dons célestes, je vous en conjure, vivifiez-moi par Votre grâce, sanctifiez-moi par Votre charité, gouvernez-moi par Votre sagesse, adoptez-moi pour Votre enfant par Votre bonté, et sauvez-moi par Votre infinie miséricorde, afin que je ne cesse jamais de Vous bénir, de Vous louer et de Vous aimer, d'abord sur la terre pendant cette vie, et ensuite dans le ciel durant toute l'éternité. Ainsi soit-il.

St Alphonse-Marie de Liguori

À vin nouveau, outres neuves !À Pentecôte nouvelle, cœurs nouveaux…

En marge de l’actualité du mercredi 31 mai 2017

Alors que nous nous unissons au Saint Père, à tous les fidèles rassemblés à Rome et à toute l’Église pour fêter le jubilé du renouveau charismatiques, nous pouvons nous demander ce que peut signifier pour nous cette nouvelle Pentecôte. Comme l’Esprit Saint mettait au cœur des apôtres le feu qui allait embraser le monde, il continue aujourd’hui de raviver en chacun de nous ce feu qui purifie, réchauffe et éclaire…

  1. Pour vivre joyeusement notre Foi malgré les difficultés, pour que notre attachement au Christ soit source de bonheur et que nous ayons vraiment des visages de ressuscités enthousiastes, grâce à l’Esprit de fête qui brille dans nos cœurs. Ainsi pourrons nous chanter avec Marie : « Mon âme exalte le Seigneur, mon esprit exulte en Dieu mon sauveur ».
  2. Pour travailler sans cesse à la construction de l’unité dans nos communautés pour que nous soyons un comme le Père et le Fils ne font qu’un, grâce à l’Esprit d’unité qui nous rassemble en un seul corps
  3. Pour vivre dans nos familles, entre époux et épouse, entre parents et enfants cet amour qui est don, accueil, respect, fidélité, et qui prend sa source dans l’amour qui unit le Père et le Fils et qui se nomme l’Esprit d’amour.
  4. Pour combattre sans cesse ce qui porte atteinte à l’image et à la ressemblance de Dieu inscrite en chaque personne, tous ces fléaux qui se nomment intolérance, injustice, violence, non-respect de l’autre, misère… Rappelons-nous les paroles du prophète Isaïe reprises par Jésus dans la synagogue de Nazareth : « L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a consacré par l'onction, pour porter la bonne nouvelle aux pauvres. Il m'a envoyé annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclamer une année de grâce du Seigneur. » (Lc 4, 18)

Que viennent les jours où l’Esprit nous ouvrira davantage encore à la connaissance du Christ Jésus, où tous serons prophètes en laissant agir en nous l’Esprit : « Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau, j'ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai mon esprit en vous » (Ez 36, 26)

+ Mgr Jean Pierre COTTANCEAU

© Archidiocèse de Papeete - 2017

La Parole aux sans paroles – hors-série

Sœur Madeleine et le Secours Catholique

Nous avons demandé à Manutea GAY de nous parler un peu de sœur Madeleine qui nous a quitté le jeudi de l’Ascension. Durant de nombreuses années, elle fut une cheville ouvrière du Secours Catholique et était présente pour les premiers pas de l’Accueil Te Vai-ete.

Qui aurait pu imaginer à l’arrivée du navire en rade de Papeete en provenance de Marseille ce 18 mars 1948 que notre pays accueillait une religieuse de la congrégation des Sœurs de Saint Joseph de Cluny, Sœur Madeleine, pour presque 70 ans au service des polynésiens.

Après une longue carrière d’enseignante « chez les Sœurs » c’est en 1988 que Sœur Madeleine s’est présentée au Secours Catholique pour reprendre le flambeau laissé par son ainée Sœur Ambroise pour la gestion du local du Secours Catholique à la Mission et sa contribution à l’animation phare du Rotary Club de Papeete, l’opération « Noel pour tous » toujours d’actualité.

