PKO 14.08.2014
Dimanche 17 août 2014 – 19ème Dimanche du Temps ordinaire – Année A
Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°45/2014
HUMEURS
Hypocrite et fier de l’être !
Oui, je suis un hypocrite… selon ce qui ressort des propos rapportés par la presse concernant l’implantation de casinos en Polynésie. Et, avec moi, l’Église, depuis Mgr Michel et ses successeurs, sont des hypocrites… et ce, parce que nous nous opposons à l’ouverture de casinos… Pour étayer le fait que nous sommes des hypocrites l’argument est : « Mais c’est un peu d’hypocrisie tout ça, parce que les avions d’Air Tahiti Nui qui vont à Auckland sont pleins de joueurs. Ils peuvent aller jouer leur argent là-bas, leur apporter leur argent, mais pas ici. C’est de l’hypocrisie totale. »… Si ce genre d’argument peut tout justifier pourquoi alors ne pas autoriser le tourisme sexuel avec des mineurs puisqu’on peut y avoir accès en prenant simplement l’avion et aller là où cela se fait ?
Autre propos relevé aussi dans la presse : « Si ces projets ne sont pas lancés, nous sommes foutus. »… À cela le Pape François répond : « Aujourd’hui, tout entre dans le jeu de la compétitivité et de la loi du plus fort, où le puissant mange le plus faible… On considère l’être humain en lui-même comme un bien de consommation, qu’on peut utiliser et ensuite jeter. Nous avons mis en route la culture du “déchet” qui est même promue… Les exclus ne sont pas des “exploités”, mais des déchets, “des restes”. » (Evangelii gaudium n°53)
Les jeux d’argent sont un leurre, un impôt sur le rêve… et les plus taxés sont toujours les plus faibles… La précarité en Polynésie n’a pas commencé avec la crise économique en 2004… Cette année, l’Accueil Te Vai-ete fêtera ses 20 ans… or, lors de son implantation nous étions en plein boom économique ! La précarité n’est pas née de la crise mais de l’égoïsme de ceux qui ne veulent pas partager : « Certains défendent encore les théories de la “rechute favorable”, qui supposent que chaque croissance économique, favorisée par le libre marché, réussit à produire en soi une plus grande équité et inclusion sociale dans le monde. Cette opinion, qui n’a jamais été confirmée par les faits, exprime une confiance grossière et naïve dans la bonté de ceux qui détiennent le pouvoir économique et dans les mécanismes sacralisés du système économique dominant. » (Evangelii gaudium n°54)
Alors avec le Pape François, avec Mgr Michel, dont nous célébrons le 6ème anniversaire de son décès, avec l’Église qui est en Polynésie, nous disons non à un développement économique qui nie la dignité de la personne humaine et use de sa fragilité pour alimenter un système au service des plus forts…
Si s’opposer à l’implantation de casinos en Polynésie c’est être hypocrite, alors, à l’instar de MgrMichel, je suis un hypocrite et surtout fier de l’être…
Je revendique ce statut d’hypocrite plutôt que celui de marchand de rêves !
Non, non et non à l’implantation de casinos en Polynésie !
EN MARGE DE L’ACTUALITÉ
Proche-Orient : prier et agir sans tarder
Comme d’autres minorités, nos frères du Proche-Orient, dont les pays sont déchirés par les guerres, crient au secours. Entendons-nous leur appel ? Qu’en faisons-nous ?
La Conférence des Évêques de France, bouleversée par les drames qui se déroulent sous nos yeux et dont ont été témoins directs plusieurs d’entre nous, appuie notamment les actions du Secours Catholique-Caritas France et de l’Œuvre d’Orient qui se sont tournés vers elle. Par leur présence sur le terrain, ces organisations d’Église sont directement solidaires des chrétiens du Proche-Orient et des victimes des trois conflits majeurs qui secouent la région : Irak, Israël-Palestine et Syrie avec son impact sur les pays limitrophes.
Depuis les tout premiers jours, des équipes Caritas, partenaires du Secours catholique-Caritas France, sont auprès des populations déplacées au nord de l’Irak, des victimes des bombardements à Gaza et des Syriens victimes du conflit dans le pays ou réfugiés en Jordanie et au Liban. Par ailleurs, les prêtres et institutions religieuses sont sur le terrain, au quotidien, aux côtés des familles. Ils leur apportent aides alimentaires, logements, soins et scolarisent les enfants, grâce au soutien de l’Œuvre d’Orient.
Depuis trois ans, le Secours Catholique et l’Œuvre d’Orient ont chacun apporté des sommes très importantes pour financer des actions concrètes. Pour continuer et répondre aux besoins de plus en plus vitaux et de plus en plus urgents, votre soutien est indispensable. Merci pour vos dons et pour votre prière tout spécialement en cette fête de l’Assomption de la Vierge Marie, si chère au cœur des catholiques du monde entier.
