PKO 26.07.2015
Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°40/2015
Dimanche 26 juillet 2015 – 17ème Dimanche du Temps ordinaire – Année B
Humeurs
Naea… ou le courage de la Foi
On a beaucoup parlé du choix de Naea Bennett de ne pas participer à la finale de la coupe du monde de Beach soccer dimanche dernier. Un choix de foi !
Les réactions, via les réseaux sociaux ont parfois été virulentes… notamment par certains admirateurs des Tikitoa déçus de ne pas avoir vu leur équipe remporter la première place du podium !
Ces réactions ont créé un malaise au point que l’on en oublie l’exploit des Tikitoa… et que ceux-ci se voient obligés de se justifier, tel Heimanu Taiaru sur sa page facebook : « Comment peut-on faire ça à l'homme qui a mis au monde cette famille “TIKITOA” franchement vous ne vous rendez pas compte du mal que vous faites à nous (tikitoa) et a sa famille on ne veut même plus rentrer a Tahiti !!! Je veux éclaircir une chose !! C'est que bien avant que nous pratiquions le beachsoccer nous savions déjà que Naea ne jouerait pas le dimanche et que juste avant que nous prenions l'avion pour le Portugal toute l'équipe savait que si nous arrivons en finale notre Capitaine Naea Bennett ne la jouera pas vu que ça tombera un dimanche jour de Sabbat. Nous avons toujours respecté ses choix et nous connaissions parfaitement sa religion, c'est un homme d'honneur, de respect et c'est grâce à ses qualités personnelles que notre groupe, notre famille, notre équipe, les TIKITOA est ce qu'il est à ce jour!!! —
De quel droit imposer cela a ces jeunes qui ont porté fièrement le flambeau du Fenua ? L’individualisme ambiant nous conduit à ne regarder que notre « pito » et a oublié que l’autre est une « personne ». La seule chose qui est vu par les détracteur du « courage de la foi » de Naea : « À cause de lui, on n’a pas gagné ! », « Dans ces conditions, l'argument de la religion qui passe avant l'intérêt public n'est pas acceptable à ce niveau là de compétition et lorsqu'il y a tout un peuple derrière en tant que supporteur »… Illustration parfaite de l’idéologie actuelle de la « pensée unique » où il n’y a plus de place pour la personne…
Naea a su, contre vents et marées, non seulement affirmé sa foi et son attachement à Dieu… mais il a du même coup « sauvé » la liberté de chacun d’entre nous à vivre selon sa conscience et ses convictions. Ceux qui l’accuse non pas conscience qu’il ne défend pas seulement sa propre liberté… mais la leur aussi…
Une société qui ne garantie pas la liberté de conscience et qui ne permet pas de l’exercer en plénitude est une dictature en puissance… alors
Merci Naea…
non seulement pour le « courage de la foi » qui anime ton cœur… mais aussi pour la défense de notre liberté de conscience, fondement de la « dignité humaine » !
Merci à ton équipe et à ta famille… pour leur soutien indéfectible !
Si Tahiti n’a pas gagné… la liberté de l’homme et sa dignité sont les grands vainqueurs !
Et pour nous hommes et femmes de foi… si la dignité humaine est gagnante… Dieu est gagnant !!!
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« La dignité de la personne humaine est, en notre temps, l’objet d’une conscience toujours plus vive ; toujours plus nombreux sont ceux qui revendiquent pour l’homme la possibilité d’agir en vertu de ses propres options et en toute libre responsabilité ; non pas sous la pression d’une contrainte, mais guidé par la conscience de son devoir. De même requièrent-ils que soit juridiquement délimité l’exercice de l’autorité des pouvoirs publics, afin que le champ d’une honorable liberté, qu’il s’agisse des personnes ou des associations, ne soit pas trop étroitement circonscrit. » (Dignitatis humanæ – Concile Vatican II)
Chronique de la roue qui tourne
Le social pour une société plus juste
« Un développement économique qui ne prend pas en compte les plus faibles et malchanceux, n'est pas un véritable développement. La mesure du modèle économique doit être la dignité intégrale de la personne, spécialement la plus vulnérable et celle qui est sans défense. » Le Pape François lors de son voyage au Paraguay.
À l'heure où on ne cesse de parler de relance économique, les paroles du Pape adressées au peuple Paraguayen nous semblent destinées tout autant.
Bien sûr qu'aucun pays ne peut appliquer des mesures d'embauche pour les exclus alors que les emplois en place sont menacés. Bien sûr qu'aucun pays ne peut difficilement proposer un plan d'action aux sans-abris lorsque des familles entières risquent de tout perdre.
Mais les paroles du Pape doivent servir de repère, à l'heure où nous nous lançons dans une refonte complète de notre économie, à l'heure où nous cherchons à tracer les grandes lignes de notre avenir.
Car, c'est bien aujourd'hui que tout commence.
Jusqu'à aujourd'hui, le social était toujours considéré comme un ministère secondaire. Pourtant, le social doit être le socle d'une République puisqu'il garantit liberté, égalité, fraternité. En 2015, avons-nous encore le droit d'oublier les malheureux, les exclus, les handicapés ? La réponse du Pape est sans appel.
Il nous faut construire une société qui cesse d'aborder le malheur des autres qu'avec un rapport comptable, réduisant le social à un ministère dispendieux ? Oui, aider nécessite des fonds, mais la dignité de chacun doit primer. Il nous faut proposer des solutions adaptées et éviter de traiter des numéros de dossier, oubliant l'humain. Il nous faut voir le potentiel de la faiblesse pour devenir un peuple fort.
