PKO 2 novembre 2014

Dimanche 2 novembre 2014 – Commémoration des fidèles défunts – Année A
Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°57/2014

HUMEURS

Denier du culte à la Cathédrale

Tenari 2014 2015 

La Campagne du denier du culte commence à la Cathédrale cette semaine et se terminera le dimanche 30 novembre 2014.

L’Archevêché a établi, depuis plusieurs années, la règle des 2/3 – 1/3, ce qui veut dire qu’un tiers du Denier du culte collecté dans la paroisse  est ensuite reversé à la paroisse.

Actuellement, ces 2/3 du denier du culte au profit de l’Archidiocèse ne suffisent plus à couvrir son  budget annuel…

Notre paroisse informée de cela, et après consultation du C.A.E. (Conseil des Affaires Économique) et du C.P.P. (Conseil Pastoral Paroissial) de la Cathédrale ; a pris la décision, de façon unilatérale, d’abandonner son droit aux 1/3 du denier afin de laisser l’intégralité de la collecte faite à la Cathédrale à l’Archidiocèse… espérant que, jumelé aux efforts pour la de diminution des dépenses, cela permettra à l’Archidiocèse d’obtenir un équilibre de ses finances…

Nous comptons sur votre grande générosité…

Rappel pour 2013

Votre généreuse participation, l’année dernière, au Denier du culte à la Cathédrale, avait permis d’atteindre la somme de 3 070 243 xfp.

 

EN MARGE DE L’ACTUALITÉ

Mort visible et mort invisible

La mort omniprésente et la mort invisible. Notre société contemporaine occidentale produit un bien étrange paradoxe : la mort – violente de préférence – hante nos journées, à chaque séquence d’information (des guerres du Proche-Orient au virus Ebola, en passant par les faits divers sanglants) ou dans les fictions – voire les jeux – qui ne lésinent jamais sur les issues spectaculairement fatales. Un adolescent peut ainsi être le spectateur blasé de multiples morts virtuelles, sur les nombreux écrans qui accompagnent ses journées, et n’avoir jamais vécu la mort d’un proche, vu son corps, ni même participé à une cérémonie d’enterrement.

La mort réelle, semble-t-il, doit être niée, combattue, rejetée comme une issue inacceptable. Les débats autour de l’euthanasie accentuent cette impression ; ils permettent certes de poser des questions fondamentales sur l’accompagnement des mourants, de réfléchir à leurs besoins et à leurs désirs, mais présentent la mort comme un ­ « problème » à régler ; elle serait, à tout coup, « indigne » ; il faudrait dès lors l’accélérer, comme pour mieux l’escamoter. Dans un étrange mouvement parallèle, on se met à imaginer – certains y travaillant dans leurs laboratoires – des progrès scientifiques permettant de retarder le vieillissement, de prolonger la vie. Jusqu’à tuer la mort ?

Oui, la mort est scandale. Un jeune manifestant dans le Tarn, un soldat au Mali, un père, un enfant… Tout deuil est une souffrance, un arrachement. En cette année anniversaire de la Première Guerre mondiale, comment ne pas – au fil des commémorations – mesurer l’horreur d’une jeunesse brutalement fauchée ? Mais elle est aussi une étape inéluctable dans le cours d’une vie. Un moment à ne pas brader, à ne pas gâcher, qui doit être pleinement vécu, par ceux qui croient au Ciel et ceux qui n’y croient pas, ou ne savent pas que croire. Mais on meurt trop mal en France. Trop souvent dans la solitude et à l’hôpital. Dans les souffrances, encore, alors que des solutions palliatives existent. Trop mal, souvent, pour nous donner la force d’apprivoiser la mort.

Dominique Quinio – La Croix

 

Le plus important est ce qui ne se voit pas

Audience générale du mercredi 29 octobre 2014 – pape François

L’Église est « un mystère de foi, dans lequel ce qui ne se voit pas est plus important que ce qui se voit », déclare le pape François de la catéchèse de ce 29 octobre 2014. Le pape a poursuivi ses catéchèses sur l'Église, méditant sur la réalité visible de l'Église, réalité qui « ne peut être mesurée ; tout le bien que Dieu opère à travers nous et dans les cœurs, va au-delà de notre contrôle et de ce qui peut être connu ».

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans les précédentes catéchèses, nous avons eu l’occasion de mettre en évidence la nature spirituelle de l’Église : c’est le corps du Christ, édifié dans l’Esprit Saint. Pourtant, lorsque nous faisons référence à l’Église, notre pensée va immédiatement à nos communautés, à nos paroisses, à nos diocèses, aux structures dans lesquelles nous sommes habitués à nous retrouver et, évidemment, à la composante et aux figures plus institutionnelles qui la soutiennent, qui la gouvernent. C’est la réalité visible de l’Église. Nous devons alors nous demander : s’agit-il de deux choses différentes ou d’une unique Église ? Et, toujours s’il s’agit d’une unique Église, comment pouvons-nous comprendre le rapport entre sa réalité visible et celle spirituelle ?

Tout d’abord, lorsque nous parlons de la réalité visible de l’Église, nous ne devons pas seulement penser au Pape, aux évêques, aux prêtres, aux sœurs et à toutes les personnes consacrées. La réalité visible de l’Église est constituée de tant de frères et de sœurs baptisés qui, dans le monde, croient, espèrent et aiment. Mais souvent, nous entendons dire : « Mais l’Église ne fait pas ceci, l’Église ne fait pas cela… » - « Mais, dis-moi, qui est l’Église ? » - « Ce sont les prêtres, les évêques, le Pape… » L’Église est constituée de nous tous ! Tous les baptisés représentent l’Église, l’Église de Jésus. Tous ceux qui suivent le Seigneur Jésus et qui, en son nom, se font proches des derniers et des souffrants, cherchant à offrir un peu de soulagement, de réconfort et de paix. Tous ceux qui font ce que le Seigneur nous a commandé forment l’Église.