Très vite Sœur Madeleine a pris ses marques et su mettre son talent à l’organisation de l’espace. Chaque chose avait sa place, les boutons, les fermetures éclair, les vêtements pour hommes et femmes, garçons et filles, les chaussures, les ceintures, les layettes pour les nourrissons, la nourriture et bien d’autres choses…

Tous les dons reçus étaient triés, classés, nettoyés si nécessaire et distribués. Quasiment rien n’était jeté, tout se recyclait. Sœurs Madeleine a su s’entourer de bénévoles, certains parmi ses anciennes élèves alors à la retraite. Un atelier couture s’est tout naturellement mis en place avec des dames qui venaient alors tenir compagnie à Sœur Madeleine et remettre les vêtements en bon état pour une nouvelle vie. Tout se faisait dans la bonne humeur et la convivialité autour de Sœur Madeleine.

L’opération Noël pour tous du Rotary Club de Papeete réclamait une organisation spécifique pour que les dons récoltés soient triés et empaquetés sans délai pour un acheminement dans les archipels qui en faisait la demande pour le plus grand bonheur des enfants. Sœur Madeleine assurait la gestion de ces « commandes » avec précision pour le compte du Rotary Club de Papeete, comme cela se fait toujours.

Sœur Madeleine était au carrefour d’un réseau d’une multitude d’équipes relais très actives dans les paroisses de Tahiti mais également des îles de nos archipels, jusqu’aux Marquises. Elle coordonnait les besoins et assurait les approvisionnements depuis le local de la Mission. Son propre réseau de connaissances permet encore au Secours Catholique de pouvoir acheminer sans frais les nombreux colis à l’attention des équipes de bénévoles des archipels pour l’aide aux plus démunis. En échange Sœur Madeleine fournissait des chiffons doux pour l’entretien des navires, très appréciés des marins et des mécaniciens.

Sa maitrise du réseau du Secours Catholique avec un lien personnel avec chacun de nos relais était précieuse lorsque nous programmions un rassemblement pour des formations. Sœur Madeleine se chargeait de convoquer tout son petit monde de bénévoles en précisant les objectifs du rassemblement, l’enseignante qu’elle avait été savait être convaincante alors !

Le Secours Catholique est aussi un réseau mondial nommé Caritas Internationalis, qui rayonne la charité dans le monde et Sœur Madeleine se tenait au courant des actions auxquelles les Polynésiens contribuaient généreusement. Les échanges avec nos homologues du grand Pacifique nous ont permis de nous retrouver en Nouvelle Calédonie avec Sœur Madeleine pour s’enrichir des expériences de développement initiées par nos amis.

Appelée à d’autres missions par sa congrégation et bien que l’âge pouvait devenir un handicap pour continuer sa mission au Secours Catholique, c’est avec regret que nous avons vu notre Sœur Madeleine nous quitter il y a quelques années. Toutefois nous étions alors grandement enrichis de son dynamisme, de son sens de l’organisation et de son modèle dans les relations envers les bénévoles et les démunis. C’est alors que nous avons assuré la poursuite de ce travail de gestion des relais au local du Secours Catholique de la Mission.

M. Manutea Gay

Ancien Président de la Délégation

du Secours Catholique de Tahiti.

Mai 2017

© Accueil Te Vai-ete - 2017

La Parole aux sans paroles 77

Portrait d’une sœur de la nuit - Rani

C’est une histoire terrible que nous livre Rani aujourd’hui. Efféminée depuis petite, elle a toujours vu son père insulter et rosser les ra’era’e et pendant longtemps elle s’est cachée sous l’aile protectrice de sa mère. Avec la mort de cette dernière, Rani a fait preuve de bravoure pour s’assumer. Aujourd’hui, c’est sans rancœur ni haine qu’elle nous parle de son enfance.

D’où viens-tu ?

« Je suis de Mahina, je vis ici depuis ma naissance. J’ai grandi avec mes parents et mes frères et sœurs. »

Tu as combien de frères et sœurs ?

« Nous sommes 7 enfants dans la famille. J’ai 2 frères et 4 sœurs. »

Raconte-nous ton enfance.

« Ah, mon enfance ! Elle n’a pas été facile avec le papa que j’ai ! C’est un papa très dur qui n’acceptait pas les efféminées. Dans sa jeunesse, il allait, avec ses frères, rosser les efféminées en ville et dans les quartiers. Aujourd’hui, pour moi, c’est le pourquoi que je suis devenue pareil. »

Et comment as-tu réussi à te construire ?