Aujourd'hui, alors que nous voulons plus que jamais une ère nouvelle, il serait bon de rendre à chaque Polynésien la dignité de pouvoir crier : « j'existe » aussi fort que les autres. Voilà un beau projet d'avenir qui mérite tout l'investissement nécessaire !
La chaise masquée
Le droit à l’exclusion n’existe pas !
Rencontre avec le monde de l’école et de l’université à Quito - juillet 2015
Le pape recommande au monde de l’éducation de l’Équateur de « cultiver » et « protéger » et enseigner comme Jésus qui ne faisait pas le « docteur » et ne pas ignorer le frère ni la terre. Un vrai examen de conscience : « le droit à l’exclusion n'existe pas ! »
[…]
Dans le récit de la Genèse, avec la parole cultiver, il en dit immédiatement une autre : protéger. L’une explique l’autre. L’une va de pair avec l’autre. Ne cultive pas qui ne protège pas et ne protège pas qui ne cultive pas.
Non seulement nous sommes invités à prendre part à l'œuvre créatrice en la cultivant, en la faisant croître, en la développant, mais nous sommes aussi invités à en prendre soin, à la protéger, à la garder. Aujourd'hui cette invitation s'impose à nous [de force]. Non plus comme une simple recommandation, mais comme une exigence qui naît « en raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. Nous avons grandi en pensant que nous étions ses propriétaires et ses dominateurs, autorisés à l’exploiter… C’est pourquoi, parmi les pauvres les plus abandonnés et maltraités, se trouve notre terre opprimée et dévastée » (Laudato si’, n°2).
Il existe une relation entre notre vie et celle de notre mère la terre, entre notre existence et le don que Dieu nous a fait. « L’environnement humain et l’environnement naturel se dégradent ensemble, et nous ne pourrons pas affronter adéquatement la dégradation de l’environnement si nous ne prêtons pas attention aux causes qui sont en rapport avec la dégradation humaine et sociale » (Laudato si’, n°48). Mais de même que nous disons « ils se dégradent », de la même manière nous pouvons dire « ils se soutiennent et peuvent se transfigurer ». C'est une relation qui maintient une possibilité, tant d’ouverture, de transformation, de vie que de destruction, de mort.
Il y a quelque chose d’évident, nous ne pouvons pas continuer à tourner le dos à notre réalité, à nos frères, à notre mère la terre. Il n’est pas permis d’ignorer ce qui se passe autour de nous, comme si certaines situations n’existaient pas ou n’avaient rien à voir avec notre réalité. Il n’est pas permis, encore moins humain, de faire le jeu de la culture du déchet.
Il se pose toujours encore, avec force, cette question de Dieu à Caïn : « Où est ton frère ? » Je me demande si notre réponse continuera d'être : « Est-ce que je suis, moi, le gardien de mon frère ? » (Gn 4, 9).
Je vis à Rome ; durant l’hiver il fait froid. Il arrive que tout près du Vatican l’on trouve, le matin, une personne âgée morte de froid. Cela n’apparaît comme nouvelle dans aucun journal, dans aucune chronique. Un pauvre qui meurt de froid et de faim ne fait pas la nouvelle, mais si les bourses des principales capitales du monde baissent de deux ou trois points, on crée de toute pièce un grand scandale mondial. Et je me demande : où est ton frère ? Et je vous demande de vous poser, chacun, encore une fois cette question, de la poser à l’Université. Je demande à l’Université Catholique : où est ton frère ?
Dans ce contexte universitaire, il serait bon de nous interroger sur notre éducation face à cette terre qui crie vers le ciel.
Nos centres éducatifs sont une pépinière, une possibilité, une terre fertile à soigner, stimuler et protéger. Une terre fertile assoiffée de vie.
Je me pose des questions avec vous, éducateurs : veillez-vous sur vos étudiants, en les aidant à développer un esprit critique, un esprit libre, capable de protéger le monde d'aujourd'hui ? Un esprit capable de chercher de nouvelles réponses aux défis multiples que la société pose aujourd’hui à l’humanité ? Êtes-vous capables de les encourager à ne pas se désintéresser de la réalité qui les entoure, à ne pas se désintéresser de ce qui se passe aux alentours ? Êtes-vous capables de les encourager à cela ? Pour cela, il faut les sortir des salles de cours, leur esprit doit sortir des salles de cours, leur cœur doit sortir des salles de cours. Comment, dans le programme universitaire ou dans les divers domaines du travail éducatif, entre la vie qui nous entoure, avec ses questions, ses interrogations, ses questionnements ? Comment générons-nous et accompagnons-nous le débat constructeur, qui naît du dialogue en vue d'un monde plus humain ? Le dialogue, c’est une parole « pont », cette parole qui crée des ponts.
Et il y a une réflexion qui nous concerne tous : les familles, les centres éducatifs, les enseignants : comment aidons-nous nos jeunes à ne pas considérer un diplôme universitaire comme synonyme d’un statut supérieur, comme synonyme de plus d'argent ou de prestige social ? Ils ne sont pas synonymes. Comment aidons-nous à considérer cette préparation comme signe de plus grande responsabilité face aux problèmes de nos jours, face à la protection du plus pauvre, face à la sauvegarde de l’environnement ?