Nous comprenons, alors, que la réalité visible de l’Église n’est pas mesurable et n’est pas connaissable dans toute sa plénitude : comment fait-on pour connaître tout le bien qui est fait ? Tant d’œuvres d’amour, tant de fidélité dans les familles, tant de travail pour éduquer les enfants, pour transmettre la foi, tant de souffrance dans les malades qui offrent leurs souffrances au Seigneur. Mais c’est immense et ce n’est pas mesurable !  Comment fait-on pour connaître toutes les merveilles que le Seigneur réussit à opérer, à travers nous, dans le cœur et dans la vie de chaque personne ? Voyez : même la réalité visible de l’Église va au-delà de notre contrôle, au-delà de nos forces et c’est une réalité mystérieuse parce qu’elle vient de Dieu.

Pour comprendre le rapport, dans l’Église, entre sa réalité visible et celle spirituelle, il n’y a pas d’autres voies que celle de regarder le Christ, dont l’Église constitue le corps et par qui elle est générée dans un acte d’amour infini. En effet, même dans le Christ, dans la force du mystère de l’Incarnation, nous reconnaissons une nature humaine et une nature divine, unies dans la même personne de façon admirable et indissoluble. Cela vaut de façon analogue pour l’Église. Et comme dans le Christ, la nature humaine favorise pleinement celle divine et se met à son service, en fonction de l’accomplissement du salut, il en advient de même dans l’Église, pour sa réalité visible, par rapport à celle spirituelle. L’Église est donc aussi un mystère dans lequel ce qui ne se voit pas est plus important de ce qui se voit et peut être reconnu seulement avec les yeux de la foi (cf. Const. dogm. sur l’Église Lumen gentium, 8).

Pourtant, dans le cas de l’Église, nous devons nous demander : comment la réalité visible peut se mettre au service de celle spirituelle ? Encore une fois, nous pouvons le comprendre en regardant le Christ. Le Christ est le modèle de l’Église parce que l’Église est son corps. C’est le modèle de tous les chrétiens, de nous tous. Lorsqu’on regarde le Christ, on ne se trompe pas. Dans l’Évangile selon Saint Luc, on raconte comment Jésus, rentré à Nazareth, où il avait grandi, entra dans la synagogue et lu, se référant à lui-même, le passage du prophète Isaïe où il est écrit : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce qu’il m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu’ils sont libres et aux aveugles qu’ils verront la lumière, apporter aux opprimés la libération, annoncer une année de bienfaits accordée par le Seigneur ».(4,18-19) 

Voilà comment le Christ s’est servi de son humanité - parce qu’il était aussi homme - pour annoncer et réaliser le dessein divin de rédemption et de salut - parce que c’était Dieu -, et il doit en être de même pour l’Église. À travers sa réalité visible, de tout ce qu’on voit, les sacrements et le témoignage de tous les chrétiens, l’Église est appelée tous les jours à se faire proche de chaque homme, à commencer par celui qui est pauvre, celui qui souffre et celui qui est marginalisé, de façon à continuer à faire éprouver à tous le regard de compassion et de miséricorde de Jésus.

Chers frères et sœurs, comme Église, nous faisons l’expérience de notre fragilité et de nos limites. Nous en avons tous. Nous sommes tous des pécheurs. Personne d’entre nous peut dire : « je ne suis pas un pécheur ». Mais si quelqu’un d’entre nous se sent comme s’il n’était pas pécheur, qu’il lève la main. Nous le sommes tous. Et cette fragilité, ces limites, ces péchés, il est juste qu’ils procurent en nous une peine profonde, surtout lorsque nous devons donner le mauvais exemple et nous nous rendons compte que nous devenons un objet de scandale. Combien de fois n’avons-nous pas entendu, dans le quartier, « cette personne va toujours à l’Église mais parle mal de tout le monde » : ce n’est pas être chrétien, c’est un mauvais exemple, c’est un péché. Notre témoignage est celui de faire comprendre ce que signifie être chrétien. Nous demandons de ne pas faire l’objet de scandale. Nous demandons le don de la foi afin que nous puissions comprendre comment, nonobstant notre insuffisance et notre pauvreté, le Seigneur nous a vraiment rendu un instrument de grâce et un signe visible de son amour pour toute l’humanité. Nous pouvons faire l’objet d’un scandale, oui. Mais nous pouvons aussi faire l’objet d’un témoignage, tout en affirmant avec notre vie, ce que Jésus veut de nous.

© Copyright 2014 – Libreria Editrice Vaticana 

Etre aux côtés des pauvres, c’est l’Évangile, pas le communisme

Discours du pape François aux Mouvements populaires – 28 octobre 2014

Le Pape François a accueilli ce mardi au Vatican les participants à la Rencontre mondiale des Mouvements populaires organisée en ce début de semaine par le Conseil pontifical Justice et Paix, en collaboration avec l’Académie pontificale des Sciences Sociales. Paysans sans terre, vendeurs ambulants, mineurs, chômeurs, migrants, marginaux, locataires de bidonvilles, jeunes en situation de précarité, mais aussi évêques et agents de la pastorale étaient venus l’écouter et c’est un discours long et puissant que le Saint-Père leur a adressé, s’exprimant avec passion, en espagnol, sa langue maternelle, alternant l’espérance à la dénonciation.

Être aux côtés des pauvres, c’est l’Évangile, ce n’est pas le communisme, a-t-il lancé. Pour l’évêque de Rome, il y a trois dossiers prioritaires : la terre, le logement et l’emploi. Il est d’autre part urgent de revitaliser les démocraties prises en otage par de nombreux facteurs, de vaincre la faim et la guerre et de garantir la dignité de tous les êtres humains, surtout des plus pauvres et des marginaux. Fidèle à lui-même et à son engagement de toujours, le Pape François a souligné que la solidarité était aujourd’hui confrontée aux effets destructeurs de l’empire de l’argent. Ce n’est pas en apprivoisant les pauvres et en les rendant passifs et inoffensifs qu’on luttera contre le scandale de la pauvreté, a-t-il tonné s’insurgeant contre des stratégies hypocrites.