« Je n’avais pas le choix, j’étais obligée de vivre avec ! Je devais être moi, avec ou sans son accord. »

Vers quel âge tu t’es sentie femme ?

« Il n’y a pas si longtemps que ça que j’ai assumé qui j’étais. Mais je le sentais déjà toute petite ! Je ne me suis plus cachée à partir de 15 ans. Et, comme je te l’ai dit, avec le papa que j’ai, ça n’a pas été facile ! J’ai reçu des coups parce que j’étais efféminée. Les personnes comme moi n’étaient pas acceptées dans la famille, surtout dans les familles religieuses où on dit que Dieu a créé l’homme et la femme à son image. Aujourd’hui, j’essaye de vivre en étant ce que je suis. Et j’en suis fière ! »

Tu as encore des contacts avec ton papa ?

« Oui. Tu sais, à un moment donné, il n’avait pas d’autres choix que de nous accepter. »

Et ta maman ?

« Elle nous a quitté en 2010. Je pense que ça a été le déclic pour mon papa, pour qu’il arrête de taper. Parce que ma maman, elle avait un grand cœur pour ce genre de personne, pour les efféminées. »

Et avec tes frères et sœurs ?

« Ils m’ont toujours acceptée comme je suis ! Aujourd’hui je suis parrain du bébé d’une de mes sœurs. C’est un cadeau pour moi, ce n’est pas donné à tout le monde ! En fait, dans la famille, nous sommes deux à être efféminées. Mon petit frère est comme moi. »

Comment es-tu arrivée à la prostitution ?

« C’est un choix ! En tant qu’efféminée, trouver un compagnon, ce n’est pas facile ! Tout ce qu’il nous reste, c’est le trottoir. On n’a pas le choix, si on veut connaître l’amour. »

À quel âge tu as commencé ?

« J’ai commencé la prostitution à 17 ans, bien sûr en me cachant de mon papa. »

Comment as-tu appris le métier ?

« Le métier ne s’apprend pas. C’est vraiment un risque à prendre ! »

Le plus dur ?

« C’est d’avoir de bons clients. Parfois, on a des clients très insolents, très agressifs. Et là, on doit vraiment se protéger ! C’est le moment le plus dur de la prostitution ! Pour moi, un bon client, ce n’est pas celui qui paie bien mais celui qui nous respecte. »

As-tu déjà eu des problèmes ?

« Non, je fais attention. Mes clients, je les choisis. Je ne vais pas avec n’importe qui. »

Tu fais ça tous les soirs ?

« Non, pas tous les soirs, que quand l’envie arrive. Mais en week-end, c’est sûr et je vais jusqu’à 4h du matin, parfois jusqu’à 7h ! En semaine, c’est selon l’envie. »

Et tu les accueilles chez toi ?

« Non, à la maison, j’ai toujours du monde. Donc c’est un peu gênant. On va dans des coins discrets. »

Et, entre nous, si un client arrive et il est moche, pas du tout attirant, ni charmant, rien. Que fais-tu ?

« Non, non, non, ce ne sont pas mes goûts ! Je pense qu’il n’aura pas trop de succès avec nous ! » (Rires)

Comment tu vois ta vie dans 20 ans ?

« Ohlalala, déjà que c’est la misère aujourd’hui ! On n’arrive même pas à trouver un bon travail ! Donc dans 20 ans, ça va être pire ! Il faudrait changer le monde pour espérer avoir un bel avenir ! »

Si demain tu trouves un bon travail, vas-tu arrêter la prostitution ?

« Non ! Je n’arrêterais pas. »

Un dernier message ?

« La prostitution, c’est quelque chose de mal vu par la population. Mais, en tant qu’efféminée, je dis qu’on ne nous donne pas le choix. Ce n’est pas vrai quand certaines disent que la prostitution c’est facile. C’est difficile. C’est plein de craintes. Ce n’est pas ce que je proposerai aux nouvelles filles. »

© Accueil Te Vai-ete - 2017

Audience générale du mercredi 31 mai 2017

L’Esprit Saint fait de nous des semeur d’espérance

L’Esprit-Saint nous rend capables d’espérer mais fait également de nous des « semeurs d’espérance », des consolateurs auprès des plus pauvres et des personnes rejetées : le Pape François l’a affirmé ce mercredi 31 mai 2017, lors de l’audience générale, Place St Pierre. À quatre jours de la Pentecôte, et devant des milliers de pèlerins venus à Rome pour fêter le Jubilé d’Or du Renouveau charismatique, le Souverain Pontife a centré sa catéchèse sur le rapport entre l’Esprit-Saint et l’espérance chrétienne.

