PKO 31.05.2015
Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°32/2015
Dimanche 31 mai 2015 – Solennité de la Trinité – Année B
Humeurs
Évangéliser c’est cela aussi… merci à toute la communauté paroissiale de la Cathédrale
Cette semaine, nous avons reçu ce courrier venu d’Espagne :
« À la Communauté catholique de Papeete – Tahiti
Place de la Cathédrale.
Chers frères en Christ
Je suis un espagnol qui fait le tour du monde sur un bateau. Mon nom est Eduardo et je suis théologien catholique. Le 28 février 2015, j'ai eu la chance d'assister à votre célébration eucharistique. Comme théologien je connais parfaitement l'Ancien et le Nouveau testament. Par cette lettre, je veux partager la joie de cette expérience de piété et de foi. De plus, en tant que théologien et croyant la même foi que nous incite à rester fermes, comme le conseille l'apôtre Saint-Jacques.
Chers frères en Christ, merci encore pour la piété et la foi vécues avec vous.
Que le Dieu de l'Evangile qui sait ce dont nous avons besoin avant que nous el demandions (Mat 6,32) vous tranquillise avec ses bénédictions. Que son Esprit, l'Esprit sain vous fasse découvrir le Royaume des Cieux et vous amène à participer à sa Gloire. Unis dans la foi
Dans l'océan Pacifique, le 6 mars 2015
[signé] Cavaller »
Chronique de la roue qui tourne
La fête des mères
« Dieu ne pouvait être partout, alors il a créé la mère. » Proverbe juif
Ce dimanche, nous allons célébrer la fête des mères. L'occasion de mettre à l'honneur cette femme qui a donné la vie. Elle a sacrifié son corps pour nous porter, elle a sacrifié son insouciance pour que nous partagions sa vie. Combien de fois nous sommes-nous réfugiés sous son aile protectrice lorsque une tempête faisait rage ? Combien de fois nous sommes-nous sentis grands sous son tendre regard. Cette femme sur qui nous pourrons toujours compter, même si le monde entier nous tourne le dos. Ainsi nul ne peut oublier sa mère. En nous portant durant 9 mois, son nom s'est gravé dans notre cœur à vie.
Profitons aussi de cette fête pour penser à toutes ces femmes qui, sans enfanter, se sont improvisées mères devant un enfant seul, triste et désespéré.
Une maman...
Aime sans rien demander en retour.
Nous admire sans savoir ce que nous deviendrons.
Pleure quand nos yeux se noient dans nos larmes.
Sourit pour accompagner nos rires.
Nous donne tendresse et amour sans modération.
Même fragile, devient une armée entière à elle toute seule
pour nous faire gagner les batailles de la vie.
Nous défend toujours envers et contre tout.
Nous protège et nous guide avec bienveillance.
Autant de preuves qui donnent raison à la citation suivante : « L'enfant a beau grandir, il reste toujours à la hauteur du cœur maternel ».
Bonne fêtes à toutes les mamans
La chaise masquée
Le mariage ne s’improvise pas… pas de mariage express
Audience générale du mercredi 27 mai 2015 – Pape François
Le pape François consacre sa catéchèse sur la famille aux fiançailles : un cheminement des libertés vers le mariage chrétien indispensable pour se préparer à une alliance durable. Choisir le mariage – qui est un « appel de Dieu » - en toute liberté « requiert un cheminement » et donc des fiançailles, explique-t-il.
Chers frères et sœurs, bonjour !
Poursuivant ces catéchèses sur la famille, je voudrais aujourd’hui parler des fiançailles. Les fiançailles ont à voir avec la confiance, la familiarité, la fiabilité. Familiarité avec la vocation que Dieu donne, parce que le mariage est avant tout la découverte d’un appel de Dieu. C’est certainement quelque chose de beau qu’aujourd’hui, les jeunes puissent choisir de se marier sur la base d’un amour réciproque. Mais justement la liberté de ce lien requiert une harmonie consciente de la décision, pas seulement une simple entente de l’attraction ou du sentiment d’un moment, d’un temps bref… cela requiert un cheminement.
En d’autres termes, les fiançailles sont un temps dans lequel les deux personnes sont appelées à faire un beau travail sur l’amour, un travail associé et partagé, qui va en profondeur. On se découvre l’un l’autre petit à petit, c’est-à-dire que l’homme « apprend » la femme en apprenant cette femme, sa fiancée ; et la femme « apprend » l’homme en apprenant cet homme, son fiancé. Ne sous-estimons pas l’importance de cet apprentissage : c’est un bel engagement, et l’amour même le demande, parce que ce n’est pas seulement un bonheur insouciant, une émotion fascinée… Le récit biblique parle de toute la création comme d’une belle œuvre de l’amour de Dieu ; le livre de la Genèse dit que « Dieu vit tout ce qu’il avait fait ; et voici : cela était très bon » (Gn 1,31). C’est seulement à la fin que Dieu « se reposa ». De cette image, nous comprenons que l’amour de Dieu, qui a donné l’origine au monde, ne fut pas une décision improvisée. Non ! Ce fut un beau travail. L’amour de Dieu a créé les conditions concrètes d’une alliance irrévocable, solide, destinée à durer.