« L'amour des pauvres est au cœur de l’Évangile »

Terre, toit et travail. Le Pape François s’est demandé pourquoi quand il évoque ces questions, certains le prennent pour un communiste. Ils ne comprennent pas que l’amour des pauvres est au cœur de l’Évangile, que ces droits sacrés sont au cœur de la doctrine sociale de l’Église. Et de faire la liste des injustices qui blessent le monde : les paysans déracinés à cause des guerres et des catastrophes naturelles ; les millions de personnes qui souffrent de la faim alors que la spéculation financière fixe le prix des denrées alimentaires, comme s’il s’agissait d’une marchandise parmi d’autres ; ceux qui n’ont pas de logement dans les villes immenses, modernes, fières et orgueilleuses, où fleurissent les centres commerciaux, mais où une partie de la population est abandonnée dans les périphéries.

Ces derniers, a-t-il noté avec amertume, on les désigne par un euphémisme « sans domicile fixe » ; or souvent, les euphémismes cachent des délits. Mais la pire des pauvretés matérielles c’est le manque de travail. Les millions de jeunes chômeurs sont les victimes d’un système économique qui place le profit au-dessus des personnes, qui exploite la nature pour soutenir une consommation frénétique, qui doit parfois déclencher une guerre pour survivre.

« Le monde a oublié Dieu »

Que de souffrance, de destruction, de douleur partout. Le monde a oublié Dieu et s’est retrouvé orphelin. Le Pape François veut accompagner la lutte des mouvements populaires. Il faut, selon lui, construire des structures sociales qui proposent une alternative, promouvoir la culture de la rencontre contre les discriminations, favoriser la participation de toute la population, surmonter l’assistanat paternaliste. Il faut le faire avec courage, mais sans fanatisme, avec passion, mais sans violence. Les chrétiens peuvent s'appuyer sur le programme des béatitudes. Le Souverain pontife a confirmé qu’il préparait un Encyclique sur l’Écologie. Les préoccupations des mouvements populaires y seront présentes, a-t-il assuré.

Et pour conclure cet appel : Qu’il n’y ait plus de familles sans toit, plus de paysans sans terre, plus de travailleurs sans droits, plus aucune personne privée de la dignité que confère le travail.

L’objectif de cette rencontre est de renforcer le réseau des organisations populaires, de favoriser la connaissance réciproque et de promouvoir la collaboration entre ces mouvements et les Eglises locales. Des évêques et des agents de la pastorale engagés dans la promotion et la protection des droits humains y participent. Dans un monde globalisé, marqué par de multiples discriminations et injustices, a expliqué le cardinal Turkson, président du Conseil pontifical Justice et Paix, les congressistes, veulent faire entendre la voix des sans-voix et donner de la visibilité à des millions d’exclus et de marginaux, en particulier les paysans, les jeunes, les immigrés et les femmes qui ont du mal à obtenir un travail digne, une terre ou un logement décent, et à toutes les victimes de l’indifférence et de l’égoïsme d’un système économique et social élitiste. Ils veulent construire une société plus juste et solidaire.

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L’Évangile du mariage

Conférence du Cardinal Philippe Barbarin

« Il s’agit de donner écho et de rendre audible, dans le contexte social et médiatique dans lequel nous vivons aujourd’hui, un message sur le mariage. Livrer une parole de vérité, comme un fondement anthropologique majeur qui demeurera toujours, malgré les méandres de l’histoire, les modes ou les initiatives des gouvernements », explique le cardinal Barbarin. Le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, et participant du récent synode sur la famille, a inauguré l'Année académique de l'Institut Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille, ce 28 octobre 2014, à l'Université pontificale du Latran. Voici le texte intégral de cette réflexion qui « sera pour nous une référence tout au long de l'année », a déclaré le Recteur de l'Institut, Mgr Livio Melina.

L’expression « Évangile du mariage » est-elle devenue habituelle à nos oreilles ? D’ordinaire, c’est le nom de son auteur qui vient après le mot Évangile ; on parle de l’Évangile « selon » saint Matthieu, Marc, Luc ou Jean. Mais déjà, dans le Nouveau Testament, saint Paul utilise des expressions comme « l’Évangile de la grâce »lorsqu’il veut résumer l’ensemble de son enseignement devant les Anciens d’Ephèse (Ac 20, 24), ou « l’Évangile de la gloire » que le Prince de ce monde veut nous empêcher de voir resplendir, lorsqu’il médite sur son ministère pour les Corinthiens (2 Co 4, 4), ou encore « l’Évangile du salut, de votre salut », explique-t-il au Ephésiens (1, 12). Ces formules ramassées ont pour but d’attirer l’attention d’une communauté sur un point central de la prédication de l’Apôtre. Elles permettent de récapituler l’ensemble de la Révélation à partir d’un aspect essentiel, pour aider chacun à vivre avec un plus grand enthousiasme sa mission de témoin du Christ.

Saint Jean-Paul II a souvent utilisé ce procédé. Quand, dans l’Encyclique Laborem exercens (1981), il parle de « l’Évangile du travail », il montre l’extraordinaire dignité de l’activité humaine qui nous rapproche du Créateur, car nous avons été créés à son image et à sa ressemblance. On a aussi entendu Jean-Paul II, notamment dans sa Lettre aux familles, en 1994, parler de « l’Évangile de la famille », pour nous inviter à regarder l’humanité entière comme une famille. Dans votre Institut, vous êtes particulièrement attentifs à l’encyclique Evangelium vitae (1995). En la lisant, nous comprenons qu’effectivement, le don de la vie est le plus beau cadeau que nous ayons reçu, et nous savons que l’Évangile de la vie correspond à notre attente la plus profonde. Lorsque, illuminés par l’événement de Pâques, nous proclamons à la fin du Credo : « J’attends la résurrection de la chair et la vie du monde à venir », nous affirmons notre espérance que « l’Évangile de la vie » est l’accomplissement de la promesse d’un Père qui, toujours, prendra soin de notre vie, jusqu’à la renouveler et la transformer par-delà notre mort.