Mgr Georges Pontier Archevêque de Marseille
Président de la Conférence des Évêques de France
Les Béatitudes, route du bonheur
Catéchèse du pape François du mercredi 6 aout 2014
« Les Béatitudes sont la voie que Dieu indique comme réponse au désir de bonheur inscrit dans l’homme », affirme le pape François qui invite les chrétiens à « s'en souvenir et les imprimer dans [leur] cœur ». Après la pause estivale, les audiences générales ont repris mercredi dernier, 6 août 2014, en la salle Paul VI du Vatican. Le pape a poursuivi son cycle de catéchèses consacrées à l’Église, sur le thème : « Nouvelle Alliance et nouveau peuple ».
Chers frères et sœurs, bonjour !
Dans les catéchèses précédentes, nous avons vu que l’Église constitue un peuple, un peuple préparé par Dieu avec patience et amour et auquel nous sommes tous appelés à appartenir. Aujourd’hui, je voudrais mettre en évidence la nouveauté qui caractérise ce peuple : il s’agit vraiment d’un nouveau peuple, qui se fonde sur la nouvelle alliance établie par le Seigneur Jésus à travers le don de sa vie. Cette nouveauté ne nie pas le chemin précédent ni ne s’y oppose ; au contraire, elle le fait avancer, elle le mène à son accomplissement.
1. Il y a une figure très importante qui sert de charnière entre l’Ancien et le Nouveau Testament : c’est celle de Jean-Baptiste. Pour les Évangiles synoptiques, il est le « précurseur », celui qui prépare la venue du Seigneur, prédisposant le peuple à la conversion du cœur et à l’accueil de la consolation de Dieu, désormais proche. Dans l’Évangile de Jean, il est le « témoin », en ce qu’il nous fait reconnaître en Jésus celui qui vient d’en-haut, pour pardonner nos péchés et faire de son peuple son épouse, prémisse de l’humanité nouvelle. En tant que « précurseur » et « témoin », Jean-Baptiste joue un rôle central à l’intérieur de toute l’Écriture, dans la mesure où il sert de pont entre la promesse de l’Ancien Testament et son accomplissement, entre les prophéties et leur réalisation en Jésus-Christ. Par son témoignage, Jean nous indique Jésus, nous invite à le suivre et nous dit clairement que cela requiert de l’humilité, le repentir et la conversion : c’est une invitation à l’humilité, au repentir et à la conversion.
2. De même que Moïse avait stipulé l’alliance avec Dieu en vertu de la loi reçue sur le Sinaï, ainsi Jésus, d’une colline sur la rive du lac de Galilée, remet à ses disciples et à la foule un enseignement nouveau qui commence par les Béatitudes. Moïse donne la Loi sur le Sinaï et Jésus, le nouveau Moïse, donne la Loi sur cette autre montagne, sur la rive du lac de Galilée. Les Béatitudes sont la voie que Dieu indique comme réponse au désir de bonheur inscrit dans l’homme et elles perfectionnent les commandements de l’ancienne Alliance. Nous sommes habitués à apprendre les dix commandements – bien sûr, vous les connaissez tous, vous les avez appris au catéchisme – mais nous ne sommes pas habitués à répéter les Béatitudes. Essayons alors de nous en souvenir et de les imprimer dans notre cœur. Faisons ceci : je les dirai l’une après l’autre et vous répéterez, d’accord ?
Première : « Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des cieux est à eux ». [La salle répète]
« Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés ». [La salle répète]
« Heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage ». [La salle répète]
« Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés ». [La salle répète]
« Heureux les miséricordieux car ils obtiendront miséricorde ». [La salle répète]
« Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu ». [La salle répète]
« Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu ». [La salle répète]
« Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des cieux est à eux ». [La salle répète]
« Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi ». Je vous aide : [il répète avec la foule] « Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi ».
« Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! ».
Bravo ! Mais faisons ceci : je vous donne un devoir à la maison, un devoir à faire à la maison. Prenez l’Évangile, celui que vous avez avec vous… Souvenez-vous que vous devez toujours avoir un petit Évangile avec vous, dans votre poche, toujours ; celui que vous avez chez vous. Prenez l’Évangile et dans les premiers chapitres de Matthieu – je crois que c’est le chapitre cinq – il y a les Béatitudes. Et aujourd’hui, demain, à la maison, lisez-les. Vous le ferez ? [La salle : Oui !]Pour ne pas les oublier, parce que c’est la Loi que nous donne Jésus ! Vous le ferez ? Merci.
Ces paroles contiennent toute la nouveauté apportée par le Christ, et toute la nouveauté du Christ est contenue dans ces paroles. En effet, les Béatitudes sont le portrait de Jésus, sa forme de vie ; et elles sont la route du bonheur, que nous pouvons nous aussi parcourir avec la grâce que nous donne Jésus.