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans l’imminence de la solennité de la Pentecôte, nous ne pouvons pas ne pas parler du rapport qu’il y a entre l’espérance chrétienne et l’Esprit Saint. L’Esprit est le vent qui nous pousse en avant, qui nous maintient en chemin, nous fait nous sentir pèlerins et étrangers et qui ne nous permet pas de nous installer et de devenir un peuple « sédentaire ».

La lettre aux Hébreux compare l’espérance à une ancre (cf. 6,18-19) ; et à cette image, nous pouvons ajouter celle de la voile. Si l’ancre est ce qui donne à la barque la sécurité et qui la tient « ancrée » dans l’ondulation de la mer, la voile, elle, est ce qui la fait se mouvoir et avancer sur les eaux. L’espérance est vraiment comme une voile ; elle recueille le vent de l’Esprit Saint et le transforme en force motrice qui pousse la barque, selon les cas, au large ou vers la rive.

L’apôtre Paul conclut sa Lettre aux Romains avec ce vœu : entendez bien, écoutez bien comme c’est beau : « Que le Dieu de l’espérance vous remplisse de toute joie et de paix dans la foi, afin que vous débordiez d’espérance par la puissance de l’Esprit Saint » (15,13). Réfléchissons un peu au contenu de cette très belle parole.

L’expression « Dieu de l’espérance » ne veut pas seulement dire que Dieu est l’objet de notre espérance, à savoir celui que nous espérons rejoindre un jour dans la vie éternelle ; cela veut aussi dire que Dieu est celui qui, dès maintenant, nous fait espérer, ou plutôt nous donne « la joie de l’espérance » (Rm 12,12) : la joie maintenant d’espérer et pas seulement espérer d’être joyeux. C’est la joie d’espérer et non espérer d’avoir la joie, dès aujourd’hui. « Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espérance », dit un dicton populaire ; et le contraire est aussi vrai : tant qu’il y a de l’espérance, il y a de la vie. Les hommes ont besoin d’espérance pour vivre et ont besoin de l’Esprit Saint pour espérer.

Saint Paul – avons-nous entendu – attribue à l’Esprit Saint la capacité de nous faire carrément « déborder d’espérance ». Déborder d’espérance signifie ne jamais se décourager ; cela signifie espérer « contre toute espérance » (Rm 4,18), c’est-à-dire espérer même quand tout motif humain d’espérer diminue, comme ce fut le cas pour Abraham quand Dieu lui a demandé de lui sacrifier son fils unique, Isaac, et comme ce fut encore plus le cas pour la Vierge Marie sous la croix de Jésus.

L’Esprit-Saint rend possible cette espérance invincible en nous donnant le témoignage intérieur que nous sommes enfants de Dieu et ses héritiers (cf. Rm 8,16). Comment celui qui nous a donné son fils unique pourrait-il ne pas nous donner tout le reste avec lui (cf. Rom 8,32). « L’espérance – frères et sœurs – ne déçoit pas : puisque l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5,5). C’est pourquoi il ne déçoit pas, parce qu’il y a l’Esprit Saint en nous qui nous pousse à aller de l’avant, toujours ! Et pour cela, l’espérance ne déçoit pas.