C’est dans cette ligne que je voudrais aujourd’hui écouter et présenter le sens de l’expression « l’Évangile du mariage ». Mais auparavant, je voudrais commencer par regarder avec vous les événements que nous avons vécus en France, l’an dernier, à l’occasion du vote de la loi sur le mariage de deux personnes de même sexe. Les débats sur la famille ont enflammé le monde de la communication. Un grand nombre d’interventions médiatiques ont retenu l’attention et une série de manifestations de masse ont eu lieu. Elles ont rassemblé des foules considérables que certains ont voulu minimiser ou ignorer mais qui ont étonné, bien au-delà de nos frontières. Je me souviens encore des questions que plusieurs cardinaux de divers continents sont venus me poser à ce sujet, lors du conclave de mars 2013.

Ces rassemblements se nourrissaient d’une réflexion conjointe de philosophes et de juristes, d’hommes politiques et d’anthropologues, de représentants des différentes religions, de psychologues et d’éducateurs. Le mouvement a été porté par de nombreux catholiques très engagés, mais il a permis une rencontre en profondeur avec d’autres croyants, en particulier avec ceux de la communauté musulmane. Dans ce contexte à la fois pacifique,  car les manifestations avaient un aspect bon enfant, et tendu, car l’opposition était forte et l’enjeu essentiel, quel témoignage les chrétiens ont-ils donné ? Ont-ils réussi à transmettre l’Évangile, la bonne nouvelle du mariage ?

I – Donner notre témoignage de manière évangélique.

Il me semble opportun de faire une sorte d’examen de conscience, en regardant l’ensemble de ces événements à la lumière des Béatitudes (Mt 5, 3-10). Les avons-nous vécus comme des pauvres, sans chercher d’abord le résultat ou l’efficacité ? Comme des doux, évitant toute parole violente ou méprisante à l’égard de ceux auxquels nous étions amenés à nous opposer ? Comme des affligés, intérieurement désolés par cette initiative de destructuration sociale et ce mensonge d’État qui déclare qu’un enfant a deux mamans ou deux papas ? Comme des affamés et des assoiffés de justice, c’est-à-dire à la fois fidèles à la justice de Dieu et soucieux du bien de tous. Quel souci avons-nous eu de l’attention et de l’amour que l’on doit aux personnes homosexuelles ? « Affamés et assoiffés », cela engage aussi à combattre le découragement qui rôde et risque de tout pourrir… La Béatitude de la justice appelle la suivante, qui évoque la miséricorde.

Quelle fut notre attitude le jour du premier mariage entre deux personnes du même sexe en France, le mercredi 29 mai, à Montpellier ? Les vrais miséricordieux ont su prendre le temps de la prière pour ces deux hommes, Vincent et Bruno. Il nous fallait voir aussi comment faire passer un message qui soit toujours une parole d’amour et de miséricorde, comme la phrase du Pape François qui nous a tellement touchés : « Si une personne est ‘’gay’’ et cherche le Seigneur avec bonne volonté, qui suis-je pour la juger ? » En somme, est-ce que ces manifestations étaient pour nous comme un acte de miséricorde, une action et une vraie présence du Messie Consolateur ?

Dans un autre cadre, j’ai essayé de faire ce travail minutieusement, en développant cette interrogation à partir de chacune des Béatitudes. On me permettra simplement de rappeler que pour certains, ce fut un rude combat qui les a conduits à la dernière : « Bienheureux les persécutés pour la justice ». Espérons que le Seigneur leur a donné d’entrevoir quelque chose de son Royaume durant ces épreuves !

II – Un point de départ solide.

Maintenant, je voudrais toucher le fond du problème. Il s’agit de donner écho et de rendre audible, dans le contexte social et médiatique dans lequel nous vivons aujourd’hui, un message sur le mariage. Livrer une parole de vérité, comme un fondement anthropologique majeur qui demeurera toujours, malgré les méandres de l’histoire, les modes ou les initiatives des gouvernements.

Dans les premières pages de la Bible, on lit le récit de la création de l’homme et de la femme qui forment ensemble « l’image et la ressemblance de Dieu ». Il est demandé à l’homme de quitter son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, de sorte que tous deux ne forment plus qu’une seule chair (cf. Gn 1, 28 et 2, 24). Ces mots ne sont ni une loi ni un règlement, mais une parole de vérité et de vie. Je les entends comme le conseil d’un Père qui ne cherche que le bien de ses enfants et veut les aider à accomplir le meilleur de ce qui les habite. Pour les croyants, il est clair que la valeur et la force de ce message ne pourront jamais être discréditées ni même effleurées par les courants de pensée à la mode ou les aléas d’une majorité parlementaire. Il fallait donc trouver le moyen de faire entendre ce message fondamental sur la famille.

Le concept chrétien de la famille est à la fois simple dans son origine et extraordinairement ample et analogique. Dans le développement d’une personnalité, d’ailleurs, on voit souvent que plus quelqu’un est profondément attaché à ses racines, plus il est capable d’une large ouverture.

Puis-je formuler quelques principes simples ?

Il n’y a pas de famille sans enfants : ni d’enfants sans famille. C’est là, dans ce milieu, dans ce contexte qu’ils ont grandi et découvert la vie.

