PKO 07.10. 2012
Dimanche 7 octobre 2012 – XXVIIème Dimanche du Temps ordinaire – Année B
Bulletin gratuit de liaison de la communauté de la Cathédrale de Papeete n°49/2012
HUMEURS
Jeudi 11 octobre 2012
50ème anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II
Vu de Tahiti, cet événement peut paraître bien loin de nous, de nos préoccupations, de notre histoire… et pourtant !…
Le Concile Vatican II a apporté un nouvel élan à l’évangélisation en profondeur de nos îles.
Mgr Paul MAZE participa aux réunions du Concile, et la mise en œuvre fut faite dans le tout nouvel archidiocèse de Papeete par Mgr Michel COPPENRATH qui su faire entrer l’Église de Polynésie dans l’esprit de Vatican II en y associant toutes les sources vives de la communauté chrétienne.
Parmi les nombreux fruits du Concile Vatican II en Polynésie, on notera tout d’abord les synodes (1970, 1973 et 1989) et la révision apostolique (1978) qu’il initia et qui sont à l’origine de l’école des katekita et des nombreuses écoles de la foi de juillet ; l’A.F.C., l’U.F.C., le Pou Utuafare…
Autre fruit important fut l’introduction du diaconat permanent avec l’ouverture de l’école diaconale le 12 janvier 1976…
Et plus généralement, c’est l’effort d’inculturation notamment au travers de la liturgie (traduction des rituels et du Nouveau Testament en tahitien), d’une créativité de chants de qualité… qui caractérise l’élan du Concile en Polynésie.
Encore un autre fruit du Concile en Polynésie qui marque beaucoup les chrétiens de passage chez nous est la place et l’action des laïcs dans nos communautés…
Nous pourrions rallonger encore cette liste… par de belles réalisations nées de la mise en œuvre du Concile par des pasteurs avisés…
Mais comme le rappelle Mgr André VINGT-TROIS, archevêque de Paris, « le Concile Vatican II n’est pas derrière nous mais devant nous ! »
En effet, si beaucoup de choses ont été mise en œuvre, ce n’est pas pour autant le temps du repos… il reste encore beaucoup de travail :
- La formation et l’encouragement des laïcs à un engagement fort dans la gestion de la société et notamment au niveau politique…
- La tentation du cléricalisme est toujours là avec une difficulté pour les clercs d’une véritable transparence dans la gestion des biens de la communauté chrétienne et la difficulté de rendre des comptes aux fidèles…
- Et surtout, une harmonisation pour chacun d’entre nous entre la foi que nous professons et la vie que nous menons. L’enjeu de la nouvelle évangélisation voulu par le pape Benoît XVI nécessité une cohérence visible chez les chrétiens entre ce qu’ils annoncent et ce qu’ils vivent…
Ensemble, entrons dans l’Année de la Foi !
En marge de l’actualité
Ouverture de l’Année de la Foi
Le 7 octobre s'ouvrira à Rome le Synode sur la Nouvelle Évangélisation. Il coïncide avec le lancement de l'Année de la Foi fixé au 11 octobre, jour du 50ème anniversaire de l'ouverture du concile Vatican II et du 20ème anniversaire de la publication du Catéchisme de l'Église catholique.
Foi et évangélisation vont de pair. Saint Paul disait : « Malheur à moi si je n'annonçais pas l'Évangile » (1 Co 9, 16). Benoît XVI rappelle que tout baptisé est invité à « faire du Credo sa prière quotidienne ». Cela suppose un approfondisse-ment personnel de la foi reçue au baptême, par une relecture des riches textes du Concile et du Catéchisme.
Mais le Pape souligne aussi que « la foi se vit, se célèbre et se partage ». C'est un appel a la vivre d'une façon renouvelée. En se laissant habiter par le Christ, Seigneur et Sauveur, nous sommes en position de témoin, en état de mission.
Confesser ma foi c'est être témoin de l'amour de Dieu en tous lieux et auprès de toutes les personnes que je côtoie. Cette charité active est ma manière de rendre compte de ma foi, elle est à l'opposé du prosélyte qui cherche à convaincre et convertir au mépris de la liberté de l'autre.
J'ai foi en Dieu, cela doit se voir… C'est la manière d'annoncer le Salut apporté par le Christ à l'humanité.
Dominique SOUPÉ
Chancelier
On ne peut pas prier Dieu d’une manière individualiste
Catéchèse du pape Benoît XVI du 3 octobre 2012
« On ne peut pas prier Dieu d’une manière individualiste », explique Benoît XVI dans sa seconde catéchèse du mercredi sur la prière liturgique. Il souligne que la liturgie n'est pas d'abord œuvre de l'homme mais avant tout une action de Dieu.