Et vous, chers jeunes qui êtes ici, présent et avenir de l'Équateur, vous êtes ceux qui doivent bouger. Avec vous, qui êtes semence de transformation de cette société, je voudrais me demander : savez-vous que ce temps d'étude, n'est pas seulement un droit mais aussi un privilège que vous avez ? Combien d'amis, de personnes connues ou inconnues voudraient avoir un espace en ce lieu et qui pour diverses circonstances ne l'ont pas eu ? Dans quelle mesure nos études nous aident-elles et nous amènent-elles à nous solidariser avec eux ? Posez-vous ces questions, chers jeunes.
Les communautés éducatives ont une tâche fondamentale, une tâche essentielle, dans la construction de la citoyenneté et de la culture. Attention, il ne suffit pas de réaliser des analyses, des descriptions de la réalité ; il est nécessaire de créer les domaines, les espaces de vraie recherche, de débats qui offrent des alternatives aux problématiques existantes, surtout aujourd'hui. Que c’est nécessaire d’être concret !
Face à la globalisation du paradigme technocratique qui tend à croire « que tout accroissement de puissance est en soi “progrès”, un degré plus haut de sécurité, d’utilité, de bien-être, de force vitale, de plénitude des valeurs, comme si la réalité, le bien et la vérité surgissaient spontanément du pouvoir technologique et économique » (Laudato si’, n°105), il nous est demandé d’urgence, aujourd’hui, à vous, à moi, à nous tous de nous résoudre à penser, à chercher à débattre sur notre situation actuelle. Et je dis que d’urgence, nous devons nous résoudre à penser quelle culture, quel genre de culture nous désirons ou voulons non seulement pour nous, mais aussi pour nos enfants et nos petits-enfants. Cette terre, nous l'avons reçue en héritage, comme un don, comme un cadeau. Qu’il nous ferait du bien de nous demander : comment voulons-nous la laisser ? Quelle orientation, quel sens voulons-nous imprimer à l'existence ? Pour quoi passons-nous par ce monde ? Pour quoi luttons-nous et travaillons-nous ? (cf. Laudato si’, n°160), pour quoi nous étudions ?
Les initiatives individuelles sont toujours bonnes et fondamentales, mais il nous est demandé de faire un pas de plus : nous résoudre à voir la réalité de façon organique et non fragmentaire ; nous résoudre à nous poser des questions qui nous incluent tous, puisque tout « est lié » (Laudato si’, n°138). Il n’y a pas de droit à l’exclusion.
Comme Université, comme centres éducatifs, comme enseignants et étudiants, la vie vous lance un défi pour répondre à ces deux questions : pour quoi cette terre a-t-elle besoin de nous ? Où est ton frère ?
Que l’Esprit Saint nous inspire et nous accompagne, puisqu'il nous a convoqués, nous a invités, nous a offert l'opportunité et, à son tour, la responsabilité de donner le meilleur de nous-mêmes. Il nous offre la force et la lumière dont nous avons besoin. C'est le même Esprit qui, le premier jour de la création, planait sur les eaux, voulant transformer, voulant donner vie. C'est le même Esprit qui a donné aux disciples la force de Pentecôte. C'est le même Esprit qui ne nous abandonne pas et se fait un avec nous pour que nous trouvions des chemins d’une nouvelle vie. Que ce soit lui, notre maître et compagnon de route ! Merci beaucoup.
© Libreria Editrice Vaticana - 2015
L’eugénisme médical aujourd’hui et demain [2]
par Jacques TESTART dans l’« Éternel retour de l’eugénisme »
Suite à l’autorisation du Conseil des ministres du 8 juillet d’inscrire le dépistage prénatal non invasif de la trisommie 21 à la nomenclature des actes de biologie médicale remboursable par la C.P.S., il nous est apparu important de conduire nos lecteurs à une réflexion de fond sur l’eugénisme moderne… dont cette décision est une illustration. Le texte ci-dessous est tiré de : Jacques Testart, dans l’éternel retour de l’eugénisme, J. Gayon et D. Jacobi Eds, PUF, 2006.