Il n’y a pas d’enfants sans parents : la filiation conduit à une profonde gratitude, mais elle comporte aussi ses souffrances, ses ruptures… Paternité, filiation, liens de fraternité… c’est le même sang qui coule aux artères, même si chaque famille a ses blessures, ses maladies…

Il n’y a pas non plus de parents sans alliance. L’expérience nous enseigne que c’est le point le plus fragile de la vie familiale, car il résulte d’un choix personnel qui a l’amour pour origine. Or nos choix peuvent être remis en cause, et souvent par nous-mêmes : « Quelle erreur j’ai commise, ce jour-là ! » Et si l’amour se limite au sentiment amoureux, il est soumis, comme l’on sait, à de dangereuses fluctuations : « Mais je ne l’aime plus ! Aujourd’hui, nous ne pouvons plus nous supporter. » La loi en porte la marque : il est difficile de nier la filiation (ou la paternité et la maternité), mais on court toujours vers une législation qui facilite de plus en plus le divorce. Comment faire pour fortifier ce qui est fragile ? C’est justement cela qui mériterait la plus grande attention !

III – Mais comment réguler le désir ?

En fait, dans le mariage, trois réalités se mélangent : le désir sensible et sexuel (des époux), la douce joie de l’amitié partagée (un long compagnonnage) et le grand cadeau de la fécondité (la paternité et la maternité). L’histoire et l’expérience nous montrent qu’elles ne font pas toujours bon ménage : plusieurs rois de France ont eu une épouse légitime et une ou plusieurs maîtresses successives, d’autres ont été homosexuels…

Voilà une question de toujours qui surgit au grand jour, à notre époque. Qui pourrait avoir le droit de juger ou de s’opposer au désir qui m’habite ? Il est changeant et chacun sait que la sexualité comporte une large part d’irrationnel. S’il est refoulé, il peut constituer un danger d’explosion interne ou de dérive. S’il est seul maître à bord, il risque de conduire à des comportements aberrants ou violents ; les faits de l’actualité - y compris au sein de l’Église - nous le rappellent trop souvent ! Comment aider chacun à rester lui-même, à vivre et exprimer librement son désir, tout en demeurant en harmonie avec la raison, la volonté et le bien commun ? Dans l’éducation que j’ai reçue, il me semble qu’on a su faire droit, avec délicatesse, à la vérité d’une personne, l’encourager à se développer librement, tout en la mettant en garde contre elle-même. Les marqueurs de l’éducation, les habitudes sociales et spirituelles ont pour but de mettre notre liberté fondamentale à l’abri des fluctuations de la sensibilité et de ses dérives ou dangers éventuels.

Dans une tribune que j’ai trouvée très éclairante, la philosophe Chantal Delsol explique qu’il y a, dans notre mentalité sociale, une tyrannie du désir devant laquelle tout doit céder. Elle peut se résumer en deux exclamations :

- « Mais on souffre ! » Il faut alors, quoi qu’il arrive, supprimer la cause de cette souffrance.

- « Mais on s’aime ! » De quel droit allez-vous vous opposer à cet amour ?

Oui, ce sont des faits ; ils s’imposent dans la vie de celui qui les exprime. Mais pourquoi faudrait-il toujours y céder, satisfaire les désirs d’aujourd’hui et ceux qui surviendront demain ? Pourquoi devrions-nous céder devant ces exigences de modifier la loi pour permettre à ces désirs de se réaliser ? L’argument souvent utilisé laisse entendre que la réalisation de ces désirs ne contraint nullement ceux qui ne les partagent pas à continuer de vivre comme ils le veulent. Mais c’est de courte vue, car il s’agit d’une modification en profondeur du contexte social, comme l’avait affirmé la Garde des Sceaux, Madame Taubira, à l’approche du vote de la nouvelle loi sur le mariage : Il s’agit d’un vrai changement de civilisation.

IV - L’Évangile du mariage, cœur de la Révélation chrétienne.

Puisque nous réfléchissons à la « bonne nouvelle » du mariage, il me semble essentiel d’affirmer que nous ne devons pas rester prisonniers de la logique médiatique du « buzz ».  Le mariage n’est pas une « opportunité » de communication, mais bien le cœur de la Révélation biblique.

Je poserai donc ici un principe simple qui est, pour moi, un élément essentiel de toute la catéchèse biblique et sacramentelle : dans la Bible, tout est nuptial.

Il est clair que le mot Testament traduit bien mal l’hébreu berit ou le grec diathèkè. La Bible est d’abord une histoire d’alliance. Dans le livre d’Osée, Dieu parle à son peuple comme à une fiancée qu’il conduit au désert pour lui dire des mots de tendresse.

Alliance, c’est le mot que l’on entend au centre de la célébration eucharistique :« La coupe de mon sang, le sang de l’alliance nouvelle et éternelle. »

Et quand Jésus vient sceller cette Alliance, il se présente comme l’Époux qui s’offre à celle qu’Il aime.« Ceci est mon corps livré pour vous », quoi de plus nuptial que cette parole qui est le cœur de la célébration eucharistique ? En se livrant corps et âme à celle qu’Il aime, l’Époux souhaite que l’Eglise, son Epouse, soit belle, « resplendissante, sans tache, ni ride, ni aucun défaut ; il la voulait sainte et irréprochable. C’est comme cela que le mari doit aimer sa femme : comme son propre corps ».C’est alors que saint Paul lance cette exclamation, à propos du mariage : « Ce mystère est grand ! » (Ep 5, 27-28 et 32).

L’aventure dans laquelle se lancent les époux est une image de l’histoire de l’humanité entière, inscrite dans leur chair et leur histoire personnelle. Les difficultés et les trahisons ne manquent pas, mais la fidélité de Dieu donne à notre fragilité humaine une espérance invincible. C’est la raison pour laquelle le sacrement du mariage est présenté d’abord comme une action de Dieu, qui scelle notre amour toujours fragile dans la grande épopée de l’Alliance entre Dieu et l’humanité, dont le sommet plonge dans le mystère pascal de Jésus.