L’alliance d’amour entre l’homme et la femme, une alliance pour la vie, ne s’improvise pas, ne se fait pas d’un jour à l’autre. Il n’existe pas de mariage express : il faut travailler sur l’amour, il faut cheminer. L’alliance de l’amour de l’homme et de la femme s’apprend et s’affine. Je me permets de dire que c’est une alliance artisanale. Faire de deux vies une seule vie, c’est aussi presque un miracle, un miracle de la liberté et du cœur, confié à la foi. Peut-être devrons-nous nous engager plus sur ce point, parce que nos « coordonnées sentimentales » sont un peu désorientées. Celui qui prétend vouloir tout et tout de suite, cède ensuite aussi sur tout – et tout de suite – à la première difficulté (ou à la première occasion).
Il n’y a pas d’espoir dans la confiance et la fidélité du don de soi, si l’habitude qui prévaut est de consommer l’amour comme une sorte d’ « intégrateur » du bien-être psychique et physique. L’amour, ce n’est pas cela ! Les fiançailles mettent en lumière la volonté de garder quelque chose qui ne devra jamais être acheté ou vendu, trahi ou abandonné, quelque alléchante que puisse être l’offre. Mais Dieu aussi, quand il parle de l’alliance avec son peuple, il le fait parfois en employant les termes des fiançailles. Dans le livre de Jérémie, quand il parle au peuple qui s’était éloigné de lui, il lui rappelle lorsque celui-ci était la « fiancée » de Dieu et il dit ceci : « Je me souviens de la tendresse de tes jeunes années, ton amour de fiancée » (2,2). Et Dieu a fait ce parcours de fiançailles ; et puis il fait aussi une promesse : nous l’avons entendu au début de l’audience, dans le livre d’Osée : « Je ferai de toi mon épouse pour toujours, je ferai de toi mon épouse dans la justice et le droit, dans la fidélité et la tendresse ; je ferai de toi mon épouse dans la loyauté, et tu connaîtras le Seigneur. » (2,21-22). C’est une longue route que fait le Seigneur avec son peuple, dans ce cheminement des fiançailles.
À la fin, Dieu épouse son peuple en Jésus-Christ : il épouse l’Église en Jésus. Le peuple de Dieu est l’épouse de Jésus. Mais que de chemin ! Et vous, Italiens, dans votre littérature, vous avez un chef-d’œuvre sur les fiançailles [Les fiancés, de Manzoni, ndlr]. Il est nécessaire que les jeunes le connaissent, qu’ils le lisent : c’est un chef-d’œuvre où l’on raconte l’histoire de fiancés qui ont connu de grandes souffrances, qui ont parcouru une route pleine de nombreuses difficultés jusqu’à ce qu’ils arrivent au bout, au mariage. Ne laissez pas de côté ce chef-d’œuvre sur les fiançailles, que la littérature italienne vous a justement offert. Avancez, lisez-le et vous verrez la beauté, la souffrance, mais aussi la fidélité des fiancés.
Dans sa sagesse, l’Église garde la distinction entre être fiancés et être époux – ce n’est pas la même chose – précisément en vue de la délicatesse et de la profondeur de cette vérification. Soyons attentifs à ne pas mépriser trop légèrement ce sage enseignement, qui se nourrit de l’expérience de l’amour conjugal vécu dans le bonheur. Les symboles forts du corps détiennent les clés de l’âme : nous ne pouvons pas traiter à la légère les liens de la chair, sans ouvrir des blessures durables dans l’esprit (1 Cor 5,15-20).
Certes, la culture et la société actuelle sont devenues plutôt indifférentes à la délicatesse et au sérieux de cette étape. Et d’autre part, on ne peut pas dire qu’elles soient généreuses avec les jeunes qui ont sérieusement l’intention de fonder un foyer et de mettre des enfants au monde ! Au contraire, souvent elles mettent mille obstacles mentaux et pratiques. Les fiançailles sont un chemin de vie qui doit mûrir comme les fruits, c’est une route de maturation dans l’amour, jusqu’au moment où cela aboutit au mariage.
Les cours de préparation au mariage sont une expression particulière de cette préparation. Et nous voyons de nombreux couples qui arrivent peut-être au cours un peu à contrecœur. « Mais ces prêtres qui nous font suivre une formation ! Mais pourquoi ? Nous savons, nous ! »… et ils y vont à contrecœur. Mais après, ils sont contents et ils remercient parce qu’ils ont en effet trouvé là l’occasion – souvent la seule ! – de réfléchir sur leur expérience dans des termes qui ne sont pas banals. Oui, beaucoup de couples sont ensemble pendant longtemps, peut-être aussi dans l’intimité, parfois ils vivent ensemble, mais ils ne se connaissent pas vraiment. Cela semble étrange, mais l’expérience le prouve. C’est pourquoi il faut revaloriser les fiançailles comme un temps de connaissance réciproque et de partage d’un projet. Le chemin de préparation au mariage doit être organisé dans cette perspective, en s’appuyant aussi sur le témoignage simple mais intense d’époux chrétiens. Et en indiquant l’essentiel : la Bible, à redécouvrir ensemble, avec une prise de conscience ; la prière, dans sa dimension liturgique, mais aussi dans celle de « prière domestique », à vivre en famille, les sacrements, la vie sacramentelle, la confession, … par lesquels le Seigneur vient demeurer chez les fiancés et les prépare à s’accueillir vraiment l’un l’autre « avec la grâce du Christ » ; et la fraternité avec les pauvres, avec les personnes démunies, qui nous provoquent à la sobriété et au partage. Les fiancés qui s’y engagent grandissent tous deux et tout cela amène à préparer une belle célébration du mariage de manière différente, non pas mondaine, mais de manière chrétienne !