L’exemple de l’opposition à l’ICSI (Intracytoplasmic Sperm Injection) est intéressant puisqu’il montre qu’on peut aussi refuser une nouvelle technologie pour des motifs eugéniques. L’ICSI permet de réussir la fécondation, malgré la stérilité masculine, en injectant un gamète mâle directement dans l’ovule. Parmi les anomalies génétiques variées qui seraient liées à la stérilité masculine, certaines pourraient être à l’origine de pathologies graves chez l’enfant né de la procréation médicalisée. Ainsi des trisomies, par déséquilibre d’une anomalie paternelle bénigne (translocation chromosomique), ou de la mucoviscidose par cumul d’un gène muté paternel (mutation fréquente chez les hommes stériles) avec le même gène muté maternel. Ces accidents sont en général évitables grâce au bilan génétique du père et à un conseil génétique prénatal si nécessaire. À l’issue de plusieurs milliers de naissances après ICSI (en France, 5 000 enfants sont ainsi conçus chaque année), il apparaît que le risque d’induire des malformations est très faible, et on craint surtout la transmission de la stérilité paternelle (« stérilité héréditaire ») dans les cas où celle-ci a une composante génétique. Pourtant les commentaires alarmistes ne cessent pas et vont jusqu’à vanter les avantages de l’IAD avec un donneur de sperme dûment contrôlé plutôt que l’ICSI avec les gamètes souffreteux du conjoint stérile. Ce jugement est contraire aux lois de bioéthique qui prévoient justement que « la procréation avec tiers donneur ne peut être pratiquée que comme ultime indication lorsque la PMA à l’intérieur du couple ne peut aboutir ». Il fait aussi bon marché des problèmes spécifiques à l’IAD (frustration paternelle, enfant privé d’origine, dérive eugénique). La stérilité ne constitue plus une malédiction imparable et la stigmatisation de sa propagation pourrait s’étendre à d’infinies caractéristiques que chacun préférerait éviter : peut-on aussi prendre le risque d’aider la procréation de personnes atteintes de diabète, de myopie ou d’obésité, toutes ces affections ayant une composante génétique ? C’est en quoi la résistance à l’ICSI relève encore de l’idéologie eugénique. L’irruption de la technique d’ICSI permet de proposer une descendance à des hommes jusqu’ici considérés comme des « impasses génétiques », mais l’éventualité d’une transmission de la stérilité vient s’opposer à la conception moderniste de l’homme de qualité (Testart 1999). Une chose est d’informer honnêtement les couples sur ce qu’on croit savoir et ce qu’on sait ignorer quant aux risques de la PMA (Procréation médicalement assistée). Une autre chose est de les condamner à leur stérilité, ou de substituer au père un donneur de sperme médicalement calibré, deux solutions de remplacement également eugéniques. Remarquons que la stimulation hormonale pour aider la conception des femmes anovulatoires, développée depuis quarante ans, n’a jamais été critiquée, ni même suspectée d’un tel potentiel dysgénique, malgré l’origine génétique vraisemblable de certaines carences à ovuler. L’eugénisme, même scientifique, est décidément une idéologie dominante, celle du sexe dominant…
Le troisième exemple est celui du tri des embryons par diagnostic préimplantatoire (DPI). Il s’agit d’une nouvelle voie pour la sélection a priori des enfants, et cette innovation modifie radicalement la faisabilité et l’efficacité de l’eugénisme médical (Testart 1992). Rappelons que l’exclusion d’un « mauvais géniteur » hors du circuit procréatif (par stérilisation par exemple) n’a pas de véritable pouvoir eugénique tant la plupart des individus, même « tarés », sont capables de produire des gamètes de toutes les qualités génétiques. Les loteries génétiques successives qui caractérisent la fabrication de ces gamètes (ils sont innombrables mais tous différents entre eux), puis la rencontre sexuée (par la formation imprévisible de couples), et enfin la fécondation (par la fusion de tel spermatozoïde avec tel ovule) instituent le hasard, bien plus que la science eugénique, en décideur du génome d’un enfant. Il faut, de plus, compter avec les échanges de fragments chromosomiques, comme avec les mutations imprévisibles dans les gamètes ou l’embryon, pour imaginer toutes les incertitudes qui ruinent l’effort eugénique quand il porte sur les « géniteurs ». Fallait-il que les médecins qui ont créé et animé les « Sociétés d’Eugénique » du début du XIXe siècle soient obsédés par des lignées humaines « de qualité » pour s’illusionner eux-mêmes sur l’efficacité des pratiques qu’ils imposaient ? Finalement, le seul objet digne de l’eugénisme scientifique est le conceptus (l’œuf fécondé) puisque la constitution génétique de l’individu qu’il préfigure est juste acquise. La forme achevée du même conceptus, l’enfant, est heureusement intouchable selon la loi, et sa forme intermédiaire, le fœtus, est un piètre objectif eugénique, en comparaison avec l’œuf juste fécondé in vitro. La nouvelle fabrique du corps humain passera donc par l’embryon car il précède l’humanité à venir, et c’est seulement au stade de l’embryon que la manipulation de l’humain peut concilier les projets sanitaires ou économiques avec les progrès sociaux et les exigences éthiques. Résumons les avantages de l’action eugénique quand on la fait porter sur le jeune embryon : la fécondation in vitro (FIV) peut déjà proposer au DPI cinq à dix embryons en moyenne, à comparer avec un seul fœtus pour le diagnostic prénatal (DPN) ; ces embryons existent hors du corps maternel, ce qui rend inutile l’interruption médicale de grossesse (IMG) si on souhaite les éliminer ; et leur production peut être répétée plusieurs fois par an alors qu’une seule grossesse annuelle est accessible au DPN. Ainsi le DPI peut conduire à l’exclusion indolore d’enfants potentiels nombreux grâce au contrôle annuel de dizaines de conceptus (plusieurs cycles de FIV-DPI sont possibles chaque année), bien plus nombreux que les fœtus qu’on pourrait soumettre au DPN au cours d’une vie entière. Ces avantages en font une alternative eugénique beaucoup plus efficace que le DPN couplé à l’IMG, et donc l’occasion d’une plus grande sévérité dans l’appréciation de la « normalité » (Testart et Sèle 1996). Admettre que le DPI, encore quasi expérimental, ne pourra pas améliorer son efficacité et son coût actuels, ou que les épreuves inhérentes à la FIV en ferait pour longtemps un barrage au DPI, c’est ne pas reconnaître des progrès à venir en PMA comme en génétique diagnostique (Testart 1992, 2004b). Des travaux, réalisés surtout chez l’animal, montrent qu’une unique et bénigne intervention sur le corps féminin pourrait permettre de prélever et de conserver par congélation un petit échantillon ovarien, détenteur potentiel de centaines d’ovules encore immatures. Alors, c’est en dehors de tout traitement hormonal de la femme, et de toute nouvelle intervention sur son corps, que les ovocytes conservés (éventuellement pendant des dizaines d’années) seraient amenés à maturité au moment voulu, puis fécondés au laboratoire, avant que les très nombreux embryons obtenus soient tous soumis au DPI. L’abondance des embryons et la disponibilité de sondes (« puces à ADN ») peu coûteuses devraient conduire à identifier d’innombrables caractéristiques génétiques. Seul le « meilleur » embryon selon ces critères serait transformé en enfant, éventuellement à l’issue d’un clonage de blastomères afin de multiplier ses chances de développement par la création de plusieurs vrais jumeaux de l’embryon élu.