Chers frères et sœurs,
Dans ma catéchèse précédente, j’ai commencé à parler de l’une des sources privilégiées de la prière chrétienne : la sainte liturgie qui, comme l’affirme le Catéchisme de l’Eglise catholique, est « participation à la prière du Christ, adressée au Père dans l’Esprit Saint. Dans la liturgie toute prière chrétienne trouve sa source et son terme » (n. 1073).
Je voudrais aujourd’hui que nous nous demandions : dans ma vie, est-ce que je réserve un espace suffisant à la prière et, surtout, quelle place a, dans mon rapport avec Dieu, la prière liturgique, spécialement la sainte messe, en tant que participation à la prière commune du Corps du Christ qui est l’Eglise ?
Pour répondre à cette question, nous devons rappeler avant tout que la prière est la relation vivante des enfants de Dieu avec leur Père infiniment bon, avec son Fils Jésus-Christ et avec son Esprit Saint (cf. ibid., 2565). Ainsi, la vie de prière consiste habituellement dans le fait d’être en présence de Dieu et d’en avoir conscience, de vivre en relation avec Dieu, comme l’on vit habituellement les rapports de notre vie, avec nos parents les plus chers, avec les vrais amis ; plus encore, c’est la relation avec le Seigneur qui apporte la lumière à toutes nos autres relations. Cette communion de vie avec Dieu, Un et Trine, est possible parce que par le baptême nous avons été insérés dans le Christ, nous avons commencé à être une seule chose avec Lui (cf. Rm 6, 5).
En effet, c’est seulement dans le Christ que nous pouvons dialoguer avec Dieu le Père comme ses enfants, autrement, cela n’est pas possible, mais en communion avec le Fils, nous pouvons dire nous aussi ce que Lui a dit : « Abba ». En communion avec le Fils, nous pouvons connaître Dieu comme un vrai Père (cf. Mt 11,27). C’est pourquoi la prière chrétienne consiste dans le fait de regarder constamment et de façon toujours nouvelle vers le Christ, de parler avec Lui, de se tenir en silence avec Lui, de l’écouter, d’agir et de souffrir avec Lui. Le chrétien redécouvre sa vraie identité dans le Christ, « premier né de toute créature », en qui subsistent toutes choses (cf. Col 1, 15 ss.). En nous identifiant à Lui, en étant une seule chose avec Lui, je redécouvre mon identité personnelle, celle de vrai enfant qui regarde vers Dieu comme vers un Père plein d’amour.
Mais n’oublions pas : le Christ, nous le découvrons, nous le connaissons comme une Personne vivante, dans l’Église. Elle est « son Corps ». Cette corporéité peut être comprise à partir des paroles bibliques sur l’homme et sur la femme : les deux seront une seule chair (cf. Gn 2,24 ; Ep. 5,30ss. ; 1 Co 6,16s). Le lien inséparable entre le Christ et l’Eglise, à travers la force unifiante de l’amour, n’annulle pas le « tu » et le « je », mais au contraire élève leur unité la plus profonde. Trouver sa propre identité dans le Christ signifie atteindre une communion avec lui, qui ne m’annule pas, mais m’élève à la dignité la plus haute, celle d’enfant de Dieu dans le Christ : « l’histoire d’amour entre Dieu et l’homme consiste justement dans le fait que cette communion de volonté grandit dans la communion de pensée et de sentiment, et ainsi notre vouloir et la volonté de Dieu coïncident toujours plus » (Enc. Deus caritas est, 17). Prier signifie s’élever à la hauteur de Dieu, grâce à une transformation nécessaire et graduelle de notre être.
Ainsi, en participant à la liturgie, nous faisons nôtre la langue maternelle de l’Église, nous apprenons à parler en elle et pour elle. Naturellement, comme je l’ai déjà dit, cela arrive de façon graduelle, peu à peu. Je dois me plonger progressivement dans les paroles de l’Église, avec ma prière, avec ma vie, avec ma souffrance, avec ma joie, avec ma pensée. C’est un chemin qui nous transforme.
Je pense alors que ces réflexions nous permettent de répondre à la question que nous nous sommes posée au début : comment est-ce que j’apprends à prier, comment est-ce que je grandis dans la prière ? En regardant le modèle que Jésus nous a enseigné, le Notre Père, nous voyons que le premier mot est « Père » et la deuxième « notre ». La réponse est donc claire : j’apprends à prier, je nourris ma prière en m’adressant à Dieu et en priant-avec-les-autres, en priant avec l’Église, en acceptant le don de ses paroles, qui deviennent pour moi peu à peu familières, et riches de sens.