Pensons à ces paroles de Dieu que nous avons entendues quand il parle à son peuple comme le fiancé à sa fiancée : « Je ferai de toi mon épouse pour toujours, je ferai de toi mon épouse dans la justice et le droit, dans la fidélité et la tendresse ; je ferai de toi mon épouse dans la loyauté, et tu connaîtras le Seigneur (Os 2,21-22). Que tous les couples de fiancés pensent à cela et se disent l’un à l’autre : « je ferai de toi mon épouse, je ferai de toi mon époux ». Attendre ce moment ; c’est un moment, c’est un parcours qui avance lentement, mais c’est un parcours de maturation. Les étapes du chemin ne doivent pas être brûlées. La maturation se fait comme cela, pas à pas.
Le temps des fiançailles peut vraiment devenir un temps d’initiation ; à quoi ? À la surprise ! À la surprise des dons spirituels avec lesquels le Seigneur, à travers l’Église, enrichit l’horizon de la nouvelle famille qui se dispose à vivre dans sa bénédiction. Maintenant, je vous invite à prier la Sainte Famille de Nazareth : Jésus, Joseph et Marie. Prier pour que la famille fasse ce chemin de préparation ; prier pour les fiancés. Prions la Vierge Marie tous ensemble, un ‘Je vous salue Marie’ pour tous les fiancés, pour qu’ils puissent comprendre la beauté de ce chemin vers le mariage [Je vous salue Marie…]. Et aux fiancés qui sont sur la Place : « Bon chemin de fiançailles ! »
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Mais qui a décidé de créer la fête des mères ?
Bref rappel de son origine…
Médailles d'argent, d'or et de vermeille ou allocation financière : les cadeaux offerts à nos mères à l'occasion de la journée qui leur est consacrée ont bien changé depuis la création de cette fête. Retour sur l'origine de cette célébration avec l’historienne Françoise Thébaud1. Inscrite dans notre calendrier « le dernier dimanche de mai » par l'article 2 de la loi du 24 mai 1950, la Fête des mères, rapidement récupérée par les marques pour faire vendre, remonte en réalité au XIXè siècle. On célébrait donc déjà les mamans bien avant que cette fête ne soit inscrite dans la loi. Mais quel était son but à l'origine ?
Lefigaro.fr/madame : Pourquoi a-t-on créé la Fête des mères ?
Françoise Thébaud : À l’origine, c’est une revendication des mouvements familialistes et natalistes apparus à la fin du XIXè siècle. Cette revendication devient de plus en plus forte pendant l’entre-deux-guerres, la Première Guerre mondiale ayant été particulièrement meurtrière. Les associations natalistes souhaitent que les couples fassent plus d’enfants. L’idée n’était pas de célébrer toutes les mamans, mais seulement les mères de familles nombreuses.
Lefigaro.fr/madame : Quelles mesures concrètes ces associations souhaitent-elles voir mises en place pour encourager la natalité ?
Françoise Thébaud : Ces associations demandent des mesures répressives, comme l’interdiction de vendre des produits contraceptifs et une plus forte condamnation de l’avortement. Mais aussi des mesures financières pour inciter les couples à fonder des familles nombreuses : des allocations, des primes d’allaitement. Et, surtout, des mesures honorifiques comme des médailles d’argent, d’or ou de vermeille, et une réelle fête en l’honneur des mères de famille. On a des preuves de certaines célébrations. À Lyon, en 1918, une fête a été organisée au cours de laquelle des hommes politiques ont tenu des discours, et des médailles et des allocations ont été distribuées. En 1926, le Conseil supérieur de la natalité - un conseil consultatif - émet le souhait qu’il y ait, chaque mois, une fête des mères. L’idée était donc dans l’air et il y avait déjà quelques réalisations pratiques. Mais les Français ne semblaient pas particulièrement vouloir y adhérer.
Lefigaro.fr/madame : Comment la fête s’est-elle implantée en France ? On attribue souvent sa création au maréchal Pétain…
Françoise Thébaud : Ce n’est pas le maréchal Pétain qui l'a inventée. Mais avec son idéologie nataliste « travail, famille, patrie », le régime de Vichy s'est évidemment emparé de ce thème défendu par les mouvements natalistes les plus fervents de l’entre-deux-guerres. Vichy va demander aux écoles de préparer la « journée des mères » avec les élèves. Affiches, discours, mobilisation de la presse... le régime va systématiser la célébration de cette fête, qui s'adresse à toutes les mères dans toutes les communes de France.
Lefigaro.fr/madame : Cette « systématisation » par le régime de Vichy n’a jamais pas été remise en cause ?
Françoise Thébaud : Vichy tombe, mais la Fête des mères continue d'exister car les mouvements politiques à la fin de la guerre sont eux aussi profondément natalistes. Même les féministes ne la remettent pas en cause. C’est un héritage de Vichy, héritage ayant lui-même pour origine ce qui s'est passé pendant l’entre-deux-guerres. Cette fête a ensuite été un moyen d'encourager la consommation dans les années 1960. Elle était l’occasion de vendre des appareils ménagers...
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1 Les Femmes au temps de la guerre de 14, de Françoise Thébaud, Éd. Payot, coll. Petite Bibliothèque Payot, 480 p.
© Madame Figaro - 2015
Restez enraciné dans le service de Dieu
Ouverture de la XXème Assemblée générale de Caritas Internationalis
Dans l'homélie prononcée pour l’ouverture de la XXème Assemblée générale de Caritas Internationalis, le pape François souligne que « celui qui vit la mission de Caritas n’est pas un simple opérateur », mais « une personne qui aime avec l’esprit du Christ, l’esprit de gratuité, de don ». Il a interpellé la conscience des pays riches sur le partage des ressources alimentaires de la planète.