3. En plus de la nouvelle Loi, Jésus nous remet aussi le « protocole » sur lequel nous serons jugés. À la fin du monde, nous serons jugés. Et quelles questions nous posera-t-on là-bas ? Quelles questions ? Quel est le protocole sur lequel le juge nous jugera ? C’est ce que nous trouvons dans le chapitre 25 de l’Évangile de Matthieu. Aujourd’hui, le devoir est de lire le cinquième chapitre de l’Évangile de Matthieu où se trouvent les Béatitudes ; et lire le chapitre 25, où l’on trouve le protocole, les questions qui nous seront posées le jour du jugement. Nous n’aurons ni titres, ni crédits ni privilèges à alléguer. Le Seigneur nous reconnaîtra si, à notre tour, nous l’avons reconnu dans le pauvre, celui qui est affamé, celui qui est indigent et marginalisé, celui qui souffre et qui est seul… Et c’est un des critères fondamentaux de vérification de notre vie chrétienne, sur lequel Jésus nous invite à nous mesurer tous les jours. Je lis les Béatitudes en me demandant comment doit être ma vie chrétienne, et ensuite je fais un examen de conscience avec ce chapitre 25 de Matthieu. Tous les jours : j’ai fait ceci, j’ai fait ceci, j’ai fait cela… Cela nous fera du bien ! C’est simple mais c’est concret.
Chers amis, la nouvelle Alliance consiste justement en ceci : se reconnaître, dans le Christ, enveloppé de la miséricorde et de la compassion de Dieu. Et cela remplit notre cœur de joie et c’est cela qui fait de notre vie un témoignage beau et crédible de l’amour de Dieu pour tous nos frères que nous rencontrons chaque jour. Souvenez-vous des devoirs à faire ! Chapitre 5 de Matthieu et chapitre 25 de Matthieu. Merci !
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Le portrait-robot de l’évêque selon le Pape François
Discours du pape François à la Congrégation pour les Évêques du 27 février 2014
Alors que nous faisons mémoire de Mgr Michel, un pasteur selon le cœur de Dieu, 6 ans après son décès et toujours dans l’attente de la nomination de nouvel archevêque voici le portrait-robot de l’évêque tracé par le Pape François : Un homme de prière, un missionnaire, un témoin, proche des personnes.
1. L’essentiel de la mission de la Congrégation
Dans la célébration d’ordination d’un évêque, l’Église réunie, après l’invocation du Saint-Esprit, demande que soit ordonné le candidat présenté. Celui qui préside demande à ce moment-là : « Avez-vous le mandat ? ». Dans cette question résonne ce que fit le Seigneur : « Il appella à lui les Douze et il se mit à les envoyer en mission deux à deux... » (Mc 6, 7). Au fond, la question pourrait s’exprimer aussi ainsi : « Êtes-vous certains que son nom a été prononcé par le Seigneur ? Êtes-vous certains que c’est le Seigneur qui l’a compté au nombre des appelés à être avec Lui de façon singulière et pour lui confier la mission qui n’est pas la sienne, mais qui a été confiée au Seigneur par le Père ? ».
Cette Congrégation existe pour aider à écrire ce mandat, qui résonnera ensuite dans un grand nombre d’Églises et apportera la joie et l’espérance au saint peuple de Dieu. Cette Congrégation existe pour s’assurer que le nom de celui qui est choisi a été tout d’abord prononcé par le Seigneur. Voilà la grande mission confiée à la Congrégation pour les évêques, sa tâche la plus exigeante : identifier ceux que l’Esprit Saint lui-même place à la tête de son Église.
Des lèvres de l’Église parviendra en tout temps et en tout lieu la demande : donne-nous un évêque ! Le saint peuple de Dieu continue de parler : nous avons besoin de quelqu’un qui nous surveille d’en haut ; nous avons besoin de quelqu’un qui nous regarde avec l’ampleur du cœur de Dieu ; nous n’avons pas besoin d’un manager, d’un administrateur délégué d’une entreprise, ni de quelqu’un qui soit au niveau de nos petitesses ou de nos menues prétentions. Nous avons besoin de quelqu’un qui sache s’élever à la hauteur du regard de Dieu sur nous pour nous guider vers Lui. C’est uniquement dans le regard de Dieu qu’il y a un avenir pour nous. Nous avons besoin de qui, connaissant l’ampleur du champ de Dieu plus que l’étroitesse de son propre jardin, nous garantisse que ce à quoi aspirent nos cœurs n’est pas une vaine promesse.
Les personnes parcourent avec peine la plaine du quotidien, et elles ont besoin d’être guidées par qui est capable de voir les choses d’en haut. C’est pourquoi, nous ne devons pas perdre de vue les nécessités des Églises particulières auxquelles nous devons répondre. Il n’existe pas un pasteur standard pour toutes les Églises. Le Christ connaît la singularité du pasteur que toute Église requiert pour qu’il réponde à ses besoins et l’aide à réaliser ses potentialités. Notre défi est d’entrer dans la perspective du Christ, en tenant compte de cette singularité des Églises particulières.