Le dialogue que Dieu établit avec chacun de nous, et nous avec Lui, dans la prière inclut toujours un « avec » ; on ne peut pas prier de façon individualiste. Dans la prière liturgique, surtout l’Eucharistie, et – formés par la liturgie – toute prière, nous ne parlons pas seulement en tant qu’individus, mais au contraire nous entrons dans le « nous » de l’Église qui prie. Et nous devons transformer notre « je » en entrant dans ce « nous ».
Je voudrais rappeler un autre aspect important. Dans le Catéchisme de l’Église catholique, nous lisons : « Dans la liturgie de la Nouvelle alliance, toute action liturgique, spécialement la célébration de l’Eucharistie et des sacrements, est une rencontre entre le Christ et l’Eglise » (n. 1097) ; c’est donc le « Christ total », toute la communauté, le Corps du Christ, uni à son Chef qui célèbre.
Alors, la liturgie n’est pas une forme d’ « auto-manifestation » d’une communauté, mais au contraire le fait de sortir du simple « être-soi-même », être enfermés sur soi-même, et le fait d’accéder au grand banquet, d’entrer dans la grande communauté vivante, dans laquelle Dieu lui-même nous nourrit. La liturgie implique cette universalité et ce caractère universel doit entrer toujours de nouveau dans la conscience de tous. La liturgie chrétienne est le culte du temple universel qui est le Christ ressuscité, dont les bras sont étendus sur la croix, pour attirer tous [les hommes] dans l’embrassement de l’amour éternel de Dieu. C’est le culte du Ciel ouvert. Ce n’est jamais seulement l’événement d’une communauté singulière, située dans le temps et dans l’espace. Il est important que chaque chrétien se sente et soit réellement inséré dans ce « nous » universel qui fournit le fondement et le refuge au « je » dans le Corps du Christ qui est l’Église.
En cela, nous devons tenir présent [à l’esprit] et accepter la logique de l’incarnation de Dieu : Il s’est fait proche, présent, en entrant dans l’histoire et dans la nature humaine, en se faisant l’un de nous. Cette présence est permanente dans l’Église, son Corps. Alors la liturgie n’est pas le souvenir d’événements passés, mais elle est la présence vivante du Mystère pascal du Christ, qui transcende et unit les temps et les espaces.
Si, dans la célébration n’émerge pas le caractère central du Christ, ce n’est pas une liturgie chrétienne, totalement dépendante du Seigneur et soutenue par sa présence créatrice. Dieu agit par le Christ et nous ne pouvons agir que par Lui et en Lui. La conviction que la liturgie n’est pas « nôtre », un « faire » qui est mien, mais qu’elle est une action de Dieu en nous et avec nous, doit grandir en nous chaque jour.
Par conséquent, ce n’est pas l’individu – prêtre ou fidèle – ni le groupe que la liturgie célèbre, mais elle est avant tout une action de Dieu à travers l’Église, qui a son histoire, sa riche tradition et sa créativité. Cette universalité et cette ouverture qui est propre à toute la liturgie est l’une des raisons pour laquelle elle ne peut pas être imaginée ou modifiée par une communauté ou par des experts, mais doit être fidèle aux formes de l’Église universelle.
Même dans la liturgie de la plus petite communauté toute l’Église est toujours présente. C’est pourquoi il n’existe pas « d’étrangers » dans la communauté liturgique. Toute l’Eglise participe ensemble à chaque célébration liturgique, le ciel et la terre, Dieu et les hommes.
La liturgie chrétienne - même célébrée en un lieu et dans un espace concret, exprimant le « oui » d’une communauté déterminée – est par nature catholique, provient du tout et conduit au tout, en unité avec le pape, avec les évêques, avec les croyants de toutes les époques et de tous les lieux. Plus une communauté est animée de cette conscience, plus le sens de la liturgie se réalise en elle de façon plus fructueuse.
Chers amis, l’Église se rend visible de beaucoup de façons : dans l’action caritative, dans les projets de mission, dans l’apostolat personnel que tout chrétien doit réaliser dans son propre milieu. Mais le lieu où l’on fait pleinement l’expérience de l’Église, c’est la liturgie : elle est l’acte dans lequel nous croyons que Dieu entre dans notre réalité, et nous pouvons le rencontrer, nous pouvons le toucher. C’est l’acte par lequel nous entrons en contact avec Dieu : Il vient à nous et nous sommes illuminés par Lui. C’est pourquoi, lorsque, dans les réflexions sur la liturgie, nous ne concentrons notre attention que sur « comment » la rendre attirante, intéressante, belle, nous risquons d’oublier l’essentiel : la liturgie est célébrée pour Dieu et non pour nous-mêmes ; c’est son œuvre ; c’est Lui le sujet ; et nous devons nous ouvrir à Lui et nous laisser guider par Lui et par son Corps qui est l’Église.