Les trois axiomes que j’ai utilisés plus haut - pas de famille sans enfants, pas d’enfants sans parents et pas de parents sans alliance - offrent un beau résumé de notre foi. Ils découlent de la première ligne du Credo : nous croyons en un Dieu qui est Père, créateur et qui garde toujours la création entière dans sa main (c’est le sens exact de Pantocrator, imparfaitement traduit par « tout-puissant »). Ses enfants ne risquent donc pas de se trouver abandonnés, mais surtout, ils sont invités à entrer dans le déploiement de cette famille puisqu’ils ont été créés à l’image et à la ressemblance de Dieu. Ils sont appelés à engager toute leur vie dans le mystère de l’Alliance et s’ils viennent à connaître la joie de la paternité et de la maternité, ils auront en mémoire l’avertissement de Jésus : « Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux »(Mt 23, 9). La source est unique, et tous peuvent avoir la joie d’y participer : « Je fléchis le genou, écrit saint Paul, devant le Père de qui toute paternité (ou famille, car le mot grec patria se traduit des deux façons) tire son nom » (Ep 3, 14-15).

« Évangile de la famille », voilà donc résumé en deux mots tout le projet de Dieu pour l’humanité : sceller avec elle une alliance, son alliance d’amour, et établir entre nous des rapports fraternels qui fassent de l’humanité entière « la famille de Dieu » par la circulation de sa charité. Dès lors, s’abolissent les frontières de races et de générations : on peut tout partager avec un frère ou une sœur d’un autre continent ou d’une autre culture ; on peut demander de l’aide aux Apôtres ou à saint Augustin, comme on se tourne vers des ainés dans la famille. Nous pouvons même attendre de notre sœur Thérèse de l’Enfant Jésus qu’elle agisse aujourd’hui en notre faveur, puisqu’elle a promis de « passer son ciel à faire du bien sur la terre ». Or, le meilleur chemin pour entrer dans l’immense famille humaine, c’est celui de nos familles qui doivent être attentivement accompagnées, aidées et encouragées dans leurs difficultés. C’est une si grande mission d’introduire chaque nouvel être humain dans le mystère de l’Alliance. Les parents, homme et femme, y sont l’image et la ressemblance de Dieu Trinité. Parfois, bien que toute comparaison ait ses limites, j’ose penser que si l’on trouve dans un enfant le regard de son père ou le sourire de sa mère, on pourrait dire de l’Esprit-Saint qu’il est le sourire et le regard de Dieu…

V – Épangile et Évangile : l’accomplissement d’une promesse.

Assurément, pour chacun d’entre nous, le plus cher désir est que l’aventure de notre amour réussisse, car, plus encore que la santé ou les succès professionnels, c’est la clé de notre bonheur. Et précisément l’attention à ce bonheur a conduit Dieu à s’engager dans notre histoire. Il nous a d’abord donné ces paroles de vie que l’on nomme sans doute à tort « les commandements ». Puis, à travers les prophètes, il a continué d’envoyer sa Parole sur terre « rapide, son verbe la parcourt » (Ps 147, 15). Mais comme tout cela n’a pas suffi, « finalement, il envoya son fils » (Mt 21, 37).

Y a-t-il coïncidence, ou au moins correspondance, entre notre attente la plus profonde et la promesse et l’engagement de Dieu dans l’histoire des hommes ? Pourquoi remarque-t-on si rarement la proximité des mots promesse (en grec épangile) et Évangile ? Ils sont souvent proches l’un de l’autre dans le Nouveau Testament, et pourtant les traductions ne permettent jamais de percevoir leur racine commune. Dieu connaît nos attentes, et il nous promet d’y répondre. C’est Jésus qui est venu réaliser cette promesse dans sa propre chair : voilà l’Évangile !

N’est-il pas aisé de montrer que « l’Évangile du mariage » est la clé de compréhension du dessein divin ? Tout nous parle de mariage, depuis le moment de l’Incarnation. Oui, Dieu viendra sur terre, mais pas « hors du mariage » : « Voici quelle fut l’origine de Jésus Christ : Marie, la mère de Jésus, avait été accordée en mariage à Joseph »(Mt 1, 18), jusqu’à l’épilogue de l’Apocalypse où l’on entend l’Esprit et l’épouse dire : « Viens ! » et l’époux répondre : « Oui, je viens sans tarder » (Ap 22, 17 et 20).

Le premier miracle ? C’est celui des Noces de Cana et l’on nous explique bien qu’il symbolise celles de la croix et le festin des noces éternelles dont elle nous ouvre les portes.

La Cène ? Le Sang du Christ est versé pour qui et pour quoi ? « La coupe de mon sang, le sang de l’Alliance, nouvelle et éternelle, versé pour vous et pour la multitude, en rémission des péchés. »

Quant à Jean-Baptiste, le plus grand des hommes qui ait existé (cf Mat 11, 11), pourquoi meurt-il ? Pour avoir dit à Hérode : « Tu n’as pas le droit de prendre la femme de ton frère » (Marc  6, 18).

Saint Paul poursuit cette ligne : « Que le mariage soit honoré de tous, que l’union conjugale ne soit pas profanée… » (He 13, 4). Or voilà, on ne profane que les sanctuaires.

Souvent, dans l’Église, nous raisonnons en termes de baptisés, confirmés, consacrés, plus rarement en termes d’hommes et de femmes mariés. Quand sont-ils appelés, dans la communauté, en tant que tels ? Au cours de la Messe chrismale, dans mon diocèse, je m’adresse aux prêtres après l’homélie comme le demande le Rituel ; j’appelle aussi les diacres et les laïcs en mission ecclésiale à la fin de la Messe… Le Christ Prêtre, on connait. Le Christ serviteur, et ses diacres, aussi, la variété des ministères est reconnue et honorée, mais le mystère de l’Alliance ? Ils ont leur place marquée dans nos messes chrismales. Pourquoi  ne pas appeler aussi les religieuses et les vierges consacrées, dont la vie nous parle du Christ-époux ? Pourquoi ne pas instaurer une « fête de la vie mariée » ?