Le DPI est ainsi capable de réaliser simultanément les deux fonctions historiques de l’eugénisme : positif (par élection des meilleurs embryons) et négatif (par élimination des autres) puisqu’il intervient sur une population. Il a déjà conduit à éviter la naissance d’enfants dont les caractéristiques ne justifient pas officiellement l’IMG (incompatibilité rhésus, vecteurs d’hémophilie, hétérozygotes pour une maladie récessive, etc.) et a commencé à être appliqué, au-delà des maladies monogéniques, à des affections polygéniques c’est-à-dire à des facteurs de risque (cancer colorectal, cancer du sein). Or de telles affections ne sont pas automatiquement associées à la présence du gène « délétère » ; leur apparition dépend d’autres facteurs génétiques et aussi des conditions environnementales. C’est dire que le DPI est théoriquement en charge de tout ce qui implique l’identité génomique dans les traits particuliers à chacun et donc de la condition mortelle que nous partageons tous. Alors, son champ d’intervention devrait être progressivement élargi et précisé par la connaissance complète du génome humain (Testart 1995). Jacques Cohen, pionnier américain de la procréation assistée et responsable d’un laboratoire de pointe à New York, semble avoir bien compris que le DPI, ainsi optimisé, va devenir le moyen privilégié pour trier l’humanité dans l’œuf. Mais c’est pour s’en réjouir, puisqu’il écrit que cette technique va heureusement permettre « de détecter n’importe quelle caractéristique génétique telle que la taille, la calvitie, l’obésité, la couleur des cheveux ou de la peau ou même le quotient intellectuel… » (Brenner et Cohen 2000).
Récemment, l’« accueil d’embryon » (appellation officielle de l’adoption d’embryons surnuméraires) par certains couples stériles a commencé à se mettre en place, et les préoccupations eugéniques révélées dans les exemples ci-dessus ont refait surface (Testart, 2004a). Certains praticiens ont proposé d’identifier les embryons à risque potentiel (parce qu’issus de couples « à risque ») pour les réserver à certains couples d’accueil, ces derniers bénéficiant alors d’une procédure plus rapide. Cette proposition correspond à un eugénisme à deux vitesses, propice à la gestion d’une liste d’attente mais susceptible de dérives : l’attribution des embryons de deuxième catégorie pourrait vite s’enrichir d’appréciations biologiques sur le couple d’accueil, au-delà de l’impatience qu’il manifesterait. D’autres praticiens appartenant aux Cecos (banques de sperme) ont proposé d’exclure de l’accueil (et donc d’éliminer) certains embryons en fonction de caractères génétiques supposés défavorables et attribués à leurs géniteurs. On notera que ces mêmes critères ne conduisent pas au refus de la PMA [Depuis 1994 (loi de bioétique) on dit AMP intraconjugale]. De plus, une telle mesure donne à croire qu’il existerait des êtres humains exempts de risque biologique (mythe de « l’enfant parfait ») et tracerait une frontière nécessairement arbitraire entre embryons sains et embryons à risque. Surtout, les mêmes praticiens ont proposé des règles d’appariement embryon-couple d’accueil largement inspirées de celles qu’ils ont su imposer pour l’IAD. Ces règles concernent des critères non pathologiques (origine ethnique, morphotype, groupe sanguin, etc.) aussi bien que des facteurs de risque (âge des géniteurs, arbre généalogique sur trois générations, etc.). Outre qu’il semble illégitime, pour l’accueil d’un embryon, d’aller au-delà des principes qui régissent l’adoption d’un enfant, il est clair que la logique sous-tendue par ces mesures serait de pratiquer le DPI sur tous les embryons surnuméraires. Ceci permettrait d’éliminer de la procédure d’accueil les embryons démontrés à risque génétique, une démarche plus « scientifique » que la suspicion à partir des conditions parentales… Il semble que les praticiens espèrent, grâce à de telles mesures eugéniques, se préserver de poursuites judiciaires ultérieures pour mauvaise pratique. Pourtant, l’inflation des diagnostics risque d’être l’occasion de confusions médicales et juridiques, et c’est plutôt la prescription prétendument savante de règles d’exclusion et d’appariement qui expose les patients à l’illusion sécuritaire et les praticiens à des poursuites pour malfaçon.
[à suivre]
© Jacques Testard Free - 2006
IVG : le planning familial américain reconnaît vendre des organes de fœtus
Dérive éthique !
Une responsable du planning familial américain, piégée en caméra cachée, s'est vantée de pouvoir fournir à la demande des organes de fœtus issus d'avortements tardifs.