La lecture des Actes des apôtres que nous avons écoutée (16,22-34) nous présente un personnage un peu spécial. Il s’agit du geôlier de la prison de Philippes, où Paul et Silas ont été enfermés à la suite d’une émeute de la foule dirigée contre eux. Les magistrats les font d’abord rouer de coups puis les jettent en prison, en ordonnant au geôlier de faire bonne garde. Voilà pourquoi, ayant entendu le tremblement de terre pendant la nuit et voyant que les portes de la prison étaient ouvertes, cet homme, pris de désespoir, veut se tuer. Mais Paul le rassure et lui, tremblant et tout étonné, supplie à genoux d’être sauvé.
Le récit nous dit que cet homme a accompli tout de suite les étapes essentielles du chemin de foi et de salut : il écoute avec toute sa famille la parole du Seigneur ; il lave les plaies de Paul et Silas ; il reçoit le baptême avec tous les siens ; et enfin il accueille Paul et Silas chez lui, il dresse la table et, tout joyeux, leur offre à manger. C’est tout le parcours de la foi.
L’évangile annoncé et cru incite à laver les pieds et les plaies de ceux qui souffrent, et à leur dresser une table. Simplicité des gestes où l’accueil de la Parole et du sacrement du baptême s’accompagne de l’accueil du frère, comme s’il s’agissait d’un seul geste : accueillir Dieu et accueillir l’autre. Accueillir l’autre avec la grâce de Dieu ; accueillir Dieu et le manifester dans le service rendu au frère. La Parole, les sacrements et le service s’appellent et se renforcent mutuellement comme on peut déjà le constater dans les témoignages de l’Église des origines.
Dans ce geste, nous pouvons voir toute la vocation de Caritas. Caritas est désormais une grande Confédération, amplement reconnue aussi dans le monde pour tout ce qu’elle réalise. Caritas est l’Église implantée dans de très nombreuses parties du monde, et elle doit chercher à se déployer encore plus largement, également dans les diverses paroisses et communautés, pour renouveler ce qui s’est passé aux premiers temps de l’Église. En effet, la racine de tout votre service consiste vraiment en l’accueil simple et obéissant de Dieu et du prochain. Et cet accueil se réalise en vous personnellement, pour que vous alliez dans le monde ; et que là, vous serviez au nom du Christ, que vous avez rencontré et que vous rencontrez dans chacun des frères et sœurs dont vous vous faites proches. C’est exactement grâce à cela que l’on évite de se réduire à une simple organisation humanitaire. La Caritas de chaque Église particulière, même la plus petite, est la même : il n’y a pas de grandes Caritas et de petites Caritas, elles sont toutes égales. Demandons au Seigneur la grâce de comprendre la vraie dimension de Caritas ; la grâce de ne pas tomber dans l’erreur de croire qu’un centralisme bien organisé soit la route ; la grâce de comprendre que Caritas est toujours en périphérie, dans chaque Église particulière ; et la grâce de croire que le centre-Caritas est seulement une aide, un service et une expérience de communion mais qu’il n’est pas le chef de toutes les autres.
Celui qui vit la mission de Caritas n’est pas un simple opérateur, mais au contraire il est un témoin du Christ. Une personne qui cherche le Christ et se laisse chercher par le Christ ; une personne qui aime avec l’esprit du Christ, l’esprit de gratuité, de don. Toutes nos stratégies et planifications restent vides si nous ne sommes pas porteurs de cet amour. Non pas notre amour, mais le sien. Ou mieux encore, notre amour purifié et renforcé par le sien.
De sorte que l’on peut servir tout le monde et dresser la table pour tous. Dresser la table : c’est une belle image que la Parole de Dieu nous donne aujourd’hui. Dieu nous dresse la table de l’Eucharistie maintenant aussi. Caritas dresse tant de tables pour ceux qui ont faim. Ces derniers mois vous avez déployé une grande campagne : « Une seule famille humaine, de la nourriture pour tous ». Tant de personnes attendent encore aujourd’hui de pouvoir manger à leur faim. La planète produit de la nourriture pour tous, mais il semble qu’il manque la volonté de partager avec tous. Dresser la table pour tous, et demander qu’il y ait une table pour tous. Faire ce que nous pouvons pour que tous aient de quoi manger, mais aussi rappeler aux puissants de la terre qu’un jour Dieu les jugera et que se manifestera s’ils ont vraiment essayé de Le nourrir en chaque personne (Mt 25,35) et s’ils ont œuvré pour que l’environnement ne soit pas détruit mais qu’il puisse produire cette nourriture.
Et en pensant à la table de l’Eucharistie, nous ne pouvons pas oublier nos frères chrétiens qui ont été violemment privés de la nourriture pour le corps comme de celle pour l’âme : ils ont été chassés de leurs maisons et de leurs églises, parfois détruites. Je renouvelle l’appel à ne pas oublier ces personnes et ces injustices intolérables.
Avec beaucoup d’autres organismes caritatifs de l’Église, Caritas manifeste donc la force de l’amour chrétien et le désir de l’Église d’aller à la rencontre de Jésus en toute personne, surtout lorsqu’elle est pauvre et souffrante. C’est le chemin qui nous attend et je souhaite que vos travaux puissent se dérouler ces jours-ci dans cette perspective. Nous les confions à la Vierge Marie qui a fait de l’accueil de Dieu et du prochain le critère fondamental de sa vie. Demain précisément, nous fêterons Notre Dame de Fatima, qui est apparue pour annoncer la victoire sur le mal. Avec une aide aussi puissante, nous n’avons pas peur de poursuivre notre mission. Amen.