Il y a plus : l’Esprit ne nous rend pas seulement capables d’espérer, mais aussi d’être des semeurs d’espérance, d’être nous aussi – comme lui et grâce à lui – des « paraclets », c’est-à-dire des consolateurs et défenseurs de nos frères, semeurs d’espérance. Un chrétien peut semer de l’amertume, il peut semer de la perplexité et cela n’est pas chrétien, et qui fait cela n’est pas un bon chrétien. Il sème de l’espérance : il sème l’huile de l’espérance, il sème le parfum de l’espérance et non le vinaigre de l’amertume et du désespoir. Le bienheureux cardinal Newman, dans un de ses discours, disait à ses fidèles : « Instruits par notre propre souffrance, par notre douleur, ou plutôt par nos péchés, nous aurons l’esprit et le cœur exercés à toutes les œuvres d’amour envers ceux qui en ont besoin. Nous serons, à la mesure de notre capacité, consolateurs à l’image du Paraclet – c’est-à-dire l’Esprit Saint – et dans tous les sens que comporte ce mot : avocats, assistants, porteurs de réconfort. Nos paroles et nos conseils, notre manière de faire, notre voix, notre regard, seront gentils et tranquillisants » (Parochial and plain Sermons, vol. V, Londres 1870, pp. 300s.). Et ce sont surtout les pauvres, les exclus, les non-aimés qui ont besoin de quelqu’un qui se fasse pour eux « paraclet », c’est-à-dire consolateur et défenseur. Nous devons faire la même chose avec les plus démunis, avec les plus rejetés, avec ceux qui en ont le plus besoin, ceux qui souffrent le plus. Défenseurs et consolateurs !

L’Esprit-Saint alimente l’espérance non seulement dans le cœur des hommes, mais aussi dans la création tout entière. L’apôtre Paul dit – cela semble un peu étrange, mais c’est vrai : que même la création « attend avec impatience » la libération et qu’elle « gémit et souffre » comme dans les douleurs d’un enfantement (cf. Rm 8, 20-22). « “L’énergie capable de faire bouger le monde n’est pas une force anonyme et aveugle, mais c’est l’action de l’Esprit de Dieu qui « planait sur les eaux” (Gen1,2) au commencement de la création » (Benoît XVI, Homélie, 31 mai 2009). Cela aussi nous pousse à respecter la création : on ne peut barbouiller un tableau sans offenser l’artiste qui l’a créé.

Frères et sœurs, que la fête prochaine de la Pentecôte – qui est l’anniversaire de l’Église – nous trouve unanimes dans la prière, avec Marie, Mère de Jésus et notre Mère. Et que le don de l’Esprit nous fasse abonder dans l’espérance. Je vous dirai encore plus : qu’il nous fasse gaspiller l’espérance avec tous ceux qui sont dans le besoin, les plus rejetés et pour tous ceux qui en ont besoin. Merci.

© Libreria Editrice Vaticana - 2017

Méditation de Mgr Jean-Pierre COTTANCEAU à l’occasion du jubilé du Renouveau dans l’Esprit

Vers une nouvelle Pentecôte

« Esprit, toi qui renouvelles le cœur des disciples au jour de Pentecôte comme tu renouvelles la face de la terre !... »

Alors que nous nous unissons au Saint Père, à tous les fidèles rassemblés à Rome et à toute l’Église pour fêter ce jubilé du renouveau charismatiques, nous pouvons nous demander ce que peut signifier pour nous cette nouvelle Pentecôte. Comme l’Esprit Saint mettait au cœur des apôtres le feu qui allait embraser le monde, il continue aujourd’hui de raviver en chacun de nous ce feu qui purifie, réchauffe et éclaire.

Souvenons-nous en effet que l’Église ne peut naître que de l’Esprit.