C’est une des révélations d’une vidéo dévoilée sur YouTube le 14 juillet, la première d’une série, et qui est en train de susciter l’émotion, aux USA et dans le monde entier. Au bout de trois ans d’enquête, le Center for Medical Progress dévoile les pratiques réelles de la Planned Parenthood Federation (PP), équivalent américain du planning familial.
Des méthodes illégales et amorales
Cette vidéo, filmée en caméra cachée lors d’un repas d’affaires, est hélas éloquente : on y voit Deborah Nucatola, directrice des services médicaux, détailler la revente de « pièces » d’embryons humains, non pas incinérés tels des « déchets médicaux », mais bel et bien revendus comme des organes humains. Un trafic d'organes de fœtus issus d'avortements tardifs, ni plus ni moins. Dans cette vidéo, le Dr Deborah Nucatola décrit en détail comment le Planned Parenthood vend des parties du corps de fœtus avortés et reconnaît avoir recours à l’avortement par naissance partielle, pour mieux récupérer des organes et des corps intacts, et ainsi être en mesure de répondre à la demande. Sa description de ses actes médicaux glace le sang : « Nous sommes très bons pour récupérer le cœur, les poumons, les reins intacts », explique-t-elle. La procédure décrite, de guidage par ultra-son pour manipuler le fœtus, est par ailleurs considérée comme illégale aux États-Unis.
Consciente des risques juridiques
La vidéo révèle également que le planning familial est conscient des risques juridiques encourus pour le fait de revendre des organes de fœtus avortés. « Mais je peux vous dire qu’une fois les portes closes, on en parle avec nos affiliés. » La vidéo détaille également le prix d’achat de ces organes, 30 à 100 dollars le « spécimen », bien que la vente et l’achat de tissus fœtaux humains soit un crime fédéral punissable de dix ans de prison et d’un demi million de dollars d’amende. À cela s’ajoute l’homicide que constitue le fait de tuer les bébés « intacts » ayant survécu à ces avortement très spéciaux.
Pour le responsable du projet « capital humain » du Center for Medical Progress, « la conspiration criminelle du Planned Parenthood pour faire de l’argent avec des morceaux de bébés avortés va jusqu’au plus haut niveau de cette organisation. Les élus doivent faire que le planning rende compte devant la loi afin qu’il soit mis fin à ce business barbare de l’avortement ».
De simples « dons de tissus »
Dans un communiqué, le vice-président en charge de la communication du planning familial américain a mis quelques heures à réagir à la parution de cette vidéo, jouant sur les mots : « Dans le domaine de la santé, parfois, les patients veulent donner des tissus pour la recherche scientifique pour aider à faire avancer la recherche, les soins, les traitements. Les femmes qui avortent au planning familial ne sont pas différentes. (…) Aucun bénéfice n’est réalisé lors de ces dons de tissus (d’embryons, ndlr). Parfois, certains coûts, comme celui de transporter les tissus vers les meilleurs centres de recherche, sont remboursés ». L’argument est paradoxal : d’une part, il n’y a pas vente mais un don, d’autre part, ce ne sont que des « tissus », pourtant explicitement décrits par le Dr Nucatola, qui précise que « les cliniques du PP peuvent fournir des organes destinés à répondre à une demande spécifique, et réaliser la vente », allant même jusqu’à parler de « menu » !
Une enquête ouverte en Louisiane
Suite à ces révélations, le gouverneur de Louisiane, Bobby Jindal, a déjà réagi. Dans un communiqué diffusé par e-mail, il annonce l’ouverture d’une enquête à l’encontre du planning familial, « après que des rapports ont fait surface, affirmant que certains affiliés se servaient d’avortements partiels pour vendre des morceaux de fœtus ». Pour le gouverneur Jindal, « cette vidéo d’un officiel du planning familial parlant d’un système de trafic de parties de corps humains est choquante et horrible. La même organisation veut ouvrir un centre d’IVG à la Nouvelle Orléans. J’ai demandé une enquête immédiate sur cette activité mauvaise et illégale, et qu’aucune licence ne leur soit accordée tant que l’enquête ne sera pas close. Je demande aussi au FBI d’assister le Département de la santé et des hôpitaux pour enquêter sur les activités criminelles reprochées à cette organisation ». Une enquête et une réaction officielles qui vont sans doute faire entrer de plain-pied la question de l’IVG et de ses dérives dans la campagne des élections présidentielles américaines.
© Aleteia - 2015
Pourquoi un catholique ne peut-il pratiquer le spiritisme
présenté par le Père Bonaventure KLOPPENBUR, o.f.m.
Voici 21 raisons fondamentales pour lesquelles les croyances des spirites sont incompatibles avec la foi catholique romaine.
Chaque religion possède ses dogmes, ses articles de foi. Si deux religions avaient les mêmes pensées et les mêmes dogmes, elles ne seraient pas deux, mais une seule religion. Une seule et même personne ne peut donc appartenir à deux religions, car elle ne pratiquera honnêtement ni l'une ni l'autre. Ainsi, le catholique ne peut pas être spirite parce que :
1. Le catholique admet la possibilité du mystère et accepte les vérités à condition qu'elles soient révélées par Dieu, de façon certaine. Le spirite proclame qu'il n'y a pas de mystères et que tout ce que l'esprit humain ne peut pas comprendre est faux et doit être rejeté.
2. Le catholique instruit croit que Dieu peut faire et fait des miracles. Le spirite rejette la possibilité de miracles et enseigne que Dieu, Lui aussi, doit obéir aux lois de la nature.