© Libreria Editrice Vaticana - 2015
Être à contre-courant
Consoler, aider, encourager : la vocation de l’évêque par le pape François
Voici le discours du pape François à l’ouverture des travaux de la 68eme Assemblée générale de la Conférence épiscopale italienne (CEI) : le pape examine la vocation de l'évêque-pasteur et il plaide pour l'autonomie des laïcs dans la communion ecclésiale.
Chers frères, bon après-midi !
Je vous salue tous et je salue les nouveaux évêques nommés après la dernière Assemblée, ainsi que les deux nouveaux cardinaux, aussi créés après la dernière Assemblée.
Quand j’entends ce passage de l’Évangile de Marc, je pense : mais ce Marc en a après Madeleine ! Parce que, jusqu’au dernier moment, il nous rappelle qu’elle avait eu sept démons. Mais ensuite, je pense : et moi, combien en ai-je eu ? Et je reste sans voix.
Je voudrais avant tout vous exprimer mes remerciements pour cette rencontre et pour le thème que vous avez choisi : l’exhortation apostolique Evangelii gaudium.
La joie de l’Évangile, en ce moment historique où nous sommes souvent cernés par des nouvelles décourageantes, par des situations locales et internationales qui nous font éprouver affliction et tribulations – dans ce cadre qui est réellement peu réconfortant – notre vocation chrétienne et épiscopale est d’aller à contre-courant : c’est-à-dire d’être des témoins joyeux du Christ ressuscité pour transmettre aux autres la joie et l’espérance. Notre vocation est d’écouter ce que le Seigneur nous demande : « Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu » (Is 40,1). En effet, il nous est demandé de consoler, d’aider, d’encourager, sans aucune distinction, tous nos frères opprimés sous le poids de leurs croix, en les accompagnant, sans jamais nous lasser d’œuvrer pour les soulager avec la force qui ne vient que de Dieu.
Jésus aussi nous dit : « Vous êtes le sel de la terre. Mais si le sel devient fade, comment lui rendre de la saveur ? Il ne vaut plus rien : on le jette dehors et il est piétiné par les gens » (Mt 5, 13). C’est très triste de rencontrer un consacré abattu, démotivé ou éteint : il est comme un puits sec où les gens ne trouvent pas d’eau pour se désaltérer.
C’est pourquoi aujourd’hui, sachant que vous avez choisi pour sujet de cette rencontre l’exhortation Evangelii gaudium, je voudrais écouter vos idées, vos questions, et vous faire partager quelques-unes de mes questions et réflexions.
Mes interrogations et mes préoccupations naissent d’une vision globale – pas seulement de l’Italie, mais globale – et surtout des innombrables rencontres que j’ai eues ces deux dernières années avec les Conférences épiscopales, où j’ai noté l’importance de ce que l’on peut définir comme la sensibilité ecclésiale : c’est-à-dire faire siens les sentiments du Christ, d’humilité, de compassion, de miséricorde, de sens du concret – la charité du Christ est concrète – et de sagesse.
La sensibilité ecclésiale qui implique aussi de ne pas être timides ou insignifiants pour désavouer ou vaincre une mentalité diffuse de corruption publique et privée qui a réussi à appauvrir, sans aucune honte, les familles, les retraités, les travailleurs honnêtes, les communauté chrétiennes, en écartant les jeunes, systématiquement privés de toute espérance quant à leur avenir, et surtout en marginalisant les faibles et les plus démunis. Une sensibilité ecclésiale qui, comme de bons pasteurs, nous fait sortir à la rencontre du peuple de Dieu pour le défendre des colonisations idéologiques qui le privent de son identité et de sa dignité humaine.
La sensibilité ecclésiale se manifeste aussi dans les choix pastoraux et dans l’élaboration des documents – les nôtres – où ne doit pas prévaloir l’aspect théorico-doctrinal abstrait, comme si nos orientations n’étaient pas destinées à notre peuple ou à notre pays – mais seulement à quelques savants et spécialistes – alors que nous devons poursuivre notre effort pour les traduire en propositions concrètes et compréhensibles.
La sensibilité ecclésiale et pastorale se concrétise aussi en renforçant le rôle indispensable des laïcs disposés à assumer les responsabilités qui sont les leurs. En réalité, les laïcs qui ont une formation chrétienne authentique ne devraient pas avoir besoin d’un évêque-pilote ou d’un monseigneur-pilote ou d’un apport clérical pour assumer leurs responsabilités à tous les niveaux, du politique au social, de l’économique au législatif. En revanche ils ont tous besoin d’un évêque-pasteur !
Enfin, la sensibilité ecclésiale se révèle concrètement dans la collégialité et dans la communion entre les évêques et leurs prêtres ; dans la communion entre les évêques eux-mêmes ; entre les diocèses riches – matériellement et sur le plan des vocations – et ceux qui sont en difficulté ; entre les périphéries et le centre ; entre les conférences épiscopales et les évêques et le successeur de Pierre.
Dans certaines parties du monde, on observe un affaiblissement diffus de la collégialité, que ce soit dans la détermination des plans pastoraux ou dans le partage des engagements économiques et financiers programmés. Il manque une habitude de vérifier la réception des programmes et la mise en œuvre des projets ; par exemple, on organise un congrès ou un événement qui, mettant en avant les voix habituelles, narcotise les communautés, homologuant des choix, des opinions et des personnes. Au lieu de se laisser transporter vers ces horizons où l’Esprit-Saint nous demande d’aller.