  1. C’est lui, en effet, qui nous tourne vers le Christ comme une fleur se tourne toujours vers le soleil. Il met dans nos cœurs et sur nos lèvres les paroles d’amour que nous adressons à notre Père et à son Fils Jésus Christ, il nous donne de joindre nos mains pour prier et de les ouvrir pour partager.
  2. C’est lui qui nous donne d’entendre le message du Christ et de nous souvenir de ses paroles pour en vivre jour après jour. Il murmure à nos oreilles les paroles des béatitudes, il ravive dans nos mémoires les gestes de salut et de service que Jésus nous a laissés pour que nous fassions cela en mémoire de lui.
  3. C’est lui qui donne la conversion du cœur et nous permet d’accueillir la miséricorde divine lorsque, ouvrant les yeux sur nos faiblesses, nos infidélités et nos manques d’amour, nous nous tournons vers lui pour changer de vie, pour assouplir ce qui est rigide, pour adoucir ce qui est dur, pour redresser ce qui est tordu, pour rafraichir ce qui brûle et réchauffer ce qui est froid.
  4. C’est lui qui construit l’unité dans la Foi et qui fait de nos diversités une richesse, nous rendant ainsi capables de construire l’Église dans l’harmonie pour vaincre rivalités, luttes de pouvoir et jalousies. Quand nous sommes tentés de construire des barrières et des frontières qui excluent, lui nous invite à bâtir des ponts et ouvrir des fenêtres. Pour rendre notre Église toujours plus ouverte et accueillante, il oriente nos regards vers le Christ qui nous unit comme les membres d’un seul corps dont il est la tête.
  5. C’est lui qui donne la force du témoignage. Comme au temps des premières communautés dans l’Empire Romain, l’Évangile va à contre-courant de ce que le prince de ce monde inspire comme comportement. Aujourd’hui comme hier, témoigner de Jésus-Christ se paie trop souvent de moqueries, de vexations et trop souvent encore, de persécutions jusqu’à la mort. Seule une confiance absolue dans l’Esprit peut donner la force de tenir bon, la sagesse pour affronter l’adversaire et l’espérance pour dépasser l’épreuve.

L’Esprit Saint, souffle de Dieu est souffle de vie donné à l’Homme pour qu’il vive. Il est force de sagesse, de justice, de pardon pour celui ou celle qui se laisse inspirer par lui et qui, ainsi, devient prophète. Il nous permet de nous ajuster à Dieu en vivant comme de vrais fils et filles de Dieu. Il nous met à part, nous consacre pour que nous puissions être les témoins dont le monde a besoin aujourd’hui.

Chaque fois que nous renouvelons notre accueil de l’Esprit Saint, nous entendons l’appel qu’il nous adresse, l’appel que Jésus adresse à ses disciples : « Allez, de toutes les nations, faites des disciples, et apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai appris ! » L’Esprit est la force qui lance l’Église sur les chemins du monde. Il accompagne et guide nos actions.

À vin nouveau, outres neuves ! À Pentecôte nouvelle, cœurs nouveaux…

  1. Pour vivre joyeusement notre Foi malgré les difficultés, pour que notre attachement au Christ soit source de bonheur et que nous ayons vraiment des visages de ressuscités enthousiastes, grâce à l’Esprit de fête qui brille dans nos cœurs. Ainsi pourrons nous chanter avec Marie : « Mon âme exalte le Seigneur, mon esprit exulte en Dieu mon sauveur ».
  2. Pour travailler sans cesse à la construction de l’unité dans nos communautés pour que nous soyons un comme le Père et le Fils ne font qu’un, grâce à l’Esprit d’unité qui nous rassemble en un seul corps
  3. Pour vivre dans nos familles, entre époux et épouse, entre parents et enfants cet amour qui est don, accueil, respect, fidélité, et qui prend sa source dans l’amour qui unit le Père et le Fils et qui se nomme l’Esprit d’amour.
  4. Pour combattre sans cesse ce qui porte atteinte à l’image et à la ressemblance de Dieu inscrite en chaque personne, tous ces fléaux qui se nomment intolérance, injustice, violence, non-respect de l’autre, misère…

Rappelons-nous les paroles du prophète Isaïe reprises par Jésus dans la synagogue de Nazareth : « L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a consacré par l'onction, pour porter la bonne nouvelle aux pauvres. Il m'a envoyé annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclame une année de grâce du Seigneur. » (Lc 4, 18)

Que viennent les jours où l’Esprit nous ouvrira davantage encore à la connaissance du Christ Jésus, où tous serons prophètes en laissant agir en nous l’Esprit : « Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau, j'ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai mon esprit en vous » (Ez 36, 26)

Pour conclure, je laisse la parole au P. Paul Hodée qui écrit dans son livre sur l’histoire de l’Église à Tahiti : « Avec son énergie spirituelle et ses points d’attention pastorale, le “Renouveau dans l’Esprit” est une grâce pour l’Église et une chance pour la Polynésie. Il se situe clairement dans la ligne de la nouvelle Pentecôte désirée par Jean XXIII en lançant Vatican II… En Polynésie, il se situe en plus dans la continuité de l’antique dévotion à l’Eucharistie… Il pénètre toute la vie Chrétienne dans l’Église. Il est indissociablement renouveau DE l’Église et renouveau EN Église… L’Esprit est toujours l’Esprit de Jésus, seul “chemin, vérité et vie” qui nous conduit au Père pour que nous ayons la vie ».