Demandons au Seigneur d’apprendre chaque jour à vivre la sainte liturgie, spécialement la célébration eucharistique, en priant dans le « nous » de l’Église qui dirige son regard non vers elle-même, mais vers Dieu, et en nous sentant une partie de l’Église vivante de tout lieu et de tout temps. Merci.
© Libreria Editrice Vaticana – 2012
11 octobre 1962 – Ouverture du Concile Vatican II
50 ans… pas une ride !
Le pape Benoit XVI a choisi d’ouvrir l’Année de la Foi le 11 octobre 2012, soit 50 ans après l’ouverture du Concile Vatican II. Ce n’est as un hasard, mais la volonté de conduire le Peuple de Dieu à une relecture approfondie, en Église, du Concile… Voici quelques éléments qui nous donnerons un aperçu du contexte dans lequel s’est ouvert ce Concile.
25 janvier 1959. Le pape, Jean XXIII, élu quelques mois plus tôt (le 28 octobre 1958), se rend comme la tradition le veut, à la Basilique St Paul-hors-les-murs pour la fête de la conversion de St Paul, ainsi que pour la célébration de conclusion de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Jusque là, rien de particulier.
Mais à la fin de la célébration, le pape retrouve une petite vingtaine de cardinaux à la sacristie de la Basilique. Il leur annonce son idée de convoquer un concile. Bien qu’il ait déjà évoqué cette possibilité avec son secrétaire particulier plus d’un an auparavant (avant d’être pape), Jean XXIII se lance. Lui, le pape de transition, sera celui qui donnera une visibilité au mouvement de renouveau qui frémissait dans l’Église. Ce sera un aggiornamento !
Rapidement, les commissions préparatoires vont se mettre au travail, les évêques sont convoqués et en octobre 1962, le deuxième concile du Vatican débutera… Le 11 octobre, à la fin de la messe d’ouverture présidée par « le bon pape Jean », le discours d’ouverture inaugure les travaux. Et n’en déplaise aux détracteurs ou défenseurs de la thèse du concile comme rupture, Jean XXIII rappelle dès le début de ce discours la succession des conciles et le sens de ces rassemblements :
« Tous les conciles – que ce soient les 20 conciles œcuméniques ou bien les nombreux et non moins importants conciles provinciaux et régionaux – qui ont été célébrés au cours des siècles, attestent avec évidence la vitalité de l’Église Catholique et sont inscrits comme des lumières éclatantes dans son histoire. (…)
Chaque fois qu’ils sont célébrés, les Conciles Œcuméniques proclament de manière solennelle cette correspondance avec le Christ et avec son Église et irradient pour tous la lumière de la vérité, orientent la vie des personnes, des familles et de la société sur le juste chemin, suscitent et renforcent les énergies spirituelles, élèvent les âmes vers les biens éternels et vrais. (…)
Ce qui intéresse avant tout le Concile, c’est que le dépôt sacré de la doctrine chrétienne soit conservé et enseigné de manière plus efficace. Une telle doctrine embrasse l’homme intégral, composé de son âme et de son corps, et elle nous commande, à nous qui habitons sur cette terre, de tendre comme des pèlerins vers la patrie céleste. (…)
Pour qu’une telle doctrine rejoigne les multiples champs de l’activité humaine, qui concernent les personnes seules, les familles et la vie sociale, il est avant tout nécessaire que l’Église ne détourne jamais les yeux du patrimoine de la vérité reçu des anciens ; et en même temps, elle a besoin de regarder aussi le présent, qui comporte des situations nouvelles et de nouveau modes de vie, et qui a ouvert de nouvelles voies à l’apostolat catholique. (…) »
On l’aura compris, Jean XXIII ne voulait rien changer à la doctrine catholique. Là n’était pas le but du concile. En revanche, c’est dans la présentation de cette doctrine que réside le vrai travail des pères du concile :
« Aux temps présents, il faut que l’ensemble de l’enseignement chrétien soit soumis par tous à un nouvel examen, avec une âme sereine et calme, sans rien en retirer, à la manière soignée de penser et de formuler les paroles qui remontent aux actes des Conciles de Trente et de Vatican I ; il convient que cette même doctrine soit examinée plus largement et plus à fond et que les âmes en soient plus pleinement imprégnées et informées, comme l’espèrent ardemment tous les sincères partisans de la vérité chrétienne, catholique, apostolique ; il convient que cette doctrine sûre et immuable, à laquelle on doit adhérer de manière fidèle, soit approfondie et exposée selon des demandes de notre temps. En effet, autre est le dépôt de la Foi, c’est-à-dire les vérités contenues dans notre vénérée doctrine, autre est le mode par lequel elles sont annoncées avec toujours le même sens et dans la même acception. Une grande importance sera donnée à cette méthode, et si cela est nécessaire, elle sera appliquée avec patience ; on devra par conséquent adopter cette manière d’exposition qui correspond le plus au magistère, dont le caractère est avant tout pastoral ».