2. L’horizon de Dieu détermine la mission de la Congrégation
Pour choisir ces ministres, nous avons tous besoin de nous élever, de monter nous aussi au « niveau supérieur ». Nous ne pouvons pas manquer de monter, nous ne pouvons pas nous contenter de mesures basses. Nous devons nous élever au-delà et au-dessus de nos éventuelles préférences, sympathies, appartenances ou tendances pour entrer dans l’ampleur de l’horizon de Dieu et pour trouver ceux qui portent son regard d’en haut. Pas des hommes conditionnés par la peur d’en bas, mais des pasteurs dotés de parresia, capables d’assurer qu’il y a dans le monde un sacrement d’unité (Const. Lumen gentium, n.1) et donc que l’humanité n’est pas destinée à la dérive et à l’égarement.
[…]
3. L’Église apostolique comme source
Alors où trouver cette lumière ? La hauteur de l’Église se trouve toujours dans les profondeurs de ses fondements. Dans l’Église apostolique, il y a ce qui est haut et profond. L’avenir de l’Église habite toujours dans ses origines.
C’est pourquoi je vous invite à faire mémoire et à « visiter » l’Église apostolique pour y chercher certains critères. Nous savons que le collège épiscopal, dans lequel seront insérés les évêques à travers le sacrement, succède au collège apostolique. Le monde a besoin de savoir qu’existe cette succession ininterrompue. Dans l’Église tout au moins, ce lien avec l’arché divine ne s’est pas rompu. Les personnes connaissent déjà la souffrance de tant de ruptures : elles ont besoin de trouver dans l’Église cette permanence indélébile de la grâce du commencement.
4. L’évêque comme témoin du Ressuscité
Examinons par conséquent le moment où l’Église apostolique doit recomposer le collège des Douze après la trahison de Judas. Sans les Douze, la plénitude de l’Esprit ne peut pas descendre. Le successeur doit être cherché parmi ceux qui ont suivi depuis le début le parcours de Jésus et peut à présent devenir « avec les douze » un « témoin de la résurrection » (cf. Ac 1, 21-22). Il faut sélectionner parmi les disciples de Jésus les témoins du Ressuscité.
De là dérive le critère essentiel pour esquisser le visage des évêques que nous voulons avoir. Qui est un témoin du Ressuscité ? C’est quelqu’un qui a suivi Jésus dès les débuts et qui est constitué avec les apôtres témoin de sa Résurrection. Pour nous aussi, c’est là un critère unifiant : l’évêque est celui qui sait rendre actuel tout ce qui est arrivé à Jésus et surtout sait, avec l’Église, se faire témoin de sa Résurrection. L’évêque est avant tout un martyre du Ressuscité. Ce n’est pas un témoin isolé mais ensemble, avec l’Église. Sa vie et son ministère doivent rendre crédible la Résurrection. En s’unissant au Christ dans la croix en se livrant vraiment lui-même, il fait jaillir pour son Église la vie qui ne meurt pas. Le courage de mourir, la générosité d’offrir sa propre vie et de se consumer pour le troupeau sont inscrits dans l’« ADN » de l’épiscopat. Le renoncement et le sacrifice sont congénitaux à la mission épiscopale. Et je veux souligner cela : le renoncement et le sacrifice sont congénitaux à la mission épiscopale. L’épiscopat n’est pas pour soi mais pour l’Église, pour le troupeau, pour les autres, surtout pour ceux qui, selon le monde, seraient à mettre au rebut.
Par conséquent, pour identifier un évêque, la comptabilité des dons humains, intellectuels, culturels ou même pastoraux n’est pas nécessaire. Le profil d’un évêque n’est pas la somme algébrique de ses vertus. Il est certain que nous avons besoin de quelqu’un qui excelle (cic, can. 378 §1) : son intégrité humaine assure sa capacité de relations saines, équilibrées, pour ne pas projeter sur les autres ses propres manques et devenir un facteur d’instabilité ; sa solidité chrétienne est essentielle pour promouvoir la fraternité et la communion ; son comportement juste atteste de la haute mesure des disciples du Seigneur ; sa préparation culturelle lui permet de dialoguer avec les hommes et leurs cultures ; son orthodoxie et sa fidélité à la vérité tout entière conservée par l’Église en fait un pilier et un point de référence ; sa discipline intérieure et extérieure permet d’être en possession de soi-même et ouvre un espace pour l’accueil et la conduite des autres ; sa capacité à gouverner avec une fermeté paternelle garantit la sécurité de l’autorité qui aide à grandir ; sa transparence et son détachement dans l’administration des biens de la communauté confère une autorité morale et suscite l’estime de tous.
Tous ces dons indispensables doivent toutefois être une déclinaison du témoignage central du Ressuscité, subordonnés à cet engagement prioritaire. C’est l’Esprit du Ressuscité qui fait ses témoins, qui parfait et élève la qualité et les valeurs en édifiant l’évêque.