3. Le catholique croit que la Bible a été inspirée par Dieu, et donc qu'elle ne peut pas contenir d'erreurs en matière de foi et de morale. Le spirite déclare que la Bible est remplie d'erreurs et de contradictions et qu'elle n'a jamais été inspirée par Dieu.
4. Le catholique croit que Jésus a envoyé l'Esprit Saint aux apôtres et à leurs successeurs afin qu'ils puissent transmettre fidèlement la doctrine de l'Église. Le spirite déclare que les apôtres et leurs successeurs n'ont pas compris les enseignements du Christ et que tout ce qu'ils ont transmis est erroné ou a été falsifié.
5. Le catholique croit que le Pape, successeur de saint Pierre, est infaillible en matière de foi et de morale. Le spirite déclare que les Papes n'ont fait que répandre l'erreur et l'incrédulité.
6. Le catholique croit que Jésus a institué l'Église afin qu'elle poursuive Son œuvre. Le spirite déclare que, jusqu'à la venue d'Allan Kardec (le père de spiritisme en France), l'œuvre du Christ était inutilisée et perdue.
7. Le catholique croit que Jésus a enseigné la totalité de la Révélation et qu'il ne reste plus rien à révéler. Le spirite proclame que le spiritisme est la troisième révélation, destinée à rectifier et même à remplacer l'Évangile du Christ.
8. Le catholique croit dans le mystère de la Très Sainte Trinité. Le spirite nie cet auguste mystère.
9. Le catholique croit que Dieu est Créateur de tout, un Être unique, distinct du monde. Le spirite affirme que les hommes sont des particules de Dieu (véritable panthéisme).
10. Le catholique croit que Dieu a créé l'âme humaine au moment de son union avec le corps. Le spirite affirme que notre âme est le fruit d'une lente et longue évolution, ayant passé par le règne animal, végétal et animal.
11. Le catholique croit que l'homme est composé d'un corps réel et d'une âme. Le spirite affirme qu'il est composé du périsprit et de l'âme, le corps n'étant qu'une enveloppe temporaire, « un alambic pour purifier l'esprit ».
12. Le catholique obéit à Dieu qui interdit strictement l'invocation des morts. Le spirite fait de cette invocation une nouvelle religion.
13. Le catholique croit en l'existence des anges et des démons. Le spirite affirme qu'il n'y a pas d'anges, mais des esprits évolués et qu'ils étaient des hommes ; les démons n'existent pas, mais seulement des esprits imparfaits qui n'ont pas atteint la perfection.
14. Le catholique croit que Jésus-Christ est vraiment le Fils Unique de Dieu, seconde Personne de la Sainte Trinité. Le spirite nie cette vérité fondamentale de la foi chrétienne et affirme que le Christ est seulement un grand médium, rien de plus.
15. Le catholique croit aussi que Jésus est vrai homme, doté d'un corps et d'une âme. Les spirites, pour la plupart, affirment que le Christ avait seulement un corps apparent ou fluidique.
16. Le catholique croit que Marie est la Mère de Dieu, qu'elle est Immaculée et qu'elle est montée au Ciel. Le spirite le nie et se moque de tous les privilèges de Marie.
17. Le catholique croit que Jésus est venu pour nous sauver, par sa Passion et sa Mort. Le spirite affirme que Jésus n'est pas notre Rédempteur, mais qu'Il est venu pour nous enseigner quelques vérités, de manière obscure, et que chaque personne a besoin de se racheter elle-même.
18. Le catholique croit que Dieu peut pardonner le pécheur repenti. Le spirite affirme que Dieu ne peut pas pardonner les péchés sans une expiation et une réparation rigoureuse faite par le pécheur lui-même, toujours lors de nouvelles réincarnations.
19. Le catholique croit dans les sept Sacrements et dans la grâce propre à chacun d'eux. Le spirite n'accepte aucun sacrement, ni même la puissance de la grâce sanctifiante.
20. Le catholique croit que l'homme ne vit qu'une fois sur la Terre et que de cette existence unique dépend la Vie éternelle. Le spirite affirme que les gens naissent, vivent, meurent et renaissent, et évoluent continuellement (réincarnation).
21. Le catholique croit que, après cette vie, existe le Ciel ou l'Enfer. Le spirite le nie, car il croit à de nouvelles réincarnations.
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Méditation sur la Parole
Cinq pains d’orge et deux poissons
Pendant cinq des dimanches d’été, nous interrompons la lecture de l’évangile de saint Marc, pour lire le fameux chapitre six de saint Jean. Il s’agit d’un long récit qui commence par la « multiplication des pains », et qui se poursuit avec le « discours sur le Pain de Vie ». Reprenant les paroles de Jésus, S. Jean nous offre, dans ce chapitre, une méditation sur le partage et sur l’Eucharistie.