Le mot est lâché. Il aura fallu attendre plus de la moitié du discours du pape pour trouver, une fois et une seule fois, ce terme « pastoral ». Auparavant, le pape a largement rappelé que le concile n’avait pas pour but de modifier la doctrine. Simplement de la transcrire en langage intelligible par les hommes (et les femmes) de ce temps. Antoine Wenger, dans l’ouvrage Vatican II, Chronique de la première Session (Paris, Centurion, 1963), notait à propos de ce discours d’ouverture, qu’il était « certes, hardi, mais (…) toutes les parties respirent un équilibre parfait, entre une totale fidélité à la tradition et une ouverture non moins grande au monde. Le discours du 11 octobre était la véritable charte du Concile. Plus qu’un ordre du jour, il définissait un esprit. Plus qu’un programme, il donnait une orientation » (p.38). Et de citer le cardinal Montini (futur pape Paul VI), qui écrivait à propos de ce discours : « Il faut sans cesse y revenir, car ce discours est la clé pour comprendre le reste » (ibid., p.39).
Le Concile sera donc pastoral ! 50 ans plus tard, l’Église parle de Nouvelle évangélisation, de catéchèse,… et ces mots ne peuvent que résonner comme une tentative moderne de dire la foi, de la faire connaître à un peuple pour qui elle n’est plus qu’un ensemble de mots ou de contenus hermétiques. Redécouvrir Jésus Christ, présent aujourd’hui dans son Église, agissant par son Esprit Saint, pour mener les hommes au Père, c’est là tout l’expérience que les chrétiens veulent partager avec leurs frères.
Le père Congar, dans ses notes parues après sa mort sous le titre Mon Journal du Concile (tome I, Paris, Cerf, 2002), note à la date du 11 octobre 1962 (p. 106) : « À 8h35, on entend au micro le bruit lointain d’une marche à moitié militaire. Puis on chante le Credo. Je suis venu ici pour prier : prier avec, prier dans. J’ai de fait beaucoup prié ». Cette insistance sur la prière illustre certainement de la manière la plus riche possible cette dimension pastorale du Concile.
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Le concile Vatican II est devant nous !
Intervention de Mgr André VINGT-TROIS à Paris
Célébrer le 50e anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II, ce n’est pas céder à la mode des rétrospectives nostalgiques, c’est reprendre conscience du dynamisme prophétique inscrit dans cet acte ecclésial, afin de renouveler notre foi au Christ Ressuscité et en être les témoins en ce début de XXIe siècle.
Lourde responsabilité d’être entré dans la vie sacerdotale au moment où s’ouvrait le Concile Vatican II, il y a 50 ans ! Mais d’abord je voudrais vous dire que le Concile Vatican II - pas plus que le Concile de Nicée ou le Concile de Trente, ou le Concile Vatican I, ou aucun des vingt autres conciles œcuméniques qui l’ont précédé - n’est pas derrière nous, il est devant nous ! Il est derrière nous pour les travaux qui ont été accomplis en leur temps, il est derrière nous pour les débats qui l’ont animé et qui ont été évoqués avec talent à l’instant, il est derrière nous pour un certain nombre d’images d’archives dont l’apparition épisodique à la télévision nous montre combien les archives vieillissent vite.
Mais le Concile Vatican II est devant nous pour ses fruits. Il est devant nous pour sa fécondité. Il est devant nous pour l’accomplissement des dynamismes qu’il a voulu mettre en œuvre à travers l’Église. Dynamisme de la collégialité, dont nous avons eu une première image à travers ce rassemblement de 2 500 évêques du monde entier, visibles pour la première fois à l’œil des fidèles qui croyaient que l’Église était universelle, mais qui n’avaient jamais pu voir ce que cela voulait dire. Prophétique d’une certaine façon puisque cette circulation et cette réunion d’évêques du monde entier était à l’orée d’un mouvement de population qui traverse notre univers et qui fait qu’aujourd’hui les cinq continents sont présents partout, en tout cas chez nous à Paris. Prophétique aussi parce qu’à travers la différence des cultures, la différence des traditions théologiques, la différence des expériences, ces évêques ont été acculés à revenir à la source, au cœur, à l’énergie centrale du mystère de la foi, le Christ tel qu’il est manifesté dans les Écritures et tel qu’il est attesté à travers les témoins depuis 2 000 ans.