5. La souveraineté de Dieu auteur du choix
Mais revenons au texte apostolique. Après le discernement difficile, vient la prière des apôtres : « Toi, Seigneur, qui connais le cœur de tous les hommes, montre-nous lequel de ces deux tu as choisi » (Ac 1, 24) et « ils tirèrent au sort » (Ac 1, 26). Apprenons quelle est l’atmosphère de notre travail et qui est le véritable Auteur de nos choix. Nous ne pouvons pas nous éloigner de ce « montre-toi, Seigneur ». Il est toujours indispensable d’assurer la souveraineté de Dieu. Les choix ne peuvent pas être dictés par nos prétentions, conditionnés par d’éventuelles « équipes », factions ou hégémonies. Pour garantir cette souveraineté, deux attitudes fondamentales sont nécessaires : le tribunal de notre propre conscience devant Dieu et la collégialité. Et cela constitue une garantie.
Dès les premiers pas de notre travail complexe (des nonciatures au travail des officiaux, des membres et des supérieurs), ces deux attitudes sont incontournables : la conscience devant Dieu et l’engagement collégial. Pas décider de manière arbitraire, mais discerner ensemble. Personne ne peut tout avoir en main, chacun pose avec humilité et honnêteté sa propre tesselle dans une mosaïque qui appartient à Dieu.
Cette vision fondamentale nous pousse à abandonner le petit cabotage de nos barques pour suivre la route du grand navire de l’Église de Dieu, son horizon universel de salut, sa boussole solide dans la Parole et dans le ministère, la certitude du souffle de l’Esprit qui la pousse et la certitude du port qui l’attend.
6. Des évêques « kérygmatiques »
Un autre critère nous est enseigné par Ac 6, 1-7 : les apôtres imposent les mains sur ceux qui doivent servir aux table, car ils ne peuvent pas « laisser de côté la Parole de Dieu ». Étant donné que la foi vient de l’annonce, nous avons besoin d’évêques kérygmatiques. Des hommes qui rendent accessible ce « pour vous » dont parle saint Paul. Des hommes gardiens de la doctrine, non pour mesurer à quel point le monde vit éloigné de la vérité que celle-ci contient, mais pour fasciner le monde, pour l’enchanter par la beauté de l’amour, pour le séduire avec l’offre de la liberté donnée par l’Évangile. L’Église n’a pas besoin d’apologistes de ses propres causes, ni de croisades pour ses batailles, mais de semeurs humbles et confiants de la vérité, qui savent que celle-ci leur est toujours à nouveau remise et qui ont confiance dans sa puissance. Des évêques conscients que, même lorsqu’il fera nuit et que le travail du jour les trouvera fatigués, dans le champ, les semences seront en train de germer. Des hommes patients, parce qu’ils savent que l’ivraie ne sera jamais envahissante au point de remplir le champ. Le cœur humain est fait pour le blé, c’est l’ennemi qui a jeté la mauvaise semence en cachette. Toutefois, le temps de l’ivraie est déjà irrévocablement fixé.
Je voudrais bien souligner cela : des hommes patients ! On dit que le cardinal Siri avait l’habitude de répéter : « Les vertus d’un évêque sont au nombre de cinq : la première la patience, la deuxième la patience, la troisième la patience, la quatrième la patience et la dernière la patience à l’égard de ceux qui nous invitent à avoir de la patience ».
Il faut donc plutôt s’engager sur la préparation du terrain, sur l’étendue des semailles. Agir comme des semeurs confiants, en évitant la peur de celui qui a l’illusion que la récolte ne dépend que de lui, ou l’attitude désespérée des élèves qui, ayant négligé de faire leurs devoirs, s’écrient que désormais il n’y a plus rien à faire.
7. Des évêques orants
Le même texte de Ac 6, 1-7 se réfère à la prière comme à l’une des deux tâches essentielles de l’évêque : « Cherchez plutôt parmi vous, frères, sept hommes de bonne réputation, remplis de l’Esprit et de sagesse, et nous les préposerons à cet office ; quant à nous, nous resterons assidus à la prière et au service de la parole » (vv. 3-4). J’ai parlé d’évêques kérygmatiques, à présent je signale l’autre caractéristique de l’identité de l’évêque : un homme de prière. Dans la prière, il doit avoir la même parresia que dans l’annonce de la Parole, il doit l’avoir dans la prière, car il traite avec Dieu notre Seigneur le bien de son peuple, le salut de son peuple. Être courageux dans sa prière d’intercession comme Abraham, qui négociait avec Dieu le salut de ce peuple (cf. Gn 18, 22-33) ; comme Moïse, quand il se sentait impuissant pour guider le peuple (Nb 11, 10-15), quand le Seigneur est las de son peuple (cf. Nb 14, 10-19), ou quand il lui dit qu’il va détruire le peuple et qu’il lui promet de le nommer chef d’un autre peuple. Avoir ce courage de dire non, je ne négocie pas mon peuple, devant Lui ! (cf. Ex 32, 11-14.30.32). Un homme qui n’a pas le courage de discuter avec Dieu en faveur de son peuple ne peut pas être évêque — je dis cela du fond du cœur, j’en suis convaincu —, pas plus que celui qui n’est pas capable d’assumer la mission de conduire le peuple de Dieu jusqu’au lieu que Lui, le Seigneur, lui indique (cf. Ex 32, 33-34).