Un autre exemple de manque de sensibilité ecclésiale : pourquoi laisse-t-on autant vieillir les instituts religieux, monastères, congrégations, au point qu’ils ne sont pratiquement plus des témoignages évangéliques fidèles au charisme fondateur ? Pourquoi ne cherche-t-on pas à les regrouper avant qu’il ne soit trop tard sous de nombreux aspects ? Et ceci est un problème mondial.
Je m’arrête ici, après avoir voulu offrir seulement quelques exemples de la sensibilité ecclésiale affaiblie à cause de la confrontation continue avec les immenses problèmes mondiaux et de la crise qui n’épargne pas non plus l’identité chrétienne et ecclésiale elle-même.
Puisse le Seigneur – pendant le Jubilé de la miséricorde qui commencera le 8 décembre prochain – nous accorder « la joie de redécouvrir et rendre féconde la miséricorde de Dieu, avec laquelle nous sommes tous appelés à apporter le réconfort à chaque homme et à chaque femme de notre temps… Confions dès à présent cette année à la Mère de la Miséricorde, afin qu’elle tourne vers nous son regard et qu’elle veille sur notre chemin » (Homélie, 13 mars 2015).
Ce n’était qu’une introduction. Je vous laisse maintenant le temps de proposer vos réflexions, vos idées, vos questions sur Evangelii gaudium et sur tout ce que vous voulez demander, et je vous remercie beaucoup !
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Le couvent de Rouru – Mangareva – 1836-1903 [4]
Fragments d’histoire
Dans le cadre de l’année de la Vie consacrée, nous reprenons ici la découverte de l’histoire de la vie religieuse en Polynésie. Cette fois-ci nous nous arrêterons sur les prémices de la vie religieuse féminine avec l’histoire méconnu du « Couvent du Sacré-Cœur » à Mangareva. Cet essai de l’histoire du couvent a été écrit par Jean-Paul DELBOS et publié dans la 3ème édition du livre : « La Mission du bout du monde » en 2011.
1850 Lettre de Cyprien Liausu à son Supérieur Général, du 19 juin 1850 : « Je demande aussi à Mgr Doumer ss.cc. (à Valparaiso) quatre de nos Sœurs pour présider et faire la classe au couvent composé de 60 personnes (religieuses) et 50 pensionnaires (écolières) qui se monteraient à 200 si je voulais les accueillir (la population avoisinait encore les 2 300 habitants). Dans cet établissement où pousse du fruit à pain pendant huit mois et du taro toute l'année, on peut avec la plus grande facilité élever des poules, des dindons et du cochon. La citrouille, les haricots, l'oignon, la laitue et la carotte prospèrent ici on ne peut mieux. Cet établissement est connu sous le nom de couvent des Sacrés Cœurs. Les personnes font l'adoration et l'ordre règne chez elles on ne peut mieux ».
En novembre 1850, l'abbé de Laval, aumônier de « la Capricieuse », visite les Gambier. Dans son « Récit adressé des Mers du Sud », il raconte : « Le couvent est à quelque distance de la ville (sic). On marche entre deux haies d'orangers et au bout d'un quart d'heure, on entre sous les toumeï qui environnent le couvent. Le fruit de ces arbres fait la principale nourriture de la communauté. Le couvent se compose de trois corps de bâtiments, un quatrième est encore en projet... Les congréganistes sont rassemblées sous le nom de congrégation de Jésus et de Marie. Néanmoins ces filles ne sont pas religieuses de profession. Elles ne font pas de vœux. Elles vivent en famille sous la direction d'une supérieure qu'elles choisissent entre elles annuellement. Selon leur attrait, elles passent leur vie au couvent ou s'engagent dans le mariage. Personne n'y trouve à redire et rien n'en souffre. Mais il faut croire que la vie du couvent leur semble bien heureuse car on les voit difficilement se rendre aux propositions de mariage. Leur supérieure actuelle nommée Maxima n'a que 20 ans et voilà 3 ans consécutifs qu'elle réunit les suffrages de ses compagnes parmi lesquelles plusieurs dépassent 30 ans. Cette réunion de costumes blancs sur lesquels tranchent ces cheveux flottants, presque toujours noirs, n'est pas la chose la moins pittoresque de Mangareva.
Le premier corps de bâtiment en entrant renferme la chapelle et l'infirmerie avec 10 lits vacants. Le deuxième vers la gauche renferme une grande classe où les sœurs font l'école aux petites filles de l'archipel et une grande salle où ces enfants prennent, quand il pleut, leurs repas et leurs jeux. Au-dessus de ces deux salles s'étend un dortoir garni de nattes où l'on couche. Le troisième, en face du premier, renferme au rez-de-chaussée la salle qui sert d'ouvroir et de réfectoire dans les mauvais temps ; une pièce contiguë où elles remisent leurs quenouilles, le coton à filer et autres choses de même catégorie ; puis la chambre à coucher commune à la supérieure et à ses deux assistantes. Au-dessus s'étend le spacieux dortoir des congréganistes tout parqueté en belles planches de toumeï et bordé de chaque côté par des nattes en écorce lisse de pandanus, où l'on prend le sommeil exigé par la nature. Un hangar occupe l'emplacement destiné au quatrième corps de bâtiment et contient des instruments divers utiles aux travaux d'agriculture et de construction ; lorsqu'il sera construit, il constituera le 4e point extrême d'une croix grecque qu'il formera avec les trois autres bâtiments, et la cour au milieu ».