Oui, ce renouveau de l’attention portée à la personne du Christ, ce renouveau de la prise de conscience que le Christ est venu pour sauver l’univers entier, ce renouveau de la meilleure compréhension du sacerdoce commun des fidèles, de la mission de témoins qui leur est conférée par le don de l’Esprit Saint, ce renouveau du dynamisme de l’Évangile, non pas simplement à travers, pardonnez-moi le mot, des corporations de missionnaires, mais à travers la vie de chacun et de chacune des membres de l’Église. Tout cela, qui était comme en germe dans le travail du Concile, a commencé à porter son fruit et à se développer. Mais le meilleur de ce fruit, la maturité de ce fruit, cela n’est pas derrière nous, c’est devant nous. Nous ne sommes pas les gardiens nostalgiques d’un âge d’or qui aurait eu lieu il y a cinquante ans et dont on ne saurait plus rien. Nous ne sommes pas les gardiens nostalgiques d’un esprit du Concile qui est partout sauf précisément dans les textes du Concile. Nous ne sommes pas les gardiens d’une espèce de vieille armée, vieillie sous le harnais, et qui veut à tout prix entretenir les souvenirs de sa jeunesse. Nous sommes des héritiers, nous avons hérité un patrimoine du Concile comme nous avons hérité un patrimoine de l’Église. Et l’acte conciliaire qui s’est ouvert il y a 50 ans a été un formidable travail de fond pour actualiser ce patrimoine de l’Église, pour le rendre plus accessible non seulement aux érudits, non seulement aux exégètes, non seulement aux théologiens, non seulement aux clercs, mais à tous les membres de l’Église. C’est cette diffusion du patrimoine de la tradition chrétienne telle que nous la recevons de l’Écriture et telle que nous l’interprétons dans l’Église qui devient le ferment et le dynamisme d’un renouveau missionnaire. Si le Pape a voulu mettre en exergue pendant ces années-ci le thème de la Nouvelle Évangélisation, ce n’est pas simplement pour satisfaire à un effet de mode, mais c’est précisément pour nous inciter à revenir avec ferveur à la source initiale de la vie de notre Église, le Christ ressuscité vivant aujourd’hui, présent au monde par son Esprit, offert à la vie de ses disciples par les sacrements, réunissant réellement à travers les membres de l’Église une espérance, une annonce du rassemblement de l’humanité. C’est ce Christ qui est aujourd’hui au cœur de notre foi, et qui est celui qui nous rassemble pour faire fructifier le Concile.
Peut-être, certains parmi vous, n’ont-ils pas connu la période du Concile lui-même, ou peut-être l’ont-ils oubliée. Mais comment pourrions-nous oublier les transformations profondes qu’il a provoquées dans la capacité des chrétiens à attendre, à accueillir, à partager, et à annoncer la Parole de Dieu ? L’établissement d’un lectionnaire liturgique qui suit de façon continue la lecture des épîtres et des évangiles, avec des lectures de l’Ancien Testament, l’ouverture d’une réflexion profonde et structurée sur le rapport de l’Écriture à la Tradition, l’annonce d’une meilleure prise de conscience du dynamisme de récapitulation que le Christ opère dans sa Résurrection, tout cela ouvre nos yeux et nos esprits à une approche renouvelée du monde qui nous entoure, non pas comme le symbole de la perversion et de la damnation, mais comme le terrain où Dieu lui-même est venu prendre chair, pour éveiller aux cœurs des hommes l’image divine qu’il a déposée dans sa Création.
Comment oublier le basculement des mentalités qui a été entrainé par l’approche non seulement théologique, mais aussi pratique des relations avec les Églises et les communautés chrétiennes ? Comme oublier le renouvellement de notre regard sur nos frères orthodoxes, sur nos frères protestants ? Comment ne pas nous réjouir qu’un jour comme aujourd’hui des représentants de ces Églises aient bien voulu se joindre à nous pour évoquer ce moment si important, non seulement pour notre Église, mais pour le chemin dont nous espérons qu’il nous conduit vers l’unité ? Comment oublier la rencontre de Paul VI et d’Athénagoras ? Comment oublier les liens qui se sont créés entre les Églises Luthérienne, Réformée, Catholique, à travers quantité de commissions de travail, et qui ont abouti à des textes communs, ou en tout cas à des textes signés ensemble avec la volonté de progresser vers l’unité ? Mais comment oublier surtout le changement de regard des uns sur les autres ? Comment oublier le virage spectaculaire que Nostra Aetate a fait prendre à nos relations avec le Judaïsme ? Comment oublier les démarches prophétiques de Jean-Paul II à la synagogue de Rome et au Mur des Lamentations ? Comment oublier nous aussi, nous qui avons reçu de l’olivier franc ce qui nous a constitués comme une greffe sur cet olivier ? Comment oublier que ce dynamisme de la charité transforme peu à peu notre expérience de l’Église ?