À Papeete, le 30 mai 2017.

+ Mgr Jean Pierre COTTANCEAU,

Archevêque de Papeete

© Archevêché de Papeete - 2017

Commentaire des lectures du dimanche

« Je ne vous laisserai pas orphelins » (Jn 14, 18).

La mission de Jésus, culminant dans le don de l’Esprit Saint, avait ce but essentiel : rétablir notre relation avec le Père, abîmée par le péché ; nous arracher à la condition d’orphelins et nous rendre celle de fils.

L’apôtre Paul, écrivant aux chrétiens de Rome, dit : « Tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu. Vous n’avez pas reçu un esprit qui fait de vous des esclaves et vous ramène à la peur ; mais vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ; et c’est en lui que nous crions “Abba !”, c’est-à-dire : Père ! » (Rm 8, 14-15). Voilà la relation renouée : la paternité de Dieu se rétablit en nous grâce à l’œuvre rédemptrice du Christ et au don de l’Esprit Saint.

L’Esprit est donné par le Père et nous conduit au Père. Toute l’œuvre du salut est une œuvre de ré-génération, dans laquelle la paternité de Dieu, au moyen du don du Fils et de l’Esprit, nous libère de l’état d’orphelins dans lequel nous sommes tombés. À notre époque aussi nous rencontrons différents signes de notre condition d’orphelins :  cette solitude intérieure que nous éprouvons même au milieu de la foule et qui parfois peut devenir tristesse existentielle ; cette prétendue autonomie par rapport à Dieu qui s’accompagne d’une certaine nostalgie de sa proximité ; cet analphabétisme spirituel diffus à cause duquel nous nous retrouvons dans l’incapacité de prier ; cette difficulté à percevoir comme vraie et réelle la vie éternelle, comme plénitude de communion qui germe ici-bas et s’épanouit au-delà de la mort ; cette difficulté pour reconnaître l’autre comme frère, en tant que fils du même Père ; et d’autres signes semblables. 

À tout cela s’oppose la condition de fils, qui est notre vocation originaire, elle est ce pour quoi nous sommes faits, notre plus profond ADN, mais qui a été abimé et qui, pour être restauré, a demandé le sacrifice du Fils Unique. Du don immense d’amour qu’est la mort de Jésus sur la croix, a jailli pour toute l’humanité, comme une immense cascade de grâce, l’effusion de l’Esprit saint. Celui qui s’immerge avec foi dans ce mystère de régénération renaît à la plénitude de la vie filiale. 

« Je ne vous laisserai pas orphelins ». Aujourd’hui, fête de Pentecôte, ces paroles de Jésus nous font penser aussi à la présence maternelle de Marie au Cénacle. La Mère de Jésus est au milieu de la communauté des disciples rassemblés en prière : elle est mémoire vivante du Fils et invocation vivante de l’Esprit Saint. Elle est la Mère de l’Église. À son intercession nous confions de manière particulière tous les chrétiens et les communautés qui en ce moment ont le plus besoin de la force de l’Esprit Paraclet, Défenseur et Consolateur, Esprit de vérité, de liberté et de paix.

L’Esprit, comme affirme encore saint Paul, fait que nous appartenons au Christ. « Celui qui n’a pas l’Esprit du Christ ne lui appartient pas » (Rm 8, 9). Et en consolidant notre relation d’appartenance au Seigneur Jésus, l’Esprit nous fait entrer dans une nouvelle dynamique de fraternité. Par le Frère universel qui est Jésus, nous pouvons nous mettre en relation avec les autres d’une manière nouvelle, non plus comme des orphelins, mais comme des fils du même Père, bon et miséricordieux. Et cela change tout ! Nous pouvons nous regarder comme des frères, et nos différences ne font que multiplier la joie et l’émerveillement d’appartenir à cette unique paternité et fraternité. 

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