Et cela vaut aussi pour la patience apostolique : il doit avoir dans la prière la même hypomonequ’il doit exercer dans la prédication de la Parole (cf. 2 Co 6, 4). L’évêque doit être capable d’« entrer en patience » devant Dieu, en regardant et en se laissant regarder, en trouvant et en se laissant trouver, patiemment devant le Seigneur. Souvent en s’endormant devant le Seigneur, mais cela est bon, cela fait du bien !
Parresia et hypomone dans la prière forgent le cœur de l’évêque et l’accompagnent dans laparresia et l’hypomone qu’il doit avoir dans l’annonce de la Parole dans le kerigma. C’est ce que je comprends quand je lis le verset 4 du chapitre 6 des Actes des apôtres.
8. Des évêques pasteurs
Dans les paroles que j’ai adressées aux représentants pontificaux, j’ai ainsi tracé le profil des candidats à l’épiscopat : ils doivent être des pasteurs proches des personnes, « des pères et des frères, qu’ils soient doux, patients et miséricordieux ; qu’ils aiment la pauvreté, intérieure comme liberté pour le Seigneur et aussi extérieure, comme simplicité et austérité de vie, qu’ils n’aient pas une psychologie de “princes” ;... qu’ils ne soient pas ambitieux et qu’ils ne recherchent pas l’épiscopat... qu’ils soient les époux d’une Église, sans être constamment à la recherche d’une autre — cela s’appelle adultère. Qu’ils soient capables de “surveiller” le troupeau qui leur sera confié, c’est-à-dire d’avoir soin de tout ce qui le garde uni ;... capables de “veiller” pour le troupeau » (21 juin 2013).
Je répète que l’Église a besoin de pasteurs authentiques ; et je voudrais approfondir ce profil du pasteur. Reprenons le testament de l’apôtre Paul (cf. Ac 20, 17, 38). Il s’agit de l’unique discours prononcé par l’apôtre dans le livre des Actes qui est adressé aux chrétiens. Il ne parle pas à ses adversaires pharisiens, ni aux sages grecs, mais aux siens. Il nous parle. Il confie les pasteurs de l’Église « à la Parole de la grâce qui a le pouvoir d’édifier et d’accorder l’héritage ». Ils ne sont donc pas les maîtres de la Parole, mais ils sont remis à celle-ci, ce sont des serviteurs de la Parole. Ce n’est qu’ainsi qu’il est possible d’édifier et d’obtenir l’héritage des saints. À ceux qui se tourmentent avec la question sur leur héritage — « quel est le legs d’un évêque ? L’or ou l’argent ? » — Paul répond : la sainteté. L’Église demeure quand se répand la sainteté de Dieu dans ses membres. Quand du plus profond de son cœur, qui est la Très Sainte Trinité, cette sainteté jaillit et atteint tout le Corps. Il est nécessaire que l’onction s’écoule du haut jusqu’à l’ourlet du manteau. Un évêque ne pourrait jamais cesser de s’inquiéter que l’huile de l’Esprit de sainteté arrive bien jusqu’au dernier pan de l’habit de son Église.
Le Concile Vatican II affirme qu’aux évêques « la charge pastorale, c’est-à-dire le soin habituel et quotidien de leurs brebis, [leur] est pleinement remise » (Lumen gentium, n.27). Il faut s’arrêter davantage sur ces deux qualificatifs du soin du troupeau : habituel et quotidien. À notre époque, l’habitude et la quotidienneté sont souvent associées à la routine et à l’ennui. C’est pourquoi on cherche assez souvent à s’échapper vers un « ailleurs » permanent. Cela est une tentation des pasteurs, de tous les pasteurs. Les pères spirituels doivent bien nous l’expliquer, afin que nous le comprenions et que nous n’en soyons pas victimes. Dans l’Église aussi, nous ne sommes malheureusement pas exempts de ce risque. C’est pourquoi il est important de réaffirmer que la mission de l’évêque exige l’assiduité et la quotidienneté. Je pense qu’en cette époque de rencontres et de congrès, le décret de résidence du Concile de Trente est très actuel : il est très actuel et il serait beau que la Congrégation pour les évêques écrive quelque chose à ce propos. Le troupeau a besoin de trouver sa place dans le cœur du pasteur. Si celui-ci n’est pas solidement ancré en lui-même, dans le Christ et dans son Église, il sera sans cesse ballotté par les vagues à la recherche de compensations éphémères et il n’offrira aucun abri au troupeau.