On a longtemps compris et présenté dans notre Eglise les vocations à la vie consacrée comme la voie royale et le mariage comme la vocation commune, pour ne pas dire banale, quelconque…

On devrait expliquer que toutes les vocations se comprennent  à partir de l’Alliance et qu’elles se vivent toutes dans la logique de l’Alliance, les unes pour le vivre, les autres pour en témoigner. À leur manière, les vocations religieuses  et le célibat consacré témoignent aussi de la grandeur du mariage. Un peu comme celui qui fait vœu d’obéissance, et qui, dans les faits, magnifie la liberté. Lorsque je suis avec des enfants ou des jeunes et que je leur demande de retrouver les sept sacrements, je me réjouis de constater qu’après le baptême (la porte d’entrée) et l’Eucharistie (le sacrement central), c’est toujours le mariage qui vient en premier. Car c’est le paradigme, le modèle à partir duquel, pour chaque disciple du Christ, l’histoire de son alliance va prendre forme.

Dans l’Evangile, quand les disciples disent, après avoir écouté Jésus répondre aux questions qui lui sont posées au sujet du mariage, « que si telle est la situation…, il n’y a pas intérêt à se marier », le Seigneur reconnaît bien qu’en effet « ce n’est pas tout le monde qui peut comprendre » (Mt 19, 10-11). Et il ajoute que tout le monde n’a pas cette vocation, un peu comme l’on dit aujourd’hui du sacerdoce : « C’est un appel, ce n’est pas fait pour tout le monde. » Pouvons-nous en conclure que ce qui n’est pas « pour tous », en l’occurrence, selon Jésus, c’est le mariage ?

Il montre que le chemin du mariage est ardu… ! Comment ne pas Lui donner raison quand on constate le nombre d’échecs dans cette voie ? Pas étonnant non plus de voir que sur le mariage se concentrent tant de menaces, de parodies. Il serait intéressant de reprendre les quatre piliers du mariage pour voir comment chacun est sérieusement attaqué par le dogme universel du choix personnel : « C’est mon choix » ou « Tu fais comme tu le sens ».

Face à l’indissolubilité : le divorce, et la procédure toujours plus simple… Face à la fidélité : l’adultère qui n’entre plus dans la catégorie du « divorce pour faute » et que l’on ne craint pas de promouvoir… Face à la fécondité : la contraception et l’avortement… Face à la liberté qui s’engage : la liberté qui s’essaye, le concubinage …

Jean-Baptiste baptisait dans l‘eau, il annonçait Celui qui baptiserait dans l’Esprit. Mais nous savons que c’est dans leur sang, que Jean Baptiste et Jésus ont, tous deux, baptisé l’Alliance.

Conclusion

À chaque génération, le même défi se présente : comment aimer le monde sans nous laisser prendre par sa logique ? Comment l’écouter et le comprendre en profondeur, pour vraiment le servir ? Des phrases essentielles de l’Évangile se heurtent dans notre esprit : « Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné son Fils unique » (Jn 3, 16) ; « Ils sont dans le monde, mais ils ne sont pas du monde. Garde-les du Mauvais » (Jn 17, 11-14) ; « Que ton règne vienne… sur la terre comme au ciel » et « Mon royaume n’est pas de ce monde. Si mon royaume était de ce monde… »(Jn 18, 36).

Aujourd’hui, nous sommes ses enfants, donnés, livrés à ce monde pour y faire venir son Règne de justice et de paix. Aimer le monde tel qu’il est, sans se laisser prendre ou fasciner par ses tromperies, et vivre au milieu de tous dans la charité et le respect, voilà ce qui nous est demandé. Du Seigneur, nous avons reçu la consigne de dire un oui qui soit oui et un non qui soit non (cf. Mt 5, 37), sans nous soucier de ce qui va servir ou nuire à notre image.

Récemment, en lisant le passage des Actes des Apôtres où Pierre et Jean racontent ce qu’ils viennent de subir de la part des chefs des prêtres et des anciens (4, 23-31), je pensais que c’est vraiment le lot et le défi de toutes les générations chrétiennes. Alors, l’assemblée, « d’un seul cœur », se met à prier :« Maître, c’est toi qui as fait le ciel, la terre et la mer. C’est toi qui as mis dans la bouche de David, ton serviteur, les paroles que voici : Pourquoi ces nations en tumulte, ces peuples aux projets stupides… ? »

C’est d’abord sur la prière qu’il faut fonder notre action, car c’est elle qui maintient le mystère de l’Alliance en nous comme une source. J’en ai été le témoin l’an dernier, à Lyon. Une dame qui attendait son quatrième enfant est venue me voir à la cathédrale, au moment des débats sur le mariage, et elle m’a dit : « Je ne vois pas ce que je pourrais faire, mais j’ai envie de lancer un groupe de prière des mères. » Je n’ai pas hésité une seconde à l’encourager… et le groupe s’est réuni, chaque mardi, à la Basilique de Fourvière.

Sur le plan doctrinal, le pape François nous exhorte dans Evangelii gaudium à ne jamais supposer que les gens connaissent les fondements de l’enseignement de l’Église, car c’est rarement le cas. Toujours, comme lors d’une catéchèse qu’il a donnée sur le mariage à l’audience du 2 avril, cette année, il prend le temps de repartir du cœur de la foi.

Dans l’homélie des  canonisations du 27 avril, il a évoqué deux points (Monsieur le Recteur ne a parlé tout à l'heure) qui viennent au cœur de notre sujet et par lesquels je vais terminer. Il a dit que saint Jean XXIII avait été docile à l’Esprit-Saint, en convoquant le Concile Vatican II, de manière si rapide et inattendue. Et il a révélé  que saint Jean-Paul II avait exprimé le désir que son nom reste comme celui du « Pape de la famille ». Lors du Consistoire de février 2014, François nous a raconté l’histoire du choix du thème des synodes de cette année et de l’an prochain : « J’y ai vu la main de Dieu », a-t-il affirmé. Il n’est donc pas étonnant qu’il ait confié ce travail  à l’intercession des deux nouveaux saints, pour qu’il soit mené dans la docilité à l’Esprit-Saint. Unissons-nous à sa prière, car l’enjeu est de taille !