Je vous disais toute à l’heure que je vais participer à partir de la semaine prochaine à la session ordinaire du Synode des évêques, ce sera mon quatrième synode depuis que je suis archevêque de Paris : un sur la Parole de Dieu, un sur l’Afrique, un sur le Moyen-Orient, et un sur la Nouvelle Évangélisation. À chaque fois nous vivons, à quelque 300 participants, une sorte d’expérience concrète de la collégialité, nous nous écoutons les uns les autres, nous partageons nos expériences et nous faisons grandir, nous développons, du moins nous l’espérons, la communion entre toutes nos Églises et avec les Chrétiens qui se réclament du Christ.
Frères et sœurs, si le Pape Benoît XVI a voulu que l’anniversaire de l’ouverture du Concile fût marqué par une Année de la Foi, c’est précisément parce qu’à travers le mouvement inauguré par le Concile, c’est un renouvellement de la foi qui est appelé. C’est ce que nous essayons de vivre à travers les différentes communautés paroissiales de Paris en mettant en œuvre l’appel à la mission qui nous a été adressé par le Christ et pour lequel il nous envoie dans cette grande ville. C’est pourquoi, après les trois années de « Paroisses en mission » nous préparons une nouvelle étape d’une action missionnaire pour l’année 2014. Nous sommes un Corps vivant, nous sommes un Corps irrigué par la puissance de Dieu et par la lumière de sa Parole, nous ne sommes pas les sentinelles d’une défaite annoncée, nous sommes l’avant-garde d’une victoire en marche.
Frères et sœurs, que cette évocation de l’ouverture du Concile Vatican II que nous allons achever par une prière commune des vêpres, soit pour nous un moment pour raviver en nos cœurs la certitude que le Christ a confié à ses disciples une parole qui est une espérance pour le monde et qui est pour nous une consolation, une joie et une force dans les épreuves que nous rencontrons. Soyez dans la confiance « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20). Amen.
+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris
© Diocèse de Paris - 2012
L’embryon, un matériau gratuit pour les laboratoires ?
Billet des « Poissons roses »
La commission des affaires sociales du Sénat va examiner mercredi 3 octobre une proposition de loi visant à lever « sous certaines conditions » l’interdiction de la recherche sur l’embryon. Dans ce billet, les Poissons roses (mouvement proche du PS), regrettent l'absence de débat citoyen autour d'une réforme dont les enjeux éthiques sont graves, et appellent à la prudence. Le débat au Sénat est prévu le lundi 15 octobre.
Avec la facture des frais de congélation de leurs embryons, les parents, qui ont eu recours à ce service, reçoivent tous les ans un formulaire afin de préciser leur projet : don à un tiers, don à la science ou désir d’enfant. Le « stress éthique », peu anticipé mais souvent suscité par ce choix au sein des couples, prouve que le contenu de cette éprouvette n’est pas rien. Même du fond de son congélateur, l’embryon est relié à ses géniteurs. Pour un couple, donner son embryon n’est pas donner un rein.
La proposition de loi ouvrant plus largement la possibilité de la recherche sur les embryons, qui doit être discutée en séance publique du Sénat le 15 octobre, ne fait que contribuer encore davantage à ce stress éthique nourri d’une logique de marchandisation de l’humain. Pourquoi accepter que les sages principes de précaution appliqués sur les manipulations génétiques du maïs ne soient pas les mêmes pour les embryons humains ? Pourquoi devoir toujours céder aux sirènes du « prix à payer » : prix à payer pour la recherche, prix à payer pour une vision incantatoire du progrès, sorte de nouveau dieu auquel il faudrait sacrifier ce que nous avons de plus intime ?
Les milliers d’embryons en attente sont autant de trésors cellulaires au potentiel immense, qui attisent les convoitises. Sont-ils cependant des objets économiques comme les autres ? Est-ce légitime qu’ils soient mis d’emblée à la disposition des laboratoires pharmaceutiques ? Faire gagner du temps à la recherche, nous dit-on. Il en serait de même si certains protocoles risqués pouvaient être testés directement sur des hommes, des femmes ou des enfants, cependant la plupart des scientifiques préfèrent s’en tenir aux souris de laboratoire… Sans doute faut-il apprendre à perdre du temps, à remettre en avant la prudence au sens d’Aristote, c’est-à-dire un juste milieu, certes, mais à comprendre comme un extrême à atteindre entre deux extrêmes et non pas une médiocrité ?
Certains laboratoires pharmaceutiques se sont lancés dans la spéculation sur la thérapie cellulaire comme ils l’avaient fait sur la thérapie génique vingt ans plus tôt. Inutilement. Dans ce domaine, il ne s’agit pas toujours du goût de la contemplation désintéressée, surtout quand le matériau est gratuit ! Les capitaux en jeu sont immenses. Le milieu de la R&D considère que le développement est lent et décevant. Alors de plus en plus de laboratoires préfèrent investir sur de nouvelles techniques dont les résultats sont meilleurs et qui permettent de contourner les problèmes éthiques.