Conclusion
À la fin de mon discours, je me pose la question : où pouvons-nous trouver de tels hommes ? Cela n’est pas facile. Existent-ils ? Comment les sélectionner ? Je pense au prophète Samuel à la recherche du successeur de Saül (cf. 1 S 16, 11-13) qui demande au vieux Jessé : « En est-ce fini avec tes garçons ? », et apprenant que le petit David faisait paître le troupeau, il ordonne : « Envoie-le chercher ». Nous aussi nous ne pouvons manquer de scruter les champs de l’Église en cherchant qui présenter au Seigneur, pour qu’Il dise : « Donne-lui l’onction : c’est lui ! ». Je suis certain qu’ils existent, car le Seigneur n’abandonne pas son Église. Peut-être est-ce nous qui n’allons pas assez dans les champs pour les chercher. Peut-être avons-nous besoin de l’avertissement de Samuel : « Nous ne nous mettrons pas à table avant qu’il ne soit venu ici ». C’est de cette sainte inquiétude que je voudrais que vive cette Congrégation.
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À 105 ans, le plus vieux prêtre du monde célèbre toujours la messe
Le R.P. Jacques Clément…
Le P. Jacques Clémens, 105 ans, célèbre chaque dimanche la messe à Nalinnes, en Belgique, en l’église Saint-Benoît qu’il a fait construire il y a plus d’un demi-siècle.
Le P. Jacques Clémens, qui a fêté son 105e anniversaire le 11 juillet, est le plus vieux prêtre du monde, loin devant son dauphin italien, le P. Alessandro de Sanctis, qui vient de fêter ses 95 ans.
À la tête de la paroisse de Bultia, dans le diocèse de Tournai, en Belgique, le P. Clémens est prêtre depuis 78 ans. Il célèbre chaque semaine la messe dominicale à 9h30 en l’église Saint Benoît devant une assemblée de 80 fidèles, émerveillés par la force de ses homélies.
Sa mémoire est intacte, il a seulement l’ouïe « un peu déficiente », reconnaît-il lui-même.
LE SECRET DE SA LONGÉVITÉ
Ce prêtre d’origine hollandaise explique sa longévité par sa manière de vivre, obéissant toujours au même rythme : il se lève, mange et se couche tous les jours à la même heure.
« Surtout, c’est un homme qui a confiance dans les gens et dans la vie », souligne Michelle Galland, 62 ans, qui a travaillé plusieurs années comme catéchiste aux côtés du P. Clémens pour le diocèse de Tournai.
UN MEMBRE DE LA COMMUNAUTÉ CHANOINE DU LATRAN
Il y a quelques années, il célébrait encore la messe tous les matins. Mais, l’an dernier, il a sagement décidé de se limiter à la messe dominicale : « De toute façon, toutes les personnes qui venaient à la messe quotidienne, je les ai enterrées », lance-t-il parfois avec humour.
Chanoine régulier du Latran, il rend visite à sa communauté tous les midis, autonome dans sa voiture, mais quand même loin du temps où il se déplaçait à vélo et soutane.
Fanny Cheyrou
© Copyright 2014 – La Croix
Synode de 1989 – 25 ans après
Questionnaire de la Commission « Société et développement »
Afin d'établir le bilan de ce 3ème synode, voici un questionnaire auquel vous êtes invités à répondre… n’hésitez pas !
Comment voyez-vous la société polynésienne en ce début du 21ème siècle ? Esquissez votre regard sous forme d’un tableau en termes généraux (positifs, négatifs, neutres,...)
Le bien commun et l'intérêt général sont une priorité.
Que faites-vous au quotidien pour mettre nos ressources naturelles (lesquelles ?) au service du bien commun et de l'intérêt général ?
Que faites-vous pour promouvoir nos valeurs humaines fondamentales (lesquelles ?) ?
Le partage et la solidarité marquent la vie chrétienne.
Comment vous engagez-vous concrètement (un peu, beaucoup, pas du tout...) en faveur de la justice sociale dans ton pays ?
Quelle place donnez-vous tous les jours au partage et à la solidarité... sur le plan familial, professionnel, associatif, ecclésial... ?
La société exclut facilement les plus faibles.
Quelle contribution personnelle (familiale, professionnelle, associative, ecclésiale...) avez-vous apporté pour que cette société soit plus ouverte, plus proche et plus attentive aux plus petits, aux pauvres, aux malades, aux laissés-pour-compte (sdf, raerae, drogués, prisonniers, personnes âgées, sidéens, handicapés, mamans isolées ... ) ?
Riches toujours plus scandaleusement riches,
pauvres toujours désespérément plus misérables.
Que ressentez-vous sincèrement par rapport aux dérives de notre société ? Dans quelles structures êtes-vous engagé pour lutter contre cette évolution ?