1851 Lettre de M. Henry à Mgr Doumer à Valparaiso, du 7 mai 1851 : « Il me reste à mentionner l'établissement que le P. Cyprien a fondé à Mangareva. Je veux parler du couvent. Il abrite environ 60 jeunes filles qui ne font pas de vœux et sont donc libres de retourner chez leurs parents si elles le veulent. Mais elles persistent presque toutes... Depuis 12 ans (en réalité depuis 15 ans) que cet établissement est fondé, 100 environ sont mortes par suite d'une cruelle épidémie mais on n'en a vu que quelques-unes abandonner la communauté pour rentrer chez leurs parents (la population est à ce moment-là de 20 00 âmes P. Nicolas Blanc ss.cc.). Tous les moments de la journée que les jeunes filles ne consacrent pas à la prière et à leur instruction elles les emploient à filer, à coudre et à travailler la terre de leurs mains. Les constructions qui composent cet établissement sont le mur d'enceinte, la chapelle, la salle de travail, le vaste dortoir si bien parqueté en planches de toumeï, avec 60 lits, chacun recouvert d'une double natte finement tissée, la maison d'école pour les petites filles ».
1852 Lettre du Père Nicolas Blanc, du 22 juin 1852 : « La mission possède deux écoles, l'une pour les filles et l'autre pour les garçons. La première est sous la direction du supérieur de la mission (le Père Cyprien Liausu) qui est aidé dans ce travail par quelques jeunes personnes retirées du monde dans le dessein de vivre dans le célibat. Là on exerce les petites filles, au nombre de 150 à peu près, à la lecture, à l'écriture, au chant, à l'agriculture, à la piété, en un mot à être de bonnes mères de famille. Leur assiduité, leur docilité et leurs progrès dans ces différentes branches sont admirables. J'ai vu quelques robes qu'on m'a dites cousues par elles, dont j'ai été fort surpris ».
1854 Journal du frère Gilbert Soulié frère convers ss.cc. : « Le 10 septembre 1854, la fille de Jacques sort du couvent sans avertir ses maîtres. Le Père Cyprien, pour le bon exemple, l'a mise à la porte de l'église »...
1855 Journal de Gilbert Soulié : « Aujourd'hui, 26 janvier 1855, j'ai fini le devant de la porte de la chapelle du couvent de Rouru. Le Père Cyprien fait creuser un puisard pour le couvent, mais je crains qu'il ne fonctionne pas bien »...
(15 juillet) départ du P. Cyprien Liausu. Malade, et découragé, le P. Cyprien (53 ans) quitte son poste sans obédience de son Supérieur (il est revenu mourir dans son pays natal, à Cahors, quelques mois plus tard, le 29 mai 1856). Il laisse la direction du couvent au Père Armand Chausson ss.cc. (Lettre d'Armand Chausson du 16 septembre 1855).
« Il laisse aussi aux religieuses de Rouru des instructions qui les laissent maîtresses d'elles-mêmes... Dans le recrutement du noviciat, une fois que la postulante avait fait sa prière, Dieu devait l'inspirer ou pour entrer au noviciat ou pour en sortir... Sur ce, la Supérieure Thérèse devait admettre si la personne désirait entrer, et ce parti pris, c'était l'inspiration du Saint-Esprit auquel même l'évêque et le Pape ne pouvaient mettre opposition, a fortiori un simple prêtre, dût-il être le Supérieur de la Mission » (Laval lui-même) Mémoires du Père Laval.
Dans une lettre à Cyprien Liausu, du 12 novembre 1855, le Père Armand Chausson écrit : « Quand est-ce que vous reviendrez prendre la direction de votre communauté qui soupire nuit et jour après vous, c'est à la lettre... Tout le chemin en pierre qui a été fait depuis le cimetière jusque près de la maison des “habillés de soie” (référence à une famille moquée connue de Cyprien) est réparé à nouveau. Dans l'intérieur de l'enclos aussi, à partir de la chapelle jusqu'au grand bâtiment (la maison des sœurs) il y a un pavé, plus une cuisine pour les pensionnaires (l'école), à l'endroit que vous aviez, je crois, désigné... Le roi a pourvu abondamment Rouru de vin et d'eau de vie pour les malades ».
En décembre 1855 (le 23), Cyprien Liausu date de Paris sa traduction d'une lettre de Sœur Rose, la Prieure de Rouru, écrite le 14 juin de la même année, six mois après que Cyprien Liausu eut quitté Mangareva. Sœur Rose réclame à nouveau l'envoi de religieuses SS.CC à Mangareva : « Que faites-vous donc dans votre pays ? Est-ce qu'ici il n'y a pas assez de vivres pour toutes ? peut-être notre nourriture ne vous convient pas ? Envoyez-nous aussi des bougies et des flambeaux pour notre autel... demandez aussi des grâces pour notre Supérieure qui s'appelle Thérèse... Priez aussi le bon Dieu de bénir Grégoire Roi de Mangareva ainsi que sa femme et leurs enfants. (s.) Sœur Rose (prieure)... Voici nos noms et nos emplois... » (suivent 32 noms de religieuses « qui ont fait leurs grands vœux » et 21 autres « qui sont au noviciat », dont Philomène, fille aînée du Roi, Adrienne, fille aînée de l'oncle du Roi, Marie, fille de l'ex-grand prêtre des idoles (Matua) ... « Nos élèves sont au nombre de 184 »... (« pour traduction conforme à l'original, Cyprien Liausu de la Congrégation des Sacrés Cœurs de Picpus »).