Enfin que dire de cette nouvelle absence de débat sur une loi préparée en catimini, dans un contexte de crise majeure ouvrant le passage d’un modèle de société à un autre, par des tenants d’une gauche libérale dans laquelle nous ne nous reconnaissons pas. Le seul progrès qui compte est celui qui contribue à relier toujours davantage nos concitoyens entre eux, dans la justice. Echanger ce qui nous fait essentiellement humain contre une incertaine promesse de santé est un marché de dupes. Est-ce le signe d’une société qui vieillit ? Un soupçon légitime nous tenaille : les lobbies pharmaceutiques faisaient pression depuis des années sur des élus de droite. La droite l’a rêvé, la gauche le fait ! Pour qui ? Pourquoi ce besoin de légiférer dans l’urgence sur cette question qui n’est ni de droite, ni de gauche ? Nos concitoyens doivent être éclairés par des experts et des scientifiques, mais sur des sujets aussi fondamentaux qui ne relèvent d’aucun clivage politique, la décision leur appartient. Les citoyens veulent être des contributeurs. Le débat, c’est maintenant !
Philippe de Roux, Nestor Dosso et Chantal Hamy
© La Vie - 2012
Ce que Dieu a uni que l’homme ne le sépare pas !
Commentaire de l’évangile du XXVIIème Dimanche du Temps ordinaire –Année B
Des statistiques récentes montrent que notre pays est celui où la taux de divorce est le plus élevé en Europe. La souffrance chez les conjoints séparés, leurs enfants et les grands parents est aussi cruelle qu’un deuil. Pour toute sorte de raisons, dont les sociologues peuvent beaucoup mieux parler que moi, la fidélité nous est devenue à l’aube du XXIe siècle beaucoup plus difficile. Le mariage ne devient-il pas un chef d’œuvre en péril ? Mais n’en restons pas à ce constat un peu morose.
Une modeste façon d’apporter une pierre pour fortifier les familles ou pour les aider à se relever après une expérience douloureuse, c’est d’exprimer la Bonne Nouvelle sur le couple que nous donne la Bible.
Voyons plutôt la belle description que l’Écriture nous donne de l’amour. Pour elle, l’amour est fait de deux choses : un enchantement suivi d’un attachement, un enchantement qui s’attache, un attachement qui s’est enchanté.
L’enchantement, c’est la découverte émerveillée de l’autre, le coup de foudre. C’est Adam qui s’écrie : « Cette fois-ci, voici l’os de mes os et la chair de ma chair ». Il vient de donner un nom à tous les animaux et en aucun il ne s’est reconnu. Mais voilà qu’il se reconnaît en Éve, comme on se reconnaît dans le noir, comme on se reconnaît dans un lieu familier.
L’attachement, c’est : « À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme et tous deux ne feront plus qu’un ». Et Jésus ajoutera : « Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas ».
Enchantement et attachement ensemble, pas l’un sans l’autre. Ni enchantement sans lendemain, mais enchantement qui s’attache. Ni attachement sans joie, mais attachement qu’un enchantement a conquis.
Et la Bonne Nouvelle pour nos amours humaines, c’est que ce qui se passe chez les hommes se passe d’abord en Dieu et en est une image. Notre amour est un reflet du sien : ce n’est pas lui qui est comme nous, c’est nous qui lui ressemblons. Ce ne sont pas les noces humaines qui peuvent nous faire comprendre ce qui se passe dans le cœur de Dieu. C’est ce qui se vit dans le mystère de Dieu qui jette une lumière sur les noces humaines.
La Bible ne définit pas Dieu comme l’Infini, le Transcendant, le Premier Moteur, l’Immuable..., mais comme Celui qui s’enchante et qui s’attache. En termes bibliques, élection et alliance. Dieu est un amoureux. Il a un coup de cœur pour l’homme, sa créature. Et même, s’il s’en mord les doigts, il tient bon. Il connaît lui aussi des désillusions et des détachements, mais il reste fidèle à l’alliance qu’il a conclue avec nous pour toujours.
Qui parle des amours humaines, voudrait ne parler que de fêtes, de parcours enchanteur, d’embarquement toujours renouvelé pour Cythère. Bien sûr, il n’en est pas ainsi ! Il y a dans l’amour, comme dans l’art, une part d’effort. Il y a un travail de l’amour comme il y a un travail de l’art. Rien de grand ne se fait sans peine et sans labeur. Mais que ce soit un labeur joyeux !