Comment savez-vous si votre engagement est ou a été suffisant ?
Quel fruit a-t-il porté ?
Trop de gens considèrent l'homme
comme une marchandise.
Que faites-vous pour que la personne humaine soit mise au centre de notre société, de son système éducatif, de son développement économique ?
Que faites-vous pour bâtir une collectivité plus humaine (exemples...), plus pacifique (exemples...), plus attachée aux valeurs culturelles traditionnelles (les nommer...) ?
Votre témoignage ne peut pas se réduire à votre paroisse.
En quoi votre foi, votre pratique religieuse (prière, sacrements,...), votre vie spirituelle sont-elles les guide et les soutien de votre engagement concret au service de votre prochain ?
À l'ère des nouvelles technologies, la calomnie et la désinformation font encore plus de mal.
Elles nous rappellent la grande époque du nucléaire polynésien. Comment faites-vous aujourd'hui pour ne pas tomber dans le panneau ?
Quels sont les sujets dont vous n’avez pas envie de discuter (avortement, contraception, euthanasie, etc.) ?
Comment faites-vous aujourd'hui pour former votre jugement ?
Vos réponses sont à envoyer :
- soit B.P. 94 - 98713 PAPEETE
- (en précisant « Bilan synodal »)
- ou par mail : archeveche@catholic.pf
- ou com.societedeveloppement@gmail.com
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Espérer au-delà des préjugés
Commentaire de l’Évangile du 20ème Dimanche du Temps ordinaire
Avons-nous bien entendu ? Jésus, surpris en flagrant délit d’intolérance et de mépris ? Cela est d’autant plus surprenant que le troisième Isaïe dans la première lecture parle de « Maison de prière pour tous les peuples. » Il allait même jusqu’à dire aux versets 3 à 5 de ce même chapitre 56 : « Si un eunuque respecte mes sabbats, s’il choisit de faire ce qui m’est agréable, s’il s’en tient à l’engagement que j’attends de mon peuple, alors je lui réserverai un emplacement pour son nom. »Saint Paul, de son côté, dans la deuxième lecture se définit comme « apôtre des païens. » Jésus, paradoxalement, apparaît comme bien moins ouvert.
Cette attitude a embarrassé la plupart des commentateurs. Ils tentent de surmonter la difficulté en imaginant une feinte pédagogique : Jésus ferait semblant de refuser pour affiner la foi de la suppliante. Ce serait lui prêter alors un jeu bien cruel et sadique !
Non, mieux vaut prendre le récit comme il est. À toutes ces tentatives plus ou moins habiles, je préfère la remarque de la théologienne protestante France Quéré quand elle écrivait : « Jésus s’est fait homme jusqu’aux préjugés. Dans son pays, on n’aime pas les Cananéens. » Les meilleurs exégètes actuels nous démontrent que le Jésus historique n’a que très épisodiquement rencontré des païens, qu’il a fort peu quitté son pays, qu’il n’a prêché qu’à ses compatriotes juifs, ce dont témoigne cette parole rapportée par Matthieu : « Ne prenez pas le chemin des païens et n’entrez pas dans une ville de Samaritains ; allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël » (10,5). Jésus a du bel et bien penser qu’il n’était envoyé si ce n’est que, au moins d’abord pour les brebis perdues d’Israël. C’est au sein de son peuple, dans des conditions historiques bien définies, qu’il vit sa mission. C’est bien pourquoi les premiers chrétiens ont eu tant de mal à passer aux païens, comme en témoignent le Livre des Actes des Apôtres et les lettres de saint Paul.
Pourquoi, la rencontre au hasard du chemin, de cette maman païenne, n’aurait-elle pas été pour le Christ un événement inattendu et embarrassant ? Sa réponse à la demande de la Cananéenne est presque méprisante : « Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le donner aux petits chiens. » Mais la femme ne se laisse pas démonter. Avec humour et audace, et aussi peut-être parce qu’elle sent la bonté du maître, elle transforme l’image offensante en une évocation familière et domestique : « mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. » Et nous voyons Jésus craquer. Il s’incline devant cette volonté féminine, il revient, – et c’est la seule fois ! -, sur son refus.
Il fait voler en éclat les idées toutes faites dont il était encore habité. La pureté rituelle qui sépare du monde païen pour être en contact avec Dieu, il la fait sauter. La véritable impureté, c’est le rejet de l’autre. Et Jésus ici commence à enlever la barrière inutile qui sépare Juifs et païens.
Sommes-nous artisans de solidarité et d’unité dans le milieu où nous vivons ? L’audace têtue de la Cananéenne bouscule-t-elle notre vie de foi ? Quand tout est désespéré, une mère espère encore. Quelle merveille surprenante : la foi d’une maman étrangère ouvre le cœur de Jésus aux païens ! Entrons dans une semblable confiance : « … ta foi est grande, que tout s’accomplisse comme tu le veux ! »
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