Permettez-moi de reprendre, comme un envoi, les deux mots de Jésus que je regarde comme une dixième Béatitude : « Vous êtes le sel de la terre », « Vous êtes la lumière du monde » (Mt 5, 13-14). Souvent, on transforme ces affirmations en impératifs : « Soyez enfin du sel, une lumière qui ose se montrer et briller au dehors ! Si les chrétiens étaient vraiment… Pourquoi ont-ils perdu leur saveur, leur audace ? »

Non, Jésus parle au présent de l’indicatif : « Vous êtes le sel de la terre ; vous êtes la lumière du monde ». Malgré nos médiocrités, voilà ce que nous sommes, en vérité ; c’est la grâce de notre baptême. De là, découle une grande joie : Quand les chrétiens agissent comme de vrais disciples de Jésus, comme les témoins de celui « qui a rendu son beau témoignage devant Pilate » (1 Tm 6, 13), ils sont, sans en avoir conscience, un cadeau de Dieu pour le monde, sel qui donne du goût à la vie, lumière qui révèle comme la création est belle !

C’est peut-être la plus grande joie des époux chrétiens, lorsqu’ils savent que leur mariage est la grâce de leur vie, donc la mission qui leur incombe. Le défi est notable.

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Rien ne surpasse l’amour de Dieu

Commentaire de l’Évangile de la Commémoration des fidèles défunts

« Les puissances démoniaques, hostiles à l’homme, s’arrêtent, impuissantes, devant l’union d’amour intime entre Jésus et celui qui l’accueille avec foi », déclare le pape François, pour qui « cette réalité de l’amour fidèle de Dieu aide à affronter avec sérénité et force le chemin de chaque jour ».

Dans le climat spirituel du mois de novembre marqué par le souvenir des fidèles défunts, nous nous souvenons des frères cardinaux et évêques du monde entier qui sont retournés dans la maison du Père au cours de cette dernière année. Tandis que nous offrons pour chacun d’eux cette sainte Eucharistie, nous demandons au Seigneur de leur accorder la récompense céleste promise aux serviteurs bons et fidèles.

Nous avons écouté les paroles de saint Paul : « Oui, j’en ai l’assurance, ni mort ni vie, ni anges ni principautés, ni présent ni avenir, ni puissances, ni hauteur ni profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté dans le Christ Jésus notre Seigneur » (Rm 8, 38-39).

L’apôtre présente l’amour de Dieu comme le motif le plus profond, invincible, de la confiance et de l’espérance chrétiennes. Il énumère les forces contraires et mystérieuses qui peuvent menacer le chemin de la foi. Mais immédiatement, il affirme avec assurance que même si toute notre existence est encerclée par les menaces, rien ne pourra jamais nous séparer de l’amour que le Christ lui-même gagna pour nous, en se donnant totalement. Même les puissances démoniaques, hostiles à l’homme, s’arrêtent impuissantes face à l’union intime d’amour entre Jésus et celui qui l’accueille avec foi. Cette réalité de l’amour fidèle que Dieu a pour chacun de nous, nous aide à affronter avec sérénité et force le chemin de chaque jour, qui est parfois rapide mais d’autres fois en revanche lent et difficile.

Seul le péché de l’homme peut interrompre ce lien ; mais dans ce cas aussi, Dieu le cherchera toujours, le poursuivra pour rétablir avec lui l’union qui perdure même après la mort, une union qui trouve d’ailleurs son sommet dans la rencontre finale avec le Père. Cette certitude confère un sens nouveau et plein à la vie terrestre et nous ouvre à l’espérance pour la vie au-delà de la mort.

En effet, à chaque fois que nous nous trouvons face à la mort d’une personne chère ou que nous avons bien connue, s’élève en nous la question : « Qu’en sera-t-il de sa vie, de son travail, de son service dans l’Église ? ». Le Livre de la Sagesse nous a répondu : ils sont entre les mains de Dieu ! La main est signe d’accueil et de protection, elle est signe d’une relation personnelle de respect et de fidélité : donner la main, serrer la main. Voilà, ces pasteurs zélés qui ont consacré leur vie au service de Dieu et de leurs frères, sont entre les mains de Dieu. Tout ce qui est à eux est bien gardé et ne sera pas corrompu par la mort. Entre les mains de Dieu se trouvent tous leurs jours tissés de joies et de souffrances, d’espérances et de difficultés, de fidélité à l’Évangile et de passion pour le salut spirituel et matériel du troupeau qui leur a été confié.

Même les péchés, nos péchés, sont entre les mains de Dieu ; ces mains sont miséricordieuses, des mains « blessées » d’amour. Ce n’est pas un hasard si Jésus a voulu conserver les plaies dans ses mains pour nous faire sentir sa miséricorde. Et cela est notre force, notre espérance.

Cette réalité, pleine d’espérance, est la perspective de la résurrection finale, de la vie éternelle, à laquelle sont destinés « les justes », ceux qui accueillent la Parole de Dieu et sont dociles à son Esprit.

C’est ainsi que nous voulons nous souvenir de nos frères cardinaux et évêques défunts. Des hommes consacrés à leur vocation et à leur service à l’Église, qui ont aimé comme on aime une épouse. Nous les confions dans la prière à la miséricorde du Seigneur, par l’intercession de la Vierge et de saint Joseph, pour qu’il les accueille dans son royaume de lumière et de paix, là où vivent éternellement les justes et ceux qui ont été de fidèles témoins de l’Évangile. Dans cette prière aussi, prions également pour nous, pour que le Seigneur nous prépare à cette rencontre. Nous n’en connaissons pas la date, mais la rencontre aura lieu.

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