1856 Le Père Honoré Laval prend la direction de Rouru. Il a 48 ans.
Le 21 novembre 1856, le P. Armand Chausson écrit à son Supérieur Général : « Je viens m'acquitter d'une commission de la part de Rouru et de Thérèse sa Supérieure... qui est de nous envoyer les restes du P. Cyprien. En me priant de vous écrire, les religieuses de Rouru me disaient : dis à Euthyme (Rouchouze) qu'en voyant ta lettre il voit notre lettre, en voyant ton nom il voit les noms de nous toute ».
1857 « Rouru jouit d'une réputation colossale » (Mémoires du Père Laval)
[à suivre]
© La Mission du bout du monde - 2011
Méditation sur la Parole
« Yahvé ton Dieu... t’a donné à manger la manne que ni toi ni tes pères n’aviez connue » (Dt 8, 2).
Ces paroles du Deutéronome font référence à l’histoire d’Israël, que Dieu a fait sortir d’Egypte, de la condition d’esclavage, et qu’il a guidé pendant quarante ans dans le désert vers la terre promise. Une fois établi sur cette terre, le peuple élu atteint une certaine autonomie, un certain bien-être, et court le risque d’oublier les tristes épisodes du passé, surmontés grâce à l’intervention de Dieu et à son infinie bonté. Alors, les Ecritures exhortent à rappeler, à faire mémoire de tout le chemin parcouru dans le désert, à l’époque de la famine et des difficultés. L’invitation est celle de revenir à l’essentiel, à l’expérience de la dépendance totale de Dieu, lorsque la survie était entre ses mains, afin que l’homme comprenne qu’il « ne vit pas seulement de pain, mais... de tout ce qui sort de la bouche de Yahvé » (Dt 8, 3).
Outre la faim physique, l’homme porte en lui une autre faim, une faim qui ne peut être rassasiée par de la nourriture ordinaire. C’est la faim de vie, la faim d’amour, la faim d’éternité. Et le signe de la manne — comme toute l’expérience de l’exode — contenait en lui également cette dimension: c’était l’image d’une nourriture qui satisfait cette faim profonde qu’il y a chez l’homme. Jésus nous donne cette nourriture, plus encore, Il est lui-même le pain vivant qui donne la vie au monde (cf. Jn 6, 51). Son Corps est la véritable nourriture sous les espèces du pain; son Sang est la véritable boisson sous les espèces du vin. Ce n’est pas un simple aliment avec lequel rassasier nos corps, comme la manne: le Corps du Christ est le pain des derniers temps, capable de donner la vie, et la vie éternelle, parce que la substance de ce pain est l’Amour.
Dans l’Eucharistie, se communique l’amour du Seigneur pour nous: un amour si grand qu’il se donne Lui-même en nourriture pour nous; un amour gratuit, toujours à disposition de toute personne qui a faim et qui a besoin de retrouver ses forces. Vivre l’expérience de la foi signifie se laisser nourrir par le Seigneur et construire son existence non pas sur les biens matériels, mais sur la réalité qui ne périt pas: les dons de Dieu, sa Parole et son Corps.
Si nous regardons autour de nous, nous nous apercevons qu’il existe tant d’offres de nourriture qui ne viennent pas du Seigneur et qui apparemment satisfont davantage. Certains se nourrissent d’argent, d’autres de succès et de vanité, d’autres de pouvoir et d’orgueil. Mais la nourriture qui nous nourrit vraiment et qui nous rassasie est uniquement celle que nous donne le Seigneur! La nourriture que nous offre le Seigneur est différente des autres, et peut-être ne nous semble-t-elle pas aussi savoureuse que certains plats que nous offre le monde. Alors nous rêvons d’autres repas, comme les juifs dans le désert, qui regrettaient la viande et les oignons qu’ils mangeaient en Egypte, mais qui oubliaient qu’ils mangeaient ces repas à la table de l’esclavage. Ces derniers, dans ces moments de tentation, avaient de la mémoire, mais une mémoire malade, une mémoire sélective. Une mémoire esclave et non libre.
Chacun de nous, aujourd’hui, peut se demander: et moi ? Où est-ce que je veux manger ? A quelle table est-ce que je veux me nourrir? A la table du Seigneur ? Ou bien est-ce que je rêve de manger des nourritures savoureuses, mais dans l’esclavage ? En outre, chacun de nous peut se demander: quelle est ma mémoire? Celle du Seigneur qui me sauve, ou celle de l’ail et des oignons de l’esclavage ? Avec quelle mémoire est-ce que je rassasie mon âme ?
Le Père nous dit : « Je t’ai nourri de la manne que tu ne connaissais pas ». Retrouvons la mémoire. Telle est notre tâche, retrouver la mémoire. Et apprenons à reconnaître le faux pain qui trompe et qui corrompt, car fruit de l’égoïsme, de l’autosuffisance et du péché.
D’ici peu, lors de la procession, nous suivrons Jésus réellement présent dans l’Eucharistie. L’Hostie est notre manne, à travers laquelle le Seigneur se donne lui-même à nous. Nous nous adressons à Lui avec confiance: Jésus, défends-nous des tentations de la nourriture mondaine qui nous rend esclaves, une nourriture empoisonnée; purifie notre mémoire, afin qu’elle ne reste pas prisonnière de la sélectivité égoïste et mondaine, mais qu’elle soit la mémoire vivante de ta présence au cours de l’histoire de ton peuple, une mémoire qui se fait «mémorial» de ton geste d’amour rédempteur. Amen.
© Libreria Editrice Vaticana - 2014