Le pain, nécessaire pour vivre, a toujours été au centre du message du Christ. C’est pourquoi il l’a inclus dans la prière du Notre Père : « Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour ». Le Christ savait que l’être humain a d’abord besoin de manger et de boire avant tout autre chose. Bien sûr, nous ne vivons pas seulement de pain mais aussi d’amour, d’amitié, de paix et d’harmonie, mais, sans le pain de chaque jour, il est impossible d’apprécier les autres bonnes choses de la vie. Dans le texte de ce matin, le Christ nourrit une foule de gens affamés et nous invite à réfléchir sur la faim dans le monde : « Où nous procurerons-nous le pain nécessaire pour nourrir tous ces gens ? »
En tant que Juif de Palestine, Jésus a été élevé dans une culture et une religion qui apprécient toutes nourritures. Ils y voient un don de Dieu. Les Juifs considèrent la nourriture comme une chose sacrée et ils font toujours une prière de remerciement avant de manger. En Palestine au temps de Jésus, la nourriture n’était pas très abondante et la famine menaçait continuellement. Rien n’a beaucoup changé dans notre monde d’aujourd’hui. On a l’impression que le problème de malnutrition et de famine s’est accentué. En 1900, la population mondiale était de 1,6 milliard. Nous atteignons maintenant 7 milliards ! La faim tue chaque année des millions de personnes, plus que le SIDA, la malaria et toutes les autres maladies infectieuses réunies.
Les famines se multiplient dans des douzaines de pays, même si nous cultivons assez de nourriture dans le monde pour permettre à chaque homme, femme et enfant de recevoir les 3000 calories nécessaires à la survie. Les gens meurent de faim, non pas parce qu’il n’y a pas assez de nourriture, mais à cause d’une distribution injuste. Il y a peu de temps, le canal de télévision CNN affirmait que 2 % de la population possèdent actuellement 50 % des revenus et un quart de l’humanité accapare les trois quarts des ressources de notre planète.
Les pays riches sont plus intéressés à vendre des armes aux pays pauvres, que de les aider à sortir de leur sous-développement et de leur misère. Avec ce que coûte un porte-avions, on pourrait acheter 3 mille tonnes de grain. Et pour le prix d’un bombardier, on pourrait construire trente écoles ! Les États-Unis dépensent mensuellement 4 milliards pour maintenir leurs troupes en Irak ! Sans compter les millions que d’autres pays impliqués dans le conflit ajoutent à ces dépenses exorbitantes.
Le président Eisenhower a observé de façon très juste que « chaque fusil qui est fabriqué, chaque navire de guerre qui est construit, chaque missile lancé est en définitive une fraude et un vol perpétré à l’endroit de ceux et celles qui ont faim et ne sont pas nourris, à l’endroit de ceux et celles qui ont froid et n’ont pas de vêtements pour se vêtir. » Le Général Eisenhower, homme de guerre, savait de quoi il parlait.
Imaginez ce que pourrait être notre monde si les montagnes d’argent dépensées en armements, en fraude, en jeux de hasard, en alcool, en drogue, étaient mises au profit de ceux et celles qui sont dans le besoin, si l’on utilisait cet argent pour l’irrigation des déserts, l’éducation, la recherche médicale, l’édification de digues, la lutte contre la faim dans le monde.
Devant les énormes problèmes de manque de nourriture, nous nous sentons totalement impuissants. Le Christ demande à Philippe : « Où pouvons-nous acheter du pain pour que tous ces gens puissent manger ? » Et Philippe de répondre : « Le salaire de huit mois de travail ne suffirait pas pour que chacun ait un peu à manger. » Ce qui veut dire : « Nous ne pouvons rien faire. Le problème est trop grand pour nos moyens très restreints ». C’est alors que l’un des disciples ajoute : « Il y a ici un jeune garçon qui a cinq petits pains d’orge et deux poissons. Mais cela n’est rien pour combler les besoins d’une telle foule ».
Cinq pains d’orge (le pain des pauvres) et deux poissons ! La multiplication des pains par le Christ a été possible grâce à la générosité de ce jeune garçon. Certains exégètes ajoutent : c’est sans doute grâce à cette générosité que d’autres personnes présentes décidèrent eux aussi de partager le peu qu’ils avaient… Et il y en eut pour tout le monde, il y eut même des restes. Souvent nous faisons cette même expérience lors d’un pique-nique. Chacun partage ce qu’il a apporté et à la fin il y a des restes.
Combien de personnes disent : « J’aimerais bien aider mais je n’ai pas d’expérience, pas d’habilité dans ce domaine. Tant d’autres personnes peuvent le faire mieux que moi. Je cède la place à des gens plus experts ! » Plusieurs, sous prétexte qu’ils n’ont pas assez d’éducation, d’expérience, de connaissance, de moyens financiers, ne font rien. Jésus nous dit aujourd’hui : « Apportez vos cinq petit pains d’orge et vos deux poissons, et voyez ce qu’on peut en faire ».
Lorsqu’il y a des besoins, nous ne pouvons résoudre le problème seul. Mais avec Dieu et avec les autres, nous pouvons améliorer la situation. Le Seigneur a besoin de notre contribution, si petite soit-elle. Dieu ne fait pas de miracle à partir de rien, il les fait à partir des cinq petits pains d’orge et des deux poissons.
Dieu a besoin de S. Vincent de Paul, de Mère Térésa, des Alcooliques Anonymes, de la Croix Rouge, de la Popote roulante, de Centre-Aide, de l’Armée du Salut, de ceux et celles qui visitent les malades, de ceux et celles qui donnent un peu d’argent pour aider les victimes de catastrophes naturelles et de guerres de toutes sortes.
Essayons, comme nous le demande Paul dans la 2e lecture, de « mener une vie digne de l’appel que nous avons reçu. » Soyons généreux, partageons notre temps, nos talents, notre argent. C’est ainsi que nous pourrons ensemble améliorer un peu les problèmes de notre monde.
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